oscmnd-0006-0025

EXCERPTA

Un cahier manuscrit (23 x 34 cm) de 25 + 216 p., (AD, B 14/4: n ° 98.01). Nous nous sommes limités à choisir dans les «Extraits» les notes de lectures qui nous ont paru les plus importantes, concernant des arguments sociaux. Ce choix a été réalisé par le P. A. Vassena scj.

Si la nature humaine pouvait supporter un régime parfait, le pouvoir social serait l'attribut non de la naissance, mais du mérite reconnu. La perpétuité héréditaire du pouvoir, destinée à remé­dier à des causes d'instabilité sociale, a sa raison dans l'infirmité même de notre nature. L'ordre contraire qui marque la dignité de la nature humaine, éclate d'une manière éminente dans la société spirituelle (l'Eglise), dont il fait essentiellement partie… L'organi­sation militaire des pouvoirs temporels tient aussi au côté défec­tueux de notre nature; et la guerre, alors même qu'elle est la pro­tection de la justice, est toujours le signe de cet état permanent de division dans lequel vit l'humanité. Mgr Gerbet, v. 2. pp. 58-59.

In hoc reges, sicut eis divinitus praecipitur, Deo serviunt in quantum sunt reges, si in regno suo bona jubeant, mala prohi­beant, non solum quae pertinent ad humanam societatem, verum etiam quae ad divinam religionem. St Aug. Ad Cresc. L.III. 57.

In hoc serviunt Domino reges, in quantum sunt reges, quum ea faciunt ad serviendum illi quae non possunt facere nisi reges. Ep. 185 ad Const. Bon. 19. Christianos imperatores non adeo felices dici­mus quia vel diutius imperarunt, vel imperantes filios morte placida reliquerunt, … sed si suam potestatem ad Dei cultum maxime dila­tandum, majestati ejus famulam faciunt. id. Lib. V De Civ. Dei.

Certum imprimis est de facto non omnia esse communia, sed multa esse sub aliquorum dominio. Certum item est hoc non solum licitum esse, sed etiam expediens, imo et necessarium ad vitam politicam humanam. Si enim omnia communia essent, cum communia facile negligantur, cessaret magna ex parte diligentia in excolendis (p. 10. col. 2) agris, in conservandis fructibus, et procuran­dis quae ad vitam humanam necessaria sunt; pauci enim essent qui ad communem solum utilitatem laborare vellent nihil sibi pro­prium sperantes, quod non haberent qui ea omnia negligerent: unde bella, jurgia et dissensiones frequenter nascerentur, omnibus rapientibus quaecumque invertirent, vi usurpantibus potentioribus ad proprium usum.

Cum hoc tamen stat quod in aliqua bonorum (hominum) con­gregatione utilius sit ad pacem nihil proprium singulos habere, ubi nimirum propter singulorum perfectionem, et minorum concor­diam, haec omnia inconvenientia facile vitantur, deputatis aliqui­bus qui res communes administrent, et singuos necessaria provi­deant, prout fit in cœtibus religiosis, et initio nascentis ecclesiae fideles Hierosolymitani aliquandiu observarunt. In tanta vero horum multitudine modus ille vivendi utilis non esset, quia perfectio apud paucos reperitur unde crescente etiam fidelium multitudine, oportuit fideles dominia etiam rerum privata retinere. Quod etiam in ipso statu clericorum factum est, qui cum initio vitam etiam communem agerent; crescente tamen eorum numero, propter eadem inconvenientia oportuit, quod proprium haberent, et vita illa communis apud paucos, et electos, hoc est pertes religiosos reti­neretur. Lugo disp. 6.

En Angleterre les comtés agricoles montrent un singulier bien­être et les comtés manufacturiers abondent de pauvres. La taxe (p. 11. col. 1) des pauvres secourt plus du quart de la population. - A Rome, les personnes secourues par les institutions de charité for­ment à peu près 15% de la population.

- La charité légale détruit la spontanéité dans le donateur, la gra­titude et la moralisation dans celui qui reçoit.

