1868-lc

435.18

AD B.21 /7a.3

Ms autogr. 4 p. (21 x 13)

De Mr Boute

Hazebrouck 7 janvier 1868

Mon révérend abbé et bien cher ami,

Avant tout, pardon pour un long mois que j'ai mis à vous répondre, il n'y a pas de ma faute, car je ne m'appartiens plus; chaque jour m'amène un surcroît de besogne.

Après ce préambule justificatif, agréez toutes mes félicitations au sujet de votre promotion à l'ordre du sous-diaconat; vous voilà donc engagé irrévocablement dans la sainte milice; j'en suis heureux pour vous et pour moi: pour vous parce que je suis convaincu que vous y trouverez pleine et entière satisfaction, et que votre vocation est une de celles marquées au sceau divin; pour moi, parce que je vous aime en Dieu de toutes les puissances de mon âme, et que j'aspirais à ce moment solennel d'un en­gagement définitif, sachant très bien que c'étaient vos propres aspirations et que vous ne seriez véritablement heureux qu'après avoir fait ce grand pas. Vous êtes appelé, mon cher ami, à faire beaucoup de bien, un bien considérable à l'Eglise avec vos lu­mières et vos talents. Que ne puis-je déjà vous voir à l'œuvre; mais je me fais trop vieux pour jouir de ce bonheur. C'est par vous qu'a commencé la conversion de votre père si bon, si loyal, si juste, et c'est par vous encore que se consommera son salut éternel, comme celui de toute votre famille. Prêtre, vous exercerez toujours sur elle une grande et précieuse influence1.

Maintenant, à vous encore tous mes meilleurs souhaits à l'occasion de ce renouvel­lement d'année; je désire que Dieu vous fasse accomplir votre carrière sacerdotale de la manière la plus avantageuse pour l'Eglise et pour vous. Que je serais heureux et fier, comme votre ami, de vous voir nous revenir muni de tous vos grades de docteur. Dieu voudra-t-il m'accorder cette faveur? Que sa sainte volonté soit faite.

Je ne vous parlerai pas de politique. Seulement, je vous ferai remarquer que votre lettre est datée du 5 Xbre 1867, et que c'est précisément ce jour-là que s'est tenue cet­te fameuse assemblée législative française et que se sont produites les solennelles dé­clarations du gouvernement français relativement au St-Siège et au pouvoir tempo­rel. Mais tout n'est pas fini: l'Italie, dans sa démence, ne voudra-t-elle pas se jeter sur l'épée de la France? Ne serait-ce pas un bien pour en finir une fois pour toutes avec tous ces fanfarons révolutionnaires? A Dieu seul de décider!2.

Tous les messieurs qui vous ont connu, Mr le Principal en tête, vous adressent leurs félicitations et leurs souhaits, et espèrent, comme moi, vous voir chez nous aux vacances prochaines. Je suis allé avant-hier passer quelques heures à Armentières; toute la famille de madame Dassonville, Melle Marie tout spécialement, vous prient aussi d'agréer leurs bons souhaits; ils ont tous conservé de vous le plus agréable sou­venir et voudraient aussi vous voir. L'abbé Dassonville m'a fait demander votre adresse, parce qu'il avait l'intention de vous écrire3.

Ici, rien de nouveau. L'hiver est rigoureux, et la misère va devenir très grande, par manque de travail pour l'ouvrier.

On vous a écrit sans doute de chez vous et l'on vous a dit que j'avais adressé une lettre pour vous à La Capelle, et pour Mr Henri, ne sachant si vous étiez parti ou non. Priez pour moi comme je prie pour vous et votre famille. Je vous embrasse de tout cœur.

Votre ami

Boute

1 Cf en NHV VI, 36 une large citation de ce début de lettre.

2 Il s'agit de la fameuse déclaration du ministre Rouher au parlement le 5 décembre 1867 après Menta­na (cf LD 86, note 2).

3 Mr Boute était lui-même d'Armentières et par lui, Léon Dehon, pendant son séjour à Hazebrouck, était reçu dans la famille Dassonville pour les petites vacances (cf NHV 1, 27 r°).

158.9

AD B.17/6.12.9

Ms autogr. 4 p. (21 x 13)

De Mr Demiselle

Soissons 13 juin 1868

Bien cher Abbé,

Lorsque cette lettre vous arrivera, vous aurez fait un pas de plus vers le sacerdoce et l'Esprit de force vous aura revêtu de sa puissante armure pour combattre les com­bats du Seigneur. Je ne vous oublie pas durant ces jours consacrés à la retraite qui vous prépare à l'ordination.

J'arrive il y a quelques jours de la Thiérache où je suis allé faire la bénédiction de la première pierre de l'église de Buironfosse, et votre lettre m'est arrivée pendant ce voyage. Je suis allé de Buironfosse passer deux jours à La Capelle, ainsi que vous l'aura appris Mme Dehon, que j'ai trouvée en bon état de santé. Mme Henri doit être à présent mère pour la seconde fois. Sa petite Marthe, votre filleule est une enfant charmante.

Depuis le 13 mars, je. n'ai presque pas été à Soissons. Cinq semaines de carême à Dizy-le-Gros, puis ce voyage de Buironfosse; au retour, une 1 ° communion près de La Fere; tout à l'heure, celle de mes enfants de la Maîtrise; puis une autre à Chauny; une autre à Villers-Cotterêts. Et je me porte bien, quoique fatigué. Il me semble que je puis continuer encore quelque temps ce ministère de la prédication, sauf à m'arrê­ter quand les forces me feront défaut.

C'est vraiment merveilleux que le calme dont on jouit à Rome. C'est déjà un triom­phe, en attendant le triomphe définitif. Ils sont à plaindre ceux qui ne verraient pas que le doigt de Dieu est là. Car il y a dans ce spectacle de quoi convaincre tout esprit droit de la divinité de l'Eglise.

