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VIII Cahier

=====Notes sur l’histoire de ma vie

===Ve période: Rome, 1865-1871 (suite) Le Concile: 1869-1870===

Travaux de Juin

Mgr Vancsa, archevêque hongrois de rite roumain, proteste de son dévouement envers le Saint-Siège. Il expose cependant ses difficultés contre les schemata de Primatu et Infallibilitate. Les Orientaux lui oppo­seront des objections tirées des Conciles et des Pères, qui considéraient l'Église et non le Pape comme détenant l'autorité suprême, et il ne saura que répondre.

Mgr de Dreux-Brézé fait remarquer que le Pape n'est jamais séparé de l'Église, parce que quand il ne consulte pas les évêques avant de for­muler une doctrine, il est sûr a priori de l'assentiment de l'Église.

Mgr Strossmayer. Si dans son discours précédent il lui a échappé dans l'improvisation quelques paroles qu'il n'aurait pas dû dire, il en demande pardon à l'assemblée. II 2 répond au patriarche de Jérusalem, qui a dit très éloquemment des choses plus ingénieuses que vraies. C'est injurieux pour l'Église, pour les Pères, pour la France de comparer à des hérétiques ceux qu'on range sous le nom de gallicans. Il v a de vrais périls pour les âmes, surtout pour 80.000 Slaves. Il faut plutôt ouvrir les portes de l'Église que les fermer.

Mgr Regnault, de Chartres, voudrait que la constitution parlât d'abord de l'Église et de son infaillibilité. On conserverait l'infaillibilité du Pape, mais en ajoutant qu'elle n'est ni séparée ni absolue, comme l'ont bien dit les rapporteurs. On enlèverait le mot dogma et l'anathème indirect. Si le peuple voyait l'infaillibilité du Pape séparée, il croirait qu'au lieu de dire Credo in Ecclesiam, il doit dire Credo in Papam…

Mgr Salzàno, évêque de Tanis in part., répond à une objection qui à été faite au sujet de la doctrine de Saint Antonin. Il prouve que ce saint a considéré comme vraie et tenue par l'Église la doctrine de l'in­faillibilité du Pape. S'il a dit quelque part qu'il fallait recourir au Concile, c'est à cause des circonstances du temps. 3

Mgr Gilooly, Elphinensis, soutient l'opportunité et la nécessité de la définition. Il regrette que des évêques empruntent des arguments aux journaux et aux libelles impies.

Mgr Dinkel, d'Augsbourg, malgré son état de souffrance, parle pour satisfaire sa conscience. Il répond à l'évêque de Ratisbonne. Celui-ci a cité quelques grands théologiens bavarois infaillibilistes de ce siècle, mais ceci ne prouve pas la foi du pays, parce que les manuels de théo­logie donnaient la chose comme controversée. Il essaye de démontrer que les trois textes de l'Écriture ne prouvent pas. Pierre a seulement l'obligation de confirmer ses frères et il peut l'accomplir en consultant les Conciles.

Mgr Domenec, de Pittsburg, parle des dangers de la définition. C'en serait fait de la conversion des protestants. Le président l'interrompt. Le cardinal De Angelis: «magis caute loquaris».

Mgr Maret oppose la théorie de la monarchie tempérée à celle de la monarchie 4 absolue que le Concile du Vatican veut introduire. Les évêques feraient là un acte d'abdication. C'est une théorie nouvelle, inouïe. Il faut encore de longues discussions. On n'a jamais vu un Con­cile proposer une définition contre 150 ou 200 évêques aussi pieux et savants que les autres. On n'a pas même encore commencé à étudier ce qu'est un Concile, ses droits, etc. (rumeurs croissantes). Que répondrait­ on à quelqu'un qui raisonnerait ainsi: le Concile définit la puissance du Pape, donc il est supérieur au Pape. Admettez-vous cette conclusion? (Non, non).

Le cardinal Bilio: «Non ita loqui fas est. Non alloquaris partem Concilii sed totam congregationem. Quando Concilium definiet infalli­bilitatem Summi Pontificis non ei dabit infallibilitatem, sed agnoscit eam a Domino Nostro Jesu Christo datam ».

L'orateur: Vous répondrez qu'il n'y a pas de difficulté parce due cette définition est faite par un Concile confirmé par le Pape, ce qui constitue une autorité reconnue par tous; mais alors pourquoi par ce dogme nouveau bouleverser la constitution de l'Église? 5

Le cardinal De Angelis: Plus de cent cinquante Pères ont demandé la clôture de la discussion générale.

On vote. Elle est prononcée par une grande majorité. Restaient à entendre cinquante orateurs.

Le cardinal Mathieu, inscrit pour le proœmium, remet sa demande de parole au chapitre IV.

Mgr Amat, Montereyensis. modifications de style.

Mgr Verot. Il n'est pas vrai de dire que le Saint-Siège soit attaqué de plus en plus par les ennemis de l'Église. Il faut effacer ces mots: « tanquam constantem et antiquam Ecclesiae fidem », parce que les dog­mes qu'on veut définir sont nouveaux.

Le cardinal Bilio. Prouver que ces dogmes sont nouveaux appartient à la discussion spéciale des chapitres, si l'orateur n'a rien de spécial à dire sur le proœmium, qu'il se retire.

Mgr Vérot reprend: «Quidam volebant silere de schemate ob prae­maturam discussionis generalis conclusionem, sed ego melius esse putavi et dignius episcopo dicere veritatem, meo sensu, quamdiu occasio se offert». (En enfant terrible il trahit les petits complots dé ses amis). 6

Mgr Wiery, Gurcensis: «Omittatur verbum «principium», quia Pe­trus non est principium unitatis, sed Christus ».

Mgr Thomas, de la Rochelle, (sur un ton de sermon) propose une addition au proœmium relative à l'Église en général et extraite du 1er schéma. Il dit qu'on ne peut pas parler de la primauté et de l'in­faillibilité sans parler des évêques.

Mgr Whelan, Vhelingensis: même sens.

Mgr Martinet, de la Havana. (Discours improvisé, parole ardente).

« On parle sans cesse des droits des évêques; la première dispute sur ces droits remonte aux Apôtres, qui se querellaient pour savoir qui serait le plus grand. Notre-Seigneur leur répondit en leur rappellant l'humi­lité. On comprend la revendication de ces droits contre les gouverne­ments, mais contre celui qui doit paître et confirmer ses frères, non. Les évêques ont un troupeau restreint, qui in vobis est: in quo vos posuit; c'est dans cette mesure que Notre-Seigneur leur dit: Ecce mitto vos ». (Mgr Hefele dit alors à son voisin en parlant de l'orateur: et ego libenter te mittam).

Le président De Luca avertit l'orateur de parler plus directement ad rem. Celui-ci 7 n'ajoute plus que quelques mots.

Mgr Magnasco. (Long et ennuyeux discours)1) Il parle en faveur des droits de Pierre. Il appuye sur ces mots: « intuens eum dixit: Tu es Petrus… ».2)

Le cardinal Schwarzenberg se plaint de ce que les observations écri­tes que lui et ses amis ont présentées n'ont pas été jugées dignes d'être écoutées: «Mente comprimor, quia examen sollicitissimum requirere­tur ».3) Les protestants objecteront que Pierre n'est pas seul fundamen­tum; qu'il n'a pas été dit à Pierre seul: «quodcumque ligaveris…». On doit prévoir ces objections. Toutes ces questions ne devraient venir qu'après la constitution de Ecclesia.

Mgr Moreno, d'Ivrée, expose la constitution de l'Église et montre que Pierre en est le fondement.

Mgr Dechamps, au nom de la commission admet quelques amende­ments. Aux autres il répond: l'ordre que nous adoptons, répond: 1) à la nécessité, à cause du péril dés âmes; 2) à la logique, puisque Pierre est le fondement 8 de l'Église.

Mgr Ferre, de Casale: correction des mots, dans le sens romain.4) Mgr Magnasco continue ses considérations de la veille sur les textes relatifs à la primauté.5)

Mgr Monzon y Martins, archevêque de Grenade, fait remarquer le dessein de Dieu et sa Providence spéciale envers Rome, le siège de Pierre.

Mgr Filippi, d'Aquila: détails. Mgr Amat, de Monterey: id. Clôture de la discussion du II chapitre.6)

Le cardinal Rauscher: 1) Potestas Papae in diœceses non est proprio sensu episcopalis nec ordinaria. Omittatur ergo in capite et canone vox ordinaria, sufficit vos immediata. 2) On ne peut pas tirer argument du II Concile de Lyon, parce que le Symbole proposé par Michel Paléo­logue ne fut pas confirmé par le Concile de Lyon ni accepté par les Grecs. Mgr Dechamps répond au cardinal Schwarzenberg et à Mgr Maret. Il propose quatre canons 9 qui condamnent les doctrines de celui-ci.

Le 3ème est: «Si quis dixerit episcopos habere partem sollicitudinis ira universam Ecclesiam, anathema sit ».

Le 4ème: «Si quis dixerit Romanum Pontificem non habere plenam potestatem docendi Ecclesiam, anathema sit». Ce canon préparerait le chapitre IV.

Mgr Desprez défend le « potestas propria, immediata, episcopalis ». Les propositions contraires sont condamnées. La juridiction des évêques ne souffre pas de celle du Pape, comme celle des curés ne souffre pas de celle des évêques. L'orateur désire qu'on exprime le pouvoir du Pape de nommer les évêques.

Mgr Behnam Benni, de rite syriaque, répond au patriarche melchite. Il démontre que ses doctrines sont celles des jansénistes, de Tamburini, etc. A l'objection que les droits des patriarches ont toujours été regardés comme la sauvegarde des églises d'Orient, il répond: «Pro Melchitis, transeat; pro haereticis, concedo; pro catholicis, nego ».

Mgr Landriot: le pouvoir du Pape n'est pas sans limites. On argue trop du plena potestas du Concile de Florence. Suarez même donne des limites à cette puissance. Il faut donc supprimer cette définition, ou ajouter avec Fenelon que ce pouvoir est limité 10 par les canons, par les lois, et ne s'exerce pas contra jus et fas.

Mgr Amat, de Monterey, est favorable au schéma, il propose quel­ques amendements.

Mgr Dupanloup: «De primatu libenter loquor quia a nemine con­trovertitur, nisi quoad adiuncta schematis inutilia, immo forsan pericu­losa». Développement emphatique de la primauté. Textes de l'Écriture, des Pères, de Saint Bernard: «Tu primatu Abel…». Longue apologie du clergé gallican. Son éloge par Pie VI, Pie VII; Benoît XIV; son dé­vouement jusqu'à la mort. On l'injurie en comparant sa doctrine à d'anciennes hérésies (allusion à Mgr Valerga). «Historia mirabitur quod talia in hoc Concilio effutita sint. Sunt nugae, ludibrium, etc. etc… ».

Le schéma est plus théorique que pratique. Il ne faut exagérer les droits du Pape, ni préjuger la question du chapitre IV. Paix et concorde. (La première partie du discours est sur un ton irrité, la seconde sur un ton triste et visant au pathétique).

Mgr Salas, de la Conception du Chili: il ne s'agit plus de gallicanis­me, mais de tout un ensemble 11 d'erreurs condamnables. Il faudrait effacer des actes du Concile beaucoup de discours et d'observations injurieuses au Pape qui disent que le Concile semble avoir été convoqué seulement pour définir l'infaillibilité, et celles qui sous prétexte de liberté épisco­pale ne respectent pas la définition du Concile de Florence. L'orateur trop long est rappelé à la question. Il accepté volontiers l'avertissement et répond: «Optime, si adhuc vagar extra rem, agita tintinnabulum ».

Mgr Sola, de Nice, parle contre la juridiction ordinaire et immé­diate du Pape.

Le président Capalti: «Non possum silentio transire quae ait Rev. Nicensis. Quoad potestatem ordinariam, est definita a Concilio Floren­tino; quoad potestatem immediatam, non fuit negata visi a Febronio, Eybel et Jansenistis… ».

Mgr Verot (toujours plaisant)7) propose un canon de ce genre: « Si quis dixerit Papam posse facere quidquid vult, anathema sit ».

Le président Capalti: « Non sumus hic in theatro inter scurras, sed in ecclesia sancta Dei; parcat Rev. orator si zelo correptus haec libere dicam: doleo quod semper 12 detineat Patres ad facetias suas audiendas ». Mgr David cite beaucoup d'auteurs qui indiquent des limites au pou­voir des Papes, et des Papes qui ont reconnu ne devoir agir que selon les canons. Il omet ceux que cite disertissimus episcopus S. Augustini (Mgr Vérot).

Mgr Montserrat, Barcinonensis, est favorable au schéma avec des amendements.

Mgr Papp-Ssilágyi: l'église d'Orient a reconnu la pleine primauté du Pape, spécialement au Concile de Florence. Cependant cette primauté s'exerce différemment: en Occident par les Décrétales; en Orient par l'approbation des canons de l'église d'Orient. Il propose d'omettre le paragraphe 2 et le can. 3: « res inutiles, non claras, disputabiles, anxieta­tes producentes ob orientales et praesertim patriarchas ». L'église d'O­rient diffère de celle d'Occident « sicut ego a vobis externa forma differo » (on rit); mais elle est d'égale dignité. On doit donc respecter ses droits. Si vous n'effacez pas cela, « pro aeternitate clausistis orientalibus Ecclesiae portas clavibus Petri ». Les évêques unis au Pape ont part à la juridiction universelle. 13

Mgr Place, de Marseille: effacer « episcopalis, ordinaria, immediata », mots nouveaux; inutiles, dangereux.

Mgr Gastaldi répond à diverses difficultés. Le Concile de Florence approuva au moins implicitement le Symbole juré par l'empereur grec. On ne peut pas au contraire arguer des discours des Pères de Trente ou de Florence, même de Bessarion. Les Pères dans les Conciles disent des erreurs, comme on l'entend souvent ici; et cependant ils sont élevés ensuite à de plus hautes dignités, mais pour d'autres raisons.

Mgr Callot, d'Oran: la pleine puissance du Pape et sa supériorité sur le Concile ont été laissées libres à Trente, même après le Concile de Florence, et on a permis à Bologne l'impression de Dell'Oca, qui dit que l'on ne peut pas la déduire du décret de Florence. En entendant des rumeurs, l'orateur s'écrie: « Murmuria non impediunt veritatem; mur­muria non sunt digna ».

Mgr Guilbert, de Gap: même théorie contre le pouvoir ordinaire, immédiat.

Mgr Magnasco (ton professoral)8), répond à l'archevêque de Reims. R. P. Zelli, abbé de Saint-Paul: les évêques n'ont pas une juridiction universelle; mais spéciale. 14

Rapport sur le proœmium par Mgr Leahy, archevêque de Cashel.9) Il développe le « maiori odio erga Sanctam Sedem ». Les hérétiques sont aussi hostiles que jamais, bien qu'ils accommodent les moyens à l'état de civilisation du temps. Les catholiques libéraux, nombreux, puissants (pleni subdolis artibus)… les journaux, les livres; la persécution russe; les sociétés secrètes; les ennemis du temporel du Pape, qui en veulent surtout au spirituel; la révolution contre laquelle le Pape lutte pres­que seul.

On vote quelques amendements.10)

Le cardinal Pitra défend la juridiction immédiate du Saint-Père. Il s'étonne qu'on craigne cette définition pour l'Orient. Cette juridiction est plus évidente encore dans les recueils canoniques d'Orient que dans ceux d'Occident. L'Orient appelait à Rome pour les plus petites choses. Puisqu'on demande un nouveau Corpus Juris, il faut poser le principe de la juridiction du Pape.

Mgr Regnault, de Chartres: on peut omettre le mot episcopalis, qui blesse certains évêques, et mettre l'équivalent comme à Florence et à Trente.

Mgr Colet, de Luçon: il ne faut pas 15 infliger à la Petite Église la note de schismatique (comme voudrait Mgr Dechamps), mais l'inviter à re­venir.

Mgr Ramirez, Pacensis: le mot episcopalis est inutile. L'orateur sous­crit à l'addition proposée par l'archevêque de Toulouse pour la nomi­nation des évêques.

Mgr Maret renonce à la parole parce que Mgr Dechamps a retiré, dit-on, les canons qu'il proposait.

Mgr de Dreux-Brézé: il faut distinguer la primauté d'honneur et de juridiction. Celle-ci comprend le magisterium.

L'évêque d'Urgel: le Pape a la juridiction épiscopale, plus pleine­ment que l'évêque.

Mgr Haynald: l'Église est établie « super fundamentum Apostolo­rum et Prophetarum ». Nous devons ménager les protestants qui en­tendent par là que toute l'Église, ses lois, ses rites sont fondés sur les Apôtres et non sur Pierre. Les mots episcopalis et ordinaria sont nou­veaux. Si les Papes s'appellaient episcopus universalis, les patriarches se donnaient le même titre.

Mgr Jussef, patriarche melchite, demande 16 qu'il n'y ait pas d'ana­thèmes et qu'on renouvelle seulement la définition du Concile de Flo­rence, « salvis juribus patriarcharum ».

Mgr Bravard: « Recordor (???) Rev.mis Patribus ». Il rappelle l'his­toire du pontificat de Pie IX et le dévouement dés évêques français au Pape.

Le cardinal Capalti: le Saint-Siège reconnaît les mérites de l'épiscopat français et lui en est reconnaissant, mais ce n'est pas le lieu d'en parler: que l'orateur en arrive aux amendements.

Mgr Bravard: je tiens à dire cela parce que la France a été outra­gée (???).

Mgr Demartis, de Galtelli-Nuoro, (long discours), s'étend sur l'in­faillibilité qu'il voudrait faire rentrer dans ce chapitre.

Le président De Luca lui ôte la parole, qu'il abandonne à regret. Mgr Krementz, Varmiensis, parle dans le sens du cardinal Rauscher, il s'en prend à l'évêque de Ratisbonne. Il veut écarter la citation du Concile de Lyon comme fausse et la remplacer par les canons du Concile de Sardique.

Mgr Vancsa, roumain: omettre le deuxième paragraphe et le troi­sième canon à cause des orientaux.

