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B18/9.2.89

Ms autogr. 6 p. (21 x 13)

À ses parents

Rome 8 décembre 69

Chers parents,

Je voudrais vous faire partager un peu notre joie de la belle fête d'aujourd'hui. Cette journée m'a fait plus d'impression, s'il est possible, que celle du 19 décembre de l'an dernier.

J'étais admirablement placé dans une tribune avec les théologiens du St-Père. Toute la solennité se passait dans le transept droit de St-Pierre. La salle était ouverte du côté de la confession de S. Pierre, pour que l'immense foule qui remplissait la basilique pût apercevoir le Concile. Les Pères du Concile, plus de 700 évêques, en chape et en mitre, arrivèrent en procession et remplirent peu à peu les gradins. Après eux venaient les patriarches, les cardinaux et enfin le St-Père entra en bénissant les Pères. L'aspect de cette salle, qui contenait toute l'Église enseignante, faisait un effet imposant. Après le Veni Creator, on chanta la messe. Il était beau de voir les évêques du monde entier réciter ensemble le Symbole des Apôtres, puis se donner la paix. Après la messe, un évêque capucin prononça le discours d'ouverture. Il rappela dans un magnifique langage la conversion du monde par les Apôtres, puis les tribulations et les joies de l'Église. Pie IX donna sa bénédiction solennellement. Puis eut lieu la cérémonie de l'obédience. Tous les Pères du Concile allèrent à leur tour embrasser la main ou le pied du Souverain Pontife. Le St-Père lut ensuite une magnifique invocation au Saint-Esprit. Puis commença le chant des litanies des saints. Quelle magnifique et touchante union de l'Église de la terre avec celle du ciel. Tous les regards du ciel étaient tournés vers ce Concile et tout le Concile invoquait avec ardeur et par les voix émues et retentissantes de tous ses membres tous les saints du ciel. Environ 50.000 fidèles dans St-Pierre répondaient aux litanies. Après les litanies, le St-Père debout appela trois fois la bénédiction du ciel sur le Concile. Puis il adressa aux Pères une allocution si émue qu'il pouvait à peine l'achever. Il leur rappela ce que l'on sentait bien, les promesses de Dieu, l'assistance du St-Esprit et la force de l'Église, plus forte que le ciel, puisqu'elle a la promesse infaillible d'être guidée par le ciel dans la vérité. Alors furent lus et votés les décrets qui déclaraient le Concile ouvert et fixaient la deuxième session publique au jour de l'Épiphanie. Jusque-là, on préparera les décrets dans des réunions privées, dont la première commencera après demain. Cette belle fête a duré de 9 h du matin à 3 h. Je me suis écrié plus d'une fois que c'est la plus belle journée de ma vie. Après avoir été témoin de telles manifestations de l'Église, on éprouve une nouvelle et brûlante ardeur de travailler pour le ciel, dont l'Église de la terre n'est que le vestibule1.

Je puis ajouter, pour compléter votre joie, que je me porte très bien et que je ne me ressens plus du tout les fatigues de l'an dernier. J'ai passé facilement le 30 novembre l'examen de licence en théologie que j'avais laissé au mois de juillet. Je puis maintenant ménager mon travail autant que c'est nécessaire.

Rendons bien grâces à Dieu le 19 et le 20 décembre. Si c'est possible, faites la sainte communion un de ces deux jours.

Embrassez pour moi Henri, Laure, maman Dehon et mes petites nièces.

Je vous embrasse de tout cœur.

Votre dévoué fils

L. Dehon, pr.

1 On trouvera en NHV VII, 1-11, une description plus documentée et plus détaillée de cette cérémonie, avec les notes critiques de Vincenzo Carbone.

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