dehon_doc:cor:cor-1lc-1870-0911-0043203

432.03

AD B.21 /7a.1

Ms autogr. 4 p. (21 x 13)

Du P. d'Alzon

Nîmes le 11 sept 1870

Cette lettre vous arrivera-t-elle, mon bien cher ami? Je croyais interrompues les re­lations avec votre département.

L'abbé Desaire ne donne aucun signe de vie. Je lui ai écrit, il ne répond pas; la Sa­voie serait-elle prussianisée sans que personne s'en soit douté?

Hélas, hélas! Deux de nos religieux, qui ont assisté aux journées de Sedan, sont de retour. Quelle honteuse débâcle et comme nous sommes frappés par la main de Dieu! et comme nous le méritons1.

Si vous m'aviez écrit une semaine plus tôt, je vous aurais engagé à aller à Paris d'où les prêtres fuient (en) masse et où le Père Picard vous eût donné un travail énorme dans les ambulances. Il vous faudrait aller en Belgique entrer dans l'Internationale et par elle pénétrer dans Paris. Nous avons enfin tout à l'heure des nouvelles de nos reli­gieux confinés à Metz. Un cinquième a dû être fusillé par les Prussiens, puis on l'a relâché.

Plus que jamais je suis convaincu que la question des études est la grande question. Pourra-t-on à Rome l'an prochain? J'en doute. Quant à moi, l'argent me fait défaut, mais ce n'est pas une raison pour ajourner. J'espère que l'abbé Desaire aura ici 10 â 12 élèves, c'est toujours un noyau.

Vous ai-je dit que mon Evêque est tout disposé à favoriser nos plans?

Ici règne l'ordre le plus parfait. Nous sommes les maîtres de la position et à moins d'un imprévu impossible, nous serons tranquilles. Il faudrait un débordement du flot révolutionnaire pour nous emporter. Si vous voulez venir, venez; vous serez accueilli à bras ouverts.

Ce qui manque, c'est l'esprit chrétien et les observations de mes religieux sur les champs de bataille et pendant la honteuse capitulation à laquelle ils ont assisté font (?) que nous qu'on accusait d'exagération, nous étions trop modérés.

Adieu, mon cher ami. Je vous souhaite de me déchiffrer. Je ne me relis pas, mais je souhaite que vous voyiez, sous mon gribouillage, toute ma tendre et confiante affec­tion en N. S.2.

E. d'Alzon

1 La capitulation de Sedan eut lieu le 2 septembre: l'empereur remit son épée, l'armée tout entière était prisonnière de guerre (80.000 hommes) avec tout le matériel. C'était la chute du Second Empire: la république fut proclamée à Paris le 4 septembre.

2 Il faut, en effet, beaucoup de perspicacité et un peu de chance pour déchiffrer les gribouillages que sont les autographes du P. d'Alzon. Cette lettre est citée en partie en NHV IX, 10.

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