Mgr Freppel répond au patriarche melchite: 17 «Salvis juribus patriarcharum », ces droits sont ecclésiastiques et non divins. Il sera plus à propos d'en parler dans un chapitre de discipline que dans un texte «de fide». Les mots espiscopalis, ordinaria, s'ils étaient nouveaux, n'en seraient pas moins opportuns. On oppose de nouvelles formules aux nouvelles erreurs: mais ces mots se trouvent dans des actes et des au­teurs anciens. On dit que la puissance du Pape est réglée par les canons. Elle n'est certainement pas arbitraire, pro lubitu, pro nutu. Personne ne soutient cela. Mais elle est pleine et absolue, comme le dit Pie VI, dans le Bref Super soliditate [28 nov. 1786].11)

Rapport sur le premier et le deuxième chapitre par Mgr d'Avanzo, évêque de Calvi. « La députation est accusée de n'avoir pas compris la constitution de l'Église, elle veut se défendre: ut aiunt curiales, diabolus ipse est audiendus ut se defendat. Elle a indiqué exactement la consti­tution de l'Église d'après l'Évangile. La relation de Pierre avec les autres Apôtres est celle d'un supérieur, d'un monarque (fundamentum, pastor).18 Les autres sont dés inférieurs, des dirigés (confirmatos). Les limites sont: 1) qu'il agisse in aedificationem; 2) qu'il se serve des Apôtres et de leurs successeurs comme constructeurs; ce sont des brebis et non des agneaux, des frères confirmés.12)

Vote des amendements (une quinzaine d'opposants).

Soixante-treize orateurs inscrits (essai d'obstruction).

Le cardinal Mathieu fait l'apologie de l'épiscopat passé; présent, de la France, en réponse au patriarche de Jérusalem.13)

Le cardinal Rauscher: il suffit dé la certitude morale pour que l'in­faillibilité du Pape porte ses fruits, parce que cette certitude est une règle pour les consciences et exige l'assentiment. Il faut ajouter dans la définition la nécessité de l'assentiment des évêques, soit antécédent, soit concomitant, soit subséquent. Il ne peut pas admettre davantage parce qu'il n'en est pas convaincu. « Quod non est ex fide, peccatum est ».

Le cardinal Pitra (discours lu par Mgr[Gérault]de Langalerie ). Il pas­se en revue l'Écriture, la Tradition de tous les pays, les conciles parti­ culiers. Il cite 19 de nombreux textes des Pères et de la liturgie de l'Orient, en partie inédits.

Le cardinal Guidi: le Pape est infaillible, mais l'histoire nous le montre se servant toujours, pour définir les dogmes, des Conciles généraux ou provinciaux. « Est medium ordinarium, ergo necessarium ».

Il propose deux canons. Le Pape est infaillible quand il définit en s'appuyant sur le sentiment des évêques. (L'opposition. Bene, optime. Quelques évêques de la majorité murmurent. L'orateur les interpelle en réclamant pour chacun la liberté de dire son opinion. Beaucoup répètent: Bene, bene).

Il est félicité par Mgr Strossmayer, le cardinal De Silvestri et l'op­position. Il répond à Mgr Strossmayer: « Spero quae dixi fore vin­culum unitatis et pacis ».14)

Le cardinal de Bonnechose affirme nettement l'infaillibilité.

Le cardinal Cullen la défend dans un long discours et propose une formule pour la déterminer « in rebus de fide et moribus ad aedificationem religionis christianae pertinentibus ».

Mgr d'Avanzo, de Calvi, au nom de la députation:15) on se fait un fantôme de trois 20 mots, personalis, absoluta, separata, qui ne sont pas dans le décret, mais dit-on, semblent y être. Au point que ce Concile serait celui des trois mots, comme un autre fut celui des trois chapitres. On a entendu dans ce sens un orateur (le cardinal Guidi), qui se dit disciple de Saint Thomas, et « quem audivimus conversari cum Bellar­mino et Perrone. Facta est commotio ac si pax inveniretur, sed extrema gaudii luctus occupat ».

I° de titulo: on a dit que le Pape n'est pas infaillible, parce que l'acte ne constitue pas l'habitude et on a cité l'exemple dé l'homme qui s'enivre quelquefois. Mais ici il s'agit vraiment d'une assistance habituelle: « ne deficiat fades tua ». L'infaillibilité est personnelle, « pro persona publica, non privata ».

On demande quatre conditions: 1) inquisitio de fide aliarum eccle­siarum; 2) collatio consilii cum pluribus episcopis; 3) maturum judi­cium et examen; 4) invocatio Spiritus Sancti.

On a proposé un canon ut medium conciliationis: « Si quis dixerit Romanum Pontificem posse errare cum definit ex consilio episcoporum traditionem ecclesiarum exhibentium, anathema sit ».

Ad vitanda phantasmata separationis, ad aliena castra transit et evasit gallicanus. Nam necessarius esset consensus episcoporum, immo antecedens, quod est 21 propositio damnata. Quod aiunt Bellarminus et Per­rone est factum ordinarium, non conditio. Una est infallibilitas, duplex modus: 1) Euntes docete; 2) Confirma fratres. Est distinctio, non se­paratio.

La condition du consentement des évêques n'est pas admissible, car 1) si le Pape était seul, le corps enseignant serait sans tête, ce qui est impossible. 2) Si le Pape est avec une partie des évêques, ubi Petrus, ibi Ecclesia; mais pour le peuple en ce cas il y aurait péril. C'est ainsi que les jansénistes demandaient d'abord le consentement, puis le consente­ment positif, universel.

Mgr Ballerini, patriarche d'Alexandrie, développe la question au point de vue théologique. Il ne faut pas s'étonner de voir la foi à l'in­faillibilité obscurcie ou même méconnue dans quelques églises d'Orient. Ces églises sont éloignées de l'Église infaillible, elles ont pu errer sur ce point comme sur quelques autres, par exemple sur le Canon des Livres saints.

Mgr Valerga répond aux injures qu'on lui a adressées, ou plutôt aux observations du cardinal de Besançon, « ne silendo contemnere videatur». Il a comparé ­22 le monothélisme au gallicanisme, mais il a dit que les gallicans étaient « bonae fidei et non contumaces ». Il ignore si ses idées ont été émises dans un journal comme on l'a dit. Il a appelé aulicos les évêques de la Déclaration de 1682. Si d'autres veulent se joindre à eux, «ipsi viderint ». Le gallicanisme n'est pas la France. Du reste il ne sait pas qui représente mieux la France de ceux qui l'ont critiqué ou de ceux plus nombreux qui l'ont félicité. Au Concile de Trente la question de l'infaillibilité n'a pas été traitée. Celle de la juridiction des évêques a été retirée pour des raisons de prudence qui n'existent pas pour l'infail­libilité.

L'orateur s'étend ensuite sur le «salvis juribus patriarcharum» du Concile de Florence.

Le cardinal Capalti lui fait remarquer que cela se rapporte au cha­pitre III, il conclut.

Mgr Mac Hale, de Tuam. La tradition de l'Irlande n'est pas aussi ultramontaine qu'on l'a dit. Il cite Saint Colomban et un évêque Vir­gilius. Dans ces derniers siècles, les Irlandais n'ont pas d'école théolo­gique. Il est vrai que 23 maintenant ils accepteraient volontiers l'infaillibilité, mais c'est parce qu'ils acceptent tout ce qui vient de Rome (on rit) et de leurs pasteurs.

Mgr Alemany, de Sana Francisco, cite le concile de Baltimore, qui demanda cette définition, assurant qu'elle serait bien reçue «a Pacifico usque ad plagas Savannenses ». Parmi les évêques qui ont souscrit était Mgr Vérot (on rit).

Mgr Apuzzo, de Sorrente. Aperçu de la foi des nations. Une assem­blée du clergé de France, cinquante ans avant 1682. L'Université de Douai qualifie le gallicanisme de « inauditam et detestabilem doctrinam, propriam schismaticorum ». En 1822, le gouvernement veut imposer l'enseignement des quatre articles dans les séminaires. Les évêques re­fusent. Un décret du concile de Kalocsa est signé Haynald, évêque de Transylvanie, etc.

Le président avertit l'orateur que tout cela appartient à la question générale.

Mgr Spaccapietra apporte le témoignage de l'Église de Smyrne. Il est rappelé à la question. 24

Mgr Errington, de Trébizonde in partibus: «Instituatur specialis deputatio ex oratoribus utriusque partis composita, ut elucidentur omnes difficultates. Caput inscribatur: de magisterio Summi Pontificis. Ni­hil addatur decretis anteriorum Conciliorum de hac re ».

Mgr Nobili Vitelleschi: Paix, union - idipsum sentientes.

Mgr Connolly, d'Halifax: rien dans les Conciles, ni dans lés Pères n'établit l'infaillibilité séparée du Pape.

Mgr de La Tour d'Auvergne, propose un canon: « Si quis dixerit judicia vel decreta Romani Pontificis, cum definit ex cathedra, non esse irreformabilia nisi accesserit Ecclesiae consensus, anathema sit ».

Mgr Monzon, archevêque de Grenade: long et spirituel discours.16) Il atteste la foi de l'Espagne. Il répond aux évêques d'Halifax et de Bologne: «Audivimus Eminentem Cardinalem Bononiensem postulan­tem ut conditiones apponantur. Exhibuit verum Petrum sed vinctum duabus catenis. Liget Herodes in carcere Hierosolymitano; ligent satel­lites in carcere Mamertino, nos relinquamus Petrum liberum ». 25

Mgr Maupas, archevêque de Zara, témoigne de la foi de la Dalmatie à l'infaillibilité.

Mgr Landriot: essai de conciliation. Effacer: « tamquam dogma fidei ». Ajouter: «non absoluta, non separata». La Tradition n'est pas aussi constante qu'on veut bien le dire. Il a un recueil de textes de 200 pages, approuvé par le primat de Hongrie, qui le prouve. On prend trop souvent les éloges flatteurs donnés aux Papes pour des textes dogmati­ques. Il croit à l'infaillibilité comme Fénelon; mais il admettra la formule telle que la fera le Concile avec le Pape.

L'archevêque [Yusto] de Burgos atteste la foi de l'Espagne.

Mgr Lynch, archevêque de Toronto, parle en faveur de l'infaillibilité. Il demande cependant qu'on ajoute, au décret les mots « episcopis unito ».

Mgr Losana, de Bielle: discours d'opposition.17) Les textes de l'Écri­ture ne prouvent pas, ils promettent seulement l'infaillibilité.

Le cardinal Bilio: s'ils promettent, il est certain que Notre-Seigneur a tenu ses promesses. « Occasionem nactus enixe te rogamus ut non loquaris de silentio obsequioso quod solum deberetur decretis dogmaticis Romani Pontificis. 26 Est doctrina damnata aeque ac jansenismus a Bulla Vineam Sabaoth, ab universa Ecclesia accepta. Senex es et laboribus pro Ecclesia exantlatis benemeritus, noli tenere similem doctrinam ». L'orateur continue à nier la force probante de ces textes.

Le cardinal Bilio: on nierait ainsi la primauté elle-même.

Mgr Whelan, Vhelingensis: les Américains et les Anglais sont ha­bitués à lire danses livres de controverse que l'infaillibilité du Pape est une question libre. Les évêques enseignent cela et le jurent, et ils ne donnent même pas cette doctrine comme proche de la foi, mais comme une opinion ultramontaine, ce que les Américains entendent seulement des Italiens.

Mgr Legat, Tergestinus, demande qu'on indique des conditions, com­me l'examen de la Tradition.

Mgr Cantimorri, de Parme: « Papa non potest errare definiendo, sive utatur concilio sive non ».

Mgr Keane, de Cloyne: long discours favorable à la définition. 27

Mgr de Ketteler: la députation représente une école et même une école extrême. De nos jours Bellarmin serait un crypto-gallican. Bel­larmin distingue le Pape: 1) comme personne privée; 2) seul; 3) avec son conseil ordinaire; 4) avec le Concile œcuménique, Bellarmin dit que l'opinion qui attribue l'infaillibilité au Pape seul est probable, mais ni certaine, ni commune.18)

Mgr Lacarrière, de Guadeloupe: discours enthousiaste. Pierre est transubstancié en pierre (petra). C'est notre père, qui est sur la terre. Nous donnera-t-il pour du pain une pierre, pour un œuf un scorpion?

Mgr Vitali, de Ferentino: les fidèles doivent croire que le Pape ne définira pas les questions sans maturité. (L'orateur s'étendant trop lon­guement pour se plaindre de la longueur des discours est lui-même rap­pelé à l'ordre).

Mgr Ginoulhiac, de Lyon: il faut dire que le Pape n'est pas aidé par inspiration mais par l'assistance du Saint-Esprit. Il faut aussi que la définition soit ni trop, ni trop peu conditionnée. Le schéma admet déjà la condition du sujet, de l'objet, du mode. 28 Le cardinal Orsi pose comme condition la célébration d'un concile. Les conditions doivent être expri­mées non seulement dans le proœmium, mais même dans le décret, au moins brièvement, v. g. « de fratrum suorum episcoporum consilio; vel loquens ut caput Ecclesiae universalis, ejusque consilio vel adiutorio re­quisito; aut alia eiusmodi, quibus exprimatur concursus episcopatus. Formula débet apta esse ad unitatem procurandam. (L'orateur s'émeut). Nihil dicam quod ex sensu catholico non prodeat». Il demande l'una­nimité, non comme nécessaire, mais comme désirable.

Mgr Caixal, d'Urgel: il n'y a qu'une seule infaillibilité. L'Église n'est infaillible que per gratiam Petri. Il demande des canons.

Mgr Amat, de Monterey, propose une formulé de conciliation, ex­traite cependant des documents cités par le schéma.

Mgr Moriarty, de Kerry, réclame lé consentement des évêques.

Mgr Sergent, de Quimper: le Concile V de Latran a défini la puis­sance suprême 29 du Pape « super episcopos sive dispersos sive congre­gatos », et par conséquent sur les Conciles eux-mêmes. Il propose ce canon. « Si quis dixerit voluisse Christum Ecclesiam reipublica forma administrari, saltem in Concilio œcumenico adunatam, ita ut Supremo Pontifici non subsit, anathema sit ».

Mgr Zelo, d'Aversa, veut introduire dans le schéma deux arguments pour justifier l'infaillibilité: 1) ex apostolicitate Ecclesiae; 2) ex inde­fectibilitate.

Mgr Martin, de Paderborn: les conciles provinciaux et les évêques de Germanie ont enseigné l'infaillibilité, l'évêque de Mayence lui-même.

Ici ils se contredisent. Ils nous objectent l'infaillibilité absolue, person­nelle: «ignorant quod blasphemant». L'orateur propose une nouvelle formule: «Itaque nos Traditioni de fide christiana a Christo percepta fideliter inhaerendo, ad. Dei Salvatoris nostri gloriam, sanctae religionis catholicae exaltationem et christiani populi salutem docemus et tam­quam dogma fidei declaramus Romanum Pontificem, cui in persona beati Petri a Christo dictum est: Tu es Petrus …, et iterum: Ego rogavi pro te …, cum pro suprema sua apostolica auctoritate 30 universam Ecclesiam docet in definiendis rebus fidei et morum, ad aedificationem doctrinae christianae pertinentibus, vi assistentiae divinae errare non posse; ideo­que huiusmodi Romani Pontificis decreta ex se irreformabilia esse ».

Il proposé le canon suivant: « Si quis dixerit Romani Pontificis fidei de­creta non esse irreformabilia nisi accesserit consensus Ecclesiae, ana­thema sit ».

Mgr Ferrè, de Casale, répond à toutes les objections.

Mgr Maupoint demande qu'on n'indique pas de conditions.

Mgr Vérot, long discours: pendant une heure et demie, l'orateur répète toutes les objections surtout historiques.

Au 5 juin, dans l'église du Gesù, le cardinal de Bonnechose a con­sacré le nouvel évêque de la Corée; Mgr Ridel, des Missions Étrangères. Un grand nombre de vicaires apostoliques entouraient leur jeune frère. Les deux évêques parrains étaient Mgr Verrolles, de la Mandchourie, blanchi par quarante années d'apostolat, et Mgr Petitjean du Japon, por­tant le poids de son peuple captif. Mais ce qui mettait 31 le comble jusqu'à l'émotion, jusqu'à la rendre par instants poignante, c'était la destination de l'élu, la sanglante Corée… Mgr Ridel va succéder a Mgr Daveluy, martyr, successeur pour quelques jours de Mgr Berneux, martyr. Et le prédécesseur de Mgr Berneux, Mgr Ferréol, avait succédé à Mgr Imbert, martyr avec ses deux prêtres, MM. Mauban et Chastan, les premiers missionnaires qui fussent entrés. Mgr Imbert, croyant que le gouver­nement coréen n'en voulait qu'aux missionnaires, leur ordonna de se livrer pour préserver le peuple; ils obéirent dans les vingt-quatre heures. Avant Mgr Imbert, Mgr Brugnières était mort de fatigue et de chagrin, ayant attendu trois ans sur la frontière qu'il ne parvint pas à franchir, et ce fut lui, peut-être, à qui Dieu demanda le sacrifice le plus dur. Jus­qu'ici donc la Corée a eu cinq évêques: le premier tué par la misère, trois des quatre autres tués par les bourreaux…»19)

La Corée depuis 1841 en est à la septième persécution générale, ou plutôt la persécution n'a pas cessé. A travers cette persécution, l'Église grandissait. Elle comptait en 1865 de quinze à vingt mille fidèles et une, vingtaine de prêtres tant indigènes qu'européens. Un dernier coup de glaive semble avoir tout détruit. 32 Au mois de mars de l'année 1866. Mgr Berneux, évêque, Mgr Daveluy, son coadjuteur, et sept mission­naires, MM. Beaulieu, Borie, Ranfer de Bretenières, Pourthié, Petit-Ni­colas, Aumaître et Huin, tous français, furent torturés et mis à mort. Mgr Daveluy mourut le Vendredi-Saint, décapité en deux fois, ayant eu les jambes rompues la veille. Le massacre atteignit les chrétiens sur toute la surface du pays. Le royaume de Corée a une administration de mandarins, de tels coups y sont possibles. Trois missionnaires pré­venus à temps purent s'échapper. Mgr Ridel était un des trois, avec M. Féron, déjà reparti, et un autre, qui retournera s'il reprend assez de force physique…20) 34

Le sacre de Mgr Ridel me rappelait des souvenirs émouvants. En mars 1866, quand Mgr Ridel échappait à la mort en Corée, le frère d'un de mes condisciples de Rome, Just de Bretenières, compagnon de Mgr Ridel donnait sa vie pour la foi. Elève du Séminaire des Missions Étran­gères, Just de Bretenières avait désiré la mission de Corée, parce qu'il espérait y trouver plus facilement le martyre, et son vœu avait été exaucé. Il envoyait de la Corée à son frère, mon condisciple, des lettres tou tes brûlantes de l'amour de Dieu et 35 du désir du martyre. Christian de Bretenières me prêtait ces lettres et je les copiais, je les retrouve dans mon cahier de notes. J'en copie une ici, cela me vaut une lecture spiri­tuelle. « Je vous avoue que je ne puis pas demander une grâce parti­culière, mais toujours la grande grâce d'aimer Notre-Seigneur, car si une âme aime un tant soit peu Notre-Seigneur, aussitôt ce bon Maître se complaît en elle et vient y habiter, et cette âme passe bien vite alors de la pauvreté à la richesse. Que je vous souhaite ardemment ce grand amour, mon cher frère, que je vous souhaite que votre cœur soit tout embrasé! Vous souvient-il encore de la bonne volonté que le Bon Dieu nous donnait au Séminaire (de Saint-Sulpice) et du désir de la solitude qu'il nous inspirait pour pouvoir plus facilement nous recueillir et nous rapprocher de lui!… J'ai souvent sous les yeux en lisant mon bréviaire une sentence de Saint jean de la Croix que le P. X… m'écrivit sur une image qu'il me laissa à mon départ: « Une heure de souffrances vaut mieux qu'une année de délices ». Oh! comme ceci est dit pour les mis­sionnaires! 36 Comme je voudrais le bien comprendre et le bien pratiquer en acceptant toute peine avec la paix et la joie d'un enfant de Jésus crucifié! Que nous pourrions bien ainsi rapidement expier nos fautes, nos iniquités passées et acquérir de précieux mérites pour le ciel! ». C'était là une âme mûre pour le martyre.