- La charité sociale au moyen de secours mutuels et de prévoyan­ce est moralisatrice.

- La charité individuelle doit être réglée par la prudence. L'extinction de la mendicité doit être obtenue par l'instruction et la moralisation du peuple.

Les lois civiles ne peuvent jamais créer la morale, elles doivent toujours la suivre et l'enjoindre. Vous avez pour la première de vos lois qui est la base de toutes les autres une religion…, il faut que toute votre législation s'y conforme, sinon, vous êtes en contradic­tion avec vous-même; et votre gouvernement reste dans le chaos où il a toujours été, par le défaut de concordance entre les lois de Dieu et les lois des hommes. La doctrine sur l'usure, sur les con­trats, sur tous les rapports de la morale, comme sur le dogme et les sacrements appartient à l'Eglise seule … Il y a sacrement où l'Eglise catholique dit qu'il y a sacrement; il y a bonnes mœurs où l'Eglise catholique dit qu'il y a bonnes mœurs. Toutes les puissances tem­porelles ensemble ne pourraient pas changer un iota à la vérité de ces principes. Fauchet, De la religion nationale.

Si j'avais un conseil à donner aux chrétiens de nos jours et à tous les prêtres, ce serait de ne pas rester étrangers, comme ils le font trop souvent, aux questions sociales, d'être mêlés à la vie (p. 19. col. l) des paysans et des ouvriers, occupés de leurs logements, de leur nourriture, de leurs salaires, de leurs enfants, de leurs vieil­lards, de leurs sociétés mutuelles, de leurs lectures, de leurs plaisirs. Pourquoi? eh! mon Dieu pour tout soulager, tout éclairer, tout améliorer. Ce devrait être là notre passion dominante en dehors de toute politique, de toute ambition, de toute récrimination … Mgr Dupanloup, Lettre aux Contemporains.

«Les communautés rurales laïques ont couvert l'Europe au moyen âge». Troplong - Le principe de Proudhon était l'individua­lisme outré. - Les socialistes des trois écoles principales (Owen, St-Simon, Fourier) ont fini par se laisser entraîner par Lammenais dans le courant révolutionnaire. - (p. 36. col. 2) V. Walter Scott: Le Monastère = Bonnemère: Hist. des associations rurales = Dupin Ainé: La communauté des fends en Nivernais.

Il naît en France un enfant naturel sur douze. - Il naît 70.000 enfants naturels en France par an. On compte un mort-né sur 28 naissances. L'excès des naissances masculines sur les naissances féminines va en diminuant. - Les naissances légitimes qui étaient en moyenne de 3,73 pour un mariage de 1820 à 1830 ne sont plus que de 3,10 de 1850 à 1860. Il y a augmentation dans la durée de la vie moyenne. V. Annuaire du bureau des long. p. 1864. A Paris il naît un enfant naturel sur 3,4. Ibid.

Christiani non desinunt esse homines et cives, et proinde membra reipublicae temporalis: ergo debent habere leges, regulam actionum suarum humanarum, qua dirigantur in commerciis et consuetudine cum aliis hominibus. Non sufficit vero lex naturels, quae ad particu­laria non descendit. Non sufficit lex evangelica, quia (p. 49. col. 1) illa tractat solum de rebus divinis et cœlestibus, ut notum est. Lex autem divina politica Testamenti veteris jam cessavit, solum enim conveniebat uni illi populo Judaeorum et in illo statu. - Reges sunt legati et ministri Dei. Prov. 8. Sap. 6. Rom. 13. 1 Pet. 2. - Ibid. Bellarm, De Eccl. lib. De lai= cis.

Le Fils de Dieu a voulu exercer sur la terre le métier de charpen­tier, et il était connu comme tel «nonne hic est faber fabri filins?» Marc 6.3, Mat. 13.55. Dans un sermon sur la passion, St Zénon don­ne pour motif de cette préférence, que les charpentiers ont toujours entre les mains des pièces de bois et des clous, et que Jésus aimait à voir ces objets, parce qu'ils lui (p. 55. col. 2) représentaient les clous et la croix qui devaient être les instruments de sa mort. Dei Filins illis delectabatur operibus quibus lignorum segmentis et clavis sibi saepe futurae crucis imago praeformabatur. S. Lig.