Il n'en est pas moins vrai que le péril existe toujours. Comment compter sur l'Au­triche dans l'abaissement dont elle donne un si déplorable exemple? La France est en­core la nation sur laquelle Rome doit le plus compter.

J'ai lu avec une vive satisfaction le recueil des pièces relatives au Séminaire fran­çais. Je remercie bien cordialement le P. Freyd du plaisir qu'il m'a procuré et je fais les vœux les plus ardents pour que les élèves y affluent de tous les diocèses de France.

Mgr de Soissons à qui le parlais ces jours derniers de retourner avec vous à Rome au mois d'octobre, me dit d'attendre pour l'y accompagner au prochain Concile. Je lui en reparlerai pour savoir au juste à quoi m'en tenir, car j'étais bien résolu â recom­mencer ce pèlerinage en 1868.

Mr Rigaux est revenu enchanté de son voyage, et surtout plein des souvenirs de Rome et de ses belles solennités pascales. J'espère que ce voyage affermira de plus en plus en lui les convictions catholiques et qu'il sera pour notre ville un modèle pour les jeunes gens1.

Mgr vous envoie sa meilleure bénédiction. Mr Péronne a été bien sensible à votre bon souvenir et ne vous oublie pas au saint sacrifice. Ma sœur me charge pour vous de tous ses compliments affectueux. Mes respects au P. Freyd.

Je suis bien à vous de cœur

Demiselle, chan.

1 Mr Rigaux, le jeune homme dont il est question en LD 95.

435.19

AD B.21 /7a.3

Ms autogr. 4 p. (21 x 13)

De Mr Boute

Hazebrouck 25 juin 1868

Mon très cher abbé,

Vous trouverez sans doute que je mets toujours un temps considérable à répondre aux bonnes (lettres) que vous voulez bien m'écrire, mais veuillez croire que ce n'est pas oubli de ma part; il n'est pas de jour où je ne pense à vous plusieurs fois et où aus­si je ne parle de vous; j'ai tant de détails, qui m'arrivent à chaque moment, qu'il me reste bien peu de temps pour moi; en faisant les affaires de la maison, je ne trouve pas assez de loisir pour les miennes.

Vous voilà donc, mon bien cher abbé, engagé dans la sainte milice et promu de plus au diaconat; j'en suis aussi heureux que vous-même; quand la vocation s'y trou­ve, et la vôtre a été rudement éprouvée, il n'est point sur la terre d'état qui puisse nous offrir plus de satisfaction et de félicité intérieure que l'état ecclésiastique. Qu'y a-t-il de plus doux et de plus suave que cette joie du cœur, que cette paix de l'âme que peuvent seuls connaître ceux qui se sont donnés à Dieu tout entiers et pour tou­jours? Et c'est ce que vous éprouvez maintenant et que vous éprouverez tous les jours de votre vie!

En répondant â votre frère Henri à l'occasion de la naissance d'une seconde petite fille (il eût mieux aimé un garçon), je lui fais part de la promesse que vous nous avez faite de venir aux prochaines vacances à Hazebrouck, où nous serons enchantés de vous recevoir. Je lui dis aussi que je compte aller à La Capelle un jour ou deux, le temps nécessaire pour faire le pèlerinage de Liesse, promis à madame votre mère. De retour à La Capelle, veuillez m'indiquer la semaine où nous aurons l'avantage de vous recevoir, afin que je puisse combiner l'époque où j'irai à mon tour faire visite à votre famille.

Je suis si convaincu des immenses avantages qu'il y a à faire ses études ecclésiasti­ques à Rome que j'ai déterminé un jeune élève de rhétorique à y aller. J'ai obtenu le consentement des parents et le jeune homme en est très satisfait. Je vous le présente­rai quand vous viendrez. C'est un jeune homme très comme il faut sous tous rap­ports; c'est Mr Piettre, fils du directeur de la poste aux lettres d'Hazebrouck. Il se trouvera très heureux de se trouver en rapport avec vous, dont il a conservé quelque souvenir. Je compte donc que vous réaliserez cette petite excursion à l'intention de St François, notre patron1.

Mr le Principal vous remercie de votre bon souvenir et vous attend selon votre pro­messe; nous passerons quelques moments bien agréables à converser ensemble. Tous ces messieurs que vous connaissez encore, vous offrent leur sincère amitié et leurs fé­licitations au sujet des ordres sacrés que vous avez reçus.

Je ne suis point étonné que monsieur votre père se soit fait déjà à l'idée d'avoir un prêtre dans sa famille; plus tard, il en sera très fier. Et puis, avant toutes choses, il faut reconnaître là l'effet de l'action divine. Prêtre, vous ferez un bien immense à son âme, et un bien non moins considérable au sein de votre famille. Bénissons donc en­semble, mon très cher abbé, les dispositions secrètes de la providence, qui vous a ap­pelé et fait arriver, malgré tant d'obstacles, à la sainte mission qu'elle vous destine à accomplir pour le plus grand bien de l'Eglise et pour celui des vôtres2.

Tout à vous de toute l'affection de mon cœur

Boute, Ptre

1 Patron de l'Institution St François d'Assise, fondée par Mr Dehaene après sa révocation du collège municipal cf LD 21 (note 4), LC 12 (note 2), LC 14 (note 1).