Les fêtes se succédaient en juin. Nous avons eu la Pentecôte, avec la messe pontificale à Saint-Pierre, la Saint-Louis de Gonzague avec la belle communion de 1500 étudiants à l'église de Saint-Ignace. J'ai parlé de la Fête-Dieu dans mes lettres à ma famille citées plus haut.

A la Saint-Jean-Baptiste toute la population se rendait à Saint-Jean de Latran. C'était le jour où se nouaient les fiançailles et tout cela se faisait avec la gravité romaine et la modestie qui convient à une popu­lation profondément chrétienne. Le soir, on s'attardait sur la place de Saint-Jean de Latran pour voir s'allumer au loin les feux de joie dans la campagne.21)

A la Saint-Pierre, la solennité rivalisait avec le grand jour de Pâques.

On illuminait encore la grande coupole 37 et toute la ville, et le lendemain il y avait un nouveau feu d'artifice. La vie chrétienne n'a rien de morose.

Elle aime les fêtes, les divertissements populaires, les arts et les plaisirs de l'esprit.

TRAVAUX DE JUILLET

Mgr Payá y Rica, de Cuenca, se signe en commençant. Il répond aux objections. On a dit qu'on n'avait ni le temps ni les livres pour étudier cette question: on a les bibliothèques de Rome, et on a été prévenu avant le Concile de l'actualité de la question et de la nécessité de la ré­soudre, par les brochures anonymes qui arrivèrent chez les évêques. On objecte que les évêques ne seront plus juges. Ils seront toujours juges en premier ressort, et ils le seront encore quand le Pape les appellera en Concile. Il y a des témoignages et des faits difficiles à expliquer, mais il y en a d'autres qui sont certains et péremptoires.

Mgr Colet, de Luçon, demande encore qu'on mette «consultis episcopis».

Mgr Maret: le moyen ordinaire pour définir les vérités de foi est le Concile 38 ou au moins le consentement et le concours des évêques. Mgr David: le gallicanisme était très général au XVII siècle. L'in­faillibilité n'a jamais été une croyance universelle.22)

Mgr Greith, de Saint-Gall, revient sur les périls qu'offre la défini­tion, à cause des gouvernements, à cause de la diminution de la foi dans les populations. On a toujours agi avec prudence dans les Conciles et avec de grandes précautions.

Mgr Nulty, Midensis, propose une nouvelle formule: au lieu de mettre «quando docet Ecclesiam de rebus fidei », on mettrait « quando obligat ad credendum de fide ».

Mgr Mermillod: «Pondere caloris et eloquentiae obruimur. A sex mensibus qualitatem judicum vindicamus et nolumus judicare. Sumusne candidati vel professores theologiae? Coram Deo, coram animis quae exspectant anxie, coram Summo Pontifice cuius decus est ut praerogati­vae eius non discutiantur … 39 hora est non discussionis sed definitionis ».

Mgr Faiet, renonce à la parole.

Mgr Fogarasy, id.

Mgr Meignan: « Traditio non est pro infallibilitate. Tumultuarie egit deputatio ».

Mgr Ramadié: c'est un dogme nouveau, « non secundum antiquam Traditionem ».

Mgr Martinez répond aux objections. Il ne faut pas mettre de con­ditions où Dieu n'en a pas mises.

Mgr Moreyra annonce qu'il renonce à la parole et adresse un vœu à Saint Pierre pour la paix.

Mgr Aggarbati, de Senigallia, évêque augustin, défend Saint Augus­tin, en développe un texte. Il est peu écouté.

NN. SS. Zunnui et Fania renoncent à la parole.

Mgr Gastaldi demande une définition prompte et ferme; se plaint de voir les évêques gallicans loués et encouragés par les mauvais jour­naux.

On appelle NN. SS. Galletti, Colli, de Las Cases, Mac Cabe, Corradi, Krementz, Garrelon, Hefele. Ils renoncent a la parole: 40

Mgr Freppel répond à quelques objections. Dans le schéma nous définissons les droits du Pape et non ses devoirs. C'est à lui à juger quelles conditions il doit remplir et quelles précautions il doit prendre.

Mgr de Ruggero et le P. Jandel se retirent.

Se retirent le cardinal Schwarzenberg, NN. SS. Simor, Blanchet, Ric­ciardi, Franchi, Limberti, Pedicini, Darboy (abest), Ghilardi.

Mgr Gandolfi demande encore qu'on mette «pastoris universalis», parce qu'à Pierre seul Notre-Seigneur a dit: pasce oves. Il demande aussi qu'on mette « ex cathedra » et « personalis ».

Se retirent NN. SS. Dupanloup, Ranolder, de Dreux-Brézé, de la Bouillerie, Formisano, Clifford, Sola, Delalle, Milella, Peitler, Dorrian, Ormaechea, Dabert, Place, Fauli, Bindi, Meurin.

Mgr Callot excuse le mot « murmuria » comme ayant été employé par Saint Augustin; il veut se justifier de la doctrine condamnée que le cardinal de Bonnechose lui a reprochée. 41

Se retirent NN. SS. Magnasco, Passeri, Gai, Savini, Havnald, Rivet, Bravard, Jekelfalusy, Gros, Guilbert, Cesari, Mac Evilly, Grimley, Bo­vieri, Moreno, Strossmayer.

En ces derniers jours 55 évêques ont renoncé à la parole: 12 français, 20 italiens, 10 allemands, 4 anglais, 4 vicaires apostoliques.23)

Fin de la discussion du chapitre IV.

Rapport par l'évêque [Zinelli] de Trévise.24) La députation ne fait aucune concession. Vote des amendements du III chapitre.25) L'archevêque de Paris demande une discussion sur le nouveau texte du 3ème canon.26) On promet de l'imprimer et de le distribuer.

Rapport de l'évêque [Gasser] de Brixen.27) Il répète les arguments tirés de l'Écriture et de la Tradition, et l'usage de toutes les Églises d'en appeler à l'Église de Rome et à son enseignement.

Vote des amendements du chapitre IV. Il y a souvent 40 ou 50 opposants. 42

Vote des III et IV chapitres réformés, contre une cinquantaine d'op­posants. Vote de la Constitution entière par placet et non placet. On compte 451 placet. Il y a eu 88 non placet et 62 placet juxta modum On espère que beaucoup se rendront et accepteront, même avant la ses­sion, le jugement de la majorité.

A LA VEILLE DE LA DÉFINITION

Le grand jour se prépare. La session est fixée au 18. « La procla­mation de l'immortelle foi de l'Église à l'infaillibilité de son Chef est une des grandes bénédictions de Dieu sur le genre humain; une de ces bénédictions qui non seulement soutiennent et réparent, mais qui créent. Le dogme n'est pas nouveau, et néanmoins il apportera dans le monde quelque chose de nouveau. Sur les bases éternelles qu'il affermit et qu'il élargit, il installera le nouvel ordre dont le monde a besoin… Ni le Con­cile, ni le Pape ne savent ce que Dieu veut faire, comme instrument social, du dogme qu'ils proclament. Ils le proclament parce qu'il, existe et parce qu'il était nié; ils le définissent parce qu'il était mal ou impar­faitement compris…

D'autres fabriquent des dogmes; …Ils posent 43 des principes com­me on dresse des embuscades et comme on fabrique des fausses clefs. Cet art s'inspire de la politique et non de la théologie … Dogmes de '89 et leurs dérivés, souveraineté du peuple, sécularisation et divinité de l'État, athéisme de la loi, principe des nationalités, droits de l'erreur, droits de la fraude, en résumé droit de la force: voilà les dogmes qui ont été faits dans un but humain… Le Pape en a dressé naguère la liste, du moins des principaux: c'est le Syllabus. L'on y peut voir que toute cette dogmatique est un immense instrument de rapine publique et privée… Le plan général est de déposséder Dieu du monde et le monde de Dieu… L'Église ne crée point ses dogmes et ne les exploite point. Elle les affir­me au prix de sa popularité, au prix de sa richesse, de sa liberté et de son sang. [Dieu fait le reste] …

Un ordre nouveau s'établira parce qu'il est nécessaire… On peut l'en­trevoir… La reconstitution de l'autorité dans le monde, la substitution de l'autorité aux caprices humiliants et stériles de la dictature, telle sera la conséquence sociale de l'infaillibilité…

Un homme de génie, presque prophète par la puissance de la foi, disait, il 44 y a déjà longtemps: la Révolution a commencé par la proclamation des droits de l'homme, elle finira par la proclamation des droits de Dieu. La sagesse moderne a ri de cet illuminé. Voici pourtant que le Concile pose le surnaturel au sommet de l'édifice social… L'Église proclame que la parole de jésus prévaut après dix-huit siècles contre toutes les négations du doute et contre la rébellion de toute la force matérielle qui existe ici-bas. C'est l'acte de foi le plus étonnant que contienne peut-être l'histoire des siècles… ».28)

Notre joie est mêlée de tristesse. Il y a des mécontentements vio­lents; des départs hâtés, des conciliabules fiévreux. Au Casino réservé de la Villa Borghese, on délibère sur les dernières tentatives à mettre en jeu, sur une démarche au Vatican pour demander l'ajournement. Ce­pendant tout se prépare. Le Pape et la cour romaine sont calmes et con­fiants.29)

LA QUATRIÈME SESSION – 18 JUILLET

« Te Deum laudamus! C'est fini. Sauf deux voix dissidentes,30) le dogme a réuni l'unanimité. Par leur abstention, les opposants ont fait l'unanimité. Ils avaient déjà fait beaucoup de choses par leur opposition. Quod inopportunum dixerunt, 45 necessarium fecerunt ».31) Quatre-vingts évêques environ ne se sont pas rendus à la session.32) « Un orage effro­yable environnait Saint-Pierre, plongé presque dans l'obscurité. Le dog­me a été proclamé au milieu des éclairs et des tonnerres. Dans la foule, les uns pensaient au gallicanisme et disaient: c'est un enterrement! Les autres pensaient à l'avenir et disaient: nous sommes au Sinaï. Ce mot répond mieux à ma foi. Il me semble qu'aujourd'hui nous sortons de l'Égypte et que désormais le monde est dépharaonisé. A vrai dire, d'ici où nous allons, la route pourra être longue, mais nous avons Moïse, mieux et plus que Moïse. Gloire à Dieu dans le ciel et paix sur la terre aux hommes de bonne volonté! ».33)

AUTOUR DU CONCILE EN JUILLET

Au 1er juillet, Pie IX avait voulu recevoir les vingt-quatre sténo­graphes, pour leur témoigner sa satisfaction. Voici comment je rendais compte de cette faveur à ma famille:34) « J'ai à vous, conter aujourd'hui, pour vous faire prendre patience à m'attendre, un trait charmant de la bonté de Pie IX. Il nous avait déjà fait dire plusieurs fois qu'il était très satisfait du service des sténographes du Concile. Mais il voulut, 46 avant les vacances, nous le dire lui-même. Il nous donna donc rendez-vous au Vatican avant-hier soir à 6 h., dans sa charmante bibliothèque privée. Il nous reçut là avec le Secrétaire et le Sous-Secrétaire du Concile (Mgr Fessler et l'abbé Cecconi).35) Il avait fait préparer une petite fête de famille. Il voulait prendre sa récréation avec nous. Quand nous eûmes embrassé sa main, il nous dit: « vous avez beaucoup de travail ces jours­ ci, j'ai voulu vous procurer une heure de récréation». Il s'informa de quelle nation nous étions, dit un mot aimable à chacun, puis nous fit voir quelques dons qui lui ont été offerts et qui ornent sa bibliothèque. Après un moment, il fit apporter des rafraîchissements (un rinfresco)36) et il en prit lui-même. On nous servit dés sorbets, des glaces, des gâteaux et des bonbons. Il avait fait venir, outre les sténographes, deux petits séminaristes de Capranica, ses deux petits neveux.37) Il nous dit alors qu'il voulait nous faire tirer une petite loterie. Les lots étaient disposés sur une table et numérotés. C'étaient des bréviaires, des missels et quelques autres volumes. Il y en avait pour tout le monde. Il donna à ses neveux deux jolies bourses 47 qui contenaient des billets, en leur disant qu'elles seraient pour eux quand elles seraient vides. Nous prîmes chacun un billet gagnant et le Saint-Père nous donnait lui-même l'objet qui nous revenait, en égayant la réunion par les traits d'esprit qui lui sont habituels. J'ai eu en partage un bréviaire en 4 volumes. Après cela, le Saint-Père nous fit voir de nouveau quelques jolis objets qui ornaient sa bibliothèque.38) Il nous montra une gravure représentant la barque de Pierre au milieu des flots tourmentés, et il nous dit: il y a du vent, et la situation ne serait pas sûre si le Padrone di casa venait à s'éloigner, mais il est là.39) Puis il nous congédia. Nous avions passé plus de trois quarts d'heure avec lui. Il nous a bénis, nous et nos familles. Nous som­mes revenus ravis. Nous avions goûté là une des meilleurs joies de notre vie… ».40)

Au 4 juillet, c'était au Collège Romain le grand acte public, ou la soutenance solennelle des thèses ex universa theologia. Mon condisciple et ami Le Tallec (qui devait être jésuite plus tard) s'y préparait depuis deux ans. Le P. Freyd m'avait dit: «J'ai pensé à vous pour cela, mais les fonctions de sténographe vous seront plus intéressantes et 48 plus utiles ».41)

AU LENDEMAIN DE LA DÉFINITION 52

Louis Veuillot rappelait les promoteurs du mouvement ultramontain en France: «C'est pourtant chez La Mennais, en quelque sorte replantée et cultivée de ses mains, que l'on vit reparaître et s'imposer aux intelli­gences cette grande doctrine de l'infaillibilité, qui vient de donner son fruit impérissable.

Joseph de Maistre avait en apparence inutilement combattu. Son livre du Pape tiré à deux cents exemplaires, n'avait trouvé qu'un nombre mi­nime d'approbateurs. Il était couvert par le vacarme stupide du voltai­rianisme triomphant qui le dédaignait 53 et même l'ignorait, et le gallica­nisme, n'en faisant guère plus de cas, déplorait la témérité des esprits aventureux qui s'élevaient contre les «maximes de nos pères». La Mennais vit que ces prétendues «maximes de nos pères» étaient la plaie de l'Église et du monde, et proposa le remède… Il avait créé une école gé­néreuse qui se trouva plus obéissante et par là même plus savante et plus forte que lui. Elle continua de combattre après qu'il eut déserté, et en moins de cinquante. ans elle a vu cette immense victoire.

Aucun des premiers n'étant là, tous sont morts ou durant le combat ou sur le seuil du triomphe, et quelques-uns, hélas! dans le camp con­traire, ayant pour des causes vaines, par des intérêts de popularité, par des illusions et des préventions de leur esprit, abandonné le glorieux drapeau de leur jeunesse… Je vous nomme en courant quelques hommes que j'aurais souhaité de voir ou dans le Concile ou aux portes avec moi, et qui avaient tous mérité cette joie. Là eussent pu se rencontrer Gerbet, Salinis, Charles Sainte-Foi, Rohrbacher même, qui par son grand et beau livre a donné un 54 coup d'épaule si vigoureux… C'est lui qui nous a restitué le Pape dans l'histoire et qui a débrouillé le plan de Dieu… De tous ces jeunes disciples qui s'étaient trouvés autour de La Men­nais dans sa maison de la Chesnaye où Rohrbacher conçut et commença son histoire universelle de l'Église, et où tant d'autres beaux projets fu­rent formés et suivis, un seul, à ma connaissance, se trouvait à Rome et entra dans le Concile, non comme Père, mais comme enfant de chœur. C'est notre bon et vénérable abbé Combalot. Grâce à l'amitié d'un évêque, il fut admis un jour à répondre la messe qui ouvrait les séances du Concile…

[Mon cher] Du Lac… aussi vous auriez dû vous trouver… là entre l'abbé Combalot et le P. d'Alzon, représentant avec eux Salinis et Gerbet et personnifiant la partie laïque de la presse religieuse, qui n'a pas au­jourd'hui de plus ancien, de plus docte et de plus ferme ouvrier…

Un autre journaliste, un autre bon ouvrier de Saint Pierre manquait, c'est M. Bonnetty. Il aurait dû être là avec la vaste collection de ses annales où tant de bonnes armes sont réunies. Et quel chagrin aussi de n'y pas voir le grand évêque Parisis, 55 qui fut le véritable chef de l'es­couade militante contre l'Université; le sincère et paternel cardinal Gous­set, le R. P. Gaultier, tous si fidèles, si constants et si bons et qui tous ont tant appelé ce jour et, par leurs œuvres connues ou ignorées, ils ont tant avancé ! ».42)

TRAVAUX. LECTURES

Le Concile avait pris cette année la moitié de mon temps. C'était un retard pour mes études, mais d'autre part quelle précieuse moisson de connaissances diverses! J'avais touché du doigt la vie de l'Église et acquis en un an plus d'expérience que je n'eusse pu faire en dix ans de mon train de vie ordinaire.

