oeu-dco-0002-2122

===XXI CORRESPONDANCE===

Quelques lettres que je recevais me disaient aussi l'état es esprits en France.

M. Boute, mon ancien maître, me donnait la pensée des prêtres du Nord. «Vous nous avez causé une bien grande joie, m'écrivait-il, en nous disant que les neuf dixièmes des évêques sont pour la définition de l'infaillibilité, et que cette question sera bientôt tranchée. Nous l'at­tendons et l'espérons de tous nos vœux. L'Univers nous annonce que 400 ou 500 évêques ont déjà signé la demande faite à ce sujet à la commis­sion des Postulats. Il est évident que la question est mûre, et qu'il faut en finir avec le petit nombre des récalcitrants encore entachés des doc­trines gallicanes. Qu'une décision solennelle vienne leur fermer la bouche et arrêter leur plume. Ne voilà-t-il pas que le P. Gratry se met de la partie et fait cause commune avec Nosseigneurs Dupanloup et Maret. Nous espérons bien que le Concile fera justice de tout cela et qu'il ne sera plus question d'Église gallicane. Je donnerais volontiers le reste de mes jours pour arriver à cet heureux résultat».

M. le chanoine Demiselle m'exprimait la pensée des prêtres de Sois­sons. «Je vois aujourd'hui dans les journaux, m'écrivait-il au 15 février, les noms de 31 prélats français demandant que la question de l'infailli­bilité ne soit pas posée devant le Concile, et parmi eux celui de l'évêque de Soissons. Ces bons prélats ne s'aperçoivent pas qu'ils tombent dans la même fauté de conduite qu'ils reprochent si bruyamment au Pape Honorius. Que peut-on reprocher à ce Pape, si ce n'est trop de ména­gements pour de rusés grecs qui abusèrent indignement de sa condescen­dance. Que font ces évêques? Par ménagement aussi pour leur parti, ils veulent qu'il ne soit parlé ni d'infaillibilité, ni de non-infaillibilité, comme Honorius qui défendait de parler ni d'une ni de deux volontés, espérant par là étouffer dans leur naissance des disputes qui menaçaient de troubler l'Église. C'était bien la peine de faire tant de bruit autour du nom de Pape pour tomber dans la même faute. In laqueo isto quem absconderunt, comprehensus est pes eorum. J'ai envoyé un petit article au Monde dans ce sens… Vous avez sans doute connaissance des lettres de M. Urghart à l'évêque d'Orléans. Que va-t-il répondre à ce coup d'as­sommoir? J'attends avec impatience. Comme la Providence préparé ad­mirablement le triomphe du Saint-Siège! Puisse la confusion de ses ad­versaires leur ouvrir les yeux!».

Au 9 juin, il m'écrivait encore: «La conduite de la minorité dans le Concile me paraît de plus en plus inqualifiable; non pas que je vois avec déplaisir qu'ils fassent valoir leurs raisons, mais crier à l'oppres­sion, quand ils prennent à tâche d'accabler leurs collègues par d'intermi­nables discussions, des redites sans fin sur une question débattue à satiété dans de gros livres et dans des brochures; se poser en victimes quand eux-mêmes font subir aux autres les tortures de leurs violences, de leur acrimonie, de leurs récriminations plus qu'inconvenantes, en vérité, c'est trop abuser de la liberté qui leur est laissée dans une si large mesure. Il n'est aucun corps délibérant qui pousserait si loin la condescendance pour une minorité. Dieu a ses desseins. Il était nécessaire qu'on connût le fond de certaines âmes. Erit in signum cui contradicetur, ut revelentur ex multis cordibus cogitationes. Espérons que l'Église sera purgée pour toujours de ce levain de gallicanisme qui la déparait depuis trop long­temps… Pauvres gens qui transportent dans le gouvernement de l'Église les idées qu'ils se sont faites touchant les gouvernements civils. Ils sont ce qu'ils appellent libéraux en politique, ils veulent l'être en religion: et ils s'aheurtent à cette malheureuse idée avec une opiniâtreté qui, jointe a l'aigreur avec laquelle ils la défendent, fait songer, malgré qu'on en ait, aux hérésiarques, tels que nous les dépeint l'histoire… Et ces âmes faibles de caractère et de doctrine, qui se laissent fasciner par ceux qu'ils regardent comme des génies supérieurs; comme si le génie (quand génie il y aurait), pesait quelque chose quand il est question de dogme et de révélation; gens qui compteraient volontiers les voix dans le Concile d'après le nombre d'âmes qu'un évêque peut compter dans son diocèse… Le spectacle que présente cette minorité me fait mal. Que serait-ce si je pouvais voir toutes les ficelles qu'ils remuent derrière la toile, et en particulier ces matriarches qui voudraient transformer certains salons comme autant de conciles au petit pied… ».

Mon pieux ami, l'abbé Costa de Beauregard m'écrivait: «L'infaillibilité désole le démon. Il fait ce qu'il peut au moins pour la montrer inopportune. Le nombre des fidèles qui pensent comme Mgr Dupanloup est très grand. Le malheureux Correspondant a fait beaucoup de mal à une classe très nombreuse d'esprits distingués et convaincus. Il faut de bonnes prières ».

Thellier de Poncheville m'exprimait ainsi sa pensée, au 1er avril: «Vous parlerai-je du Concile, à vous un des rares privilégiés qui voient le Concile face à face et dégagé des brouillards malsains qu'amassent au­tour de lui les tristes ingérences du journalisme. Si je vous avais écrit plut tôt, peut-être n'aurais-je pu le faire sans laisser percer un peu de tristesse. Mais il me semblé que peu à peu le calme se fait, et que la confiance, qu'on ne peut perdre, sans perdre la foi, reprend son empire légitime sur les âmes catholiques. Il y a eu dans ces derniers temps une telle confusion des choses divines et des choses humaines, un tel renversement de tous les rôles, de toutes les idées et de toutes les hié­rarchies, que l'œil de l'âme a pu se troubler un peu. Mais ce n'est que le trouble d'un moment. Pour celui qui croit, la paix et la lumière ne tardent pas à se faire. Et pour ne parler que du dogme de l'infaillibilité, qui, bien que non défini, était admis par tout le monde, les catholiques comprendront, après les premières confusions dissipées, qu'il né justifie pas les effarements inattendus de quelques-uns, mais d'un autre côté il n'a rien de commun avec la bruyante exploitation que prétendent en faire, quelques autres. Et quant à la recrudescence que l'école d'aveu­glement que dirige L'Univers semble avoir reprise, à la faveur de cer­tains de ses adversaires, je ne m'en effraye pas trop. Cette école sera après ce qu'elle était avant, ni plus ni moins: une difficulté pour la bonne volonté des uns, une pierre d'achoppement pour l'orgueil des autres. Si le péril est là, il ne sera pas ailleurs; Dieu sait toujours le me­surer à la dose que comportent nos forces. Au surplus, qu'est-ce que tout cela? des grains de poussière sur la route de l'Église et de la papauté. Vous voyez donc, mon cher ami, que je ne suis pas de ceux qui ont peur. Je crois néanmoins que le devoir de tous, même du plus humble, est de prier ».

Il y avait certainement un trouble profond dans les âmes. Le ton dé L'Univers était parfait pour les presbytères, il était choquant pour les gens du monde. Il parlait des opposants comme s'ils étaient déjà jugés et condamnés, et il était loin d'y mettre de la courtoisie.

J'écrivais de temps en temps à mes parents. Ma mère gardait toutes mes lettres, je les retrouve dans son bureau. Celles des années précé­dentes exprimaient toute ma joie d'avancer dans ma préparation au sa­cerdoce. Souvent aussi j'essayais de ramener mon père à la pratique de la vie chrétienne. Cette année, je parlais un peu du Concile et j'engageais mon père à persévérer.

Au 30 novembre, j'écrivais: «Rome prend un aspect chaque jour plus vivant. Les évêques s'installent et se mettent au travail. La foule des étrangers suit le cours ordinaire des fêtes liturgiques de Rome et remplit surtout Saint-Pierre et ses abords. On se prépare au Concile par une neuvaine solennelle qui se fait dans toutes les églises, et toutes les grandes reliques sont exposées partout. Le corps sténographique se pré­pare à remplir ses fonctions. Nous sommes déjà allés plusieurs fois nous exercer dans la magnifique salle du Concile. Aujourd'hui nous avons eu le bonheur d'être reçus en audience par le Saint-Père. Il nous a encou­ragés. Il nous a exhortés à donner tous nos soins à nos fonctions pour que nos travaux servent à l'édification du monde. Il nous a donné à chacun une médaille. Il est affable et gai comme toujours et son immense confiance en Dieu lui permet de n'être pas préoccupé, à la veille d'un acte si important et au milieu des affaires dont il est assailli. On est tou­jours heureux de l'approcher. Combien l'est-on plus d'approcher tous les matins de N.-S. Jésus-Christ! Aidez-moi à remercier Dieu de la grande grâce de mon sacerdoce, dont l'anniversaire approche ».

Au 8 décembre, au retour de la première session, j'écrivais: «Je vou­drais vous faire partager un peu notre joie de la belle fête d'aujourd'hui.

Cette journée m'a fait plus d'impression, s'il est possible, que celle du 19 décembre de l'an dernier (jour de mon ordination). J'étais admirable­ment placé dans une tribune avec les théologiens du Saint-Père. Toute la solennité se passait dans le transept droit de la basilique. La salle était ouverte du côté de la confession de Saint-Pierre, pour que l'im­mense foule qui remplissait l'église pût apercevoir le Concile. Les Pères du Concile, plus de 700 évêques en chape et en mitre arrivèrent en procession et remplirent peu à peu les gradins. Après eux venaient les patriarches, les cardinaux et enfin le Saint-Père entra en bénissant les membres du Concile. L'aspect de cette salle, qui contenait toute l'Église enseignante, et de la basilique, où la foule représentait l'Église enseignée, faisait un effet plus imposant qu'on ne peut le dire.