2 Cf citation partielle de cette lettre en NHV VI, 37.

436.20

AD B.21 /7a.3

Ms autogr. 3 p. (21 x 13)

De Mr Boute

Hazebrouck 8 septembre 1868

Mon bien cher abbé,

J'étais en voyage lorsque votre lettre est arrivée à Saint-François. J'ai voulu profiter de la fête d'Hazebrouck pendant laquelle les ouvriers ne travaillent pas, pour visiter encore une fois la Belgique, et pousser jusqu'à Cologne. Mais j'en suis revenu avec un gros rhume et grand échauffement; je dois prendre beaucoup de précautions encore même à l'heure où je vous écris. Une fluxion de poitrine arrive si facilement à mon âge, que, d'après l'avis du médecin, je dois observer un régime et garder le repos. J'espérais toujours que cette indisposition finirait vite et me mettrait à même de vous annoncer le moment de mon arrivée chez vous; mais je ne dois pas encore y penser de sitôt; peut-être pour la fin de 7bre, pour vous reconduire quand vous serez venu me faire visite, selon votre promesse. Je regrette infiniment ce contretemps fâcheux qui me prive encore une fois de saluer en personne toute votre famille.

J'ai gagné ce rhume en montant aux combles de la cathédrale de Cologne: j'étais en société parfaitement choisie d'archéologues, dont un chanoine d'Aix-la-Chapelle, grand amateur et connaisseur d'antiquité religieuse; il a fondé à Cologne, avec ses seules ressources, un musée religieux déjà très précieux, dont il nous a fait les hon­neurs. J'ai donc dû monter avec ces messieurs en haut de la cathédrale, d'où l'on dé­couvre, comme vous savez, un magnifique panorama. Mais en descendant, je ruisse­lais des pieds à la tête, comme si je m'étais baigné dans le Rhin; inde malum.

Venez me voir la semaine prochaine et je vous accompagnerai la semaine suivante, si je vais bien. Vous voyez que je suis bien raisonnable et que je témoigne de la meil­leure volonté possible; faites de même de votre côté. Dites bien à vos parents que je désire beaucoup les voir. Je voudrais bien voir aussi votre frère Henri, sa dame et leur petite famille. Venez donc guérir mon rhume, vous ferez acte de charité. Monsieur le Principal vous attend aussi, il sera enchanté de vous recevoir. Donc, à la semaine prochaine, le jour qui vous ira le mieux pour votre arrivée.

Mes hommages respectueux à vos bons parents et à maman Dehon, sans oublier madame Henri. Je serre cordialement la main à votre frère et j'embrasse de tout cœur vos deux espiègles de nièces.

Mr le Principal se rappelle au bon souvenir de votre famille et vous attend sans faute.

Votre ami

Boute Ptre

436.05

AD B.21 /7a.4

Ms autogr. 1 p. (21 x 13)

Du P. Freyd

Rome, ce 18 septembre 1868

Mon bien cher ami,

Un mot seulement de réponse à votre bonne lettre. Vous avez déjà dû voir par le palmarès que vous a envoyé Mr Le Tallec (qui demain sera ordonné diacre) le résul­tat de vos concours: le 1 ° prix du P. Cardella eût eu sans doute pour compagnon le prix de Morale, si la fiévrette n'était venue vous empêcher. En attendant, vous avez eu le prix de l'Académie de Morale, et cela sans concurrent aucun, ce qui est chose insolite.

Je suis très heureux de savoir que vos excellents parents sont maintenant tout faits à votre soutane, et votre digne père sera bientôt aussi heureux de vous voir prêtre qu'il a eu de peine en vous voyant prendre la soutane. Je n'ai rien de nouvau à vous annoncer. Passez bien vos vacances en prenant de bonnes forces physiques et aban­donnez pieusement et filialement votre âme à Celui qui vous comble de ses faveurs et en qui je suis, avec une tendre affection, tout vôtre.

M. Freyd

Offrez mes respects à vos parents.

435.21

AD B.21 /7a.3

Ms autogr. 2 p. (21 x 13)

De Mr Boute

Hazebrouck 19 septembre 1868

Mon bien cher abbé,

Depuis longtemps je me faisais une fête d'aller vous voir au sein de votre famille à laquelle j'aurais été si heureux de serrer la main. Mais l'homme propose et les évène­ments disposent; voilà qu'il vient de surgir pour nous une grande difficulté: il se pré­sente tant de nouveaux élèves pensionnaires pour la rentrée que nous ne savons où les caser. Il faut nécessairement improviser un nouveau dortoir pour 40 au moins; j'ai déjà pris les mesures et donné les ordres nécessaires, mais ma présence est ici in­dispensable pour les faire exécuter, les ouvriers ne connaissent que moi, et d'ailleurs personne ici ne voudrait et ne pourrait diriger les travaux.

Me voilà donc forcé, bien malgré moi, de renoncer à mon projet de voyage et de pèlerinage de Liesse. Témoignez-en, je vous prie, tous mes regrets à votre famille, et en particulier à votre excellente mère.

J'espère que ce contretemps fâcheux ne nous privera pas de l'avantage de vous pos­séder quelques jours. Vous jugerez par,vous-même si j'aurais (pu) m'absenter impu­nément. Mais Siméon vous a fait désigner pour votre arrivée un jour où nous serons en retraite. Elle commence le mardi soir 29 sept. pour se terminer le samedi suivant au matin. Arrangez-vous avec Siméon pour nous arriver avant ou après, n'importe, de manière à pouvoir causer un peu. J'abandonne le tout à votre sagesse.

Mes hommages à toute la famille, vos parents spécialement, Henri et sa dame. Embrassez pour moi vos petites nièces.

Tout à vous

Boute, Ptre

Je suis seul ici, tout le monde est absent, même Mr le Principal. Ne manquez pas surtout à votre promesse. Vous, vous pouvez, venez donc.