J'ai pu suivre cependant régulièrement les cours de l'après-midi et quelquefois ceux du matin. Je me suis appliqué au droit canon. J'avais passé en novembre ma licence en théologie, que ma santé m'avait obligé de laisser en arrière l'année dernière. J'ai subi le baccalauréat de droit canon en février et la licence le 19 juillet, avant de partir pour les va­cances.

J'avais fait peu de lectures et d'études spéciales dans l'année. Comme lecture spirituelle, j'ai lu les 56 lettres et les entretiens spiri­tuels de St François de Sales, et la vie de Ste Elisabeth par Montalem­bert. J'étais toujours fortement incliné à la vie religieuse.

L'étude de l'Enchiridion de Saint Augustin me révéla mieux qu'au­cune autre lecture l'action de la grâce en nous.

L'étude du droit canon m'apportait la solution de bien des question sociales.

Je préparai mon premier examen dans de Camillis. J'aimais à y lire que «les peuples chrétiens sont des êtres moraux: à l'Église, à Pierre, il appartient de veiller à la moralité de leurs lois, de leur façon de vi­vre. A l'Église il appartient de leur ordonner de fuir le péril prochain de leur foi ou de leur salut, ce péril fût-il leur roi ou leur constitu­tion». - «Le peuple a des devoirs. Il doit obéissance à toutes les auto­rités légitimes. Mais il a aussi des droits, en particulier celui d'être gou­verné avec sagesse et prévoyance». - «Les immunités de l'Église n'ont pas nui à l'État: Les canons ordonnaient à l'Église de secourir la socié­té civile dans le cas de nécessité urgente, et l'Église l'a toujours fait. On en peut lire maints exemples dans Thomassin: De la discipline de L'Église». 57

Je rencontre dans Civiltà (cattolica) des pensées pratiques et qui ne sont pas assez connues, par ex.: «Les maux présents de la société viennent de l'organisation des études. On donne trop dans les études communes aux sciences, aux langues, à un vernis d'érudition, et on ne donne rien à la philosophie, à la morale et à la politique». Il fallait ajouter que même dans les séminaires, la morale sociale et la politique sont étudiés d'une manière trop incomplète (Civiltà, 5 mars 1870).

J'y lis aussi sur la légitimation des gouvernements ces paroles sou­vent applicables de notre temps: «La legittimazione migliore e più chiara, e praticamente l'unica agli occhi dei cattolici conservatori e onesti, è sempre quella che dà la Chiesa, quando in un modo o in un altro riconosce il fatto compiuto. Molte mutazioni politiche, molte ri­voluzioni sono accadute in molti paesi. e quasi dappertutto è giunto il giorno in cui i cattolici credettero esser loro lecito ed ancor doveroso di non pensar più al passato di prender parte alla cosa pubblica e di riconoscere il governo di fatto» (2 av. 70). 58

QUELQUES RELATIONS

Mes fonctions me mettaient chaque jour en rapport soit avec des Pères du Concile soit avec des personnes éminentes de la colonie fran­çaise. Je ne noterai ici que quelques relations plus intimes.

Je voyais souvent Mgr Gignoux, évêque de Beauvais, il me prenait fréquemment dans sa voiture. Il m'édifiait toujours profondément. Il étu­diait ses schemata devant le Saint-Sacrement. Il écrivait chaque jour les actes de son pontificat, il prenait note de toutes les lettres qu'il écrivait. Il perdit son frère pendant le Concile. C'était un prêtre pieux. qui ne passa pas un jour sans faire sa lecture d'Écriture Sainte et sans étudier un peu de théologie. Mgr Gignoux croyait à la prochaine canonisation de Jeanne d'Arc.

Je voyais souvent aussi Mgr Mermillod, qui me témoignait une amitié paternelle. Je lui parlais de mes projets d'avenir.

Je me promenais souvent avec le P. d'Alzon. Il était tout feu pour l'infaillibilité. Il comprenait bien la nécessité de relever, les études en France. Il prévoyait 1a fondation d'Universités libres et voulait se pré­ parer à faire quelque chose à Nîmes. 59 C'était l'objet fréquent de nos con­versations. Il me raconta ses relations avec La Mennais, qui l'empêcha de fonder un séminaire à Rome, il y avait 35 ans. Il s'entretenait de ses projets avec Mgr Manning. Il pensait que le Saint-Siège pourrait avoir des examinateurs qui iraient dans les principaux séminaires d'Europe faire passer des examens pour les grades.

Deux fois je fis une promenade avec le P. d'Alzon et Louis Veuillot. J'allai aussi voir Veuillot chez lui avec l'abbé Dugas qui le connaissait particulièrement. C'était une jouissance de causer avec le grand écrivain. Sa conversation répondait à son style: pensées de foi, vues élevées, esprit gaulois, jugement souvent acerbe sur les personnes.

Mgr Pallu du Parc, évêque de Blois, voulait bien aussi me témoigner quelque amitié. Il m'offrait souvent aussi une place dans sa voiture. A la fin de mai, se trouvant fatigué il alla passer quelques jours à Albano. Il désira me voir pour savoir ce qui se passait au Concile. J'allai dîner avec lui à l'hôtel de Russie et je le mis au courant. 60

Dans cette même excursion je rencontrai l'évêque de Budweis, Mgr Jirsik, suffragant du cardinal Schwarzenberg. Je dînai une fois avec lui. Il fallut tenir conversation en latin. C'était un bon gallican, pieux et zélé, opposant par conscience. Il admirait le grand évêque d'Orléans. Le dernier discours de l'évêque de Paris lui avait beaucoup plu. Il a fait un manuel de théologie en langue tchèque. Ce manuel a été traduit en allemand et en polonais. Il y enseigne le gallicanisme. Il a, dit-il, un excellent clergé, pieux et instruit. Le cours de théologie est chez lui de quatre ans. Ses professeurs de séminaire sont formés à Vienne aux frais du gouvernement.

Je rencontrai dans le train Mgr de Ketteler, il lisait consciencieu­sement la quatrième lettre du P. Gratry.

Pendant l'octave de la Pentecôte, il y a chaque jour des prières pu­bliques dans quelque grande église en faveur du Concile. Le dimanche, c'est à Saint-Jean de Latran, le lundi à Saint-Pierre, le mardi à Sainte-­Marie Majeure, le mercredi à Saint-Charles au Corso, le jeudi à Saint­André, le vendredi au Gesù, le samedi à la Chiesa Nuova. Rome a un grand aspect pendant cette octave. Les 61 ordres religieux, les confréries d'hommes et de femmes se rendent aux sanctuaires en procession et en chantant. La foi du peuple romain et ses habitudes chrétiennes se ma­nifestent. Ces pèlerinages me sont l'occasion de rencontres intéressantes.

Le dimanche j'allai à Saint-Jean de Latran avec Mgr de Beauvais. Il me parla avec émotion de la vie édifiante de son frère, qu'il venait de per­dre. Il me disait que les articles de L'Univers des jours précédents lui avaient paru bien insignifiants, sauf celui sur l'unanimité morale.

Le lundi j'allai à Saint-Pierre avec le P. d'Alzon, Louis Veuillot, Mgr Sohier, évêque de Hué et Mgr Dépommier. Mgr Sohier a dû se tenir caché pendant dix-neuf ans et maintenant il est très honoré du souverain lui-même. Ah! si notre gouvernement savait s'appuyer aux colonies sur nos missionnaires!

J'allai le mercredi à Saint-André avec Mgr Mermillod. Il me parla du projet d'une Université catholique à Lille, dont on commençait à s'occuper.

Le samedi, j'assiste à l'ordination de quelques-uns de mes bons con­disciples. Le P. Dorvan me raconte que Mgr Maret et Mgr Thomas sont allés trouver Mgr Pie et menacent 62 de regarder le décret du Concile com­me une simple constitution papale si on passe par-dessus une opposition d'une centaine d'évêques.

NOTES PERSONNELLES

Malgré mes occupations, je trouvai chaque jour quelques instants pour noter les impressions de mon oraison, selon le conseil de S. Louis de Gonzague: Notabo affectiones et proposita. Je les copie ici; c'est pour moi la meilleure lecture spirituelle. Ce sont les grâces du com­mencement, dont le souvenir embaume toute ma vie.

3 nov. Mon Dieu qui avez transformé les passions de Paul, d'Augus­tin et de Jérôme en de saintes et ardentes affections, purifiez les ardeurs de mon cœur et transformez les en un brûlant amour pour vous. Donnez-moi une douce gravité dans la conversation et maintenez-moi dans l'esprit d'oraison.

4 nov. Spiritu serviamus Christo (cf. Rm 7,6). Servons le Christ en esprit, entrons dans son esprit, dans l'esprit de sa loi qu'il développe au sermon sur la montagne. Gardons, non l'apparence pharisaïque, mais la vérité de la loi. Conformons à son esprit non seulement nos actes, mais notre cœur, et si nous aimons véritablement N.-S., allons au-delà de ses préceptes et entrons dans l'esprit de ses conseils.

5 nov. Initium sapientiae timor Domini (Ps 110, 10). Il faut com­mencer par la crainte, par le raisonnement, 63 par le calcul: Haec arbi tratus sum propter Christum detrimenta (Ph 3,7). Il faut compter d'a­bord: Leve pondus tribulationis ingens (aeternum) gloriae pondus ope­ratur (cf. 2 Cor 4,17). Mais ensuite il faut aimer: Finis omnium chari­tas (cf. 1 Tm 1,5). Il faut aimer Jésus, seul beau, seul aimable, Jésus qui nous a tant aimés. Omnia arbitror ut stercora ut Christum lucrifa­ciam (Ph 3,8).

6 nov. C'est dans le Christ seul et dans la ressemblance avec lui que St Paul met sa confiance. Et inveniar in illo… per societatem passio­num illius, configuratus morti ejus (cf. Ph 3,9-10). Augmentez ma foi, Seigneur, et ma confiance. La confiance surnaturelle exclut les petits calculs de la prudence humaine.

7 nov. Opposons à nos passions la beauté incomparable, seule di­gne, seule attrayante de Jésus. Pour la composition de notre exté­rieur et de notre intérieur, tenons-nous sous le regard de Dieu. Pour nous fortifier dans la patience et la mortification, comparons le ciel et la terre: Leve tribulationis (pondus) ingens (aeternum) gloriae pondus operatur (cf. 2 Cor 4,17).

8 nov. Manent fides, spes, charitas (1 Cor 13,13). Il y a la crainte, l'espérance et l'amour. Mais le plus fort de tous les mobiles est l'a­mour: Fortis est ut mors dilectio (Cn 8,6). Seigneur Jésus, comment oublierais-je un instant votre 64 amour? Vous m'attendez à la porte de l'éternité pour me recevoir et me dire: Euge serve bone (Mt 21,25); et en attendant vous vous donnez à moi dans l'Eucharistie: Venite ad me omnes (Mt 11,28). Quis nos separabit a charitate Christi? (Rm 8, 35).

9 nov. Multi.. ambulant, quos… flens dico, inimicos crucis Christi (Ph 3,18). La voie est dans le renoncement et l'humble soumission à la volonté de Dieu, avec une entière confiance en sa Providence. - Je vous rends grâces, o mon Dieu, qui me permettez une si grande fami­liarité et intimité avec votre divin Fils. Vous nous ouvrez son palais qui est l'Eglise, les lieux où il a vécu et son Cœur même. Merci!

10 nov. Christus sacerdos et vittima. A l'autel, nous agissons au nom du Christ: Sacerdos alter Christus. Ce qu'il nous donne le pouvoir de faire en son nom, ce n'est pas seulement d'instruire le peuple, ce n'est pas de guérir les malades ou de ressusciter les morts, c'est plus que tout cela, c'est de l'offrir lui-même à son Père avec les mérites infi­nis de la Rédemption. Quelle gravité, quelle sainteté, quelle union avec N.-S. ce ministère n'exige-t-il pas!

11 nov. Conversatio nostra in caelis est (cf. Ph 3,20). Notre conver­sation doit être avec Dieu et avec les saints. C'est notre plus grand in­ térêt; c'est la vie que 65 nous devons continuer pendant l'éternité. C'est le moyen de nous rendre moins indignes de converser avec Dieu si fa­milièrement à l'autel.

12 nov. Le grand acte de la journée du prêtre, c'est le Saint Sacrifi­ce. Sa préoccupation continuelle doit-être de plaire à Dieu et au Sei­gneur Jésus. Marie n'avait pas d'autre pensée. Le grand acte de la Ré­demption absorbait toute son âme.

13 nov. Mon Dieu, si vous m'avez éprouvé par quelque maladie, par quelque retard dans mes études et quelque difficulté dans l'avance­ment spirituel, c'est pour ménager mon amour-propre et pour mon plus grand bien. Que votre saint nom soit béni!

14 nov. Constituite… ut evellas… et aedifices et plantes (Jr 1,10). Il faut se mettre à la besogne et tailler les rejetons du vieil homme, et bâtir d'après un plan arrêté et revoir tous les jours ses comptes. Quand une pratique négligée est la cause du retour d'une ancienne misère, il faut reprendre énergiquement cette pieuse habitude.

15 nov. Dominus prope est. Modestia vestra nota sit omnibus homi­nibus (Ph 4,5). Tenons-nous toujours devant Dieu et près de Dieu. 66 Il est proche. Et le temps est rapide et nous allons paraître devant Dieu pour l'éternité. Tout ce qui nous arrive est pour notre plus grand bien. Nihil solliciti sitis (Ph 4,6). Prions seulement.

16 nov. Les grandes grâces de l'ordination au sacerdoce sont un profond enseignement. Cet amour ardent, cette ferveur, cette paix (quae exuperat omnem sensum (Ph 4,7), Dieu nous les donne parce que nous y préparons par un profond recueillement et que nous affir­mons franchement notre volonté d'être à lui. En d'autres temps, tout conspire, et le monde spécialement, à nous faire descendre au niveau de la tiédeur commune. Renouvelons les dispositions d'alors et nous en retrouverons les grâces.

17 nov. Mon Sauveur Jésus, vous avez terrassé St Paul et il fut con­verti. Vous faites plus que me terrasser chaque jour, vous me relevez et vous m'admettez à votre embrassement sacré. Confirmez ma foi et mon amour. Je veux vous servir promptement et sans jamais hésiter, c'est en cela que S. François de Sales place la dévotion. Je ne m'in­quièterai pas des autres vous êtes mon seul Maître.

18 nov. Notre Seigneur veut bien nous admettre chaque matin à ses chastes noces. Il veut 67 bien regarder comme sien notre corps honoré du contact de son corps sacré. Et erunt duo in carne una (Gn 2,24)

Et nous sommes Ex ossibus ejus et carne ejus; membra corporis ejus (cf. Gn 2,23; Eph 5,30).

19 nov. Enseignez moi, Seigneur, à aimer les hommes comme vous les avez aimés, pour la plus grande gloire de votre Père. Notre charité ici (au séminaire) doit être grande dans la prière, grande dans notre propre sanctification, grande dans le travail.

20 nov. Quae didicistis et accepistis, … haec agite (ad Philip. IV, 9). Ce que vous avez compris, ce que vous avez senti quand la grâce de Dieu abondait en vous, mettez-le en œuvre, accomplissez-le à chaque instant, avec foi et crainte, avec espérance, mais surtout avec amour.

21 nov. Marie, notre modèle, a perfectionné jusqu'au Calvaire son union avec Dieu. Mon Dieu resserrez mon union avec vous, commen­cée plus intimement avec la tonsure, sanctionnée au Sous-diaconat et consommée dans le sacerdoce.

23 nov. Mon Dieu, augmentez ma foi et mon amour. Quel acte di­vin! Nous sommes là, à l'autel, les interprètes de la Sainte-Trinité qui nous donne le Rédempteur, du Christ qui s'offre à son Père, de l'Eglise, 68 de l'humanité et de tous ses besoins. Pouvons nous passer au mi­lieu d'une telle fournaise d'amour sans en être embrasés! Seigneur, ac­cordez moi de vous bien traiter à l'autel et de vivre dans la vérité de ma foi.

24 nov. Je m'unis, o mon Sauveur, aux larmes que vous avez versées sur moi, dans vos longues nuits d'oraison et surtout à Gethsémani. Mon Dieu, quelle dégradation! que de gloire perdue! que de misères amoncelées dans ma vie passée!

25 nov. Le Saint Sacrifice offert, même une seule fois, n'est-il pas capable de nous transformer! Les grâces de Dieu n'y ont d'autres limi­tes que nos dispositions. Que n'y sommes-nous consommés dans l'a­mour, comme les Saints dans leurs extases!

26 nov. Hoc sentite quod et in Christo Jesu (Ph 2,5). Votre amour filial pour votre Père, o mon Sauveur, a compris l'horreur que doivent inspirer les péchés des hommes, qui oubliaient et injuriaient votre Pè­re pour jouir d'un vil plaisir ou éviter un peu de peine; et vous avez désiré souffrir infiniment pour montrer à votre Père que vous estimez toutes choses comme rien en comparaison de son honneur; et vous vous êtes abaissé infiniment (exinanivit semetipsum (Ph 2,7)), et vous avez voulu souffrir toutes les douleurs possibles. 69 Et votre Père nous a pardonné et nous a comblés de grâces en se voyant si bien honoré par l'un de nous. Exauditus est propter suam reverentiam (Heb 5;7). Et il vous a exaucé en nous sauvant: Propter nos et propter nostram salutem.