Après le Veni Creator, on chanta la messe. Il était beau de voir les évêques du monde entier réciter ensemble le symbole des Apôtres; puis se donner la paix. Après la messe, un évêque capucin prononça le discours d'ouverture. Il rappela dans un magnifique langage la con­version du monde par les Apôtres, puis les tribulations et les joies de l'Église. Pie IX donna sa bénédiction solennellement, puis eut lieu la cérémonie de l'obédience. Tous les Pères du Concile allèrent à leur tour embrasser la main ou le pied du Souverain Pontifie. Le Saint-Père lut ensuite une magnifique invocation au Saint-Esprit. Puis commença le chant des litanies des Saints. Quelle touchante union de l'Église de la terre avec celle du ciel! Tous les regards du ciel étaient tournés vers ce Concile, et tout le Concile invoquait avec ardeur par les voix émues et retentissantes de tous ses membres tous les Saints du ciel. Cinquante mille fidèles dans Saint-Pierre répondaient au chant des litanies. En­suite le Saint-Père debout appela trois fois la bénédiction du ciel sur le Concile. Puis il adressa aux Pères une allocution si émue qu'il pou­vait à peine l'achever. Il leur rappela ce que l'on sentait bien, les pro­messes de Dieu, l'assistance du Saint-Esprit et la force de l'Église qui a la promesse infaillible d'être guidée par le ciel dans la vérité. Alors fu­rent lus et votés les décrets qui déclaraient le Concile ouvert et qui fixaient la deuxième session publique au jour de l'Épiphanie. Jusque là on préparera des décrets dans des réunions privées dont la première commencera après-demain. Cette belle fête a duré de 9 h. du matin à 3 heures. Je me suis écrié plus d'une fois que c'est la plus belle journée de ma vie. Après avoir été témoin de telles manifestations de l'Église de Dieu, on éprouve une nouvelle et brûlante ardeur de travailler pour le ciel dont l'Église de la terre n'est que le vestibule… ».

Au 19 décembre, j'écrivais: «Vous rappelez-vous comme nous étions heureux l'année dernière à pareil jour? Le 19 décembre est l'an­niversaire de mon ordination et en même temps le quatrième dimanche de l'Avent me rappelle ma première messe. Avec quel bonheur et quelle émotion j'ai célébré cette même messe ce matin. Je me suis représenté ce que nous étions ce jour-là et ce que nous voulions être. Comme nous étions pénétrés de la grâce de Dieu! Quelle joie! quelle bonne volonté! Et ce n'était que le commencement d'une série de grâces qui se continue tous les jours. Notre Seigneur nous a donné sans compter, il s'est donné lui-même. Nous lui avons promis beaucoup aussi avec l'aide de sa grâce: l'avons-nous tenu? Je fais de tout mon cœur mon mea culpa. Je n'ai pas toujours apporté au saint sacrifice la même bonne volonté que la pre­mière fois et par suite tout le reste aussi a été en souffrance. Mais je vais reprendre avec la même confiance que le premier jour et j'espère tout de la miséricorde de Dieu. Remerciez Dieu aussi des grâces qu'il vous a accordées à Rome et tenez les promesses que vous lui avez faites.

J'ai besoin, cher père, de t'ouvrir à toi plus spécialement mon cœur. Tu as certainement ressenti l'année dernière quelle joie tu me causais à moi, mais cela n'est rien. Tu as ressenti aussi quelle joie tu causais au ciel, à N.-S. Jésus-Christ et à ses Saints. Eh bien! si tu ne restais pas dans les mêmes sentiments, de même que tu me déchirerais le cœur à moi, tu renouvellerais aussi, s'il était possible, les larmes de sang que Notre Seigneur a versées sur nos infidélités. Voilà pour le nécessaire. Mais il y a en outre ce que l'Église n'exige pas et qui est extrêmement bon et utile, ce serait une communion aux deux ou trois plus grandes fêtes de l'année.

Penses-y à Noël, et si tu pouvais renouveler notre union commune avec Notre-Seigneur, dont nous étions si heureux l'année dernière n'y manque pas. Entretenons-nous souvent de ces souvenirs-là, ils nous font du bien… Je suis on ne peut plus heureux de suivre de près la grande œuvre du Concile. Depuis la belle fête du 8, il y a eu deux réunions ou Congrégations générales. La troisième aura lieu demain. Ces réunions sont secrètes. Nous avons seuls le privilège d'y assister. Nous y sommes mieux placés que nous ne pouvions l'espérer. Notre table est au centre de la salle. Ceux d'entre nous qui n'ont pas à écrire ont à leur disposition une tribune d'où ils peuvent voir et entendre. Nous avons eu peu à faire jusqu'à présent. Les séances ont été remplies par élections des commissions, et autres dispositions préparatoires. Il est probable que nous ne serons pas occupés du Concile plus de deux jours par semaine. J'ai fait visite à Mgr Dours et à Mgr d'Orléans. Mgr Dupanloup a fait tort à son influence par ses dernières lettres qui n'ont pas du tout été goûtées des évêques. Vous en verrez dans les journaux une belle réfuta­tion écrite par Mgr Dechamps, archevêque de Malines… ».

Au 29 décembre: «Je reste à Rome cette année pendant ces petites vacances et j'y trouve aussi de bien grandes choses avec beaucoup moins de fatigues. Toutes les fêtes de Rome sont rehaussées par le grand nom­bre des évêques qui les suivent. Le Concile continue ses travaux. Il y a eu hier congrégation générale et il y en aura une autre demain. Elles se tiennent jusqu'à présent à Saint-Pierre. Mais on prépare au Quirinal une salle plus propre aux discussions. La salle de Saint-Pierre servira toujours pour les sessions solennelles. La discussion des décrets est com­mencée et nous avons eu déjà hier beaucoup à écrire. Nous sommes heu­reux d'assister à tout cela et tout le monde envie notre sort. Le Concile fait espérer des résultats immenses et les petites difficultés que grossis­sent les journaux n'auront aucune influence sérieuse… ».

Au 11 janvier: «Nous avons eu pas mal de travail au Concile depuis quelques jours. Il y a eu la semaine dernière trois congrégations géné­rales et la session. Cette semaine, nous avons eu peu de repos, il n'y aura que deux congrégations. Chacune de ces réunions est pour nous très intéressante. Nous voyons de près se préparer les décrets qui ont la promesse d'être les oracles de l'Esprit Saint… Les travaux du Concile marchent très bien. Cependant il faut s'attendre à ce qu'il y ait quelques évêques qui, trompés par l'une ou l'autre illusion, et se croyant dans la vérité, le retardent sur quelques points. Mais la promesse de la vérité n'est que pour ceux qui sont unis au successeur de Pierre parce que c'est à lui qu'il a été dit: Tu es Pierre et sur cette pierre je bâtirai mon Église. Un charmant incident de la séance d'hier était un beau discours (en latin) d'un évêque chaldéen, du pays des rois mages. Nous écrivons beaucoup aux congrégations et nous réussissons fort bien jusqu'à pré­sent. Aux sessions publiques, nous n'avons pas à écrire, mais nous avons le privilège d'y assister dans les tribunes. Quatre seulement nous re­présentent dans la salle près de l'autel. J'étais de ce nombre à la seconde session le jour de l'Épiphanie. Comme j'étais heureux d'être uni de si près aux prières de Pie IX et de tout le Concile pour l'Église!…». Au 25 janvier: «Je n'ai pas le temps de vous écrire bien souvent. Nous avons eu depuis quelques jours des congrégations générales très fréquentes. Les questions de discipline ecclésiastique sont longues à discuter parce que beaucoup d'évêques ont à exposer les besoins parti­culiers de leurs églises. On ne prévoit pas encore l'époque de la pro­chaine session publique où se promulgueront les premiers décrets. Notre service sténographique marche bien, mais nous n'avons plus guère de temps à donner à nos études. Quel beau spectacle que celui de ces nom­breux évêques qui réunissent ici leurs efforts et le zèle qu'ils déploient d'ordinaire à la tête de leurs diocèses. Les séances offrent toujours un grand intérêt et parfois des scènes très touchantes. On ne peut pas en­tendre sans émotion les évêques qui ont souffert de dures persécutions ou qui exposent les malheurs de leurs églises. En dehors du Concile, Mgr Mermillod, le digne successeur de Saint François de Sales sur le siège de Genève, nous fait tous les dimanches de magnifiques conférences à Saint-Louis des Français, ou il exprime son ardent amour pour l'Église catholique. Mgr l'évêque de Beauvais nous a donné au Séminaire Français une charmante allocution qui nous a émus et hier nous avons eu au Sé­minaire français la visite du Saint-Père, qui est venu voir le saint et savant évêque de Nîmes gravement malade chez nous. Ne vous inquiétez pas des dires des journaux qui voient toujours les choses sous un faux jour. Il y a certainement au Concile différentes opinions sur les matières: qui ne sont pas encore définies, mais tous sont prêts à se soumettre au jugement définitif du Concile…».