Quand il s'agit du progrès en général on doit mettre en premiè­re ligne les principes de morale qui doivent de plus en plus péné­trer dans les mœurs, dans les lois civiles et dans les institutions sociales et politiques. Au second rang on place l'extension et le perfectionnement de toutes les sciences, de toutes les connaissan­ces humaines. Le progrès économique, le développement de la richesse n'occupe que le troisième rang. Il ne vient qu'à la suite de ces intérêts supérieurs et leur demeure subordonné. Il faut cher­cher exclusivement dans l'ordre moral la cause première de notre progrès, la raison de nos efforts et l'explication de notre destinée.

- La production des richesses a pour dernier terme et pour raison suprême, non point la jouissance par la consommation, mais l'usage dans les limites de la vertu. - Seule la morale chrétienne a des motifs assez élevés pour triompher des résistances de notre nature, aussi bien lorsqu'il s'agit de secouer la paresse dans le travail que de bor­ner notre ambition dans la richesse. - La solution du problème social se reduit à la pratique de certaines vertus; ces vertus exigent le sacri­fice de penchants qui exercent sur la nature humaine une grande (p. 60. col. 2) puissance d'attraction et dont la religion catholique peut seule triompher. - De Metz - Noblat, Les lois économiques.

L'homme du peuple est celui qui pourvoit à son existence par le travail. - Le bourgeois est un homme du peuple qui a su se modé­rer et se former un capital par le travail et par l'épargne. - Le noble (autorités sociales de M. Le Play) est un bourgeois qui s'est distin­gué et illustré. - Le prêtre est l'homme de toutes les classes qui s'est sanctifié et travaille à sanctifier les autres.

L'objet d'une société bien organisée est de travailler à l'ascen­sion de chaque classe à la classe supérieure.

1° A l'homme de peine qui vit (p. 74. col. 2) de son travail, elle doit offrir des institutions qui lui ouvrent un passage vers la classe bour­geoise, c'est-à-dire en l'aidant à faire fructifier et capitaliser ses épargnes.

2° Au bourgeois la société doit ouvrir une voie pour s'élever aux rangs supérieurs par l'éclat des services et par la supériorité du talent et du caractère.

3° L'aristocratie se recrutant ainsi de toutes les supériorités indi­viduelles, est l'élément par excellence de la force et de la grandeur nationale; elle est le ferment social et civilisateur des nations com­me l'Eglise en est le ferment divin. En elle se résument les efforts et les vertus de tout un peuple. Enlever à un peuple son aristocra­tie, c'est lui ôter le cœur qui l'anime, la force qui le tient debout et la tête qui le dirige.

L'hérédité étant en toutes choses la prolongation et la capitalisa­tion des mérites acquis par l'homme, est aussi un facteur essentiel de l'organisation sociale. L'honneur (dit-il) est le premier capital d'une famille; il est sa première richesse pour elle et pour l'Etat. Abolissez l'hérédité du capital matériel, le pays tombe dans la misè­re: aucun homme ne s'astreindra à amasser des (p. 75. col. 1) biens qui ne passeront pas à ses fils. Abolissez l'hérédité du capital immatériel de l'honneur, la nation tombe dans la dernière déca­dence: peu d'hommes poursuivront un honneur qui s'éteint avec eux. L'argent sera l'unique but. Les conséquences sont le droit à l'anoblissement, l'hérédité de la pairie, le rétablissement du droit de tester et au sommet la dynastie royale qui a été le séculaire fac­teur de la nation française. Telle est la pyramide rationnelle et vivante qui constitue un grand peuple…

* Importations. Exportations
Années Importations Exportations
1864 2.528.150.000 fr. 2.924.168.000 fr.
1868 3.303.729.000 fr. 2.789.914.000 fr.
1873 3.600.178.000 fr. 3.936.895.000 fr.