27 nov. Mon Dieu, quelle ne doit pas être l'union du prêtre avec Vous! Il est votre représentant, le médiateur entre votre Père et vous, entre les hommes et la Sainte-Trinité. Son cœur doit être un abîme d'amour, de prière, de miséricorde, de pénitence.

28 nov. Entrons dans les sentiments dans lesquels N.-S. s'est offert à son Père comme victime. Hoc sentite quod et in Christo Jesu (Ph 2, 5).

29 nov. Exemplum esto fidelium… in fide (1 Tim. IV, 12). Mon Dieu, accordez-moi la grâce d'apprécier avec une foi vive, ce que je fais dans la prière, dans le Saint Sacrifice et dans tous mes rapports avec vous.

30 nov. Mon Dieu, les grâces que vous m'avez accordées pendant cette année ecclésiastique auraient suffi pour me transformer mille fois en vous. Ne me laissez plus déchoir de l'union avec vous, à la­quelle vous me conviez chaque jour avec tant d'amour. Que je comprenne l'amour de la croix, comme S. André et que je voie les choses en vous! Qu'il me 70 suffise, o mon Sauveur, pour m'entretenir dans votre amour, de considérer qu'à chaque instant de ma vie vous offrez a­vec amour à votre Père et avec tous vos Saints, votre Passion pour mon salut!

1er décembre. Mon Dieu, faites que je ne me laisse pas préoccupé par ce qui m'entoure! Que j'adore votre Majesté infinie que je ne vois pas! Que j'aime l'amour infini qui m'est présent et invisible! Que je n'oublie pas que chaque instant a une importance capitale pour l'é­ternité!

2 déc. Au Saint Sacrifice, comme au Calvaire, la toute-puissance et la miséricorde infinie de Dieu le Père nous donnent, pour nous rache­ter, le Sauveur (quia in ipso complacuit omnem plenitudinem inhabita­re et per eum reconciliare omnia in ipsum (Col 1,19-20)). L'Esprit Saint y est aussi présent et agissant (ex voluntate Patris, cooperante Spiritu Sancto). Quel mystère redoutable! Quelle majesté sur nos hum­bles autels!

3 déc. Quel amour! Dieu nous a donné la vie de son Fils pour nous racheter: Reconciliavit in corpore carnis ejus per mortem exhibere nos sanctos (Col 1,22). Notre cœur était loin de lui: Inimici sensu in operibus malis (Col 1,21). Ayons foi comme les Saints et nous serons tout-puissants. Comme S. François Xavier, nous glorifierons Dieu 71 et nous sauverons nos frères.

4 déc. Le Concile est une nouvelle manifestation de N.-S. enseignant par son Esprit. L'esprit de l'Eglise pendant le Concile doit être confor­me à celui avec lequel est venu N.-S. C'est un esprit d'anéantissement et de douleurs à la vue des péchés des hommes. L'Eglise doit aussi se tenir dans un esprit de recueillement et de pureté, pour recevoir la pa­role de Dieu, l'action du St-Esprit illuminant et inspirant. Elle doit en­fin croître en amour à la vue d'un nouveau et immense bienfait et en union avec l'Esprit d'amour.

6 déc. Mon Dieu, le monde est affamé de paix, de foi, de religion. Ramenez-le dans vos sentiers. Eclairez les nations sur ce qu'elles vous doivent. Fortifiez l'unité et l'autorité de l'Eglise, en affermissant l'au­torité de votre Vicaire sur la terre.

7 déc. Instructi in charitate, in omnes divitias plenitudinis intellec­tus (Col 11, 2): Là sont les vraies richesses, dans l'amour et dans la connaissance du mystère divin, du mystère de la Rédemption, mystè­re conçu éternellement, accompli au Calvaire, renouvelé sur nos autels: In agnitionem mysterii Dei Patris et (Christi) Jesu, in quo sunt omnes thesauri sapientiae et 72 scientiae absconditi (Col 2,2-3).

8 déc. Faiblesse et force de l'Eglise de Dieu: faiblesse par elle-même, imperfection, obscurité; force en Dieu, stabilité, lumière, vie, quand el­le est appuyée sur la pierre angulaire qui est le Christ et sur ses fonde­ments qui sont les apôtres. Intime union de l'Eglise du ciel et de celle de la terre. Elles se contemplent et vivent l'une avec l'autre pour Dieu. Vivante image de cette union dans les litanies des Saints dites par le Concile. Comme la foi de Pie IX est admirable et sensible dans ses prières!

9 déc. Combien est sensible dans l'agitation de ces jours-ci la solidi­té du roc qui est Pierre. Tout ce qui s'agite hors de lui, s'agite dans les ténèbres. Tout ce qui n'est pas édifié sur lui est bâti sur le sable. Tous les évêque réunis composent un édifice indestructible, mais alors seu­lement qu'il est bâti sur le roc …

11 déc. Vous seul, ô mon Sauveur, pouvez rassasier notre cœur al­téré d'amour et de perfection: Et estis in illo repleti (Col II, 10). Tout le reste est vide: Omnia vanitas (Ec 1,2). Vous seul êtes toujours aimable.

12 déc. Vous avez tout fait, Seigneur, pour gagner nos cœurs. Vous n'avez pas voulu que nous 73 agissions sans mérite, mais vous avez en­touré notre volonté de tous les secours les plus puissants, grâces exté­rieures et intérieures, de l'intelligence, des sens, de la volonté. Vous vous étés donné vous-même.

13 déc. Praecipio tibi coram Deo Patri qui vivificat omnia et (Do­mino) Jesu Christo qui testimonium dedit sub Pontio Pilato, bonam confessionem. Je t'ordonne à toi, à tes successeurs (Usque in adven­tum Christi) et, proportion gardée, aux prêtres, devant Dieu qui donne la vie et la mort, Ut serves mandata (mandatum) (1 Tim. VI, 13-14), que tu conserves le dépôt de la foi et que tu. vives selon la foi.

14 déc. La perfection demande l'esprit de pauvreté, l'esprit d'obéis­sance, l'esprit de chasteté. Par là nous coupons les racines de la concu­piscence et nous nous donnons tout entier à Dieu. Cet esprit est celui de tous les Saints, qu'ils se soient ou non aidés d'une règle pour la pra­tiquer. II doit être celui de tous les prêtres, parce qu'il est éminem­ment celui de J.-C. dont ils se nourrissent chaque jour…

16 déc. O mon Sauveur, je veux que tout mon bonheur soit de vous voir aimé et de vous faire aimer. Je voudrais que toute la vie de la ter­re et toutes ses puissances, peuples, rois, sciences, arts, vous soient consacrés et glorifient 74 votre nom. Imprimez ces sentiments dans mon cœur et faites que je m'oublie moi-mème pour ne m'occuper que de votre gloire.

17 déc. Ignem veni mittere, quid volo nisi ut accendatur (Luc XII, 49). Je suis venu apporter le feu du zèle et de la charité et ce feu me dévore et je brûle du désir de donner ma vie pour les âmes: Baptismo habeo baptizari et quomodo coarctor usquedum perficiatur (Lc 12, 50). Mon cœur est à l'étroit dans ma poitrine jusqu'à ce qu'il soit ou­vert et qu'il ait versé son sang.

18 déc. Quels solennels instants que ceux du Saint Sacrifice! C'est un entretien avec l'infinie majesté de Dieu le Père. C'est une offrande infinie qui lui est faite. C'est une prière toute-puissante qui lui est a­dressée. Oh! si nous voyions ce qui est fait à l'autel, nous défaillerons d'amour.

19 déc. Quel beau jour c'était, il y a un an, et pourquoi ne l'ai-je pas renouvelé tous les jours depuis lors! Modicae fidei, quare dubitasti? (Mt 14,31). Je n'ai pas eu, Seigneur, assez de foi en vous. J'ai oublié que j'étais votre ami: Jam non dicam vos servos (Jo 15,15), et je me suis encore attaché aux créatures. Permettez-moi, Seigneur, de mar­cher à vos 75 côtés et de ne plus voir les choses qu'en vous. Renouvelez mon âme aujourd'hui. Ne, permettez plus que je souille par mes fautes la belle robe du Sacerdoce dont vous m'avez revêtu.

20 déc. Vita vestra abscondita est cum Christo in Deo (Col III, 3). Au ciel est notre vie, c'est là qu'il faut la puiser. C'est là qu'est notre amour, notre lumière, notre force …

22 déc. Seigneur, vous venez à moi au Saint Sacrifice chargé des grâ­ces que votre Père accorde à vos infinis mérites et aux prières de tous les Saints! Vous nous apportez des grâces pour toute l'Eglise. Accor­dez lui celle de dominer la politique, la science et la liberté révoltées contre elle.

23 déc. Seigneur, le désir que j'ai de me sanctifier et de sanctifier les miens n'est rien, le désir qu'ont les Saints de procurer la sanctification du monde n'est rien non plus en comparaison du brûlant désir de votre Cœur pour notre sanctification. Disposez mon cœur, Seigneur, par votre toute-puissance, afin qu'il soit capable de recevoir les grandes grâces que vous lui apportez.

24 déc. Quelle sublime rencontre! Mon Sauveur vient à moi avec son éternel 76 amour, son ardent désir de posséder mon âme, sa brûlante affection qu'il exprime au Cantique des cantiques, le zèle de sa Passion et de sa mort, les dons dont les Saints l'ont chargé pour moi… Avec quel amour ne dois-je pas aller à lui, avec quelle reconnaissance, avec quelle compassion pour ses douleurs!

25 déc. O mon Sauveur, l'amour avec lequel St Jean cherche sur la montagne le jeune homme qu'il aimait n'est qu'une ombre de votre a­mour pour nos âmes. Vous avez tout fait pour nous attacher à vous: vous avez pris les charmes de l'enfance, l'autorité de l'enseignement, l'attraction du dévouement jusqu'à la mort. Vous nous avez tout pro­mis et tout donné, et vous vous donnez tous les jours, avec quelle ten­dresse! Donnez moi votre Cœur pour vous aimer et aimer les âmes, et aussi pour aimer le bien de ma patrie. Elle est aimable comme le jeune disciple de St Jean, parce qu'elle a été belle dans sa jeunesse et qu'elle était la fille aînée de l'Eglise. Elle s'est laissée entraînée et elle est allée avec les voleurs. Donnez à ses prêtres le zèle de St Jean pour la recher­cher et la ramener,

26 déc. Mon Sauveur Jésus qui avez une 77 prédilection particulière pour vos prêtres à qui vous vous donnez tous les matins avec tant d'a­mour, donnez nous en abondance votre Esprit comme à St Etienne. Vivez en nous dans les mystères de votre enfance, dans l'humilité, la douceur, l'innocence, la soumission.

27 déc. Le prêtre au Saint Sacrifice n'est-il pas comme élevé entre le ciel et la terre? N'est-il pas entouré de milliers d'anges qui admirent son bonheur? N'est-il pas l'objet de la sollicitude de Marie, de Joseph et de tous les Saints qui désirent le voir bien traiter leur Dieu? Quelle grandeur dans quel néant! Quel amour! Les prêtres sont, comme Jean, ceux que Jésus aime, et Jésus aima Jean parce qu'il était pur, vierge, aimant. Il est toujours également vrai que nous sommes les temples du Saint-Esprit et les membres du Corps mystique de N.-S. N.-S. renouvelle et confirme chaque jour son alliance avec nous. Nous ne pouvons vivre qu'en sa sainte volonté et en la pureté qui convient aux membres de son corps sacré.

29 déc. Mon Dieu, par l'intercession de S. Thomas de Cantorbéry, accordez-nous le 78 retour de la société civile à la vérité. Que tout vous soit soumis comme tout doit l'être. Entretenez dans mon Cœur le soin délicat d'éviter toute souillure quelle qu'elle soit.

30 déc. Nous sommes vos bien-aimés, Seigneur: Induite vos sicut eletti Dei, sancti, diletti (Col III, 12). Que ce soit notre seule gloire et que nous sachions vous sacrifier tout ce qui est périssable et vain!

31 déc. Mon Dieu, l'année qui vient de s'écouler a été pour moi très abondante en grâces. Merci! J'aurais dû la passer dans la plus pure union avec vous et j'ai trop souvent laissé renaître l'inextinguible con­cupiscence. Pardonnez-moi. Fortifiez-moi pour l'avenir.

1er janvier. Seigneur, votre bonté nous a préparé de grandes grâces pour cette année. Répandez vos bienfaits sur l'Eglise, sur les peuples, sur les miens, sur votre enfant. Je souhaite que votre règne arrive.

2 janv. Vous avez aimé la souffrance, Seigneur, et la contradiction pour la gloire de votre Père et pour notre salut: Praecepit ne cui dice­rent, hoc dicens: quia oportet 79 Filium hominis multa pati et reproba ri et occidi (Matt. XVI) (cf. Mt 16,20-21; Lc 9,21-22). Si nous vous imitons, nous serons couronnés avez vous: Dicebat auteur ad omnes:si quis vult post me venire.. tollat crucem suam quotidie… qui me erubuerit, erubescam eum (Luc IX) (cf. Lc 9,23.26).

3 janv. Dans votre gloire même, Seigneur, vous êtes préoccupé de notre salut: Dicebant excessum… quem completurus erat in Jerusalem (Luc IX, 31). Comment notre cœur ne repondrait-il pas au vôtre? Sic nos amantem, quis non redamaret?

4 janv. Omnia et omnibus in Christo (Col III, 1.0). Il nous suffit, Seigneur, de vous voir sans cesse pour marcher droit. Vous nous ap­pelez au bien comme rémunérateur; vous nous éloignez du mal com­me juge; et vous gagnez notre cœur comme Père, ami, frère, époux. Augmentez en moi cette vie surnaturelle en vous, augmentez surtout mon amour: Super omnia charitas, vinculum perfectionis (cf. Col 3, 14).

5 janv. L'union avec vous, ô mon Dieu, devrait être facile après les grâces du Saint Sacrifice. Elle doit être continue, sans calcul. Elle doit être réveillée par la prière, l'oraison, l'examen. 80

Les bergers viennent dans leur pauvreté figurer à Bethléem la synagogue qui finit, et les mages, dans leur richesse, la gentilité qui va rece­voir les faveurs de Dieu.

Que votre règne arrive, ô mon Dieu, parmi ces nations si éloignées de vous!

8 janv. Eternité! Éternité! Quelle folie de s arrêter à une autre pen­sée! Pour chaque acte de vertu, nous jouirons mieux de Dieu pour l'éternité! Pour chaque acte de négligence, nous perdrons quelque cho­se de son amour pendant l'éternité. Ne perdons pas de temps à criti­quer autrui. Laissons la sollicitude à qui de droit: Qui praeest in solli­citudine (Rom XII, 8). Réformons nous sans cesse.

9 janv. Oportet sapere… ad sobrietatem… Omnia… membra non eundem actum habent (Rom XII, 3-4). Laissons de côté toute sollici­tude inutile pour bien faire ce que Dieu veut de nous. (Reformamini in novitate sensus veltri, ut probetis quae sît voluntas Dei bona et bene­placens et perfecta) (Ibid., 12,2).

10 janv. Votre enfance, Seigneur, n'avait pas de grandeur apparente, mais sous la voile de votre humilité, il y avait votre majesté, votre puis­sance, votre amour. De même sous les espèces eucharistiques à 81 l'au­tel, j'ai véritablement devant moi et en moi votre puissance et votre amour.

11 janv. Mon Dieu, c'est vous même, l'infini, l'éternel; vous, dont toute la création n'est qu'une faible manifestation, qui venez à moi à l'autel; c'est vous dont toutes les merveilles créées ne sont que l'om­bre. C'est vous, ô mon Sauveur, qui êtes descendu du ciel, vous qui é­tiez au Cénacle et au Calvaire, vous qui sanctifiez et vivifiez l'Église, c'est vous qui vous donnez à moi. Combien je suis riche pour honorer votre Père et pour enrichir les vivants et les morts!

12 janv. Après votre entrée triomphale eu ciel; Seigneur, vous dai­gnez encore venir à nous, vous, devant qui il a été dit: Elevamini, por­tae aeternales et introibit rex gloriae, … Dominus virtutum, … Domi­nus potens in praelio (Ps 23,8-10).

13 janv. Servi inutiles sumus (Luc XVII, 10). L'Église n'a pas besoin des hommes. Faisons ce qu'elle demande de nous par nos supérieurs, avec la persuasion que nous sommes des serviteurs inutiles. Faisons bien ce que nous avons à faire, sans songer à l'avenir.

14 janv. Puisse-je Seigneur, pratiquer toute ma vie les vertus de vo­tre aimable enfance! Comme vous étiez doux et fort 82 en même temps! obéissant et actif! Quelle délicieuse vie que celle de Marie et de Joseph auprès de vous!

15 janv. Quel bel hommage vous est justement rendu, o mon Dieu, par les créatures! Tout ce qu'il y a de pur et d'élevé sur la terre vous loue! et les impies eux-mêmes sont contraints de se rapprocher de vous aux meilleurs moments de leur vie!…

18 janv. Quel grand acte que le Saint Sacrifice! Entre Dieu et le prêtre se partage le monde. Dans le cœur du prêtre est le monde qui souffre, qui supplie, qui adore; dans le Cœur de Jésus est tout le ciel qui bénit. Tous nos amis du ciel chargent Jésus de nous apporter leurs dons…

21 janv. Quelle force admirable dans sainte Agnès! Unissons nous aux élans d'amour de ces saints. Récitons avec eux les psaumes, les prières de la liturgie, les noms de Jésus et de Marie.

22 janv. C'est vous, Seigneur, le même qui êtes plein de vie, de puis­sance et de gloire dans le ciel, vous que tout le ciel adore et prie pour le salut de votre Eglise; c'est vous qui venez vous donner à nous, vous offrir à votre Père avec une prière toute-puissante. 83

23 janv. Desponsatio est B.M.V. Ce sont les épousailles de Marie, notre mère. Réjouissons nous avec notre frère Jésus. Marie qui s'était consacrée au temple a été conduite au mariage par la volonté de Dieu; rendons grâces à Dieu avec elle d'avoir été amenés à Rome à la source de 1a vérité et loin des préjugés et des passions qui entraînent dans l'erreur les hommes les plus éminents de notre France.