Au 3 février: «Je cueille une moisson de souvenirs pour toute ma vie. Quelle grande chose que l'épiscopat catholique! Quelle magnifique assemblée d'hommes à la fois graves et dignes dans leur démarche, doux et affables dans leur conversation, savants et riches en bonnes œuvres. Une pareille réunion est ce que l'on peut voir de plus beau sur la terre, et je m'estime heureux d'y avoir une petite part. Les congréga­tions ont lieu fréquemment et la discussion marche lentement à cause du grand nombre des orateurs. On commence à craindre de ne pas pou­voir finir cette année. S'il en est ainsi on interrompra les travaux pendant l'été. En dehors du Concile je trouve encore le temps de travailler un, peu. J'ai subi aujourd'hui l'examen de baccalauréat en droit canon…:

Mon excellent ami Perreau, avec qui j'étais au Trépost, est mort sain­tement il y a quelques jours à Chambéry. Il avait plus fait de bonnes œuvres en peu d'années que bien d'autres dans une longue vie, et le bon Dieu l'a jugé mûr pour la récompense. Il priera pour nous au ciel parce qu'il m'aimait beaucoup». (Je reçus à l'occasion de cette mort des lettres touchantes de l'abbé Costa de Beauregard et de Thellier de Poncheville qui étaient aussi des amis de Perreau. Une notice a été écrite par un de nos confrères de Chambéry sur ce nouveau saint Louis de Gonzague).

Au 14 février: «Le Concile marche, bien que lentement. Les jour­naux se passionnent pour la question de l'infaillibilité qu'ils compren­nent fort peu. Il s'agit seulement des bulles dogmatiques des Papes et du pouvoir qu'a donné Notre-Seigneur à Saint Pierre et à ses successeurs de juger en dernier ressort les questions de foi avec l'assistance divine. L'Église n'en a jamais douté et elle a toujours reçu comme une sentence irréformable les bulles des Papes qui condamnaient les hérésies. Malgré quelques évêques qui croient comme Mgr Dupanloup qu'il n'est pas op­portun de définir cette vérité, je suis persuadé qu'elle sera prochaine­ment définie et quand elle sera expliquée et que ces évêques se seront rangés au jugement de la majorité nous verrons heureusement cesser le trouble que suscite à ce propos toute la presse française fort ignorante de théologie… Quant à l'histoire d'un faux évêque, je crois que c'est un canard des journaux. J'ai appris encore bien des traits édifiants de l'abbé Perreau depuis sa mort. Sa bonne mère, qui est très pieuse, a écrit au Père supérieur une lettre fort résignée. Elle croit que le Bon Dieu a accepté le sacrifice de la vie de son fils pour le salut de son mari. L'abbé Perreau avait souvent offert sa vie, dit-elle, pour le salut de son père, et son père qui pendant bien longtemps n'avait pas pratiqué sa religion était revenu à la pratique des sacrements peu de temps avant de mourir, un an avant la mort de son fils. L'abbé Perreau était vrai­ment un saint tout consumé de l'amour de Dieu et de l'amour des âmes, et j'espère qu'il nous obtiendra bien des grâces… ».

Au 13 mars, je racontais une excursion à Subiaco.1) « …Comme vous le savez par les journaux, les réunions du Concile n'ont pas encore recommencé. On suppose qu'elles reprendront dans cinq ou six jours. En attendant, les évêques travaillent et font des rapports écrits sur les questions qui leur sont proposées.

Je profite de ce long intervalle pour me reposer et pour me mettre un peu au courant de mes études. Je suis heureux de jouir un peu du calme et de la solitude pendant qu'on s'agite ailleurs si violemment pour entraver l'œuvre de Dieu. Quelques Montalembert menacent de suivre la défection du P. Haycinthe et de Lamennais. Ils n'ont pas assez d'humilité pour croire qu'ils ont pu se faire illusion, ni assez de foi pour s'en rapporter à l'assistance de Dieu promise au Concile. Ils se prépa­rent un retour bien difficile… ».

Au 25 mars, je décrivais la visite solennelle du Pape à l'église de la Minerve. «C'est aujourd'hui une bien belle fête à Rome. C'est l'An­nonciation. Le temps est superbe et le Saint-Père vient de venir à l'église de la Minerve plus solennellement encore que vous ne l'avez vu à Saint­-Charles au Corso. Nous l'avons acclamé à son passage devant Sainte Claire. Il avait avec lui dans son magnifique carrosse doré le cardinal de Bordeaux et un cardinal d'Espagne. Les maisons sont pavoisées et de toutes les fenêtres on a jeté des fleurs sur la voiture du Saint-Père. Les étrangers sont très nombreux et l'animation très grande.

Le Concile a repris ses séances avec activité. Nous allons en avoir presque tous les jours. Les travaux marcheront très bien avec la nou­velle organisation. On tiendra une session publique vers Pâques. On espère encore finir cette année.

Je n'aurai plus le temps de faire autre chose que de suivre les réu­nions du Concile. Je ne le regrette pas. Je suis heureux d'assister de près au plus grand événement de notre siècle.

J'ai reçu la visite de M. Noël qui a épousé Melle Parmentier de Ver­vins. Ils sont ici en voyage de noces. Ils ont été passer quelques jours à Naples. Ils voient un peu Rome en touristes et semblent ne pas y prendre goût.

J'ai vu aussi Allègre, secrétaire de Mgr l'évêque d'Arras, dont vous avait parlé M. Gordien ».

Au 8 avril: «…Nous avons eu ici beaucoup de besogne depuis quinze jours, et c'est ce qui fait que je suis un peu en retard à vous écrire. Le Concile a tenu séance presque tous les jours. Les travaux ont avancé et cependant la session publique que l'on espérait tenir pendant la Semaine Sainte n'aura lieu probablement que le dimanche de Qua­simodo.

Nous aurons peu à faire dans les 15 jours qui vont venir. J'en pro­fiterai pour me reposer. Je me porte du reste très bien et je suis beau­coup moins fatigué que l'an dernier à pareille époque. Je me promène quelque fois avec Mgr Dours qui est seul depuis le départ de M. Guyart. Notre service sténographique marche bien. Le Saint-Père en est content. On nous donne à mesure toutes les pièces imprimées que l'on distribue aux évêques. Cela nous aidera à bien connaître les travaux du Concile.

Il est toujours à peu près certain que l'on suspendra le Concile à la Saint-Pierre, mais on ne sait pas encore si on le continuera l'année pro­chaine.

Les fêtes de Pâques promettent d'être très belles. La ville se remplit d'étrangers… ».2)

Au 14 avril, jour du jeudi-saint: «Cher père, je t'écris encore parce que je crains plus que la foudre, que tu ne restes en l'état de péché et que tu ne te mettes pas en règle avec Dieu. Je frémis à cette pensée. C'est la seule chose nécessaire. Tu sais bien que je suis prêt à donner tout ce que j'ai, ma santé et ma vie pour assurer ton salut. Il n'y a pas de choix autre que celui-ci: bénir Dieu avec nous toute l'éternité, ou bien être maudit de Dieu et de nous toute l'éternité. Je n'aurai pas de repos que tu ne m'aies annoncé que tu veux être avec nous. Ah! si tu ne déchirais que le cœur de ton fils et si tu ne faisais couler que ses larmes en refusant cela, je te pardonnerais. Mais il y a plus que les tiens, il y a ton Dieu qui s'est fait homme pour toi et qui a versé des larmes de sang à la pensée que tu l'oublierais. Il se délectait dans la douleur pour effacer nos fautes. Et ses commandements sont si doux! Il nous oblige à nous asseoir à son banquet et à recevoir ses grâces. Quel honneur et quel bonheur c'est pour nous! Et tu l'as bien éprouvé, car je t'ai vu comme transfiguré quand tu as bien reçu ici la sainte communion.

Pourrais-tu résister à tant de grâces que Dieu t'accorde! Le saint sacrifice est offert souvent pour toi et autant de fois Notre-Seigneur présente à son Père ses blessures en expiation de tes fautes. Ne crains-tu pas d'être abandonné de Dieu et de ne pas faire une bonne mort? Et puis ne sais-tu pas que chaque bonne action que nous faisons est un placement fait à Dieu, qui nous rapportera le centuple. Allons! écris­-moi bien vite que c'est fait. Je t'en prie, je t'en supplie. Il le faut. Je puis à peine te parler d'autre chose, tant cette pensée me dominé. Je té dirai seulement que j'ai eu le bonheur d'offrir le saint sacrifice aujour­d'hui, fête de l'institution de la sainte Eucharistie et du Sacerdoce. Tu sais que le jeudi-saint il n'y a qu'une messe dans chaque église et les autres prêtres reçoivent seulement la sainte communion, en mémoire de la sainte Cène. Mais le Saint-Père a permis aux sténographes, en récompense de leurs travaux, de dire la sainte messe aujourd'hui. Tu penses bien combien j'ai prié pour toi et pour vous tous… ».

Au 28 avril: «Tu es bien long à m'annoncer ton bonheur. J'attends tous les jours le courrier avec anxiété et la bonne nouvelle n'arrive pas. Si tu savais combien je souffre de ce retard tu aurais peut-être pitié de toi-même et de moi. Je ne sais plus quoi te dire pour te déterminer. J'avais jusqu'à présent une confiance entière. Il ne me semblait pas que tu puisses résister. Tout a été mis en œuvre pour te ramener à Dieu. Le ciel tout entier est appelé à ton secours cent fois par jour. Tues recommandé aux prières de toute l'Église par la Propagation de la Foi, par les confréries de N.-D. des Victoires et de N.-D. du Sacré-Cœur. Notre-Seigneur Jésus-Christ s'offre à son Père pour toi sur l'autel tous les jours avec tous les mérites de sa passion, de son amour et de sa mort. Dieu t'invite à partager son héritage et à vivre éternellement avec lui, et tu veux rester dans la mort. Je ne doutais pas que tu ne cédasses à de si pressantes et si amoureuses invitations, quand une affreuse pen­sée vient de me venir à l'esprit, c'est que peut-être tu manquerais de courage. Ah! cette pensée me fait horreur. Je ne la développe pas. Non, j'espérerai jusqu'à la fin. Cher père, n'attends donc pas un avenir dont tu n'es pas certain. Vis avec nous dans la grâce de Dieu et l'attente du ciel et la sainte joie de l'espérance. Va à ton souvenir. Qu'au moins une ou deux fois par an tu sois assis avec nous à la table du roi des rois, pour qu'après les courts instants de cette vie, nous soyons ensemble pour l'éternité. Prends courage. Lave toutes tes négligences dans le sang de l'expiation infinie du Fils de Dieu. Regarde cette image que je t'en­voie (un Christ en croix) et laisse-toi toucher par tant d'amour. Voudrais-tu continuer à approuver les meurtriers du Fils de Dieu en conti­nuant à rester dans le péché? Écris-moi vite. Pas de promesses, pas de vains regrets ou de vaines espérances, des faits. J'ai promis à Dieu bien des actions de grâces, veux-tu encore l'en priver? Ah! si, tu voyais un peu les choses surnaturelles, tu serais effrayé de l'abîme auquel tu mar­ches et des foudres que tu accumules sur ta tête. Je te supplie d'avoir pitié de ton âme, pitié des tiens, pitié du Fils de Dieu qui frappe à la porte de ton cœur et à qui tu ne veux pas ouvrir ».