Différence en faveur des exportations, 326 millions environ. -

- Détail des importations en 1873:

Objets d'alimentation: 918 millions

Matières premières: 2.161 millions

Objets fabriqués 349 millions

Autres marchandises 171 millions

Houille 139 millions

- Détail des exportations des fils et tissus:

tissus de soie 521 millions

de laine 346 millions

de coton 90 millions

de lin et chanvre 28 millions

fils de laine 32 millions

(p. 75. col. 2)

Les «œconomies politiques» de Sully. (Mémoires de Sully, année 1608). Les Levées, du temps de Charles VII, par forme de capitation ou de réalité sur les héritages, suivant les provinces s'éle­vaient pour toute la France à 1.800.000 livres - Louis XI les porta à 4.662.000 livres - Louis XII à 4.865.000 - François I à 14.044.000 - Henri II à 12.098.000 - François II à 9.104.000 - Charles IX à 8.738.000 - Henri III à 31.654.000 - Sous Henri IV, il revenait de deniers bons en son épargne, moitié provenant des tailles et moitié des fermes, environ 16 millions de livres. - Toutes ces tailles étaient votées par les Etats comme dons.

La politique royale en France fut conforme à la liberté populai­re. Il s'était élevé au moyen âge une foule de tyrannies diverses que la royauté travaille à détruire. Louis le Gros et Suger sous Louis VII y travaillèrent par l'épée et par la loi.

Les rois gouvernaient avec le concours des Etats auxquels ils demandaient les impôts ou tailles à titre de don et ils prenaient conseil de ces Etats pour gouverner et réformer le pays.

Les abus introduits dans les trois (p. 76. col. 1) ordres par la déca­dence des XVe et XVIe siècle, par les longues guerres et par l'excès du protestantisme portèrent les trois Etats en 1614 à demander à la royauté de prendre en main le pouvoir absolu pour opérer les réformes nécessaires. Les Etats de 1614 furent unanimes sur ce point. Richelieu y parla dans ce sens au nom du clergé et plus tard il fut chargé d'exécuter ce programme. C'est donc la volonté du peuple qui amena l'absolutisme exagéré du XVIIe siècle. Du reste cet absolutisme profita en un sens au peuple en appelant aux fonc­tions tous les hommes capables, bourgeois aussi bien que nobles.

La Régence après Louis XIV réagit au profit de la noblesse. Saint­Simon appelle le règne de Louis XIV un long règne de vile bourgeoi­sie. La maison d'Orléans qui depuis a flatté la bourgeoisie et le peu­ple commença donc par l'opposer à la politique populaire des rois.

Louis XVI aurait pu reprendre l'œuvre de Louis XIV et faire toutes les réformes demandées. Il n'eut pas assez d'énergie.

La population en 1614 était estimée en France à 40 millions. - Il y avait dès 1576, 12 archevêchés, 96 évêchés, 12 paieries, 7 parle­ments (p. 76. col.2) et un échiquier, douze gouvernements et 17 généralités. Il pouvait y avoir quatre millions de maisons (à 10 habi­tants par maison?) et 152.000 grandes paroisses (de 300 habitants en moyenne).

A Lyon - Dîner à la préfecture, voir Le Monde du 13 Mars.

- Marseille - 22 mars - Les ouvriers, membres des cercles catho­liques, au nombre de 4.270, sont allés faire bénir leurs bannières au sanctuaire de N.-D.-de-la-Garde et se sont déployés en proces­sion. La manifestation a été splendide. Mgr l'évêque officiait. Le général avait mis la musique militaire à la disposition des cercles. L'émotion de la foule était indescriptible.

En 1780 il y avait en France, d'après Necker, une naissance illégi­time sur 47; de 1817 à 1860 la proportion était de 1 sur 14; de 1860 à 1869 elle était de 1 sur 13; (p. 77. col. 2) En Bretagne elle est seule­ment de 1 sur 30. A Paris la proportion est de 1 sur 3,4. - A St­-Quentin de 1 sur 4,5.