24 janv. O Eglise catholique, que tu es aimable! Tu es née du côté de mon Sauveur, comme Eve du côté d'Adam; et le Christ a dit de toi: L'os de mes os et la chair de ma chair (cf. Gn 2,23). Tu es aimable de l'amabilité du Christ, ton chef, et de tous les Saints, tes membres. Tu as toutes les grandeurs, toutes les tendances au bien, toutes les pure­tés. Tous les efforts de la nature aidée par la grâce pour reconquérir la noblesse de sa création sont ton œuvre.

25 janv. Saint Paul, obtenez nous quelque chose de ce zèle que vous aviez pour glorifier le nom du Sauveur Jésus. Vous viviez de sa grâce et de son amour et vous étiez dans sa main un instrument docile. Ob­tenez moi la même grâce dans la proportion des desseins de Dieu sur moi.

26 janv. Jerusalem, Jerusalem, … quoties volui congregare filios tuos! (Lc 13,34). Seigneur, que de fois 84 dans votre tendresse vous a­vez voulu réunir à votre service toutes mes forces et mes facultés et cela pour mon bonheur. Compelle me intrare (cf. Lc 14,23).

27 janv. Nous vivons en Dieu, en sa grâce, en son Esprit-Saint, nous nous mouvons avec Lui et pour Lui, il faut régler en conséquence no­tre maintien et nos actions…

2 fév. Quelle belle fête ce fut dans la sainte famille que ces relevail­les! Comme Marie confirma son attachement à la pureté! et comme elle croissait en grâce et en charité pour se préparer à devenir la mère de l'Église naissante! Jésus s'offrait à son Père avec toutes ses épreuves et celles des siens, tant de peuples, tant d'âmes sanctifiées, tant de vic­toires remportées par chaque âme.

4 fév. Ce qui doit le plus nourrir notre pensée, notre foi, avec les mystères du Sauveur, c'est sa vie eucharistique, sa vie dans l'Église, son Corps mystique. Nous avons encore présentes les merveilles de l'An­cien Testament, nous repassons chaque année les mystères de la vie de Notre-Seigneur et nous avons derrière nous et autour de nous sa vie Eucharistique et sa vie dans l'Église, et nous sommés déjà à la porte de l'Éternité. Que de lumières et que de grâces!

6 fév. Electi Dei, sancti, diletti (Col III, 12). Vous m'avez considéré de toute éternité, ô mon 85 Dieu, et vous m'avez aimé; vous avez désiré ma sanctification et vous voyez avec déplaisir toutes les taches de ma vie. Aidez-moi, sanctifiez-moi, ne m'abandonnez pas. C'est au temple, Seigneur, que l'on vous trouve; c'est dans l'oraison, le recueillement, le silence et la séparation d'avec les créatures. C'est dans mille petits sacrifices que vous récompensez.

8 fëv. Justice et vérité. Se tenir comme il est juste, devant Dieu, dans l'oraison, à l'autel. Devant le prochain, l'estimant, le respectant, ne nous préférant pas à lui, ne parlant pas de nous, n'aimant dans les hommes que ce qui est selon Dieu et dans l'ordre que Dieu veut.

9 fév. Soyez en tout mon modèle, ô mon Sauveur! Que je vous voie sans cesse auprès de moi, m'indiquant la volé, la vérité! Que je me con­forme à votre modestie et à vos saintes affections.

10 fév. Ce n'est pas pour trouver de la douceur dans la piété qu'il faut vous aimer, Seigneur, mais parce que vous êtes infiniment aimable et le plus généreux dés bienfaiteurs. - Il ne faut pas chercher dans l'amitié des hommes un plaisir sensible, mais leur salut et le nôtre.

11 fév. La dignité du prêtre est immense 86 et les secours qu'il reçoit sont en proportion; mais il ne peut y correspondre que par la voie tracée par les Saints, voie du recueillement, de la mortification, de la paix.

12 fév. Il faut que toutes nos affections soient surnaturalisées, et el­les le seront si, en elles, nous ne cherchons que le salut des âmes, leur amélioration, leur union à Dieu, la paix surnaturelle et la gloire de Dieu…

15 fév. Exauditus est pro sua reverentia (Heb 5,7). Combien la priè­re est nécessaire, précieuse, sainte! Vous nous l'avez enseignée, Sei­gneur, verbo et exemplo. Vous- passiez de longues nuits dans ce saint exercice, cum clamore valido et (multis) lacrymis (Heb 5,7), et vous étiez exaucé. Donnez nous l'esprit de prière.

16 fév. Quelles saintes fonctions, que nous envient les anges, de trai­ter si familièrement avec notre Dieu! Les anges l'adorent et nous nous entretenons avec lui, nous lui exposons tous nos besoins et toutes les prières de nos amis, et nous ne faisons presque qu'un corps et une âme avec lui.

17 fév. Pour être uni à Dieu à l'autel, il faut l'être dans la journée par le recueillement et la vue des choses en Dieu. Il faut à chaque ins­tant faire la volonté dé Dieu, chercher sa gloire et le salut des âmes. 87

18 ,fév. Comme le prêtre devrait reproduire la vie de N.-S.! II le représente, il s'en nourrit. Par cette vie seule il travaille pour l'éternité. Tout le reste est vanité. Et il s'expose à tomber si bas! Optimi cujus­ que pessima corruptio.

19 fëv. Saint Paul, vous qui aimiez tant N.-S. et ne pouviez vous rassetier de dire son nom si doux, obtenez nous la grâce de ne pas nous arrêter dans le stade, mais de courir comme vous, Ut comprehenda­mus (cf. Ph 3,12).

19 mars. Les Saints sont nos vrais amis. Que de grâces, que de tré­sors au ciel nous leur devons, par leurs exemples, leur intercession! Chercher des amis et des trésors hors de Dieu, c'est une folie…

N.-S. a Ste Gertrude: «Je songe sans cesse en moi-même avec plaisir à toutes les marques particulières de tendresse que vous m'avez don­nées sur la terre, et je me prépare avec soin à les récompenser dans la gloire, selon la liberalité royale de ma toute-puissance, de ma sagesse et de ma miséricorde, par des témoignages de charité et de douceur mul­tipliés au centuple» (Le Héraut de l'amour divin. Révélations de Sainte Gertrude. Livre III, chap. XLVII). 88

Le Curé d'Ars pleurait en disant: «Dieu a fait les oiseaux pour chan­ter et ils chantent; il a fait les hommes pour l'aimer et ils ne l'aiment pas».

20 mars. Comme nous sommes puissants en donnant à Dieu et aux Saints dés marques d'affection! Ils nous les rendront au centuple dès cette vie et ils viendront au devant de nous à notre mort pour nous choyer au ciel.

21 mars. Aujourd'hui St Benoît et son innombrable famille se ré­jouissent au ciel et sur la terre. Quelle puissante intercession! Combien de pontifes, d'apôtres et de saints religieux qui ont gagné le Cœur de N.-S. et qui vont obtenir ses bienfaits pour l'Eglise! Grand saint, rani­mez dans nos cœurs l'amour de N.-S. et le détachement de la terre!

24 mars. Seigneur, votre Cœur est sans oubli ni défaillance. Tou­jours dans la vision de l'amour, vous nous désirez, vous nous aimez, vous nous attirez. Vous gémissez de nos faiblesses et voudriez nous retenir dans une sainte union avec vous.

27 mars. Secessit in solitudinem: exiens vidit turbas et misertus est super eas (cf. Lc 9,10; Mt 9,36). Vous aimiez, Seigneur, la solitude et vous y exerciez vos apôtres. Le prêtre doit se tenir dans la 89 solitude, dans celle du corps, de l'esprit et du courr. C'est la source et la sauvegarde de la pureté, de la science, de l'union avec Dieu, de la grâce, de la vie surnaturelle. - Vous considérâtes la foule. Le prêtre aussi doit al­ler à elle, lui porter les fruits de sa solitude et de son recueillement, considérer tous ses besoins, toutes ses plaies, tous ses dangers. Et vous eûtes pitié et vous l'avez rassasiée par le pain qui figure l'Eucharistie. Le prêtre aussi doit avoir pour les âmes des entrailles de père. Il leur donne le pain des anges. Quelle sainte et sublime fonction! Il faut s'y préparer sans cesse par le recueillement et la prière…

C'est la croix qui triomphe du monde. Les œuvres sont fécondées par la mortification et le sacrifice.

28 mars. Seigneur, répandez abondamment vos dons sur les âmes de la terre et du purgatoire. Donnez nous des Saints afin que vous soyez glorifiés.

10 avril. Avec quelle ardeur et quel amour, Seigneur, vous avez por­té votre croix! Surgite, eamus (Mt 26,46). Vous l'avez prise avec ar­deur sur vos épaules fatiguées par l'agonie et la flagellation. Vous l'a­vez prise comme l'étendard du salut, glorifié déjà 90 par sa figure (le serpent d'airain) au désert. Vous l'avez prise comme l'instrument du salut, la source de toute grâce, de toute grandeur par la réparation et l'expiation, la condition de toute civilisation et de toute vertu.

11 avril. Retraite par le pieux Père Grignard. - Méditations sur le sa­lut, sur le péché véniel.

12 avril. Méditation sur la vie intérieure. - Que de merveilles dans le monde des esprits! Que de merveilleux édifices édifiés dans l'oraison! Que de tableaux artistiques! de jardins délicieux! Que de mécanismes merveilleux dans la vertu! Quelles habiles combinaisons des moyens pour arriver à la fin! Comme ce monde est supérieur à celui de la ma­tière! Quelle belle vocation d'édifier, de réparer, de consolider, d'orner les âmes, de les élever de la terre au ciel!…

17 avril. Mon Dieu, quel jour de bénédiction que celui d'une ordina­tion! Votre Eglise grandit. Plusieurs de vos enfants s'élèvent de la terre au ciel.

27 avril. Le Seigneur est tout à moi avec le prix infini de ses méri­tes, et Marie aussi avec le prix de sa compassion. Ils 91 sont à moi au Calvaire où Marie me donne tout son Fils et où Jésus se donne tout en­tier. Ils sont à moi à l'autel, où Jésus se donne sans réserve. Que puis-je craindre avec ces richesses? J'ai une monnaie d'un prix infini pour a­cheter toutes les grâces et payer toutes les dettes.

15 mai. Regale sacerdotium! (1 Pt 2,9). Que nous sommes bien un sacerdoce royal! Le Roi des rois nous donne audience tous les matins avec sa Mère et toute sa cour. Quelle dignité! Vous nous acceptez à vo­tre banquet, Seigneur; ou plutôt vous, le Roi des rois, vous daignez descendre du trône pour venir à nous, pauvres mendiants. Vous entrez sous notre toit. Vous vous entretenez avec nous, dont l'intelligence est si bornée et le regard tout courbé vers la terre.

Le Saint Sacrifice de la messe, l'Eucharistie; l'union avec N.-S., tel­les étaient les sources de grâce toujours ouvertes que N.-S. m'offrait.

LE RETOUR

20 juillet. Quelques évêques étaient partis avant la session, bien peu cependant.

Les départs étaient nombreux le vingt au soir. On, ne coudoyait que des évêques à la gare. 92 Presque tous appartenaient à la majorité. On y remarquait ceux de Poitiers, Langres, Saint-Die, Angers, Cambrai, Ta­rentaise, etc.

De l'opposition, il y avait ceux de Paris et d'Ajaccio. La politique a voulu donner une certaine pompe au départ de Mgr Darboy, archevêque de la cité impériale. L'ambassadeur de France l'accompagnait, et il avait aussi une escorte ecclésiastique composée de Mgr de Mérode et de deux prélats inférieurs, Mgr Vecchiotti, membre du tribunal de la Consulte, et le R. P. Trullet, théologien de l'ambassade. Mgr de Mérode eut le mauvais goût d'aller au compartement de Mgr l'archevêque de Reims; qui était là aussi, et de lui reprocher d'avoir trahi l'opposition. Mgr Lan­driot avait en effet voté « placet » à la session.

Pour moi, j'eus une petite place dans le compartement de Mgr Pie, avec 1e P. Dorvan et M. Bougouin. J'étais fier et heureux de revenir avec le grand évêque qui avait fait tant d'honneur à la France pendant le Concile.

Nous passâmes la nuit à Turin, à l'Hôtel de Bologne. Je ne quittai Mgr Pie qu'à Lyon. 93

LA SUITE DU CONCILE

Les théologiens du Concile avaient préparé un magnifique ensemble de constitutions.

La commission de Fide avait concentré ses travaux sûr trois chefs principaux: de Fide, de Ecclesia Christi, de Matrimonio christiano.

Les schemata de Fide contenaient, en leur première partie, toute la théologie préliminaire, sauf le traité de l'Église, et une bonne partie de la théologie dogmatique, en laissant de côté les Sacrements. Cette pre­mière partie avait en vue surtout de combattre le rationalisme et les erreurs qui en sont dérivées.

La seconde partie des schemata de Fide traitait de l'Église, soit en elle-même soit dans ses rapports avec la société civile. La troisième traitait du Mariage.

Toutes les grandes erreurs modernes étaient atteintes: le rationalis­me,destructeur de la foi et de la vie surnaturelle; le laïcisme, destruc­teur de l'Église; le divorce et la sécularisation du mariage.

Voici le résumé de ces thèses, qui constituent ce qu'on pourrait ap­peler la théologie moderne. 94

====SCHEMATA proposés par la députation de rebus ad fidem pertinentibus====

Professio doctrinae catholicae:

1. Contra materialismum et pantheismum;

2. Contra rationalismum absolutum.

Declaratio doctrinae catholicae contra principia semirationalismi.

A. De revelatione supernaturali:

1. De fontibus revelationis in Scriptura et Traditione;

2. De necessitate revelationis;

3. De objecto superrationali revelationis, sive de mysteriis.

B. De fide divina:

1. De distinctione divinae fidei a scientia rationali;

2. De motivis credibilitatis pro fide christiana;

3. De supernaturali virtute fidei, et de libertate voluntatis in fidei assensu.

4. De necessitate et supernaturali firmitate fidei.

C. De relatione inter fidem et scientiam:

1. De ordine scientiarum ad fidem et ad auctoritatem Ecclesiae custo­dientis depositum.

2. De incommutabili veritate doctrinae Ecclesiae pro quavis scientiarum transformatione. 95

Declaratio doctrinae catholicae contra errores circa specialia dogmata.

A. Doctrina de Deo:

1. De unitate divinae essentiae in tribus personis realiter inter se dis­tinctis;

2. De divina operatione ad extra communi tribus personis et de Dei libertate in creando.

B. Doctrina de Verbo Incarnato:

1. De una divina persona Christi in duabus naturis;

2. De redemptione et satisfactione a Verbo incarnato pro nobis prae­stita secundum humanam suam naturam.

C. Doctrina de homine secundum naturam spectato:

1 De communi origine totius generis humani ab Adam;

2. De natura hominis composita ex corpore et anima rationali ut forma corporis humani.

D. Doctrina de hominis elevatione supernaturali:

1. De supernaturali statu sanctitatis et iustitiae originalis;

2. De hominis lapsu et de peccato originali; de aeternitate pœnae desti­natae cuivis peccato lethali in hac vita non expiato;

3. De gratia, quae nobis per Christum Redemptorem donatur; de habi­tuali gratia permanente et ammae inhaerente; de necessitate gratiae ad quemvis actum salutarem. 96

De Ecclesia in se spectata.

A. De natura Ecclesiae:

l. Ea est corpus Christi mysticum;

2. In ea exstat concreta religio christiana unico vera, quae ab Ecclesia seiuncta consistere nequit.

B. De proprietatibus Ecclesiae ut est societas:

l . Ecclesia est societas vera, perfecta, spiritualis et supernaturalis;

2. Est societas visibilis;

3. Ecclesia visibilis est una, in se pœnitus cohaerens;

4. Ecclesia est societas necessaria ad aeternam hominum salutem, neces­sitate tum praecepti, tum medii;

5. Extra Ecclesiam nemo salvatur: hinc, sicut rationi, ita fidei christia­nae repugnat doctrina de religionum indifferentia.

C. De dotibus Ecclesiae, ut ea perennis est:

1. De Ecclesiae indefectibilitate;

2. De Ecclesiae infallibilitate.

D. De Ecclesiae potestate:

Est in Ecclesia vera potestas non solum ordinis sed etiam iurisdictio­nis; legifera, iudiciaria, cœrcitiva, eaque independens.

De visibili Ecclesiae capite.

A. De primatu Romani Pontificis: 97

1. De institutione primatus in B. Petro;

2. De primatus perpetuitate in B. Petri successoribus, Romanis Ponti­ficibus;

3. De huius primatus divinitus instituti natura.

B. De temporali S. Sedis dominio.

De Ecclesia spectata in suis ad societatem civilem relationibus.

1. De utriusque societatis concordia;

2. De civilis potestatis iuribus et officiis secundum doctrinam Ecclesiae catholicae;

3. De specialibus Ecclesiae iuribus:

circa christianam institutionem et educationem iuventutis,

circa publicam professionem consiliorum evangelicorum,

circa ecclesiastica bona temporalia.

1. De matrimonii christiani dignitate et natura;

2. De Ecclesiae circa matrimonium christianum potestate;

3. De matrimonii bonis, in comparatione cum coniugiis quae mixta dicuntur. 98

De ces trois séries de constitutions relatives à la foi, les deux pre- mières seulement ont été abordées par le Concile.

De la première série, deux parties ont été traitées et définies par la constitution Dei Filius du 24 avril 1870. Ce qui concerne l'Écriture Sainte y est traité bien sommairement, une constitution pontificale pourra le compléter. La troisième partie: « circa specialia dogmata », n'a pas pu être abordée, et c'est vraiment dommage, elle aurait pu mettre fin à bien des controverses qui divisent les écoles au sujet de la grâce. (En note: l'Enc. Providentissimus Deus, 1893, a complété l'enseignement de l'Égli­se sur la Sainte Écriture).