Bientôt la bonne nouvelle m'arriva. J'avais fait violence au ciel et â la terre.

Au 2 mai, j'écrivais: «Bien cher père, quelle bonne nouvelle m'a apporté le premier jour du mois de Marie! Comme tu dois être heureux d'avoir vaincu un long respect humain! Quelle joie pour nous de vivre maintenant tous de la même vie franchement chrétienne, vie pleine d'espérance et qui sera suivie d'un bonheur éternel! Ne te laisse plus jamais séparer de la grâce de Dieu. Reste l'ami et le cohéritier de tous les habitants du ciel. Tu as dépassé en courage la plupart des habitants de La Capelle. Cet acte de généreuse énergie était bien digne de toi. Je retournerai en vacances bien plus heureux que l'an passé, parce que j'irai vivre avec de vrais amis de Dieu.

Tu ne me dis rien d'Henri (mon frère). N'aurait-il pas eu le courage de t'accompagner? Est-ce qu'il a oublié ce qu'il disait, il y a quelques années? Il te suppliait_- comme moi - de remplir tes devoirs religieux, et il ajoutait: si tu ne le fais pas, c'est autoriser tes enfants à ne pas le faire… Je me le rappelle très bien. Il a dit cela. Il ne manquait ni de foi ni de courage alors. Est-ce qu'il ne devrait pas maintenant s'adresser à lui-même ces prières et ces arguments qu'il t'adressait alors? Je savais très bien alors qu'il ne faut pas vendre le ciel pour un moment de paresse ou de gloriole. Il redoutait les jugements de Dieu… Qu'il me rassure vite et qu'il me dise que notre joie est complète et que notre famille est tout entière bénie et aimée de Dieu.

Le Concile fait son œuvre avec lenteur et maturité. Les journaux vous racontent et exagèrent les divergences d'opinions de quelques évê­ques. Mais cela n'est rien. Tous veulent le bien et si à la fin quelques-uns défaillaient, ce qui j'espère n'arrivera pas, l'Église marcherait sans eux. Elle a la promesse de l'assistance de l'Esprit-Saint pour ses décisions; mais ses pasteurs pris individuellement ne sont pas à l'abri des erreurs et des passions. Il peut arriver que quelques-uns, de bonne ou mauvaise foi, résistent à l'Église ou s'en séparent. Il y avait bien un traître parmi les Apôtres. Ceux-là se perdent et l'Église est toujours vivante et gran­dissante… ».

Au 30 mai, on m'apprend qu'un de mes oncles (du Nouvion) est revenu aussi à la pratique de la religion. Je réponds: «J'ai trouvé votre lettre au retour d'une petite excursion que j'ai faite à la campagne, et je rends grâces à Dieu de toutes les bonnes nouvelles qu'elle m'apporte. ­Je demandais depuis longtemps cette grâce pour mon oncle…

J'ai donc été passer quelques jours à Albano, respirer l'air des bois et le vent de mer et prendre des forces pour le mois de juin. Il y avait trois jours de fêtes: jeudi, l'Ascension; vendredi, Saint Philippe de Neri, et le dimanche. J'ai demandé dispense de la congrégation du samedi et je me suis fait ainsi une petite vacance de quatre jours… Il est probable que la question des vacances du Concile ne sera réglée que vers la Saint-Pierre. Je ne puis donc pas encore faire des projets. La discussion pen­dante a traîné au commencement, mais elle marche plus rondement de­puis quelques jours. On espère arriver à une solution vers la Saint-Pierre ­ou peu après. Défiez-vous des appréciations des journaux, surtout de la France, qui favorise, je crois, l'opposition peu sage de quelques évêques.».

Au 12 juin: «Nous avons eu toute cette semaine un spectacle bien, touchant. A l'occasion de l'octave de la Pentecôte il y avait tous les soirs dans l'une des principales églises de Rome des prières publiques pour le Concile. Les Romains, avec leur grand esprit de foi, s'y sont rendus en foule. Les ordres religieux et les confréries et associations de chaque paroisse avec leurs costumes variés y allaient en chantant les litanies. Quel beau spectacle qu'une société franchement chrétienne­ priant Dieu avec ferveur pour les besoins de l'Église! Lundi dernier, c'était à Saint-Pierre. Le Saint-Père s'y est rendu avec tout l'épiscopat et le Sacré Collège. La basilique était presque remplie comme aux plus grandes fêtes, et la place Saint-Pierre était dans tout son beau, ornée des processions de religieux et de confrères qui allaient et venaient en­chantant. Ces prières obtiendront au Concile des grâces abondantes… ».

Au 24 juin: «Je ne puis pas encore vous annoncer mon retour. La session du Concile n'est pas encore fixée. On espère pouvoir la tenir dans quinze jours. Je demanderai à partir aussitôt après. Tous nos évêques sont fatigués, c'est leur intérêt de ne pas nous retenir ici trop longtemps. Ma santé est toujours. très bonne. Comme les congrégations du Concile sont très fréquentes, je ne fais plus d'autre travail. Rien n'est encore décidé pour les vacances et la reprise des travaux du Con­cile. Nous avons eu une bien belle fête il y a quelques jours. C'était la procession du Saint-Sacrement sur la place Saint-Pierre. Le Saint-Père, précédé de 500 évêques, était porté sur sa Sedia et priait avec une fer­veur admirable, agenouillé devant l'ostensoir… Nous avons eu aussi à Santa Chiara une cérémonie bien touchante. Un cardinal (Pecci) a donné le baptême; la confirmation et la première communion à six juifs adultes qui viennent de se convertir au catholicisme. Cinq sont de Bologne et un de Rome. Beaucoup d'évêques y assistaient. Les parrains et marraines étaient des plus grandes familles de Rome. Cette cérémonie s'est faite chez nous parce que l'éducation religieuse de ces juifs a été achevée cet hiver par deux prêtres français qui habitaient à Santa Chiara et qui sont eux-mêmes deux juifs convertis, les abbés Lemann, de Lyon.

Le jour de la fête de Saint Louis de Gonzague, Pie IX est entré dans sa XXVe année de pontificat. La santé n'est pas altérée par toutes ses sollicitudes. On touche heureusement à la fin des petites divisions qu'il y avait au Concile, et j'espère que les décrets de la prochaine ses­sion réuniront à peu près l'unanimité… ».

* * *

A questa rassegna delle lettere ai genitori, fatta dallo stesso Dehon, ne aggiungiamo altre tre, indirizzate all'amico Palustre. Esse presentano un certo interesse.

Rome, 5 février 1870

Le Concile absorbe une grande partie de mon temps et ne m'en laisse guère pour mon travail et ma correspondance. Nous avons chaque se­maine trois ou quatre longues séances d'où nous ne sortons qu'une heure ou deux après les évêques.

On a déjà discuté et préparé plusieurs projets de décrets, mais on n'avance que lentement et il paraît probable qu'il faudra reprendre le Concile l'hiver prochain après quelques mois d'interruption. L'œuvre du Concile sera certainement considérable et elle ne rencontrera pas les difficultés intérieures qu'imaginent ou grossissent les journalistes.

Tu ne ménages pas dans ta dernière lettre ni Veuillot ni les archi­tectes de Rome. Je savais que tu n'aimais ni ceux-ci ni celui-la. Tu les juges avec ton ardeur habituelle. Tu pourrais être un peu plus indulgent pour des hommes qui ne manquent ni de talent ni de bonne volonté. Je n'approuve pas toujours le ton de L. Veuillot, mais je sais gré à son journal de défendre autant qu'il peut la bonne cause. J'aimerais qu'il le fît toujours avec la courtoisie et la modération que tu admires sans doute comme moi dans les lettres de Mgr Dechamps.

Quant aux architectes de la salle du Concile, ils l'avaient disposée avec goût et avaient admirablement tiré parti de l'emplacement qu'on leur avait assigné, sans laisser ignorer qu'il serait difficile de s'y entendre. Ils ont depuis habilement tiré parti de ce qui existe en séparant pour les congrégations par une tenture une partie de la salle où les évêques se resserrent et s'entendent parfaitement.

Tu attends sans doute que je te dise ce que l'on pense à Rome de la question tant agitée en France de l'infaillibilité du Pape. Si je ne me trompe, cette infaillibilité sera prochainement définie conformément à l'enseignement constant de l'Église. Les oppositions récentes n'auront fait que rendre nécessaire et opportune la proclamation d'un dogme qu'elles contestent».

