dehon_doc:cor:cor-1lc-1865-1211-0043514

435.14

AD B.21/7a.3

Ms autogr. 4 p. (21 x 13)

De Mr Boute

Hazebrouck 11 Xbre 1865

Mon bien cher ami,

Vous m'avez écrit de votre nouveau séjour au commencement de fibre, et nous voi­ci au 11 Xbre sans voir arriver ma réponse. Vous n'avez pas pensé assurément que je vous perdais de vue ou même que je voulusse vous négliger. Votre amitié a rejeté sur la besogne forcée qu'amène toujours un premier établissement un si long retard. Vous avez touché juste; mais ce qui n'a pu se présenter à votre esprit, c'est la pensée constante où j'étais chaque jour de vous répondre, quand soudain venait surgir un obstacle, une circonstance qui paralysait ma bonne volonté. Vous aurez peine à me croire, mais c'est la vérité, quand je vous affirmerai que depuis votre lettre, il ne s'est point écoulé une seule heure du jour, sans que ma pensée ne se portât vers vous, préoccupé que j'étais toujours de la nécessité où je me trouvais de remettre indéfini­ment. Je saute aujourd'hui à pieds joints sur la besogne pour vous écrire quelques li­gnes et surtout pour vous remercier de votre bonne lettre. Son éloquente simplicité m'a plu infiniment; de même qu'à ceux à qui je l'ai lue.

Vous voilà donc séminariste et heureux puisque vous vous trouvez enfin dans vo­tre élément et le milieu qui vous convient. Avec votre facilité de travail et votre appli­cation à l'étude, vous arriverez aisément, je crois, à parcourir le cercle des études phi­losophiques, telles qu'elles se font à Rome. Dans quatre années ou cinq au plus, vous nous reviendrez avec un bonnet de docteur en plus. Je désire vivre encore assez de temps pour vous voir débuter dans la carrière que vous venez d'embrasser. - Je ne suis point surpris de l'émotion de Mr votre père au moment de la séparation. Il est le seul de la famille qui conçoit encore, de temps à autre, quelque espoir de vous voir revenir sur votre décision; mais il se fera, ou plutôt il s'est déjà fait à cette pensée qu'il aura bientôt un fils dans le sacerdoce, et une fois le sacrifice accompli, il n'y pensera plus. Je trouve que vous avez bien fait de vous mette à la disposition de votre évêque; c'est la voie la plus simple et la plus selon Dieu. Suivez toujours ses inspirations et il saura vous conduire aux fins auxquelles il vous destine. L'homme a beau s'agiter, c'est toujours Dieu qui le mène.

J'ai appris avec bonheur que vous étiez très satisfait de votre nouvelle position et accoutumé dès le premier jour avec votre nouveau costume. C'est déjà une grande marque de vocation. J'ai vu avec peine la retraite, momentanée sans doute, de Mon­seigneur de Merode: mais il parait qu'il ne doit pas quitter Rome, et la connaissance que vous avez déjà faite de ce prélat ne peut que vous être bien avantageuse1.

Mr votre père est-il toujours dans l'intention d'aller vous voir aux fêtes de Pâques? Je le désire pour vous et pour lui-même; il serait enchanté des cérémonies qui se célè­brent à cette époque et retournerait chez lui plus catholique encore… Pour moi, j'at­tendrai pour faire mon voyage de Rome que nous soyons tout à fait casés. Nous som­mes bien établis, si vous voulez, mais il nous manque encore une foule de choses dont chaque jour nous révèle le besoin, et mille détails de toutes sortes appellent notre at­tention, je vous dirai que, outre ma classe, je suis chargé de l'économat, de la direc­tion des travaux et des appropriations qui continuent et en outre de la comptabilité: jugez si je suis occupé. Tout marche à souhait: nous avons 120 pensionnaires, c'est pour le moment tout ce que nous pouvons prendre; nous avons 70 externes: le même nombre qu'auparavant. L'autre collège végète et on n'en parle pas plus que s'il n'exi­stait pas. Nous sommes de plein exercice, et 15 professeurs. Tous les élèves sont très contents et nous espérons voir notre établissement s'accroître de plus en plus; nous y consacrons nos soins et notre dévouement. C'est une œuvre que nous voulons fon­der, mais une œuvre indépendante des personnes et qui subsiste après nous. Nous sommes cinq associés à l'œuvre et, en outre, nous avons Dunkerque et Gravelines dans notre association, bien que ces maisons s'administrent elles-mêmes et à part; mais si l'une avait besoin de l'autre, il est stipulé qu'elle doit en obtenir tous les se­cours possibles. Il arrive donc que, au lieu de songer à prendre ma retraite, me voici, pas la force des choses et les dispositions de la providence, appelé à renouveler ma jeunesse, comme l'aigle de l'Ecriture: sicut aquila quae renovat juventutem suam. Amen2.

Mr le Principal et Mr Lacroix particulièrement vous disent mille et mille choses ai­mables. Je sais tout l'intérêt qu'ils vous portent. - Quand vous écrirez chez vous, ce que vous faites sans doute souvent, mais trop peu encore au gré de vos parents, rappelez-moi à leur bon souvenir: ils recevront de la sorte de mes nouvelles par la voie de Rome. - Rien de nouveau à Hazebrouck, si ce n'est qu'on est en plein jubilé et que celui-ci marche très bien. Tout à vous; pensez à moi à vos moments de loisir.

Boute Ptre

1 Cf LD 31 (note 5) et 32 (note 4).

2 Il s'agit toujours du nouvel établissement S. François-Xavier (cf LC, 12, 14).

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