174.01

AD B.17/6.27.1

Ms autogr. 4 p. (21 x 13)

De M. Le Tallec

Castel Gandolfo 9 (= 29) Septembre (1868)1

Mon cher ami,

Votre aimable lettre m'est parvenue presque au moment où je venais de recevoir dans l'ordination l'effusion du Saint-Esprit. Je vous remercie de l'aide que vous avez bien voulu me prêter par vos prières. Je tâche de mon côté de vous rendre la pareille. Veuillez aussi agréer ma paix de diacre que je tiens immédiatement de S. E. le Cardi­nal Vicaire. M. Dugas vous aura peut-être annoncé qu'il a eu le même bonheur â Lyon le jour de la Saint Barthélemy. Nous sommes donc tous réunis de nouveau dans le même ordre. Espérons que le bon Dieu nous tiendra réunis jusqu'au jour où il nous appellera à l'autel. M. Lucas veut absolument que je vous remercie de sa part et que je vous félicite pour lui. J'en profits pour joindre mes félicitations aux siennes et à cel­les de tous nos confrères. M. Dugas m'a écrit une charmante lettre à laquelle je ré­ponds aujourd'hui même. Jusqu'au 19 septembre, il s'était exclusivement occupé de sa retraite et des relations amicales qu'on est obligé de renouer pendant les vacances. Pour moi, j'ai passé le mois d'août et une grosse partie du mois de septembre à Rome dans une solitude parfaite. Depuis le 22, je suis à Castelgandolfo, dans l'aimable so­ciété de MM. Colpini, Lucas et Legouelf (?). Nous formons une petite communauté très gaie et non moins régulière. Nous faisons peu de pérégrinations: mes compa­gnons, qui sont à la campagne depuis trois mois, commencent à en être fatigués et moi, je me conforme au règlement de la République. Nous faisons bon ménage et nous harmonisons dans la perfection. M. Colpini, dont le caractère se révèle à la campagne, nous amuse beaucoup. C'est le plus aimable original que la terre ait por­té. Jamais je n'aurais soupçonné tant de poésie sous un extérieur si austère2.

Depuis mon départ de Rome, je n'en ai point reçu de nouvelles. On doit y déployer beaucoup d'activité pour orner la chapelle, qui à la rentrée doit être complètement décorée dans le style de la voûte de chœur. La coupole sera couverte par un sujet en fresque de la composition du peintre des sujets latéraux de chapelle de St joseph.

Le P. Franzelin fait imprimer son traité «De Sacrementis», qui sera l'objet de son cours. La nomination du P. Palmieri est désormais garantie. En attendant la nouvelle ère qui s'annonce au Collège Romain, prenez de nouvelles forces pour entrer en lice3. Pensez aussi devant Dieu à votre ami tout affectionné en J. et M.

P. Le Tallec

Mes confrères ne veulent pas être oubliés dans cette lettre, exigent même que je les nomme tous. Je ne nommerai que M. Lucas, qui vous remercie de l'obligeance avec laquelle vous vous êtes offert pour lui rapporter son calice. On a trouvé une occasion pour le faire parvenir jusqu'à Rome, ce qui vous évitera la peine de vous en occuper.

1 Si cette lettre est certainement de 1868, le jour indiqué (9 septembre) ne peut guère être retenu. En LC 37 (18 septembre), en effet, le P. Freyd parle de l'ordination de M. Le Tallec au diaconat, indi­quée ici comme déjà reçue, comme devant avoir lieu la lendemain 19; et par ailleurs, la date du 19 septembre est mentionnée plus loin comme une date dépassée. Tout porte à croire que la lettre a été écrite le 29 septembre, d'autant que c'est depuis le 22 septembre que M. Le Tallec est à Castelgan­dolfo.

2 M. Dugas, l'un des amis intimes de Léon Dehon (cf notice sur les correspondants).

Lucas de Coudray, venait d'être ordonné prêtre, d'où l'affaire du calice à rapporter: cf NHV V, 39; c'est de sa mort prématurée qu'il s'agit en LD 116 (en 1869).

3 Sur le P. Franzelin cf NHV V, 53-57, et sur le P. Palmieri IV, 140; V, 57.

161.01

AD B.17/6.15.1

Ms autogr. 4 p. (21 x 13)

De l'abbé Desaire

Rome, 30 septembre 1868

Mon bien cher ami,

Vous devez sans doute vous étonner beaucoup de mon long silence et en recher­cher souvent la cause. Peut-être même l'attribuez-vous à un oubli, ou tout au moins à une petite infidélité. Détrompez-vous, mon cher ami, s'il en est ainsi: un ami comme vous ne s'oublie pas et un cœur comme le mien ne sait point être infidèle. Depuis longtemps je désirais me procurer la douce satisfaction de vous adresser quelques mots; mais j'ai été si occupé par mon retour durant tout ce mois que l'accomplisse­ment d'un devoir si agréable m'a été moralement impossible. Je pensais d'ailleurs qu'une petite lettre de Rome vous serait beaucoup plus agréable.

M'y voici donc de nouveau rendu dans cette chère ville où la solitude et le bonheur se touchent de si près - et surtout, me voici à Saint-Louis! Je suis arrivé le 18 cou­rant; croiriez-vous que je suis rentré avec un indicible plaisir: mes vacances ont été si décousues, si oisives, si distrayantes qu'à la fin elles me devinrent insupportables, et que je me suis mis â soupirer après ma rentrée, aussi ardemment que les Israëlites après la Terre Promise1.

Elles ne me furent cependant pas complètement inutiles: je m'y suis convaincu de plus en plus qu'une vie de prêtre dans le monde est bien difficile à mener, fût-on armé des plus énergiques résolutions. J'ai fait un peu de ministère et il me fut facile de voir bien vite que les roses y étaient beaucoup plus rares que les épines. Enfin surtout, j'ai prêché à plusieurs reprises, mettant à exécution le projet que vous m'aviez indiqué; l'avez-vous essayé, mon bon ami? Je le 'trouve pour ma part bien pénible et quelque­fois décourageant, tant on parait s'amoindrir à ses propres yeux en récrivant tou­jours les mêmes choses et d'une manière presque uniforme. Assurément, pour con­server longtemps une telle marche, il faut avoir sur soi-même beaucoup d'empire; mais incontestablement, elle est tout à fait profitable. En ami, je vous annoncerais qu'après l'avoir suivie, je n'ai pas trop mal réussi, et que plusieurs prêtres m'ont beaucoup encouragé. L'élocution est tres facile après ce triple travail, le naturel est facilement trouvé, et l'action elle-même en reçoit une influence heureuse, car elle est celle d'un sujet qui n'est point astreint au mot à mot, par conséquent ni à la contrain­te, ni à l'appréhension. Nous recauserons longuement ensemble à ce sujet, et notre petite expérience mutuelle nous instruira mieux encore2.