Castel Gandolfo, 8 juillet 1870

J'ai attendu longtemps pour t'écrire, toujours incertain sur l'époque et la durée de mes vacances. Je les attends avec impatience. J'en ai grand besoin pour ma santé. J'espère du reste qu'elles commenceront bientôt, dans une quinzaine de jours environ. Rien n'est encore fixé, mais voici les probabilités. Un grand nombre d'évêques s'en iront pour trois mois après la prochaine session. Le Concile ne sera pas suspendu. Les évêques qui resteront à Rome prépareront quelques décrets. Pour nous, la moitié du corps sténographique va s'en aller en vacances, et si on a besoin d'eux on les rappellera pour remplacer les autres qui iront à leur tour en vacances en septembre. Je suis donc exposé - à mon grand regret, à n'a­voir que six semaines de repos. Dans cette perspective j'incline fort à m'en aller directement dans ma famille, sauf à passer par la Touraine à mon retour si on ne raccourcit pas mes vacances.

Tu ne m'en voudras, pas de prendre si tard une résolution. Je ne pouvais pas la prendre plus tôt. On espérait encore il y a quinze jours tenir la session à la Saint-Pierre. Je comptais bien alors me rendre à Tours pour le 15. J'en avais déjà averti mes parents qui me chargent de t'inviter de nouveau à revoir La Capelle, et à y conduire ta femme comme tu le leur as fait espérer. Le voyage est devenu. plus facile, par le chemin de fer de Vervins à Laon.

Tu vois à la date de ma lettre que j'ai fui le soleil de Rome. Je suis venu passer quelques jours d'intervalle entre deux congrégations du Con­cile chez les franciscains de Castel dans le site délicieux, que tu connais, en vue de la mer et du lac d'Albano. Ce séjour est moins fatigant que celui de Rome.

Nous touchons à la fin de la première période du Concile. Elle a été assez agitée et elle va finir par une définition probablement unanime de l'infaillibilité du Pape. Cette soumission des évêques opposants réparera largement le scandale qui avait pu naître de leur résistance un peu obstinée. On continuera l'année prochaine, mais on ne finira probable­ment pas.

Je compté bien que nous trouverons quelques moyens de nous voir ces vacances. Nous causerons alors plus longuement. Si dans quelques jours je voyais la possibilité d'aller à Tours, je t'en préviendrais ».

La Capelle, 26 juillet 70

J'avais un grand désir de passer par Tours en revenant de Rome, mais le retard de la session, la fatigue et l'impatience de mes parents m'ont fait remettre cette partie de plaisir. Je compte bien qu'elle ne sera que différée et que je pourrai exécuter mon projet au mois d'octobre. Je passerai alors par Poitiers, Bordeaux, Toulouse et Marseille pour me rendre à mon poste.

J'ai quitté Rome le lendemain de la session. Le Concile est en va­cances jusqu'à la Saint-Martin. Les évêques se sont empressés de quitter le climat brûlant d'Italie pour venir se reposer chez eux. J'ai fait route de Rome à Lyon dans la charmante compagnie de Mgr Pie qui a dû trouver dans son diocèse une réception triomphale. Il y a bien droit. C'est lui qui a fait le plus d'honneur à l'épiscopat français au Concile.

Nos travaux reprendront au mois de novembre si toutefois la poli­tique n'y vient pas mettre des entraves et si la guerre n'amène pas une suspension du Concile.

Bien que je sois revenu beaucoup mieux portant que l'an dernier, j'ai bien besoin de ces trois mois de repos. Les derniers travaux du Concile ont été accélérés à nos dépens.

J'ai trouvé ici tout le monde bien portant. Mes deux petites nièces. me seront une charmante distraction. La saison est belle comme partout et la fraîcheur du climat de La Capelle est cette année très précieuse. Je suis sûr que tu reverrais notre pays avec plaisir. Viens, s'il est possi­ble, passer quelques jours avec nous. Nous serons assez loin des prus­siens pour n'avoir rien à en craindre ».

===XXII TRAVAUX DE MAI===

On reprend la question du petit catéchisme.3) Le Concile y aura con­sacré une partie notable de ses travaux, et ce sera sans résultat, là cons­titution préparée ne devant pas être promulguée.

On entend un long rapport de Mgr Wierzchleyski, Leopolitanus, sur les amendements proposés.

Le cardinal Donnet loue l'unité de catéchisme. Il ne faut pas, dit-il, se laisser effrayer par une crainte vaine ou même diabolique d'exagérer le pouvoir du Saint-Siège. Si le catéchisme unique avait existé, on ne verrait pas en Allemagne et en France tant de gens qui ignorent et méconnaissent les prérogatives de l'infaillibilité du Saint-Siège.

Le cardinal Rauscher: discours lu par Mgr Hefele. Le catéchisme unique devrait être seulement recommandé. On ne pourra l'introduire en Autriche sans l'assentiment du gouvernement, et on provoquera de nouvelles récriminations contre les prêtres. L'orateur fait ensuite un pompeux éloge de son gouvernement, ce qui soulève des protestations assez générales.

Mgr Rota, de Guastalla, défend le schéma.

Mgr Verot, de Saint-Augustin, demande qu'on fasse une rédaction d'essai du catéchisme avant d'en décider l'admission.4)

A la fin de cette congrégation on annonce l'introduction de la ques­tion de l'infaillibilité, pour rétablir la paix et la tranquillité des cons­ciences.5)

Mgr Dubreil, archevêque d'Avignon, défend le catéchisme de l'Em­pire, qu'on a attaqué.6) Il a été approuvé par le cardinal Caprara. L'ora­teur fait alors un éloge pompeux de l'Empire, auquel on doit, après Dieu, le rétablissement du culte en France. Il complimente le cardinal Bonaparte. Ce discours est mal accueilli.

Mgr Bailles, ancien évêque de Luçon, demande qu'on nomme une commission d'évêques pour la rédaction du catéchisme.

Mgr l'évêque [Cantimorri] de Parme défend l'unité de catéchisme et réfute Mgr Vérot.

On entend encore les évêques [Marguerye] d'Autun, [Ketteler] de Mayence, [Vaughan] de Plymouth.

Mgr Clifford, de Clifton, demande aussi une commission d'évêques.

Mgr l'évêque [Eberhard] de Trèves demande que les évêques aient la liberté d'intercaler des additions dans le catéchisme.

Mgr Zwerger, évêque de Seckau, expose le sentiment de la commis­sion sur cette faculté d'ajouter au catéchisme des additions.7)

Rapport de Mgr Zwerger, évêque de Seckau, sur des observations et amendements qui ont été proposés directement à la commission.

Vote de plusieurs amendements.

Vote du schéma entier.8) 591 votants: 491 placet; 56 non placet; 44 iuxta modum.

Rapport sur les modi proposés. Le rapporteur est Mgr Marilley, évêque de Lausanne.

Tout a déjà été jugé, dit-il, par la majorité. Il n'y a rien de nouveau à proposer aux votes. Le Saint-Siège tiendra compte de ce qui est de­mandé par les Orientaux.9)

Rapport de Mgr Pie sur l'introduction du ler schéma de l'Église.10) Long discours plein d'autorité et très goûté.

Il analyse le schéma. Il est frappé de cette idée qu'avec la manière dont on traite aujourd'hui l'Écriture Sainte et la Tradition on n'arriverait plus à définir certains dogmes comme les sacrements d'extrême-onction, de la confirmation et même la présence réelle. Heureusement le Concile de Trente et les autres ont défini tous ces dogmes.

Il se demande ensuite comment en traitant des prérogatives du Pape on n'aurait pas défini son infaillibilité. Il supplie enfin qu'on n'oppose plus cette prétendue séparation possible du Pape d'avec les évêques. Saint Pierre n'a pas été décapité. Il porte sur son chef, qui figure la pa­pauté, tout son corps qui figure l'Église (Lettre de S. Léon IX au pa­triarche de Constantinople).

Le cardinal Vicaire [Patrizi]. Discours plein d'autorité. Il convenait, dit-il, qu'il affirmât; à titre de doyen des cardinaux, sa foi aux prérogatives de Pierre. Les attaques récentes ont troublé la paix de l'Église, il faut la rétablir.

Mgr Alemany, évêque de S. Francisco, est favorable.

Mgr Natoli, de Messina: Hoc unum in corde fidelium, hoc unum in ore… Les Messanais ont reçu cette foi des Apôtres. Leur foi est garantie par la protection de la Sainte Vierge, à laquelle les premiers citoyens de Messine convertis sont allés rendre hommage. Elle accepta le patro­nage de la ville et leur donna un gage de son affection (sa lettre).

Mgr Dusmet, de Catane: même sens.

Mgr Rivet, de Dijon: long discours anti-opportuniste. Ton grave et morose. Trois points: 1. la définition est pluribus intolerabilis; 2. nociva (plusieurs y perdent la foi); 3. inutilis; on est assez dévoué à l'Église. Il rappelle les précautions prises pour la définition de l'Immaculée-Con­ception, les ménagements qu'on a eus à Trente pour les gouvernements. Mgr Ranolder, Veszprimiensis: la définition serait nuisible. Il espère que Pie IX, qui ne l'a pas introduite, la retirera. Les catholiques et les prêtres ont déjà trop souvent la honte d'affirmer des vérités qu'ils ne savent pas prouver!!!

Mgr Conde y Corral, de Zamora [Spagna], est favorable.

Mgr Célesia, Pactensis, id. Il y a une conspiration générale contre l'autorité civile et ecclésiastique. Il faut y mettre ordre. Autrement elle grandirait. On voit déjà des associations «del clero emancipato», con­tre l'autorité ecclésiastique.