De la seconde série: « de Ecclesia », la seconde partie seule, celle qui concerne le Souverain Pontife a été traitée. Et c'est une grande lacune. La troisième partie, concernant les droits de l'Église et ses rap­ports avec l'État, a des applications pratiques quotidiennes. Les droits de l'Église relativement à l'éducation des enfants, à la pratique des con­seils de perfection dans la vie religieuse et' à la libre possession des biens temporels sont foulés au pied par les nations. Mais le Souverain Pontife pourra les revendiquer avec l'autorité nouvelle que lui donne la recon­naissance de son infaillibilité par le Concile. 99

L'action sociale de l'Église est également méconnue. Elle pourra être mise en lumière par quelques encycliques pontificales. (En note: Léon XIII n'y a pas manqué par plusieurs encycliques).

Pour ce qui est de la discipline, la députation avait préparé vingt­-huit schemata. C'était comme un nouveau corps de droit canon. Un seul de ces schemata fut étudié à fond par le Concile, celui sur le petit caté­chisme. Un décret a été préparé, il n'a pas été promulgué. Le Concile se réservait de promulguer à la fois plusieurs constitutions disciplinaires quand elles seraient prêtes.

Ce que le Concile n'a pas pu faire, le Saint-Siège pourra le faire peu à peu, soit par des Lettres pontificales, soit par des décrets des Congré­gations.

En recueillant ces décisions pontificales, on pourra quelques années après le Concile, écrire un recueil intitulé: « Le Concile sans le Con­cile ». Je reproduis ici la liste des schemata disciplinaires préparés. 99

====SCHEMATA 100 circa disciplinam ecclesiasticam==== 1. De Episcopis, Synodis Provincialibus et Diœcesanis et de Vicariis generalibus.

2. De Sede Episcopali Vacante.

3. De Capitulis Ecclesiarum Cathedralium et Collegiatarum, ubi de Ca­nonicorum officiis et qualitatibus.

4. De Parochis, ubi de modo conferendi parochiales ecclesias, de paro­chorum officiis eorumque remotione.

5. De vita et honestate clericorum.

6. De seminariis ecclesiasticis, ubi de methodo studiorum et graduum collatione.

7. De collationibus ecclesiasticis.

8. De predicatione verbi Dei.

9. De parvo catechismo.

10. De oneribus missarum aliisque piis dispositionibus.

11. De usu Ritualis Romani.

12. De administratione Sacramentorum.

13. De Patrinis.

14. De titulis ordinationum.

15. De impedimentis matrimonii, ac speciatim de impedimentis cogna­tionis legalis, publicae honestatis et affinitatis.

16. De matrimonio, quod vocant civili.

17. De matrimoniis mixtis.

18. De domicilio et quasi domicilio ad effectum /101 matrimonii.

19. De cœmeteriis et sepulturis.

20. De iudiciis et praxi servanda.

21. De modo procedendi ex informata conscientia.

22. De emendandis populi moribus, ac speciatim de indifferentismo, blasphemia, ebrietate, impudicitia, theatris, choreis, luxu, pravorum librorum ac imaginum diffusione, necnon de educatione filiorum familias, de operariis, aliisque famulatum praestantibus.

23. De sanctificatione festorum.

24. De abstinentia et jejunio.

25. De duello.

26. De suicidio.

27. De magnetismo et spiritismo.

28. De occultis societatibus.

Il y avait là un thème pour des travaux longs et fructueux. Des Let­tres pontificales et des décrets pourvoieront au plus pressé, notamment pour les études ecclésiastiques, pour l'Index des livres défendus, pour les sociétés secrètes.

La députation pour les réguliers avait préparé dix-huit schemata. 102

====SCHEMATA circa ordines regulares==== 1. De regularibus in genere.

2. De voto obœdientiae.

3. De vita communi.

4. De clausura.

5. De parvis conventibus.

6. De novitiatu, et de novitiorum ac neo-professorum institutione.

7. De affiliationibus.

8. De studiis regularium.

9. De gradibus et titulis.

10. De ordinatione regularium.

11. De electione regularium.

12. De visitatione regularium.

13. De expulsione regularium incorregibilium.

14. De iurisdictione episcoporum in regulares praesertim delinquentes.

15. De monialibus.

16. De institutis votorum simplicium.

17. De spiritualibus exercitiis et sacris recessibus.

18. De privilegiis.

C'était tout un code de la vie religieuse. Il y sera suppléé par quelques décrets pontificaux et par la jurisprudence de la Congrégation 103 des évêques et réguliers.

Là députation sur les rites orientaux et les missions ne publia que ­cette note:

Nonnulla ex iis quae Ecclesias ritus orientalis respiciunt, in schema­tibus de Disciplina ecclesiastica et de Regularibus, suis quoque locis, inserta sunt; insuper sequuntur duo schemata:

1. De ritibus.

2. De missionibus apostolicis.

À tout cela aussi il devra être pourvu par le Saint-Siège.

Le Concile était censé continuer pendant les vacances. Un certain nombre d'évêques restaient à Rome et travaillaient.43) Mais bientôt les événements firent voir qu'on ne pourrait pas le reprendre avant long­temps. Pie IX publia le décret de suspension du Concile le 20 octo­bre 1870.44)

Les deux prélats qui avaient voté « non placet » adhérèrent au dé­cret le jour même. Les autres envoyèrent peu à peu leur adhésion au Saint-Siège. /

TABLE DES MATIERES

Le Concile. Travaux de juin 1

Autour du Concile en juin 30

Travaux de juillet 37

A la veille de la définition 42

18 juillet. IVe session 44

Autour du Concile en juillet 45

Au lendemain de la définition 53

Travaux. Lectures 55

Quelques relations 58

Notes personnelles 62

Le retour tour 91

La suite du Concile 93

Appendice I (1)

Errata

Pageligneau lieu delire
64 12 in partem solitudinisin partem sollicitudinis
71 12 (cleri vagi)(clerici vagi)
75 17 variétédiversité
86 20 discussionsdiscours
90 20 leson
102 20 il écritils ont écrit
108 19 née
108 20 n'ont pas fauchén'ont pu faucher
110 31 faisaitfaisaient
143 5 tousNous
165 25 jusqu'
199 15-16 ardeurbonheur

Appendice I (2)

À ajouter

Pageligneaprèsajouter
14 12 présynodaleou préparatoire au Concile
15 19 uns,les parlementaires
41 31 ConcileSon nom a brillé avec éclat pendant et a­près le Concile.
45 11 maître.Il se livra à des manœuvres d'opposition.
63 17 Mgrde
65 7 approuveles évêques de Besançon, Paris et Orleans, et désire
75 30 au moinsdans le schéma
91 10 MgrEbed- Jesu
93 14 placetquia quidquid Concilio placuerit mihi pla­cet».
108 22 fromentnécessaire
108 24 vivants estdevenu
110 28 et levrai
114 24 à la faveurdes défaillances
119 20 qui nous atous
120 9 lentement.Malgré l'opposition de quelques évê­ques, le dogme de l'infaillibilité sera défini…
121 7 Quelquesuns de nos grands esprits français com­me le Père Gratry et Mr de
121 32 aussiM.
121 34 au 8 avril«Cher père. C'est à toi que j'adresse cette lettre, parce qu'elle arrivera à La Capelle vers la fête de St Jules. Je te recommande tous les jours à la pro­tection de ce saint pontife, et j'espère qu'il t'obtien­dra la grâce de vivre et de mourir bien chrétienne­ment. Je compte bien que tu ne te laisseras pas met­tre en retard cette année pour la communion pasca­le. Quand on a le jugement droit que tu as, on ne peut pas se laisser arrêter par les petits obstacles de la gêne et du respect humain. Tu sais très bien que négliger les devoirs essentiels du chrétien, c'est re­noncer à son droit d héritier du ciel. C'est une folie. C'est ne pas aimer Dieu, ne pas aimer les siens, ne pas s'aimer soi-même. Tu ne nous donneras certaine­ment pas ce chagrin cette année… »
125 14 joursJ'ai trouvé à mon retour le temps raffraichi à Rome par un orage… Les travaux du Concile avan­cent, on espère qu'ils seront terminés vers la Saint­-Pierre.
131 16 Cliffordévêque
140 8 L'opportunitéd'introduire
141 8 libre,quoique réprouvée et qu'il faut laisser libre.
153 26 d'observationsécrites ou les y laisser comme des erreurs condamnées. Par ex. les observation
156 18-19 plainementmême
161 1 FranceIl adhère à tous les éloges donnés à l'Église de France.
195 33 de sapremière
197 34 19 fév.Diligatis invicem sicut dilexi vos; avec la même fin, le même ordre, la même générosité, la même pureté.
199 5 Et vousen
199 16 fatiguées parvotre agonie et par la flagellation.
206 20 encycliques).La troisième serie «de Matrimonio» n'a pas pu être étudié. Ce sera l'œuvre d'un Concile subséquent, à moins que le Pape n'y pourvoie par son enseignement personnel. (En note: Léon XIII l'a fait: Enc. Arcanum divinae Sapientiae, 1880).
210 1 Travaux de juin1870.

Appendice I (3)

Textes et mots ajoutés ou changés et mis à la place de ceux du manuscrits (Notes sur l'Histoire de ma Vie) du P. Dehon.

Pageligneaprèsajoutés/changés
22 2 1 Tim VI,20;Nobiscum Spiritu Sancto duce iu­dicetis
24 7 serarecouverte (pour couverte de NHV ).
28 13 modisolim Deus loquens patribus in profetis
(pour Deus locutus est per prophetos de NHV ).
36 35 pourétudier (pour voir de NHV).
37 3 suprêmeet unique
37 13 hommegrand et beau, qui lui dit pour première parole: En grâce, avez-vous à manger ?
37 16 aprèsles deux missionnaires…. se dirent: Nous mourrons ici (pour tous deux sentirent qu'ils al­laient mourir là et ils se dirent: de NHV).
37 21 mourantcouché près de l'autel de terre,
37 22 fois,désespérant souvent de pouvoir achever, et cette véritable…
37 27 mort.Elle ne tarda point.
37 34 ensuiteportant dans leurs bras le malade. ils le soutinrent sur le bord de cette fosse, pour qu'il pût la bénir. Ils finirent plus. À sa prière
38 3 cœuret leur évêque est ce missionnaire d'abord si cruellement repoussé.
47 9 petitet, encore pense-t-on qu'il existera plutôt au dehors qu'au dedans du Concile. Au dehors me disait un évêque, il y a quelque place pour l' esprit de l'homme au dedans, il n'y aura place que pour l'esprit de Dieu,
58 16 vuessplendides (pour sublimes de NHV ).
88 23 Dubar,évêque de Canada,… de Pet-chili oriental
98 7 laissententendre (pour comprendre de NHV).
101 17 Albanensisin America
109 18-19 de feuVous savez que
110 9 estresté (pour demeuré de NHV).
125 10 passerquelques (pour quatre (le NHV).
126 9 touchantUn cardinal (Pecci) (pour Le cardinal
Pecci de NHV).
131 19.22 évêque deSeckau (pour l'erroné Ségovie de NHV).
164 6 il fautdire (pour indiquer de NHV).
179 7 vous (pour se (le NHV).

Appendice II (1)

Nous possédons deux cahiers de Léon Dehon, intitulés Notes sur le Concile (AD, B 32/11 a-b). Ils ont été rédigés durant le Concile, en commençant à la qua­trième congrégation générale. Le Père Dehon s'en est servi pour rédiger ses Mémoires sur le Concile de Vatican I.

Nous les avons confrontés avec le texte des Notes sur l'Histoire de ma Vie (Mé­moires). Des trois premières congrégations générales, qui furent consacrées à des scrutins et à la distribution des schémas du Concile, il n'y est fait aucune allusion. L'omission de la huitième congrégation générale du 8 janvier 1870 est certaine­ment due à une distraction. Nous donnons le texte des Notes sur le Concile.

(8e) Congrégation générale 8 janvier

Distribution des 2 schemata: De Episcopis et De sede episcopali vacante.

- Mgr Valerga (discours lu); approuve la substance du schéma. Réprouve les criti­ques exagérées et celles qui portent sur lés définitions d'anciens Conciles (Conc. de Vienne sur l'union de l'âme et du corps, et de Latran: «simul ab initio creavit»… Hermes condamné par Grégoire XVI.

Idem Mgr Valerga sur l'authenticité de l'Ecriture ne veut pas qu'on entende «sin­gulas partes» des simples mots et verset. Il veut qu'on laisse libre la doctrine que Dieu ne pouvait pas créer l'homme dans l'état de nature, ratione decentiae creato­ris.

- Mgr Landriot. Discours emphatique en médiocre latin. Texte: «Ecce ego mitto vos». Recommande la douceur par l'exemple de N.-S. et de l'Eglise. Vante la tolé­rance.

Idem Mgr Landriot se réserve de défendre la doctrine du Card. Noris et de Saint Augustin sur les âmes des enfants.

- Mgr Deschamps. Improvisation. «Schema non est sepeliendum nec resurget quia vivit et vivet, quia est accomodatum tempori nostro etc.»… Approuve la douceur envers les personnes, non envers les doctrines, à l'exemple de l'Eglise et du Christ.

- Mgr Raess de Strasbourg. Approuve le fond du schéma, et la condemnation sévè­re dés doctrines, renvoie aux calendes grecques les discours inutiles… (AD, B 32, 11a, pp. 6-8).

Appendice II (2)

32 ……………. . J'ai donc vu ce sacre, ces témoins, écrit Louis Veuillot, toute cette scène si grande par delà les spectacles ordinaires de la vie. Quelle gravité clans l'acte, dans le lieu, dans les hommes! C'était au maître-autel, consacré au nom de Jésus, entre la chapelle de Saint-Ignace et la chapelle de Saint-François-Xavier: C'é­tait à Rome; c'était au pied du Capitole; c'était proche du Vatican et de Saint­-Pierre; c'était le jour de la Pentecôte! Toute parole qui se disait et tout rite qui s'accomplissait 33 soulevait des visions de la grandeur de Dieu et de la grandeur de l'homme dans la main de Dieu. Le nouvel évêque était à genoux, le poids de l'É­vangile sur les épaules. Il était prosterné comme mort, pendant que l'on chantait les grandes litanies, afin que, par le secours de toute l'Eglise triomphante, l'homme en effet mourût et ne laissât plus rien en lui que le pasteur envoyé de Dieu. Il se relève la tête bandée, les mains liées, se dirigeant vers l'autel, pâle et tran­quille comme une victime déjà frappée qui va recevoir le dernier coup. Quel sou­venir en ce moment! Mgr Daveluy, son prédécesseur, entra dans la capitale de la Corée, portant la cangue et saluant d'un calme sourire la multitude qui le regar-dait. Après le sacre, le nouvel évêque s'assied sur le trône, la mitre sur la tète, la crosse à la main, et ensuite il donne au clergé et au peuple sa première bénédic­tion. L'évêque de la pauvre Corée accomplit ce rite royal: revêtu d'or, portant le sceptre paternel, il parcourut cette magnifique église, et bénit la foule agenouil­lée. Mais que sort regard s'enfonçait loin de ces murs splendides et de ce peuple qu'il bénissait, et comme l'on voyait bien, 34 à sa pâleur plus grande et plus au­guste, que sa première bénédiction allait à l'épouse crucifiée qui l'attend! Et nous, les yeux obscurcis de larmes, par delà cette pompe rapide, nous apercevions la tête sereine de Mgr Daveluy, élevée sur trois piquets fixés en terre, au pied des­quels gisait un corps exposé à la dent des bêtes. Cependant l'évêque revint au chœur et l'on chanta le Te Deum. - Te Deum laudamus… Te martvrurn candidatus laudat exercitus!

Oh! que l'Église est grande, et que je trouve mon sort heureux d'avoir été à la contempler d'ici (cf. L. Veuillot, Rome pendant le Concile, II, Paris. 1872, pp. 263-265).

Appendice II (3)

48 ………….:..Voici comment L'Univers raconte la grande journée.

J'aurais à vous raconter un tournoi, et je n'y manquerais pas, si j'était assez bon juge des coups. Lundi dernier, dans la belle église de Saint-Ignace, au Collège Ro­main, un Breton de Vannes; ancien zouave pontifical, élève du séminaire français, prêtre et maintenant docteur, a soutenu une argumentation publique sur deux cent quarante-huit thèses ex-universa theologia. Il les a soutenues tout un jour, contre tout venant, en présence de sept cardinaux, des soixante évêques et d'une multitude de prêtres et d'étudiants. Et je vous assure que c'est un jeu héroïque.

Nous n'avons plus de ces lices où le grand Condé descendait, s'y comportant comme à Rocroi ou à Lens. Notre Sorbonne, féconde en brochuriers, ne saurait nous en donner la fête… L'épreuve en vérité est sérieuse. Il faut de la théologie, il faut de la philosophie, et ce n'est pas encore tout ce qu'il faut. Les armes né­cessaires sont une dialectique prompte et précise, une langue obéissante……. Le chevalier théologique, de garde au pied du dogme, doit saisir toute objection qui passe, la tordre, la ployer, la réduire à confesser 49 aussitôt la vérité. Voilà l'art indispensable. Tout le monde ne peut pas l'acquérir; et pour les mieux doués, ce n'est point l'affaire d'un jour. Notre chevalier de lundi s'en est tiré à l'honneur de ses maîtres et au sien, très vigoureusement, de l'air le plus modeste.

Il y a eu deux combats: celui du matin a duré deux heures, contre trois sa­vants religieux, entre autres un ancien clerc du séminaire français (le P. Dorvan), docteur en théologie et attaché à l'illustre évêque de Poitiers. Le soir, le cardinal Vicaire présidait la séance, entouré de sept autres cardinaux et d'une soixantaine d'évêques de toutes les nations. Le Répondant a d'abord exprimé ses sentiments de dévotion envers les divines prérogatives du Prince des Apôtres, auquel il a dé­dié son travail. Ensuite il s'est mis à la disposition des argumentateurs.

Ils étaient trois: Mgr Micaleff, de l'ordre des Augustins, évêque de Città di Castello, en Italie; Mgr Freppel, évêque d'Angers, en France; Mgr de Preux, évê­que de Sion, en Suisse. Chacun a attaqué à son choix l'une des 248 thèses du programme. On sait que le défenseur ignore toujours sur quelle thèse les atta­ques porteront.

Mgr l'évêque de Città di Castello déploya toute l'érudition biblique contre la divinité de Jésus-Christ. 50

Mgr l'évêque d'Angers, appliquant l'appareil scientifique à la mode en Allemagne, poussa ses objections contre la notion de l'hypostase, telle que les docteurs catholiques l'ont formulée d'après les données de la révélation; et il faut avouer qu'en certains moments le jeu semblait terrible! On était bien aise de dire qu'il serait répondu à tout cela.