Le système des tours exista en France du 1811 à 1840. - Les secours aux filles-mères coûtent déjà autant que le service des enfants trouvés. Ce système de secours démoralise la mère qui une fois sa réputation perdue est livrée sans défense à toutes les séduc­tions. - Il démoralise l'enfant qui doit subir un tel exemple et une telle éducation. - Il démoralise la société en donnant au vice une sorte de prime officielle, tandis que bien des honnêtes familles sont dans le besoin. - Le système des tours a aussi ses inconvénients. - Ce qu'il faut faire c'est d'empêcher la dissolution des mœurs propagée par la littérature et le théâtre, et confier dans les hospices dépositaires la réception des enfants à des religieuses, qui puissent joindre à la garantie du secret les conseils et les exhortations.

Cette pratique est à peu près universelle dans le nord, l'orient et le midi de l'Europe; et elle est encore fort répandue au centre et dans l'occident. Elle résiste de nos jours, dans les localités entières de cette dernière Région aux influences perturbatrices émanant des révolutions; des corruptions urbaines et des agglomérations manufacturières. Ces influences agissent, au contraire, avec une force irrésistible dès que les populations ont accepté les facilités d'établissement que présentent les foyers pris en location. Ce désordre se lie en France aux régimes de la famille instable (§ 32). Il y a pris, même chez les familles riches, une extension qui est pour tous les Européens un sujet d'étonnement et de blâmes. La réforme sociale, t. 1er, p. 330 à 348.

Les gouvernements locaux de chaque Etat concentrent dans le département rural et la commune urbaine (p. 80. col. 2) (§ 68) toutes les libertés qui n'entravent pas la légitime action des autorités pré­posées à l'Etat et à la Confédération. La vie privée repose sur la liberté testamentaire (§ 42) et la famille souche (§ 6).

La famille reste unie, stable et féconde, elle ne demande sa pros­périté qu'au travail et à la religion.

Elle possède, outre la liberté religieuse, toutes les libertés de la vie privée, c'est-à-dire celles qui ne peuvent pas compromettre les intérêts publics.

Enfin, les ateliers de travail, les communautés et les corporations privées vivent dans une paix complète en respectant les prescrip­tions de la Coutume et du Décalogue. Grâce à ses constitutions, les plus libres dont l'humanité ait joui jusqu'à ce jour; grâce à la sévé­rité du climat, à l'absence des grandes richesses et à l'éloignement des principales voies commerciales la foi religieuse et la paix publi­que se sont affermies mieux qu'elles ne l'ont jamais été sous les régimes de contrainte du moyen âge.

Le nombre des Franco-canadiens réduit à 63.000 à l'époque de la peste du Canada en 1763, s'est élevé en 1868 à 1.200.000. (p. 81. col. 1) On a calculé que, en dehors d'une faible immigration, la population a constamment doublé pendant chaque période de vingt-cinq ans, par le seul effet de la fécondité des anciens colons et de leurs descendants.

L'évêque catholique de Québec, qui en 1763 suffisait au gouver­nement religieux des vastes territoires compris entre les bassins du St-Laurent et du Mississipi, ne peut aujourd'hui pourvoir qu'avec le concours de sept autres évêques aux seuls besoins spirituels du bas Canada.

Aucun peuple n'a mieux mis en lumière par sa propre histoire, les forces incomparables que l'humanité trouve dans le catholicisme, quand celui-ci dispose de Clercs pauvres et dévoués à leur mission.

Dès l'origine, le clergé s'est mis à la tête de la colonie; il a exploré le pays dans toutes les directions; et, tout en préparant les succès des colons, il a travaillé à l'amélioration morale des indigè­nes, autant que l'ont permis les rivalités des Européens. Les prêtres séculiers, secondés souvent par les jésuites, ont dirigé toutes les entreprises des défrichements. Ils ont présidé à la création (p. 81. col. 2) des villages enjoignant à leur fonction principale celle du législateur, du juge, de l'architecte et du médecin.

Au milieu des souffrances provenant de la guerre, des épidé­mies, des famines et des désordres atmosphériques, puis de l'aban­don de la mère patrie, les Clercs ont constamment soutenu les cou­rages et conservé l'esprit national.