Je suis tout enchanté de la nouvelle position qui m'est faite à Saint-Louis: une peti­te règle assez sérieuse, quand on veut la suivre en tous points, et toujours efficace quand on sait la recevoir en esprit de foi, tempère admirablement la grande liberté qui nous est laissée. Comme je l'avais présumé, la sinécure est presque absolue: aussi aurai-je tout au moins autant de temps qu'au Collège fr. pour préparer mes cours; ma santé, qui s'est encore améliorée de plusieurs degrés en Savoie, se conservera fort bonne, j'espère, à en juger par le matériel que je vois, et quant à la société, bien qu'el­le ne soit pas aussi douce que celle de Sta Chiara, surtout depuis le temps où je suis entré avec vous dans un commerce plus fréquent et plus familier, je crois cependant qu'elle sera fort supportable avec les confrères qui sont à St-Louis. je trouve en eux beaucoup de piété, quelques idées peut-être un peu libérales, mais qui, en définitive, n'ont rien de trop accentué. Un Mr Martin, qui s'occupe beaucoup de langues orien­tales et qui jouit ici d'une estime fort grande, me tenait absolument le même langage qui opéra entre nous deux la formation des projets dont nous avons parlé et que, j'espère, vous continuez à méditer bien sérieusement devant le bon Dieu: j'ai été stu­péfait de la chose; inutile de vous dire que je n'ai pas exprimé la moindre pensée de ce dont nous nous sommes promis le secret; mais je vous attends impatiemment pour vous communiquer cet étonnement inouï que j'ai éprouve3.

Tout va bien au Séminaire Fr. où je continue à prendre mes plus beaux instants. Le P. Supérieur est en très bonne santé: il s'occupe des réparations matérielles, car bien qu'il fasse en ce moment sa retraite, on peut bien dire qu'en son âme, les réparations sont impossibles: le neuf et le beau ne se réparent pas. Vous aurez su sans doute que M. Le Tallec a été fait diacre, M. Lucas et M. Nicolas prêtres: j'ai eu le bonheur d'ar­river juste à temps pour assister ce dernier: qu'il est utile et humiliant en même temps de voir un jeune lévite à sa première messe, même quand on est prêtre depuis quel­ques mois seulement! …4.

A Rome, nous avons la tranquillité la plus parfaite; chacun s'étonne des nouvelles alarmantes que répandent les journaux français, et dont nous n'avons pas ici la moindre connaissance. Cependant les événements qui se précipitent en Espagne in­quiètent assez, en raison de l'attente qu'on a de voir quelle attitude va prendre la France, engagée aujourd'hui de tant de côtés, au moins moralement5.

M. Perreau, que j'ai vu en passant à Chambéry, allait mieux et pense arriver pour la retraite.

Et vous, mon bon ami, vous ne nous ferez pas défaut à ce moment-là. Je compte beaucoup sur vos saintes prières, et puis bien dire, en toute sincérité, que tous les jours, je vous porte à l'autel, et que je prie le bon Dieu de nous éclairer tous les deux. Adieu, le vous embrasse et vous aime comme un frère.

Votre tout dévoué en N. S.

C. Desaire

1 L'abbé Desaire avait été étudiant à Santa-Chiara avec Léon Dehon depuis 1866-1867 (NHV V, 39). Ordonné prêtre «depuis quelques mois seulement», il était en 1868-1869 chapelain à l'église Saint­-Louis des Français (NHV VI, 77). Cette lettre est, comme on verra, la première d'une longue corre­spondance intéressant un «projet» cher à Léon Dehon (cf note 3).

2 Il doit s'agir de quelque méthode de préparation pour lés sermons et d'exercice de la parole publique.

3 Le projet d'une œuvre d'études pour le clergé et la rénovation des études ecclésiastiques: les NHV en parlent longuement à l'occasion de la présence à Rome du P. d'Alzon en 1869 (NHV, VI, 115-130). Cette lettre montre que les deux amis s'en étaient entretenus auparavant, d'où le mot des NHV qui parle d'un «réveil» de ces préoccupations relatives aux études ecclésiastiques. Selon NHV I, 61r°, c'est dès ses études à Paris qu'il aurait pensé à ce projet…

4 Cf LC 37 et 38.

5 Allusion à la grande tension internationale provoquée par l'affaire de succession d'Espagne dès l'au­tome 1868. On parlait d'un Hohenzollern (Léopold); d'où la crainte de la France relativement à la reconstitution de l'empire de Charles-Quint. Cela devait aboutir en juillet 1870 à la fameuse dépêche d'Ems et à la déclaration de guerre de la France à la Prusse, avec les résultats que l'on sait.

