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B.18/11.1.28

Ms autogr. 4 p. (21 x 13)

A ses parents

Rome 23 juin 1871

Chers parents,

Le conseil que vous me donnez de retourner de suite m'aurait souri si je n'étais si près du but. Il ne me reste plus guère qu'un mois de travail, je préfère aller jusqu'au bout. Mes vacances seront plus complètes. J'au­rai l'esprit plus libre. Du reste, nous n'avons pas encore eu de fortes cha­leurs, et le travail qui me reste à faire n'est pas bien pénible.

Les fêtes du jubilé de Pie IX ont eu ici leurs joies et leurs tristesses. Nous n'avons rien pu avoir à l'extérieur, pas la moindre illumination. La canaille aurait brisé les lanternes et les vitres. Rome seule parmi les grandes villes catholiques n'a pas pu témoigner extérieurement son dé­vouement au Pape. Les députations étrangères elles-mêmes ont été in­sultées dans les rues. Mais en revanche, les églises et le Vatican ont of­fert un spectacle bien consolant. Le 16, toute la population s'est portée à St Jean de Latran et le 17, à St-Pierre. La foule immense rappelait les fê­tes du Concile. On a chanté le Te Deum avec entrain. Il ne manquait â la fête que Pie IX. La canaille, irritée de voir une telle unanimité des ro­mains, a essayé le lendemain une démonstration contraire, en arborant les drapeaux italiens. Leur petit nombre fait rire, quand on songe qu'à leur plébiscite ils prétendent avoir obtenu 40.000 oui contre 46 non.

Le 21, anniversaire du couronnement de Pie IX, la démonstration ca­tholique a recommencé à St-Pierre. On a chanté de nouveau le Te Deum. La basilique était pleine. Il y avait de 30.000 à 40.000 personnes. La grande majorité étaient des hommes. 280 messieurs de la haute socié­té romaine portaient des torches devant le Saint-Sacrement. Après de si nombreuses et si ferventes prières, la captivité de Pie IX et l'asservisse­ment de Rome ne peuvent plus durer longtemps. De solennels triduos ont eu lieu aussi dans les principales églises. Les collèges étrangers ont fait le leur dans l'église St-Ignace. J'espère que l'intercession de St Louis de Gonzague rendra bientôt à ses petits protégés les universités catholi­ques de Rome, qui sont remplacées par des lycées dirigés par des juifs et des hérétiques. Depuis huit jours, le St-Père voit véritablement le com­mencement de son triomphe. Il reçoit du matin au soir des députations qui lui apportent des millions de signatures et des offrandes de toute sor­te. J'ai été en audience avec la députation française. Pie IX a été super­be. Il aime tendrement la France et n'en parle qu'avec émotion. Il prie chaque jour pour qu'elle se relève en revenant à la religion. Il nous a donné de belles médailles'.

Au revoir. Embrassez pour moi Henri, Laure, maman Dehon et les enfants.

Je n'oublierai pas la recommandation de Marthe. Je vous embrasse de tout cœur.

Votre dévoué fils

L. Dehon, pr.

(P.S.) Envoyez-moi encore quelques timbres. Les reliques que maman a données à Siméon sont pour une personne d'Hazebrouck que Mr Boute connaît et qui m'en a fait demander plusieurs fois2.

1 La description de ces fêtes est reprise en NHV IX, 25-27 par de larges citations de cette lettre.

2 Cf. LC 59 et 60.

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