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B18/11.1.24

Photo. Ms 4 p. (21 x 13)

L'original autographe de cette lettre a été offert à Paul VI en hommage sur la recommandation de Mgr Macchi.

À ses parents

Rome 6 mai 1871

Chers parents,

Rome a le don d'entretenir dans les cœurs une grande espérance parce qu'on y prie beaucoup. On y prie beaucoup même pour notre pauvre France. Nous avons eu pendant les trois premiers jours du mois un triduum solennel de prières à l'église de la Minerve pour obtenir de Dieu la fin de la guerre civile en France. Le St-Père était l'instigateur de ces prières. Il y a eu une splendide illumination. L'association romaine pour la défense des intérêts catholiques en a fait les frais. Notre nouvel ambassadeur, Mr d'Harcourt y assistait. L'église était trop petite pour contenir la foule immense qui venait témoigner de sa sympathie pour la France et en même temps protester contre l'invasion piémontaise, dont la France délivrera Rome un jour. D'éloquents discours ont été prononcés. Ces prières, unies à celles qui se font en France, obtiendront de Dieu la paix pour notre chère patrie.

Les démonstrations bonnes et mauvaises sont fréquentes ici. Elles consistent pour les honnêtes gens à aller prier en grand nombre pour la délivrance de Rome; et pour la canaille révolutionnaire à s'enivrer et à blasphémer à l'occasion de la fête de quelque échappé des galères.

Une bonne nouvelle pour notre petite communauté de Ste-Claire, c'est que le P. Freyd va nous arriver jeudi prochain, avec un ancien élève. Nous serons très heureux de posséder de nouveau notre supérieur auquel nous sommes très attachés. Il m'a écrit dernièrement et me chargeait de vous faire ses compliments.

Mon travail avance autant que je pouvais l'espérer. Les facilités pour l'étude que donne la règle d'une communauté, et les répétitions qui se font ici, me permettront peut-être de combler les lacunes de mon travail de l'hiver.

Les modernes vandales continuent à s'emparer des couvents de Rome, pendant qu'ils font des lois pour garantir la liberté de l'Église et du Pape.

C'est la bêtise unie à la brutalité. J'espère que les événements de Paris auront bientôt un terme et que la France pourra reformer un gouvernement stable et chrétien.

Mille compliments à Siméon s'il est encore avec vous.

Embrassez pour moi Henri, Laure, maman Dehon et les enfants.

Je vous embrasse de tout cœur.

Votre dévoué fils

L. Dehon, pr.

P.S. Je ferais volontiers la commission de Mr Cardot, mais je crois qu'il trouvera plus facilement à Paris des monnaies antiques, et je craindrais d'être trompé, parce que je ne suis pas connaisseur.