181.01

AD B.17/6.34.1

Ms autogr. 5 p. (21 x 13)

De Louis Perreau

de La Bauche 3 octobre 68

Mon cher ami,

Je suis bien touché de votre bon souvenir et si ce n'était la paresse absolue à laquel­le je me suis voué en vacances, j'aurais bien plus vite répondu à votre lettre. Il est bien vrai, comme vous le dites, que le saint Père Freyd et le Séminaire manquent à l'âme pendant les vacances: les miennes ont été absorbées par les soins matériels donnés à ma santé: promenades, repos d'esprit, 18 jours aux bains de Salins (eaux salées près de Moutiers) etc… En ce moment je suis à La Bauche près Les Echelles en Savoie: je bois du fer, je veux dire de l'eau ferrugineuse. C'est pour achever mon rétablisse­ment, car je suis beaucoup mieux, sans être encore parfaitement bien: je suis assez content de mon petit séjour à La Bauche où je suis depuis 6 jours. C'est lui qui doit décider la question de mon départ pour Rome à la fin d'octobre. je suis, mon cher ami, fort peu résigné et si la Faculté médicale me condamnait à rester quelque temps encore à Chambéry, cela me causerait bien du chagrin. je compte bien cependant que Dieu ne m'imposera pas cette privation; si ma santé progresse encore comme elle le fait depuis quelque temps, je serai plus que très bien avant peu. Pour le moment, je fais de longues promenades, je dors et je mange beaucoup. Voilà bien de quoi me matérialiser.

Il ne faut pas trop vous scandaliser de mon genre de vie, mon cher abbé; aussi bien, parlons maintenant de vous. Vous étiez souffrant aussi à votre départ de Ro­me: je l'ai su par le R. P. Eschbach et j'aurais été bien heureux de savoir par votre let­tre votre guérison, mais vous ne me dites rien là-dessus et vous me laissez à mes con­jectures et à mes vœux. Il faut vous bien soigner et faire une grande provision de san­té; je crois que vous serez agréable à Dieu en vous reposant beaucoup pendant cette fin de vacances.

Comme elles ont fui! Voici le retour de l'année scolaire. Vous paraissez douter de notre retour à Rome; rassurez-vous entièrement: ni Garibaldi, ni le choléra ne nous en empêcheront. Vous avez vu combien la Providence se joue de ce pauvre Garibaldi et protège manifestement le St- Siège d'une manière ou de l'autre dans les moments où tout serait à craindre humainement parlant. Quant au choléra, une petite lettre du R. P. Supérieur, datée du 1 ° août, m'annonçait déjà qu'il disparaissait à peu près et le bon Père finissait en disant: «N'ayez pas peur de votre retour; la maladie sera par­tie de Rome longtemps avant votre arrivée…».

J'espère donc avoir bientôt le plaisir de vous voir à votre passage à Chambéry. Je me suis trop souvent absenté ces vacances pour vous promettre de vous accompagner à Annecy et à la Grande Chartreuse, malgré le bonheur que j'aurais de faire ces ex­cursions avec vous. Quoi qu'il en soit, ne m'oubliez pas à votre passage: mes parents à qui j'ai parlé de vous, seront heureux de vous voir. J'aimerais savoir le jour de votre arrivée, afin de ne pas me trouver à la campagne ce jour-là.

Je vous dis que j'espère cela pour bientôt. C'est pour un double motif: d'abord pour le plaisir de vous voir plus tôt; et puis - vous permettrez à celui qui vous aime en N.S.J.C. de vous dire l'autre: parce que je crois que ce sera une bonne action de vous rendre à Ro­me pour la retraite. Nous sommes anciens déjà et Dieu nous donne cette occasion de donner le bon exemple; il faut pas que l'on puisse dire que la retraite n'est que pour les nouveaux. Et puis, c'est une si bonne chose pour l'âme que ce recueillement de quelques jours! Pardonnez-moi de vous parler avec cette même simplicité que vous me permettiez dans nos causeries à Rome. Ce ne serait point à moi de vous dire ces choses, moi qui ne sais encore rien du moment de mon départ: c'est une vieille réminiscence de moniteur. Si votre santé demande un retard, c'est une autre affaire.

Conservez-moi votre sainte affection, mon bon ami. Priez pour moi. Soyez tou­jours pour moi un conseiller animé de l'esprit de Jésus. Priez pour que le ne me rela­che pas trop au point de vue de l'âme en m'occupant de ma santé: les soins m'absor­bent.

A Dieu! Soyons fidèles à Ste Catherine, pour que Dieu bénisse notre temps de sé­minaire: prions pour le cher séminaire français1.

Je suis à vous en J. C.

Louis Perreau

Rue de la Gare à Chambéry maison Mollart.

Je vais passer la fin des vacances à la campagne à Beauvoir, à une demi-heure de Chambéry.

1 Allusion à l'Œuvre Sainte-Catherine commencée au séminaire en 1868 et dont Louis Perreau fut avec Léon Dehon l'un des premiers initiateurs et animateurs (cf NHV V, 107-108). Il avait été com­pagnon d'études de Léon Dehon à Paris (cf NHV IV, 143-144): «C'était pour moi un ami, un confi­dent et un moniteur», note-t-il.

158.10

AD B.17/6.12.10

Ms autogr. 2 p. (21 x 13)

De Mr Demiselle

Soissons 8 oct. 1868

Bien cher Abbé,

Je ne veux pas vous laisser quitter La Capelle sans vous exprimer toute ma satisfaction pour les quelques jours que j'ai passés avec vous et dans votre excellente famille. Mainte­nant j'envie votre bonheur de retourner à Rome et je vous y suivrai de cœur. Je serai heu­reux d'apprendre que Mr et Mme Dehon seront allés vous y rejoindre dans quelque temps. Puisse la santé de Mme Dehon trouver sous le ciel d'Italie un climat plus favorable et nous revenir dans les conditions que nous souhaitons. Ce qu'elle y trouvera en toute hypothèse et à coup sûr, ce sera un admirable réconfort pour son âme dans le spectacle des scènes religieuses dont Rome est journellement le théâtre.

On ne parle pas encore ici du nouveau Vicaire Général. Mgr est de retour depuis quelques jours seulement. Nous venons de perdre le doyen de Villers-Cotterets. Je suis encore embaumé de notre visite à la trappe. Ce sont vraiment là les heureux du monde.

