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B18/9.2.40

Ms autogr. 4 p. (21 x 13)

À ses parents

Rome 28 février 67

Chers parents,

J'attendais depuis quelques jours pour vous écrire parce que j'espérais recevoir de vos nouvelles de jour en jour. Voici trois semaines que je n'en ai pas reçu. C'est bien long. Il est probable que la poste aura égaré une lettre. Tâchez de ne pas attendre plus de 15 jours. J'espère que papa répondra aussi au supérieur du séminaire qui a eu l'amabilité de lui écrire1.

Je n'ai rien de bien important à vous apprendre, si ce n'est que je suis heureux et bien portant. Mon travail marche bien et je suis très content de cette première partie de l'année et je n'ai qu'à remercier Dieu du bonheur qu'il m'accorde.

Je serais heureux d'être auprès de vous comme Henri, mais ce n'est pas la volonté de Dieu. Je compense cela en priant souvent pour vous plusieurs fois par jour. C'est la meilleure manière dont je puisse vous témoigner mon affection.

Nous avons eu quelques jours de repos pour le carnaval. Ce matin j'ai fait une petite excursion avec Mr Poisson et Palustre et j'en ferai une autre après-demain pour toute la journée. Palustre va partir dans une dizaine de jours pour faire un voyage dans le sud de l'Italie, avec Mr de Laurière dont il a fait la connaissance à Paris; c'est un homme très aimable et très sérieux, veuf et déjà assez âgé. Je ne sais si Mr Poisson restera encore longtemps. Je les vois rarement. Je pourrais être plus souvent avec eux, mais je ne le veux pas, parce que mon travail en souffrirait et je serais trop distrait.

J'espère que vous avez reçu la lettre que je vous ai envoyée il y a quinze jours, avec une lettre du supérieur de la maison. J'ai écrit aussi récemment à l'abbé Palant2. Je n'ai reçu de nouvelles de personne sauf une carte de visite de Mr Dubois, receveur de l'enregistrement. Je lui ai renvoyé la mienne, quoique ce soit un peu tard, par politesse.

Rome est toujours aussi calme et même assez prospère. On y fait pas mal de travaux d'utilité publique. Le carnaval est très gai comme tous les ans et l'on peut constater que la révolution n'y a aucune force. Ils sont quelques centaines sur 200.000 habitants. Le Saint-Père est très rassuré sur l'avenir. Il est venu deux fois au Collège romain depuis quelque temps.

Une fois pour voir un instrument d'astronomie qui doit être envoyé à l'exposition, et une autre fois pour assister à la lecture d'un décret relatif à la béatification de 250 martyrs japonais, qui aura lieu au mois de juillet après les grandes fêtes.

Écrivez-moi régulièrement. Dites-moi si la santé de maman continue à s'améliorer. Donnez-moi l'adresse de Mme Lavisse3.

Embrassez pour moi Henri, Laure, maman Dehon et Marthe et aussi mes parents du Nouvion, de Vervins et de Dorengt quand vous les verrez.

Mes respects à Mme Fiévet et au cousin Foucamprez4.

Je vous embrasse de tout cœur.

Votre fils qui vous chérit

L. Dehon

1 Mr Dehon répondra le 22 mars (cf. LV 2).

2 L'abbé Palant qualifié ailleurs de cousin (cf. LD 37, 41).

3 Madame Lavisse: Aline Longuet, sa cousine (cf. LD 9 note 8)

4 Le cousin Foucamprez: sans doute un fils d'Édouard Foucamprez, époux de Julie-Erminie-Clémence Dehon (décédée en 1863), lui-même mort en 1864.