Mgr Dechamps, au nom de la commission. Discours serré et bien rempli, répondant principalement à l'évêque de Dijon: «Non est infalli­bilitas absoluta, sed relativa ad depositum fidei; non personalis, sed officii; non separata; non per revelationem sed per assistentiam, per gra­tiam status. Non est onus importabile: an Evangelium est onus impor­tabile? Qui quaesierunt difficultates historicas, «in illa nocte nil inve­nerunt», quia non in verbo Dei laxarunt retia. Non est tempus arcani, sed praedicanda veritas super tecta quia error praedicatus est super tecta. Nec dicendum «non possumus portare modo», quia est constans praxis Ecclesiae, etiam Galliae, etiam saeculi XVII…».

Mgr David: il faudrait d'abord traiter de l'Église; ensuite ne pas infliger la note d'hérésie même matérielle à tant d'illustres théologiens; ne pas définir une opinion, si probable et si respectable qu'elle soit.

Mgr Greith, de Saint-Gall. «omittenda definitio duplici ex capite, ob difficultates temporis praesentis et ob difficultates quaestionis ipsius».

Mgr Hefele: on n'a pas répondu victorieusement aux difficultés tirées des Conciles. Le Concile de Chalcédoine a approuvé la lettre de Saint Léon, donc il pouvait la désapprouver… Il y a aussi la question d'Honorius.

Mgr Garcia Gil, de Sarragosse, répond au nom de la commission aux difficultés de la veille.

Le cardinal Schwarzenberg tire ses objections de l'historique de la controverse actuelle. Elle a été soulevée par les journaux catholiques de Rome et de Paris. On doit tenir compte de 137 évêques qui repré­sentent 47 millions de fidèles. L'histoire prouvera qui avait raison des; deux partis.

Le cardinal Donnet: discours peu intelligible. Les vrais catholiques accepteront volontiers la définition. Il espère que le Saint-Esprit con­vaincra les inopportunistes.

Le cardinal Rauscher: discours lu recto tono par Mgr Hefele. L'in­faillibilité n'est contenue ni dans l'Écriture ni dans la Tradition, qui n'a pas connu ce mot.

Le cardinal Cullen répond pendant une heure trois-quarts aux objec­tions de la veille. Il réfute Mgr Hefele par ses propres écrits. Il répond en toute liberté, avec facilité et énergie aux cardinaux Schwarzenberg et Rauscher.

Le cardinal Moreno défend avec animation l'opportunité. La vérité est attaquée. Le Concile est provoqué: s'il ne définissait pas, la vérité recevrait un terrible échec.

Mgr Jussef, patriarche melchite, ne dit rien de l'infaillibilité. Il vou­drait que pour la primauté on se contentât de répéter le décret de Flo­rence, pour ne pas éloigner davantage les Grecs. La juridiction directe et immédiate du Pape ne peut s'exercer en Orient que dans des cas tout à fait extraordinaires.

Mgr Simor, combat l'opportunité, bien qu'elle soit jugée par cela même que le schéma est distribué. Il le fait pour ne pas avoir la res­ponsabilité des périls que courront les Orientaux, spécialement en Hon­grie: «ne me canem non valentem latrare exhibuerim. Inimicus homo seminavit zizaniam». Le Saint-Père n'avait pas indiqué cette question, elle n'est pas assez préparée.

Mgr Mac Hale, archevêque de Tuam: long et ennuyeux discours con­tre le projet. Ces questions sont soulevées par esprit de réaction contre les oppositions au Saint-Siège et ne doivent pas être définies.

Mgr Maddalena, évêque de Corfou: on a exagéré les dangers de cette définition pour les Grecs. C'est un peuple pétrifié, orgueilleux et ignorant, qui fait de la religion une question de nationalité. Leurs prê­tres ne savent pas lire et n'enseignent pas. Si quelquefois on explique l'Évangile dans leurs églises, c'est un laïque, souvent le pharmacien de l'endroit. Il n'y a rien à espérer d'eux à moins que l'athéisme y péné­trant par l'indifférence ne les prépare à un retour complet.

Mgr Darboy: il faudrait donner une formule convenable et non une formule obscure qui renvoie à l'infaillibilité de l'Église. Il faudrait ex­primer la nécessité de l'assentiment des évêques, qui est toujours requis même pour que les fidèles acceptent les Conciles généraux. Il faudrait prouver cette formule par l'Écriture et par la Tradition constante: quod semper, quod ubique, quod ab omnibus, avec tous les Pères évêques et théologiens. Enfin il faut redouter les conséquences de cette définition.

Mgr Leahy, archevêque de Cashel, répond au nom de la commission. Il rappelle la foi de l'Irlande, reçue de Saint Patrice, qui leur a dit de recourir à Rome dans les difficultés. Il répond aux objections des jours précédents sur le fond et l'opportunité. La définition est nécessaire. Si elle offre quelque danger en Allemagne, la non-définition en offrirait partout pour l'Église et le Saint-Siège, qui perdraient leur autorité.

Mgr Raess, de Strasbourg: même thèse. La définition est nécessaire et sera bien reçue des vrais croyants. Sa nécessité est prouvée par l'atti­tude même des protestants et des mauvais chrétiens qui en ont peur, et qui ne désirent qu'une chose, c'est que le Concile se taise et se sépare. (Mgr Haynald dit à son voisin, l'évêque de Baltimore: ce sont des indignités, des impertinences, il en aura de moi. Un peu après il dit à demi-voix: «numquam erit opportunum».

Mgr Trucchi, de Forlì, prouve l'opportunité: 1. ex necessitate; 2. ex desideriis piorum.

Mgr Petagna, de Castellammare: le gallicanisme n'est pas l'opinion de la vraie Église dé France ni du vrai clergé français. Il demande un canon et une définition formelle.

Mgr Hassun, patriarche maronite, répond au nom de la commission ,au patriarche grec sur trois chefs: 1. Le schéma serait contraire au type de l'Église selon les Pères; 2. contraire aux Saints Canons; 3. contraire au Concile de Florence.

Ad 1um: le type, qui poussé à l'extrême est hérétique, considère l'Église divisée en cinq patriarcats, de sorte que le Pape soit seulement le 1er patriarche. C'est opposé aux Pères de l'Orient qui ont toujours considéré le Pape comme le seul chef, lé juge des patriarches, etc. (nom­breuses citations).

Ad 2um: les patriarches sont d'institution ecclésiastique, et c'est seu­lement au patriarcat de Rome et non à la primauté de Rome qu'ils sont comparés…

Mgr de Ketteler. On n'a pas eu de bonnes raisons de présenter d'a­bord et séparément ce schéma. Il faut traiter ensemble de toute l'Église, pour calmer les esprits, et parce que la primauté, «Pasce oves», n'a été instituée qu'après l'Église et que les théologiens n'en traitent qu'après l'Église. L'infaillibilité est une doctrine pieuse que l'orateur a toujours enseignée, mais pas assez certaine pour être définie. Les dogmes fonda­mentaux seuls doivent être définis et seulement quand ils ont toujours été admis et par tous.

Mgr Cousseau, d'Angoulême, prouve la nécessité de la définition par la. question du Jansénisme, de la Petite Église, etc. qui n'auront plus d'échappatoire.

Mgr Ginoulhiac: le schéma est maigre et incomplet. Le Pape y est trop séparé. Les Pères ne le considéraient pas comme tel, mais s'en te­naient à l'autorité des églises apostoliques, du corps des pasteurs, etc. (citations). Il faudrait ainsi représenter le Pape comme juge avec le col­lège apostolique et épiscopal…

Mgr de Preux, évêque de Sion, au nom de la commission répond éloquemment à l'évêque de Saint-Gall. Il n'y a rien à craindre pour la Suisse. À défaut de ce prétexte pour persécuter les catholiques, le gou­vernement en trouverait d'autres. Si même il y avait à souffrir, il fau­drait le faire pour le bien de l'Église. C'est le bien de l'Église que l'au­torité de son chef, le développement de son dogme, la condamnation des erreurs rendue plus facile, plus prompte. C'est l'honneur du Concile de ne pas craindre de définir… Il remercie l'évêque de Saint-Gall d'un ouvrage sur l'Irlande dont il lui a fait hommage et qui défendait l'in­faillibilité.

L'évêque d'Urgel répond à quelques difficultés. Saint Léon a expli­que l'utilité des Conciles non pas «ad definiendum», ce qu'il pouvait faire seul, mais pour que l'erreur soit plus efficacement détruite pleniori Concilio. Les évêques ont jugé lés définitions des Papes comme au juge­ment dernier les Apôtres jugeront après le jugement particulier prononcé par Notre Seigneur…

Mgr Salas, évêque Chilien [Concepcion]: discours éloquent et plein d'esprit. Toute l'Amérique du Sud désire cette définition. On oppose les grands diocèses, il y en a aussi de grands qui la désirent, et puis: an potentiorum civitatum etiam potentiores Ecclesiae? An ubi potentiores civitates, ibi scientia, veritas, etc.? «Non multi sapientes, non multi nobiles… infirma mundi elegit Deus ut confundat fortia». On écarte les missionnaires apostoliques, que peut-on leur opposer: Ministri Christi sumus, ils répondront: plus ego… in multis laboribus, in carceribus, in vigiliis, etc. Qui sunt isti magistri episcoporum, qui viennent dans des libelles gratuits, hospite insalutato, et s'introduisent chez les évêques pour leur donner des leçons de morale…

Mgr Rota, de Guastalla: la doctrine de l'infaillibilité est certaine et n'est condamnée par aucune école, aucun auteur; l'autre est proche de l'hérésie. Que les opposants prennent garde à leur conscience… Quant aux autres s'ils se trompent, ils auront droit de le reprocher à Dieu, qui a muni cette doctrine de tant d'autorité et d'arguments.