Mgr l'évêque de Sion se chargea, l'oserai-je dire? de la petite pièce: il attaqua la thèse de l'infaillibilité pontificale. Ce fut un assaut où tombèrent tour à tour toutes les difficultés de l'Écriture, de la tradition, de l'histoire qui ont servi dans la foule des brochures écrites en ces derniers temps contre la Papauté. Une certai­ne ironie… (disait) assez ce que l'assaillant pensait lui-même de ses arguments, qui excitaient assez fréquemment l'hilarité de l'auditoire. Néanmoins, il prit le soin le plus loyal de n'en affaiblir aucun…..

Devant ses trois éminents adversaires, le Répondant se comporta également bien. Attentif et tranquille, il saisissait la difficulté, quelque subtile qu'elle fût, et la soumettait à son vigoureux laminoir. Lorsqu'elle sortait 51 de là, ce n'était plus une difficulté, c'était une preuve, qui apportait une nouvelle part d'éviden­ce à la vérité contre laquelle elle avait été lancée.

Cette belle passe d'armes intellectuelle dura deux heures et demie, sans fati­gue des acteurs ni de l'auditoire. De chaleureux applaudissements s'adressèrent également au jeune champion et aux illustres adversaires qui, l'ayant apprécié dès les premiers coups, lui avaient fait l'honneur délicat de ne le point ménager. La jeunesse scolastique, qui se trouvait là très abondante, s'était véritablement très amusée; les graves esprits, qui ne manquaient point, voyaient la beauté, l'utilité, la nécessité des grandes études théologiques…

Il faut revenir à la théologie, et nous y reviendrons. Ceux de nos évêques qui ont assisté à cette séance, au milieu des travaux du Concile, ne l'oublieront pas. Mgr Freppel surtout s'en souviendra, et il a terminé son argumentation par des compliments de bon augure. A présent, la France catholique connaît l'arme qui lui manque; elle en sera un jour munie. L'œuvre sera difficile, elle pourra être longue. On y mettra le temps, et comme ce sont de ces choses où Dieu ne refuse pas 52 son aide, nous arriverons encore à faire de la théologie avant que la sagesse des peuples modernes n'arrive à faire une constitution; - et c'est la théologie qui fera la constitution.

Le mouvement qui entraîne le monde nous annonce où la science théologi­que puisera son unité, c'est-à-dire sa force. Elle s'élèvera à l'ombre de celui qui a dit au Sauveur: Tu es Christus filius Dei vivi, et à qui le Dieu fait homme a dit à son tour: Tu es Petrus, et super banc Petram aedificabo Ecclesiam meam (Mon Eglise, c'est-à-dire, mon peuple, le peuple de mes délivrés, de mes enfants)…..


1)
Avec ce jugement s’accorde en partie ce qu’écrit Arrigoni: «Le très ennu­yeux et très pédant Mgr Magnasco, vicaire Capitulaire de Gênes, prétend montrer que la constitution dogmatique De Ecclesia commence très bien par le primat de St Pierre…» Journal, 6 juin, p. 59 (cité par U. Betti: La costituzione dommatica `PastorAeternus’ del Concilio Vaticano I, o.c., p. 244, note 1).
2)
Les amendements proposés pour le préambule (cf. Coll. Lac., o.c., VII, 301­304) furent imprimés et le 9 juin furent distribués aux Pères (cf. Coll. Lac., o.c., VII, 750). La députation de la foi les examina en deux séances et, au cours de la 70ème congrégation générale du 13 juin, Leahy fit sur eux un rapport. Les Pères, sauf quelques exceptions peu nombreuses, acceptèrent le jugement de la députa­tion. Ensuite le préambule fut remanié suivant les amendements approuvés. Le nouveau texte (cf. Coll. Lac., o.c., VII, 330-331) fut distribué aux Pères le 28 juin (cf. Coll. Lac., o.c., VII, 755) et au cours du vote du 2 juillet fut approuvé presque à l’unanimité (cf. Coll. Lac., o.c., VII, 756).
3)
Le cardinal Schwarzenberg se plaignit de nouveau de ce que la question du primat fût traitée avant celle de l’Eglise, il demandait donc qu’au moins fût consi­déré en même temps le pouvoir des évêques.
4)
Il demandait que les mots opiniones damnandae fussent remplacés par opi­niones damnatae, parce que ces opinions, ayant été professées par Richer, avaient déjà été condamnées par le St-Siège.
5)
Arrigoni, pour cette seconde intervention de Magnasco, répète le sévère juge­ment du jour précédent: « il revient à l’ambon ce très ennuyeux Mgr Magnasco, Vicaire Capitulaire de Gênes, et il dit qu’on commence merveilleusement par Pier­re et non par l’Église dans cette Constitution, parce qu’ainsi le veut la nature des choses (!), d’abord l’autorité, puis la société sur laquelle elle doit s’exercer; d’a­bord le fondement, puis en désignera la bâtisse, etc. Quand il parle avec le sens commun, il dit les choses les plus évidentes et les plus élémentaires comme si les Pères du Conciles étaient des écoliers…» Journal, 7 juin, p. 60 (cité dans U. Betti, La costituzione dommatica ‘Pastor Aeternus’ del Concilio Vaticano I, o.c., p.260, note 4).
6)
Les amendements, proposés par écrit sur les deux chapitres (cf. Coll. Lac. o.c., VII, 312-315) furent imprimés et distribués aux Pères le 10 juin (cf. Coll. Lac., o.c., VII, 750). Après l’examen fait parla députation de la foi, d’Avanzo fit un rapport sur eux au cours de la 72ème congrégation générale du 15 juin (cf. Coll. Lac., o.c., VII, 752).
7)
Arrigoni aussi donne un jugement semblable sur Vérot. De son intervention dans la 60ème congrégation générale du 28 mai il écrit: «Il fit un de ses discours habituels mi-sérieux, mi-bouffon, qui retint l’attention des Pères pendant une heu­re et demie», Journal, 28 mai, p. 54 (cité par U. Betti, La costituzione dommatica ‘Pastor Aetemus’ del Concilio Vaticano I, o.c., p. 200. note 2).
8)
Arrigoni, de retour de l’audience du Pape, note : «A mon arrivée Mgr Magna­sco, Vicaire, Capitulaire de Gênes, parlait au milieu de l’ennui général, disant avec une importance impertinente des choses évidentes et élémentaires pour la défense de Schéma», Journal, 11 juin, p. 63 (cité par U. Betti, La costituzione dommatica ‘Pastor Aetemus’ del Concilio Vaticano I, o.c., p. 277, note 4). Dans un autre pas­sage du Journal (7 juin, p. 60), que nous avons déjà cité auparavant, on lit: «Quand il parle avec le sens commun, il dit les choses les plus évidentes et les plus élémentaires, comme si les Pères étaient des écoliers».
9)
Cf. Coll. Lac., o.c., VII, 304-311.
10)
Cf. Coll. Lac., o.c., VII, 311-312.
11)
Les amendements, présentés par écrit sur le chap. III, (cf. Coll. Lac., o.c., VII, 332-346), furent imprimés et distribués aux Pères le 30 juin (cf. ibid., VII, 755). La députation dé la foi fit l’examen en cinq séances et Zinelli fit le rapport sur eux au cours de la 83ème congrégation générale du 5 juillet (cf. ibid., VII, 757).
12)
Cf. le texte du rapport dans la Coll. Lac., o.c., VII, 315-330.
13)
Le cardinal Mathieu consacra toute son intervention à réfuter le discours du patriarche Valerga (congrégation générale du 31 mai) et protesta en particulier contre sa comparaison entre le monothélisme et le gallicanisme. Ensuite le premier à parler sur le chap. IV fut le cardinal Rauscher.
14)
Cf. Granderath, o.c., Bruxelles, 1913, pp. 16-23; F. Mourret: Le Concile du Vatican d’après des documents inédits, Paris, 1919, pp. 296-299; A. Barilaro: Il Cardinale Filippo Maria Guidi e la definizione dell’infallibilità pontificia dans Me­morie Domenicane 59 (1942), pp. 97-101, 132-136; 60 (1943), pp. 8-13,67-72, 134-140; J. P. Torrel, L’Infaillibilité pontificale est-elle un privilège personnel? Une controverse au premier Concile du Vatican, dans Rev. Scienc. Philos. Théol. 45 (1961), pp. 229-245. Barilaro concilie le discours de Guidi avec la doctrine du schéma. Betti est d’un avis différent, cf. o.c., p. 354. Arrigoni écrit: «Pour moi jusqu’à un certain moment j’ai cru que c’était un discours de conciliation concer­té en haut lieu, mais je suis assuré que non. Certes ce discours a laissé des impres­sions profondes, et je crois qu’il a fait quelques conquêtes contre la doctrine de l’infaillibilité absolue», Journal, 18 juin, p. 67 (cité dans U. Betti, o.c., p. 355, no­te 1).
15)
D’Avanzo, membre de la députation de la foi, répondit à quelques observa­tions faites (par Guidi) au schéma et expliqua la doctrine de l’infaillibilité pontifi­cale.
16)
Arrigoni note énergiquement: «Il récite sans dignité et avec bouffonnerie, bien qu’on le connaisse comme bon et fervent» Journal, 22 juin, p. 69 (rapporté dans U. Betti: La costituzione dommatica ‘Pastor Aeternus’ del Concilio Vati­cano I, o.c., p. 393, note 1).
17)
Arrigoni commente: «Il a fait un discours désordonné, illogique et drôle… et ainsi poursuivit sans logique et sans bon sens», Journal, 23 juin, pp. 70-71 (rap­porté dans U. Betti, o.c., p. 355, note 5).
18)
De Ketteler exposa sa pensée avec clarté et compétence. Arrigoni note: «Par son langage fouillé, laconique, serré, il produisit de l’effet» Journal; 25 juin, p. 78 (rapporté dans U. Betti, La costituzione dommatica ‘Pastor Aeternus’ del Concilio Vaticano I, o.c., p. 362, note 6).
19)
L. Dehon rapporte littéralement, avec quelques omissions, tout ce passage de la description, que L. Veuillot donna de l’évènement dans L’Univers du 6 juin. Cf. Rome pendant le Concile, o.c., II, pp. 255-257.
20)
Egalement ces courts aperçus historiques sur la situation religieuse en Corée sont pris de l’article cité de Veuillot. Cf. Rome pendant le Concile, o.c., II, p. 259. Pour le texte qui manque de la p. 32 à la p. 34, cf. Appendice II, p. 216.
21)
Cf. L. VEUILLOT, Rome pendant le Concile, o.c., II, p. 346 s.
22)
Après Mgr David, l’évêque Nicolas Adames prit la parole.
23)
La chaleur devenait toujours plus intense et rendait pénible le séjour des Pè­res à Rome qui maintenant paraissaient fatigués par les longues séances, lesquelles se prolongeaient pendant quatre heures. D’autre part la discussion ne présentait plus d’intérêt, parce que la matière avait été approfondie sous tous les aspects et aucun élément nouveau n’affleurait. C’est pourquoi quelques évêques essayèrent de persuader les orateurs restants, inscrits pour prendre la parole, de renoncer à leur droit. L’initiative, qui, d’abord, ne fut pas vue d’un bon œil par certains de la minorité, obtint ensuite l’effet désiré. Quelqu’un commença à renoncer à la parole et l’exemple fut vite suivi par d’autres, si bien que par suite des nombreux renon­cements pendant la 82ème congrégation générale du 4 juillet, on put épuiser la longue liste des inscrits et clore la discussion du chap. IV.
24)
Le rapport de Zinelli (cf. Coll. Lac., o.c., VII; 346-367) sur les 72 amende­ments proposés pour le chap. III, dura deux heures.
25)
Cf. le résultat du vote pour chaque amendement dans la Coll. Lac., o.c., VII, 367-368.
26)
Le 72ème amendement, qui regarde le canon 3, fut présenté par la députa­tion de la foi de la manière suivante: «Si quis dixerit, Romanum Pontificem habe­re tantummodo officium inspectionis vel directionis, non autem plenam et supremam potestatem iuridictionis in universam Ecclesiam, tum in rebus, quae ad fi­dem et mores, tum quae ad disciplinam et regimen Ecclesiae per totum orbem dif­fusae pertinent; aut eum habere tantum potiores partes, non vero totam plenitudi­nem huius supremae potestatis; aut hanc eius potestatem non esse ordinariam et immediatam sive in omnes ac singulos ecclesias, sive in omnes et singulos pastores et fideles; anathema sit» Coll. Lac., o.c., VII, 368. Les mots en italique furent a­joutés par la députation de la foi. A peine lu le texte, beaucoup de Pères observè­rent qu’il n’était. pas opportun de passer au vote après la simple lecture, mais qu’il convenait d’avoir en main le texte écrit. L’archevêque de Paris demanda qu’on re­prît la discussion sur le texte du canon, parce qu’il contenait quelque chose de nouveau. C’est pourquoi les Présidents décidèrent de renvoyer le vote à la congré­gation générale suivante et de faire imprimer entre temps le texte à distribuer aux Pères. Cf. Coll. Lac., o.c., 1. c.
27)
Les amendements, proposés par écrit sur le chap. IV (cf. Coll. Lac., o.c., VII, 372-387), furent imprimés et remis aux Pères le 7 juillet. Deux jours après, furent distribués aux Pères quelques amendements proposés parla députation de la foi. Cf. Coll. Lac., o.c., VII, 387-388. Gasser, après un rapport général sur le chap. IV, examina les 79 amendements proposés, en donnant le jugement de la dé­putation. Cf. le texte du rapport dans la Coll. Lac., o.c., VII, 388-421.
28)
L. VEUILLOT, Rome pendant le Concile, o.c., II, pp. 419-425
29)
Cf. ibid.,II,.. p. 429.
30)
Des 535 Pères présents (cf. la liste dans la Coll Lac., o.c., VII, 488-497), à l’appel nominal deux seulement répondirent non placet, Luigi Riccio, évêque de Caiazzo (royaume des deux Siciles) et Edward Fitzgerald, évêque de Little Rock (Etats-Unis d’Amérique). Ces deux votes négatifs démontrèrent, contre les accusa­tions d’une certaine presse, la liberté des Pères dans les décisions conciliaires. Ric­cio, dans la congrégation générale du 13 juillet, avait voté placet iuxta modum; Fitzgerald, qui avait été toujours opposé à la définition de l’infaillibilité, dans cet­te même congrégation générale avait voté non placet. Aussitôt après la définition, dans la quatrième session, les deux évêques déclarèrent leur pleine soumission à la doctrine définie. Riccio, agenouillé devant le Pape, dit: Credo, se déclarant prêt à défendre ce dogme au prix de sa vie. De même Fitzgerald, s’étant rendu au trône pontifical, s’écria: Modo credo, sancte Pater.
31)
L. Veuillot: Rome pendant le Concile, o.c., II, p. 430.
32)
Dans la congrégation générale du 13 juillet avaient voté 601 Pères, au con­traire dans la quatrième session publique ne furent présents que 535. La diminu­tion du nombre s’explique par le fait que 83 Pères, hostiles à la définition de l’in­faillibilité pontificale partirent avant la dite session et n’y participèrent pas. Cette abstention ne fut comblée qu’en partie par là rentrée de quelques Pères, qui n’a­vaient pas été présents au vote du 13 juillet. L. Veuillot écrivait de Florence le 21 juillet: «Hier, sur le registre de l’hôtellerie où nous avons dû écrire nos noms, nous avons lu ceux-ci, inscrits de l’avant-veille, c’est-à-dire du jour même où le Concile définissait l’infaillibilité: Maret, évêque; Strossmayer, évêque, Rome pen­dant le Concile, o.c., II, p. 440.
33)
L. VEUILLOT, op. cit., II, p. 430 s.
34)
L. Dehon rapporte ici, avec quelques adjonctions, la lettre envoyée de Rome à ses parents, le 3 juillet 1870.
35)
Les mots, mis entre parenthèses, ne se trouvent pas dans le texte original de la lettre, mais ont été ajoutés par L. Dehon, quand il transcrivait la lettre dans le Journal du Concile.
36)
Le mot italien un rinfresco ne se retrouve pas dans l’original de la lettre, mais fut ajouté par L. Dehon dans le Journal du Concile.
37)
Le texte original de la lettre porte: … deux petits séminaristes qui sont ses petits neveux».
38)
La lettre ajoute: «et qu’il a reçu en cadeaux des missionnaires».
39)
Ce passage manque dans la lettre.
40)
Le texte de la lettre porte: «… ravis de cette petite soirée, une des plus belles de notre vie. Je n’ai pas besoin de vous dire que j’attends impatiemment les vacan­ces du Concile. On dit que les travaux ne seront pas entièrement suspendus. De toute façon, je compté partir le lendemain de la session qui semble devoir se tenir vers le 19 …».
41)
Les Notes sur l’Histoire de ma Vie, cahier VIII, pp. 48-52) rapportent ici la description de la solennelle séance académique que fit L. Veuillot dans L’Univers le 9 juillet. Cf. Rome pendant le Concile, o.c., II, pp. 404-411. Pour le texte qui manque de la p. 48 à la p. 52, cf. Appendice II, p. 217.
42)
L. VEUILLOT, Rome pendant le Concile, o.c., II, pp. 441-445.
43)
Après la quatrième session publique du 18 juillet eurent lieu trois autre con­grégations générales: la 87ème du 13 août, à laquelle participèrent 136 Pères, qui élirent 10 membres pour la députation de discipline, à la place des absents; la 88ème du 23 août, au cours de laquelle 127 Pères discutèrent les trois chapitres du schéma de Sede Episcopali vacante, amendé par la députation et distribué le 19 août (cf. le texte et le rapport correspondant dans la Coll. Lac., o.c., VII, 655-659); la 89ème du ter septembre, au cours de laquelle 104 Pères, après le rapport de Trucchi votèrent sur les amendements proposés le 23 août pour le schéma de Sede Episcopali vacante. Cf. Coll. Lac., o.c., VII, 763-764.
44)
Cf. le texte dans la Coll. Lac., o.c., VII, 497-498.
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