Quand sont venus de meilleurs jours dans la domination britan­nique, ce sont également les clercs qui ont lié indissolublement à la langue française l'enseignement de la religion, la culture des arts, des sciences et des lettres.

Si les voyageurs français trouvent aujourd'hui hors d'Europe une province qui leur rappelle leur Patrie, ils doivent cette satisfac­tion au dévouement des Clercs catholiques du Canada, et à la soli­de organisation des familles qui fournirent les premiers colons.

Des études persévérantes sur la vie domestique des ouvriers européens m'ont démontré que, sauf en certaines régions excep­tionnelles, il n'existe qu'une faible minorité qui, possédant un immeuble, puissent résister au désir de le grever d'hypothèques pour se procurer une jouissance (p. 82. col. 1) immédiate. Le régime féodal avait admirablement bien remédié à cette infirmité des familles sociales, par le système des fiefs et des tenures.

Le fieffé et le tenancier avaient tous les droits utiles de la pro­priété libre et individuelle, mais le seigneur interdisait l'hypothè­que, en venant au secours de ses hommes dans le cas de force majeure; et il se réservait l'autorisation en cas de vente. Les hom­mes honorables qui, en Alsace notamment, se dévouent à restaurer chez les ouvriers la pratique de la possession du foyer, se heurtent à cette infirmité des populations.

Une enquête récente m'a conduit à constater que plusieurs patrons après avoir aidé leurs ouvriers à acquérir le foyer, avaient compris la nécessité de se réserver le droit d'interdire l'hypothè­que: ils se trouvent ainsi ramenés, dans l'intérêt même des ouvriers, à la pratique du fief. Les combinaisons de ce genre seront repoussées, dans le régime actuel, sous la domination accordée en fait aux légistes.

Elles seront rétablies avec succès quand les autorités sociales auront repris leur légitime influence, et quand la mission des légis­tes se réduira à formuler les pratiques adoptées par les vrais intéres­sés. Au surplus la possession du foyer est, en effet, refusée aux (p. 82. col. 2) ouvriers, moins par leur imprévoyance actuelle que par les contraintes du partage forcé. Ibid.

La quiétude qu'engendre en Orient, jusque dans les plus pau­vres familles, la possession permanente du foyer domestique, est le trait de mœurs qui m'a fait d'abord ouvrir les yeux sur la fausseté de certaines doctrines propagées en Occident sur l'organisation des sociétés.

Il y a, en effet, un véritable aveuglement à proclamer la supério­rité absolue des nouvelles pratiques qui ont substitué à cette quiétu­de les récriminations et les haines au milieu desquelles nous vivons.

Que la France s'efforce d'enlever ou du moins d'amoindrir la plaie horrible qui afflige la société humaine et que l'on nomme suffrage universel, plaie destructrice de l'ordre social et qui mérite­rait, à juste titre, d'être nommée «mensonge universel».

Arrachons de nos lois la racine du mal; considérons que l'Etat, fondé sur la souveraineté du peuple, est cette «maison, que le Seigneur n'a point édifiée et à laquelle on travaille en vain». Pie IX, 5 mai 1874.

On convient de toutes parts qu'il s'agit, pour sauver la France, de (p. 83. col.1) rétablir le principe d'autorité; dès lors de reconnaître Dieu comme le souverain des peuples, le fondateur, l'appui, le but final des sociétés humaines. Nions, masquons ou esquivons ce fait, savoir: Dieu seul est souverain, sur quoi reposeront nos lois? sur quoi s'appuieront les consciences?…

Après avoir écarté Dieu de nos constitutions, on, en a écarté l'homme lui-même ou au moins le mérite de l'homme, pour met­tre au premier rang la brutalité du nombre…