Mgr Manning [della deputazione] laisse aux autres la question théo­logique. Il parle des protestants. Il a une double expérience: il a vécu quarante ans dans le protestantisme et vingt dans le catholicisme. Il a eu et il a encore avec eux les plus intimes relations. Ils s'étonneraient si l'Église ne définissait pas ce qu'elle croyait et ce qu'elle avait dans sa Tradition, elle qui tient pour révélé ce que tiennent la Tradition et l'École. Lui-même avant sa conversion était éloigné de l'Église catholique parce qu'il. voyait les ultra-montains et les gallicans divisés sur le sujet de l'infaillibilité et sur l'œcumenicité de certains Conciles.

Mgr Mac Evilly, Galviensis, irlandais: discours énergique dans le même sens. Il atteste la foi de l'Irlande. Il a assisté, il y a vingt ans, à un concile national où on a affirmé ce dogme. Toute l'Irlande demande cette définition, même les réunions de laïques. Il condamne ces bro­chures, anonymes ou non, qui font la leçon aux évêques contre la foi de l'Église.

Mgr Clifford, évêque de Clifton, suppose (avec raison) qu'il est im­portun en venant encore parler de l'inopportunité: Il s'étend sur les conditions du gouvernement anglais, le serment prêté autrefois et ap­prouvé par Rome «qu'on n'était pas obligé à tenir l'infaillibilité du Pape». Il abandonne les arguments des grands évêchés et de l'opinion.

Mgr Senestrey, évêque dé Ratisbonne: au nom de la députation. Cette croyance a été donnée à l'Allemagne par Saint Boniface. Il cite Albert le Grand etc.

NN. SS. [Gérault de] Langalerie et Maupoint renoncent à leur tour de parole.

Mgr Vérot. La définition serait un sacrilège! La foi des Irlandais ne prouve rien. Ils croient même à l'infaillibilité de leurs curés et bat­traient qui la nierait. Les incrédules rient des pratiques et croyances religieuses. A quelqu'un qui riait de voir bénir les ânes, il a répondu que pour en comprendre l'efficacité, il fallait se mettre à leur place… L'ora­teur est interrompu plusieurs fois par des exclamations générales.

Le cardinal Capalti lui dit: «Si non habeas nisi nugas addendas, cedas locum alteri». On donne la parole au suivant.

Mgr Bonnaz, Csanadiensis, au nom des orientaux: «doctrina talis de primatu et infallibilitate est nova et inaudita».

Mgr Bravard, de Coutances, développe les inconvénients extrinsèques de la définition. Il rapporte que l'évêque d'Evreux s'estimait heureux d'avoir envoyé à Rome ses observations contre cette définition et de mourir avant la discussion.

Mgr Papp-Szilàgyi, évêque de Gross-Varadin. Il n'y a rien à craindre pour les Orientaux. Cette doctrine est dans leur liturgie et dans les Pères Grecs.

Mgr Spalding, de Baltimore, au nom de la députation: il n'y a rien à craindre pour les protestants. On ne demande pas l'infaillibilité séparée. L'Église ne peut pas être décapitée ni mourir. On a cité son prédéces­seur Kenrick, il prouve qu'il a tenu l'infaillibilité et qu'il a écarté seu­lement l'hypothèse de la séparation.

Mgr Le Breton, évêque du Puy, renonce à son discours. Il demande seulement qu'on abrège la discussion générale. Il condamne les brochu­res actuelles.

Mgr Lachat, de Bâle, atteste la foi de son diocèse. Si ses prédécesseurs avaient tenu cette doctrine, il n'aurait pas à pleurer le triste état de ce pays.

Mgr Lenti, de Nepi, renonce aussi à son discours et demande qu'on arrive à la discussion spéciale. L'opportunité de la question a été jugée par le Pape après les deux postulata. Peu de Pères, un ou deux, con­tredisent le fond: qu'on arrive à la discussion spéciale.

Mgr Gastaldi, de Saluces, est heureux d'avoir à défendre les préro­gatives de Pierre toujours vivant dans ses successeurs. Il est triste de voir la division de l'épiscopat qui serait déjà terminée si on avait com­mencé par cette question. Il passe en revue éloquemment les difficultés tirées dé l'Écriture, des Pères, de la raison…

Mgr Garrelon, Nemesinus (vicaire apostolique de Quilon), lit rapi­dement un discours favorable.

Mgr Schaepman, archevêque d'Utrecht, au nom de la commission. L'épiscopat hollandais est unanime et ne craint rien pour les protestants.

L'abbé de Saint-Paul renonce à la parole.

Mgr Valerga, patriarche de Jérusalem. Beau discours. Il compare le gallicanisme au monothélisme, les objections des gallicans à celles de Sergius et de Pyrrhus, la marche de l'hérésie, la définition…

Mgr Claret y Clarà, Traianopolitanus in part. (espagnol). Discours favorable.

Mgr Purcell, de Cincinnati, tient et a souscrit dans les conciles parti­culiers qu'on doit obéir aux décisions du Pape et qu'on ne doit pas en appeler aux Conciles; mais il ne peut en conscience souscrire au décret. Il ne sait pas quand le Pape parle ex cathedra. Parle-t-il toujours ainsi? Les Papes se sont souvent trompés et ont été contredits par l'Église, tels Vigile, Zosime, etc. Et puis on n'a pas encore déclaré avec autorité que l'Église renonçait au droit sur les royaumes. Boniface VIII, Paul III, Pie V ont cru avoir reçu de Dieu ce pouvoir. On objecte les Conciles de Lyon et de Latran, mais ceux-ci ne parlent pas de droit divin. Les peuples et les rois s'opposeront à l'Église, craignant qu'on ne déduise de l'infaillibilité cette autorité sur les nations.

Mgr Connolly, archevêque d'Halifax, oppose à Mgr Manning le péril qu'offre la définition pour les protestants d'Amérique. Il ne s'oppose qu'à l'opportunité. Le gallicanisme n'est noté par les Papes d'aucune censure, quoi qu'en ait dit Mgr Manning. Les censures données par les théologiens ont été déclarées plusieurs fois par les Papes n'avoir pas de valeur. C'est une question libre. Lui rejette la définition et ne permet­trait pas d'enseigner cette doctrine.

Au 2 mai, L. Veuillot écrivait: «Il est question de cinq ou six notes dans le goût de la note Daru.11) Elles ont été, dit-on, remises ces jours-ci au cardinal secrétaire d'État par diverses puissances, plus ou moins ca­tholiques: France, Autriche, Prusse, Bavière, Portugal. L'Angleterre aurait daigné apostiller la note française. L'Angleterre se trouve en droit d'intervenir, sans doute pour garder la religion d'Irlande! A ce titre, nous ne voyons pas pourquoi la Russie s'est abstenue; n'a-t-elle pas à garder la foi de la Pologne, menacée par l'infaillibilité? Un évêque me disait: je pense que le Saint-Père, réunissant toutes ces notes, leur don­nera la bénédiction de l'encens: ab illo benedicaris in cujus honore cre­maberis. Non, les notes ne seront pas brûlées. Elles passeront aux archi­ves, réunies à beaucoup d'autres du même genre, qui depuis un siècle attestent la sagesse des gouvernements chrétiens de l'Europe, et leur servent de monument mortuaire».12)

Au 25 mai, L. Veuillot recevait un magnifique bref du Pape comme récompense de sa vaillante campagne. Au 8 mai, il avait remis au Saint-­Père l'adresse suivante: «Très Saint-Père, prosterné à vos pieds, j'ap­porte une nouvelle offrande fournie par la souscription ouverte dans les bureaux de l'Univers afin de vous aider à subvenir aux frais du Concile (100.000 fr.). Cette souscription, qui continue, est alimentée par l'obole du pauvre, surtout par l'obole du prêtre, plus pauvre en France que les plus pauvres, mais plus généreux que les plus opulents. Ces oboles sont des actes de foi et d'amour envers le Vicaire de Jésus-Christ. Elles con­fessent votre mission d'autorité et de salut. Elles remercient notre Sau­veur qui a donné Pierre au monde, et qui, en nos jours inquiets, vous a mis sur ce trône de lumière et de justice pour abattre, pour confirmer et pour édifier, de telle sorte que par ce magistère infaillible nos esprits reçoivent la certitude et nos âmes la paix. Pour les souscripteurs, pour les collaborateurs de l'Univers et pour moi, leur heureux intermédiaire, j'implore humblement la bénédiction apostolique ». Louis Veuillot.13)

Le Saint-Père a daigné répondre par lé Bref suivant: «A notre cher fils Louis Veuillot, Pie IX, Pape. Cher fils, salut et bénédiction aposto­lique. Les marques de dévouement et d'amour que Nous avons reçues de vous, en votre nom et au nom de vos collaborateurs lorsque vous Nous offriez la riche souscription confiée à votre journal par les fidèles, Nous ont été très agréables, et l'offrande elle-même Nous a fait un vif plaisir, parce qu'elle est le gage de la piété filiale d'un grand nombre et aussi parce qu'elle est le fruit du combat que vous soutenez depuis longtemps pour la religion et pour ce Saint-Siège. Ce don Nous a paru encore plus beau et plus noble, lorsque Nous avons appris que c'est principalement par le clergé secondaire de France, si dénué de ressources, que ces secours ont été réunis pour Nous. Le nombre de ceux qui ont concouru à cette œuvre d'autant plus grand que les offrandes individuelles ont dû être plus petites, d'où il résulte clairement que l'antique simplicité de la foi vit dans la plupart, et que ce clergé est tel qu'il travaille ardemment à confirmer et à promouvoir l'union étroite des âmes avec cette Chaire de Vérité. Rien ne peut Nous être plus doux en ce temps où, le cœur rempli d'affliction, Nous voyons quel péril font courir aux âmes les erreurs qui se multiplient partout, et par quels efforts les ennemis de l'Église et de ce Saint-Siège travaillent à séduire nos fils et à les séparer de tous. C'est pourquoi Nous vous félicitons, vous et vos collaborateurs, de l'heureux résultat de vos travaux: Nous félicitons ceux qui le font servir à l'affermissement de leur propre piété; Nous félicitons le Clergé qui, uni dans une action commune, vous soutient par son exemple et par son zèle, et Nous demandons pour -tous une récompense digne de leur religion et de leur charité. Comme gagé de la faveur divine et dé notre bienveillance paternelle, Nous donnons avec amour la bénédiction apostolique à Vous, cher fils, à vos collaborateurs, à votre famille et aux autres, objet de nos louanges.