Adieu et bon voyage. Respects affectueux au P. Supérieur. Je vous embrasse de cœur en N. S.


Demiselle

Souvenir affectueux à Mr et Mme Dehon, sans oublier maman Dehon, Mr et Mme Henri et ma petite Marthe. Ma sœur ne veut pas être oubliée auprès de vous et de vos bons parents.

435.22

AD B.21 /7a.3

Ms autogr. 4 p. (21 x 13)

De Mr Boute

Hazebrouck 5 novembre 1868

Mon digne et cher abbé,

Vous trouverez sous ce pli une billet de cent francs pour le Saint-Père, envoi de deux personnes pieuses de Hazebrouck, accompagné d'une longue liste de demandes plus ou moins singulières et impossibles, dont vous n'avez pas à tenir grand compte; seulement par le canal de Melle Rose, sœur de l'un des secrétaires du St-Père pour les lettres latines, vous pourriez, comme le pense Mr le Principal, obtenir la Bénédiction apostolique pour ces personnes, d'après une prière formulée par écrit par votre révérence même. Mr le Principal a beaucoup ri, comme vous le ferez vous-même sans doute, de l'étrange factum que je vous envoie.

Il y a quelques jours, j'ai vu Mr Piettre père, il n'avait pas encore reçu de nouvelles de son fils; il est sans doute arrivé à bon port, malgré les tempêtes qui ont éclaté sur nos côtes. On attend de ses nouvelles avec impatience. Je passerai aujourd'hui chez ses parents pour m'en informer. Je recommande ce jeune homme à vos bons soins et excellente direction. Qu'il puisse un peu vous ressembler un jour, quoique de loin; car vous avez enchanté ici, mon cher abbé, tous ceux qui ont eu le plaisir de vous voir et édifié les bons paroissiens d'Hazebrouck par votre recueillement et votre piété; voilà ce qui vous a valu le fameux factum ci-inclus; on vous croit destiné à faire des miracles, mais pardon pour tout cela et parlons de vos bons parents. Sont-ils avec vous? Comment Mme Dehon a-t-elle supporté le voyage? Compte-t-elle rester à Ro­me jusqu'après Pâques? Il est toujours sérieusement question de mon voyage à Rome pour la Semaine sainte 1869. Mr le Principal en parle comme d'une affaire arrêtée; je ne m'y oppose pas, si Dieu me donne la santé et la force de faire ce voyage; je serais heureux d'assister à votre ordination, de m'y voir réuni avec votre famille et de reve­nir en France en leur compagnie. Je remets le tout entre les mains de Dieu; que votre pieuse mère lui demande pour moi la grâce de pouvoir visiter dans ma vieillesse les tombeaux des saints. Apôtres; et, Dieu me venant en aide, j'accours à vous aux pro­chaines Pâques. Mes respects à vos parents et mes amitiés à Mr Piettre. Mr le Princi­pal et tous ces messieurs se rappellent à votre bon souvenir. Madame Louis vous of­fre ses respects et vous demande une petite prière pour ses enfants et pour elle-même. Elle vous aime déjà comme son fils. Siméon est venu me voir après son voyage en Bel­gique et Hollande, enchanté de tout ce qu'il a vu. Il a dit à Mme Louis qu'il espérait aller aussi à Rome en même temps que moi, mais je doute beaucoup de la réalisation de son projet, mais comptez sur moi si le bon Dieu me donne la santé et la force ne­cessaires. Ce qui m'inquiète pour ce voyage, ce n'est pas la fatigue du corps dans son ensemble, ce sont mes mauvais pieds qui ne me permettent pas de faire longue route. Vous vous rappelez que je fus obligé… de me priver du plaisir de vous faire la con­duite jusqu'au chemin de fer, parce que je souffrais horriblement de mes cors et duril­lons. Néanmoins, je suis disposé à tout tenter pour vous voir à Rome, voir le Saint-­Père, le grand saint de nos jours; voir Rome, mais Rome catholique, plus volontiers que la Rome païenne, et aspirer son souffle vivifiant.

Demandez donc aussi à Dieu de m'accorder cette faveur, et souvenez-vous de moi de temps en temps dans vos prières.

Votre ami dévoué

Boute Ptre

P.S. Deux mots de votre main quand vous le pourrez. Dites-moi alors ce que vous avez pu faire pour ces deux personnes pieuses qui ont tant de confiance en vous.

435.23

AD B.21 /7a.3

Ms autogr. 4 p. (21 x 13)

De Mr Boute

Hazebrouck 11 décembre 1868

Mon cher abbé et ami,

Pardon pour le retard que je mets toujours à répondre à vos bonnes et excellentes lettres. Vous savez que je suis toujours très occupé, et aujourd'hui encore plus que ja­mais. je fais construire un grand préau galerie tout le long du bâtiment à l'intérieur, pour abriter les élèves contre la pluie et le mauvais temps, lequel me donne beaucoup de besogne.

