dehon_doc:cor:cor-1ld-1866-0506-0021819

218.19

B18/9.2.19

Ms autogr. 4 p. (21 x 13)

À son père

Rome 6 mai 1866

Cher père,

J'apprends de plusieurs côtés que tu te tourmentes à la pensée de me voir si tôt en ecclésiastique. Tu sais que mon plus grand désir est d'éviter de te faire de la peine et puisque ce n'est pas essentiel à ma vocation, je te fais volontiers ce sacrifice, quoiqu'il me coûte beaucoup. Ce sera seulement au mois d'octobre que je prendrai définitivement la soutane1.

Notre séparation, chers parents, ne sera plus bien longue: dans deux mois et demi environ, nous serons réunis pour passer ensemble de bonnes vacances.

Nous continuons ici notre travail tranquillement et Rome n'a jamais été plus calme, tandis qu'il circule, dit-on, dans toute l'Europe des bruits de guerre2. Nous commençons à nous préparer aux examens: la chaleur nous sera un peu pénible. J'avais une chambre assez chaude et un peu haute pour l'été. J'en prends une autre plus fraîche au 4ème.

J'ai reçu la lettre d'Henri et de Mr Demiselle. J'y répondrai dans quelque temps. M. Dehaene m'a écrit aussi une lettre charmante où il me témoigne beaucoup d'intérêt et d'affection. Il se loue de la réorganisation de son établissement3.

Le dernier semestre est commencé et je n'ai pas assez d'argent pour le payer. Il est temps aussi de songer à mon retour. Afin de pourvoir à tout cela et pour être sûr de ne pas manquer, il me faudrait 600 francs. J'espère que vous aurez la bonté de me les envoyer. Voici le moyen le plus favorable en ce moment. Envoyez-les au R.P. Peureux, rue des Postes, 30, à Paris, avec une petite lettre explicative et prévenez-m'en immédiatement. Je ferai traite d'ici sur la maison de Paris directement. Les traites sur Paris se vendent avantageusement à Rome en ce moment à cause des circonstances politiques4.

Nos lettres se croisent encore cette fois; cependant je n'attends pas parce que j'ai une occasion pour Marseille.

J'attends de longs détails sur l'heureux mariage d'Aline Dehon. Mon oncle Alfred ne va-t-il pas chercher à remettre sa ferme pour venir habiter La Capelle5.

Dites-moi le nom du mari d'Alice Fiévet; je ne le sais pas encore, et parlez-moi un peu de son avenir6. Henri est-il guéri de ses clous?

Reprenez la gaieté qui fait défaut dans vos dernières lettres et ne vous faites pas un tourment de vaines inquiétudes.

Embrassez pour moi Henri, Laure et maman Dehon. Des compliments aux personnes qui s'intéressent à moi.

Je vous embrasse de tout cœur.

Votre dévoué fils

L. Dehon

1 Mr Demiselle, entre autres, avait écrit à ce sujet à Léon Dehon le 22 avril: cf. LC 21.

2 L'année 1866 voit en effet, entre autres, l'alliance italo-prussienne (avril), l'occupation du Holstein par Bismarck (juin), la guerre contre la Prusse et la bataille de Sadowa (juillet) et les revendications de Napoléon III sur la rive gauche du Rhin (mai), le Luxembourg et la Belgique (août)…

3 De M. Demiselle LC 21; de Mr Dehaene LC 22.

4 Notamment sans doute la prévision du retrait des troupes françaises de Rome, en vertu de la convention du 15 septembre 1864.

5 Sur cette Aline Dehon cf. LD 46 note 1. L'oncle Alfred, dont il est question en LD 16, où il est question de regrets et de douleur dont la raison n'est pas autrement précisée; peut-être s'agit-il de cette ferme?

6 L'un des mariages dont il est question en LD 46 avec celui d'Aline Dehon. La famille Fiévet était très liée avec la famille Dehon.

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