Donné à Rome, près Saint-Pierre, le 19 mai 1870, de notre Ponti­ficat l'an vingt-quatre ». Pie IX, Pape.14)

Le Pape avait voulu encourager ses amis et montrer une fois de plus la voie à suivre. Il constatait la foi du clergé de France et son union au Saint-Siège.

Le 25, c'était la belle fête de l'Ascension. Le Saint-Père se rendit a Saint-Jean de Latran, et du balcon de la basilique il bénit la foule immense qui remplissait la place. On entendait sa voix pleine et harmo­nieuse jusque dans l'avenue qui s'en va vers Sainte-Croix de Jérusalem.15) Le 27, il se rendit à Saint-Philippe de Néri. L'accueil populaire a été comme toujours aussi enthousiaste qu'ému.16)

Une nouvelle brochure anonyme a paru sous ce titre: L'unanimité morale nécessaire dans les Conciles.17) C'est habile. Les arguments sont tirés de Bossuet dans sa Défense de la déclaration de 1689.18) En fait on a recherché à Trente l'unanimité morale. C'était facile. Les protestants s'étaient retirés. S'ils avaient pris part au Concile, il aurait bien fallu passer outre et les condamner quand-même.»19)


1)
Per questa lettera e per quella successiva il Dehon si limita ad un semplice accenno. Abbiamo aggiunto le parti riguardanti il Concilio, trascrivendole dal­l’Epistolario.
2)
Nel Diario è riportata la prima parte della lettera, che contiene un caldo appello al padre, perchè si accosti alla comunione pasquale, Noi abbiamo preferito trascrivere dall’Epistolario la seconda parte, che parla dello svolgimento del Concilio.
3)
Il 25 aprile era stato distribuito ai Padri il nuovo testo dello schema de parvo Catechismo (cf. Coll. Lac., VII, 664-665), riveduto dalla deputazione della disciplina secondo le osservazioni fatte dai vescovi nella prima discussione. Il titolo era: Schema constitutionis de parvo Catechismo a Deputatione pro rebus disciplinae ecclesiasticae reformatum Patrum examini propositum. Allo schema era annessa una relazione (cf. Coll. Lac., VII, 665-666), che illu­strava i criteri seguiti nel lavoro dalla deputazione.
4)
Il quinto ed ultimo oratore della giornata fu Gastaldi. Egli difese lo schema e propose che il Concilio non solo approvasse, ma anche componesse il Catechismo unico per tutti.
5)
Cf. Coll. Lac., VII, 740. I Padri della maggioranza inviarono due lettere di ringraziamento al Papa (cf. Coll. Lac., VII, 979): la prima portava 48 firme e la seconda 5. A loro volta 71 Padri della minoranza sottoscrissero una nota di protesta al card. Bilio per la modificazione dell’ordine del giorno (cf. Coll. Lac., VII, 980 ss).
6)
Dubreil si riferiva al discorso del carda Desprez, che aveva criticato alcuni punti del vecchio catechismo napoleonico.
7)
Gli emendamenti, proposti per iscritto dai vari oratori, furono stampati e distribuiti a tutti i Padri (cf. Coll. Lac., VII, 741).
8)
Cf. Schema constitutionis de parvo Catechismo iuxta emendationes a Con­gregatione generali admissas reformatum (Coll. Lac., VII, 666-667).
9)
Lo schema dunque restò come era stato approvato nella congregazione gene­rale precedente. Perchè divenisse definitivo mancava soltanto l’approvazione, nella sessione pubblica, dei vescovi è del Papa. Tale approvazione non ci fu, perchè la schema non venne presentato nella quarta sessione, che fu l’ultima del Concilio.
10)
Cf. Coll. Lac., VII, 290-301. Il nuovo schema, Constitutio dogmatica prima de Ecclesia, elaborato dalla deputazione della fede dal 27 aprile all’8 maggio, com­prendeva un breve proemio, quattro capitoli e tre canoni, relativi ai primi tre capitoli: la conclusione del cap. IV faceva le veci del canone. Il proemio affermava che Pietro è il fondamento visibile e perenne dell’unità della Chiesa. Il cap. I opponeva la dottrina del primato agli errori; il cap. II riguar­dava la perennità del primato; il cap. III la sua natura; il cap. IV l’infallibilità pontificia. Il proemio, i primi tre capitoli e i tre canoni corrispondenti riproducevano so­stanzialmente il cap. XI e i relativi canoni dello schema de Ecclesia catholica, re­datto dalla commissione preparatoria. Il cap. IV, sulla infallibilità, è il riadattamento dell’antico cap. XI aggiunto. Il nuovo schema fu distribuito ai Padri il 9 maggio 1870 insieme ad una rela­zione (Schrader-Maier); che illustrava i criteri seguiti dalla deputazione della fede nella redazione.
11)
Il Memorandum, che portava la data del 5 aprile, solo il 22 aprile fu presentato a Pio IX da Banneville, perchè l’udienza dovette essere ritardata a causa delle cerimonie della settimana santa. Cf. il testo nella Coll. Lac., VII, 1563-1566. La nota francese apparve sulla stampa prima ancora che fosse stata consegnata al Papa. Daru, quando Banneville, latore della nota, era partito dalla Francia per far ritorno a Roma, ove giunse il 14 aprile, aveva inviato copia del documento ai diversi governi europei, sollecitando il loro appoggio. Questi intervennero con passi diplomatici e con varie note. I documenti sono raccolti nella Coll. Lac., VII, 1569-­1590 (documenta ad Austriam spectantia); ibid., 1591-1597 (documenta spectantia ad Bavariam, Hispaniam, Italiam); ibid., 1597-1610 (documenta spectantia ad Bo­russiam). Cf. GRANDERATH, Histoire du Concile du Vatican, II-2, Bruxelles 1911, pp. 362-425.
12)
Rome pendant le Concile, II, Paris 1872,. p. 66.
13)
Rome pendant le Concile, II, Paris 1872, pp. 209-210.
14)
Il breve era in latino (cf. Rome pendant le Concile, II, Paris 1872, pp. 210­211). Dehon ne riporta la traduzione francese dello stesso Veuillot (ibid., II, pp. 211-212).
15)
I due aggettivi pleine e harmonieuse sono del Veuillot (cf. Rome pendant le Concile, II, p. 220).
16)
Cf. L. VEUILLOT, Rome pendant le Concile, II, p. 221.
17)
Durante il Concilio Vaticano I, i Padri dell’opposizione, nella speranza di riuscire ad impedire la definizione della infallibilità pontificia, fecero propria la tesi della necessità di un consenso moralmente unanime per le definizioni conciliari in materia di fede. La questione venne vivacemente discussa sulla stampa e si susseguirono parecchi opuscoli a sostegno dei diversi e contrastanti punti di vista. Ci limitiamo a citare alcuni di tali opuscoli. Per la tesi della unanimità morale apparvero due scritti anonimi: L’unanimité dans les conciles œcuméniques, Paris 1870, pp. 72; De l’unanimité morale nécessaire dans les conciles pour les définitions dogmatiques (Mémoire présenté aux Pères du Concile du Vatican), Naples 1870, pp. 51. Questa seconda è la brochure, cui fa riferimento qui il Dehon, come risulta dal racconto del Veuillot, ché il Dehon segue da vicino. Cf. Rome pendant le Concile, II, Paris 1872, p. 220 s. Per la tesi contraria scrissero V. STECCANELLA, Adversus novam doctrinam de necessitate unanimis episcoporum consensus theologica disquisitio, Romae 1870, pp. 66; G. PENNACCHI, De suffragiorum pluralitate in Conciliis generalibus contra «l’unanimité dans les Conciles œcuméniques», Romae 1870, pp. 28; F. ZINELLI, Della unanimità dei suffragi nei decreti dommatici dei Concili ecumenici, Torino 1870, pp. 74. La presidenza del Concilio fece studiare la questione dal P. Sanguinetti e dal Fessler, segretario del Concilio. Il primo, nella sua relazione del 5 aprile 1870 (Quinam suffragiorum numerus requiratur in Concilio œcumenico ad definiendum dogma fidei), dimostrò che non era necessaria l’unanimità morale. Fessler poi nella sua relazione (Praxis Conciliorum universalium de numero suffragiorum in quaestio­nibus fidei dogmaticae definiendis) sostenne che tale necessità non poteva dedursi dalla prassi degli antichi Concili.
18)
Il rilievo è di L. Veuillot, il quale, nell’impugnare la brochure apparsa anonima a Napoli, il 29 maggio tra l’altro scriveva: «Dans lé fond, ils ne se sont pas donné beaucoup de peine, ayant tout pris, textes et arguments, dans la Défense de la déclaration de Bossuet, où tout le thème de l’unanimité nécessaire est écha­faudé pour soutenir le quatrième article gallican. Ils ne l’ont pas dit, mais on l’a bien vu » Rome pendant le Concile, II; p. 229, nota 1.
19)
Cf. L. VEUILLOT, op. cit., II, p. 226 ss.
  • oeu-dco-0002-2122.txt
  • ostatnio zmienione: 2022/06/23 21:40
  • przez 127.0.0.1