Votre lettre du 27 novembre m'a apporté une nouvelle qui m'a causé quelque sur­prise et une bien grande satisfaction, en m'informant que monsieur votre père avait obtenu du Saint-Père la faveur pour vous d'être ordonné prêtre avant le temps. Mon­sieur Dehon est vraiment un emporte-pièce; je l'en félicite, comme je vous félicite vous-même, mon bien cher abbé. Le 19 de ce mois va donc vous voir célébrer la sain­te messe avec le saint évêque qui doit vous consacrer prêtre. Nos prières ne vous font pas défaut, quelque peu méritoires qu'elles puissent être. je vous ai recommandé à tous ces messieurs et à vos amis et connaissances. Bien que le 19 soit un des jours où je dois dire la messe pour les enfants de madame veuve Louis, cette bonne dame qui vous aime tant renonce pour vous à ses droits, pour que ce même jour je puisse célébrer la sainte messe pour vous, et à laquelle elle communiera elle-même avec sa bon­ne à votre intention, à 7 heures du matin. je n'oublierai pas non plus monsieur et ma­dame Dehon, Henri, Laure, et la famille. C'était trop près pour me rendre à Rome pour cette époque, d'autant plus que c'est une fin de trimestre et d'année… paiements qui ne peuvent s'effectuer que par moi seul; sans compter les nouveaux travaux qu'il faut mener à bonne fin. je regrette infiniment que vos bons parents ne puissent se décider à rester jusqu'à Pâques dans la capitale du monde chrétien. je connais cepen­dant leurs préoccupations pour leurs affaires et leur chez eux; tout cela est bien natu­rel. Malgré cela, je nourris toujours l'espoir d'aller vous voir à la Semaine sainte, si les événements politiques que je ne peux prévoir ne viennent mettre obstacle à mon projet. je veux aussi aller respirer les parfums de Rome, m'émouvoir, comme votre excellente mère et votre bon père, à toutes les belles choses, à toutes les merveilles que l'on y rencontre à chaque pas et qui sont de nature à fortifier et (nourrir?) notre foi; c'est là, comme vous le dites fort bien, que l'on a un avant-goût des choses du ciel, Vos parents ont eu une excellente pensée d'aller passer à Rome quelques mois avec vous. Ce sera pour eux et pour vous une bien douce consolation pour le mo­ment du départ de vous avoir vus réunis au pied de l'autel où vous, vous serez ordon­né prêtre et eux-mêmes auront eu l'avantage bien précieux d'assister à votre première messe. Ce sera pour vous tous une grâce de bénédiction.

Mr Désiré Vandewalle m'a dit, il y a deux jours, que vous lui avez écrit pour lui faire connaître l'heureuse nouvelle de votre prochaine ordination. En attendant qu'il vous réponde, il m'a prié de vous adresser ses félicitations.

Je recommande toujours à vos bons soins et sages conseils Mr Piettre. Vous pou­vez lui rendre de bien grands services pour la direction de ses études et la vie du sémi­naire. Je compte sur votre charité pour ce jeune homme auquel nous nous intéressons beaucoup. Veuillez lui dire que tout va bien chez lui et que ses lettres font toujours grand plaisir à sa famille. Je ne sais pas pourquoi il n'a pas encore parlé de vous dans sa correspondance… C'est sans doute distraction de sa part. Ses parents m'ont témoi­gne leur étonnement à cet égard. Vous pouvez le lui dire de ma part, avec mes com­pliments.

Je termine, mon cher abbé et ami, en vous priant d'embrasser pour moi vos bons parents, que je considère toujours comme d'excellents amis. Mr le Principal et tous ces messieurs me chargent de vous remercier de votre bon souvenir et de vous offrir leur amitié. Ils prient pour vous. Mme Louis vous présente ses respects et désire vous voir encore. J'ai fait part à ces personnes pieuses de la partie de votre lettre qui les concernait. Elles vous remercient beaucoup. Envoyez-moi, quand vous pourrez, ce que vous (aurez) pu obtenir.

Tout à vous, mon cher abbé et ami, de cœur et d'esprit, en toute hâte -10 heures du soir.


Boute Ptre

158.11

AD B.17/6.12.11

Ms autogr. 3 p. (21 x 13)

De Mr Demiselle

Beaurieux 12 décembre 1868

Mon bien cher Abbé,

Je me trouve en ce moment en mission à Beaurieux, canton de Craonne et je dois y rester jusqu'à Noël.

Ma surprise a été grande d'apprendre que vous alliez être ordonné aux Quatre­-Temps de l'Avent. J'en bénis le bon Dieu pour vous d'abord et ensuite pour vos bons parents. Quelle consolation pour M. et Mme Dehon! J'espère que cette fois ce sera la coup de grâce pour Mr Dehon et que, de retour â La Capelle, il ne craindra plus de s'afficher chrétien, se confessant et communiant. Les impressions si chrétiennes pui­sées dans cette atmosphère de Rome, ces spectacles si beaux et si éloquents, affermi­ront en lui de bonnes dispositions qui sont dans son cœur depuis longtemps.

J'ai fait part â Mgr de Soissons de votre prochaine promotion au sacerdoce. Vous avez dû lui écrire depuis. Il vient de s'adjoindre comme vicaire général justement no­tre abbé Legrand qui a donné un si triste spectacle à La Capelle pendant que j'y étais. Mgr n'a su l'affaire que trop tard. Je n'avais pas cru devoir lui en parler, ne pouvant me persuader qu'il penserait à lui pour ce poste. On enterrait Mr Murillon (?) le len­demain de mon retour de La Capelle. Il parait que cette nomination a péniblement impressionné les curés de la Thierache. Enfin, c'est un fait accompli dont il faudra prendre son parti.

Je ne m'étendrai pas pour vous dire la part que je prends a ce qui va s'accomplir. je serai avec vous le 19, je suivrai les diverses phases de la cérémonie et je demanderai à l'Esprit-Saint, par Marie Immaculée, de répandre sur vous dans la plénitude ses grâ­ces du sacrement de l'ordre, afin que vous soyez en état par la suite de répondre aux desseins que Dieu peut avoir sur vous.

Vous poursuivrez, en attendant, le cours de vos si intéressantes études et vous pui­serez dans ces belles et fortes leçons du Collège Romain cette sève puissante de l'en­seignement catholique qui vous servira un jour à propager les idées saines, en face du débordement de doctrines misérables qui coulent â flots dans nos contrées.

J'envoie à Mr et Mme Dehon l'expression de mes sentiments les plus affectueux et les plus dévoués. Et vous, mon bien cher Abbé, je vous embrasse du plus grand cœur.


Demiselle

Un respectueux souvenirs au R. P. Supérieur.

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