dehon_doc:cor:cor-1lc-1869-1103-0043526

435.26

AD B.21 /7a.3

Ms autogr. 4 p. (21 x 13)

De Mr Boute

Hazebrouck 3 novembre 1869

Mon bien cher abbé et ami,

Il y a donc bientôt un mois que j'ai reçu votre dernière lettre de Rome, et je n'y ré­ponds qu'aujourd'hui. Je connais votre indulgence sur mes retards accoutumés, mais aujourd'hui, il y a plus. Mon état de santé ne m'a pas permis jusqu'ici d'entretenir au­cune correspondance. J'ai souffert considérablement depuis cinq mois de rhumati­smes et de névralgies. A l'heure qu'il est, il neige ici, et cette pluie condensée agit sur mes nerfs et sur tout l'organisme de la manière la plus irritante, sans compter mes rhumatismes qui sont loin d'avoir disparu. Je suis la plus grande partie du jour cloué sur mon fauteuil, et la nuit je ne sais où reposer mes membres.

N'était cela, le tempérament est encore bon et la charpente assez solide. Seule­ment, je ne puis pas m'occuper longtemps d'affaires sérieuses; l'esprit est bientôt fati­gué, la mémoire se perd… enfin, c'est comme partout ailleurs, le commencement de la fin, c'est-à-dire la vieillesse avec ses infirmités - multa senes ferunt incommoda, dit notre païen Horace, que vous connaissez comme moi, et mieux que moi.

Je prends patience et je demande à Dieu chaque jour la résignation dans mes souffrances. Accordez-moi, s'il vous plaît, une bonne place dans vos bonnes prières. Mais c'est trop parler de moi; je ne 1»ai fait que pour me disculper auprès de vous pour ce dernier retard et mon absence à vos (mémorables?) prémices, où j'ai assisté d'esprit et de cœur, avec le bien vif regret de n'y être pas en personne.

J'ai reçu par Siméon les reliquaires et les titres authentiques, et dernièrement, de La Capelle, d'autres reliquaires dont votre lettre m'indiquait la destination. Ces deux envois ont (été) remis aux personnes désignées, Madame Louis, et les personnes pieuses, Melle Pilon et sa compagne. Elles vous expriment toute leur vive reconnais­sance pour ce précieux envoi. Je n'ai pas encore vu Mr Darant du…, depuis l'envoi que je lui ai fait, en votre nom, des reliques de St Antoine. Je vous transmets ci-joint un mot de Melle Pilon, qui est encore une nouvelle demande. N'en tenez compte qu'autant que cela ne vous dérange nullement et à moins de frais possible-cuivre au lieu d'argent, en pareille circonstance. Je dois vous dire, pour l'acquit de ma con­science, que j'ai gardé pour le porter sur moi, ce que je fais, le reliquaire contenant des reliques de St François d'Assise, St Fidèle de Sigmaringen, etc, etc, etc…

Quand vous recevrez ce griffonnage, vous serez en plein concile. Nous lisons, avec le plus grand intérêt, tous les détails qui concernent son ouverture; notre attention sera vivement sollicitée dès son ouverture. Vous connaissez sans doute les paroles de l'Empereur, dans son discours lors de l'ouverture des chambres, relativement au con­cile. Les voici textuellement: «De la réunion à Rome de tous les évêques de la catholi­cité, on ne doit attendre qu'une œuvre de sagesse et de conciliation». Les uns trou­vent ces paroles pacifiques et bienveillantes, d'autres les trouvent bien vagues.

Je ne vous parle pas du dernier écrit de Monseigneur d'Orléans. «Observations à l'Univers», vous les connaissez déjà sans aucun doute1; elles ont fait ici beaucoup de bruit. Tout cela agite un peu les esprits. Espérons que le Concile mettra ordre à tou­tes choses et saura concilier tous les intérêts, moins ceux d'amour-propre. Va-t-on poser la question de l'infaillibilité, oui ou non? Les uns sont pour l'affirmative, les autres pour la négative. Ne faudrait-il pas en finir, une fois pour toutes, avec les pré­tendues libertés gallicanes? Si parfois il vous restait cinq minutes au milieu des occu­pations qui vont vous incomber, je vous serais bien reconnaissant, et tous ces mes­sieurs comme moi, pour nous tenir au courant de tout ce qui se passera au sein du concile, avec la physionomie qu'il présentera.

Mr le Principal et tous ces messieurs vous présentent leurs hommages pleins de re­spect et d'affection. - Mr Piettre a renoncé à la carrière ecclésiastique; il est entré dans celle de l'administration. Son séjour chez son frère docteur médecin dans une lo­calité près Paris a tout gâté; c'est notre opinion à tous2.

Je termine par où j'aurais dû commencer: Mr votre frère, qui tient tant à votre san­té, m'invite, dans sa lettre d'envoi des derniers reliquaires, à vous recommander d'ap­porter tous les ménagements possibles pour la conservation de cette précieuse santé. Ménagez-vous donc, je vous prie en son nom et au mien.

Votre ami

Boute Ptre

1 Cf LD 135 (note 1).

2 Cf LD 35, 43, 44, 46, 47.

  • dehon_doc/cor/cor-1lc-1869-1103-0043526.txt
  • ostatnio zmienione: 2022/06/23 22:00
  • przez 127.0.0.1