- N'y a-t-il pas toujours au sein d'un peuple ceux qui lui appor­tant la vertu, le capital et l'ordre, édifient et produisent plus qu'ils ne consomment, et ceux qui, ne cessant au contraire de porter atteinte à la vertu, au capital, à la justice, à l'ordre, détruisent plus qu'ils ne produisent et sont encore comme dans la barbarie. Les premiers n'appartiennent-ils pas au mouvement de composition, et les seconds au mouvement de décomposition d'un peuple? Auquel de ces deux mouvements une nation doit-elle dès lors se confier? … Le capital n'est-il pas chez ceux qui le possèdent une première preuve de moralité? Ne porte-t-il pas le véritable signe de l'aptitude sociale? Ne (p. 83. col. 2) représente-t-il pas le travail, qui exclut la mère des vices et la modération dans les jouissances, qui témoigne à la fois d'une certaine conscience et d'un apport fait à la société? … Celui qui reçoit de la société plus qu'il ne lui rend n'est pas un citoyen, c'est un frelon qui vit aux dépens de la ruche. Si la société l'admet dans son sein en vue de le moraliser, elle ne doit lui con­fier ni ses intérêts, ni sa vie…

Le déplacement du pouvoir social par le suffrage universel, c'est la démolition de la hiérarchie, l'abaissement de l'homme, la destruction de l'œuvre de l'histoire et la dissolution même des peuples… Blanc de St-Bonnet. (p. 84. col. 1)

Il n'y a pas à Londres ainsi qu'on le constate une statistique offi­cielle, moins de 91.636 pauvres entièrement dénués de moyens d'existence et entretenus par la ville; 33.393 dans les workhouses et 58.238 dans les taudis malsains qu'ils préfèrent cependant à la pro­preté et à la régularité du workhouse.

[Vu] le nombre énorme des gens sans ressources à la charge d'une seule ville on ne s'étonnera (p. 84. col. 2) pas que dans le cou­rant de l'année 187 individus soient morts de faim. Il est vrai que

dans certains cas, les privations n'ont fait qu'accélérer un résultat probable; mais il n'est pas moins vrai qu'il y a eu dans la ville la plus riche du monde un nombre extrêmement élevé de malheu­reux qui ont demandé du pain et auxquels personne n'en a donné.

Concours de 1874 pour les bourses des écoles municipales supé­rieures.

Paris compte 59 écoles dirigées par les Frères et 78 écoles laïques. - Les premières coûtent à la Ville 700.000 francs, les secondes 1.800.000 francs - 505 élèves ont concouru. 233 appartenaient aux écoles laïques et 272 aux Frères. Après les premières épreuves ont été éliminés 292 candidats, dont 174 laïques et 118 congréganistes. Sur les 213 admis aux épreuves définitives, 154 étaient donc congré­ganistes et 59 seulement laïques. - Enfin, sur 185 bourses accordées, les élèves des Frères en ont obtenu 126 et les laïques 59. - Dans le classement par ordre de mérite ne figure qu'un seul laïque parmi les 20 premiers. Des 55 premiers, 46 sont élèves des Frères.

Voir les ouvrages de MM Louis Reybaud, Blanqui, Villermé, Jules Simon. A Paris, dans les quartiers populeux, le concubinage prend une extension déplorable. D'après M. Devinck, le quart des ouvriers de Paris vit en dehors du mariage. Les femmes qu'ils s'attachent pour un temps ne sont que leurs esclaves et le jouet de leurs capri­ces, menacées sans cesse d'être chassées par (p. 85. col. 2) eux et de se voir refuser la reconnaissance de leurs enfants (Comptes rendus de la société d'économie sociale, Séance du 4 janv. 1874, p. 429).

Plus loin M Devinck nous révèle ce fait affligeant que sur 19.000 apprentis parisiens, il en est plus de 10.000, et la plupart sont des enfants naturels, qui ne rentrent jamais ni chez leur père, ni chez leur mère. Dès qu'ils ont quinze ans, ils ne reconnaissent plus aucune autorité. Ibid. p. 431.

Le nombre des naissances naturelles, sur un million de naissan­ces en France, est moyennement de 75.000, soit de 7.5%. Sur 13 enfants il naît un bâtard. A Paris, le rapport est plus élevé et dépas­se un bâtard sur 4 naissances (15.366 enfants naturels sur 39.571 enfants légitimes en 1869). Sur ces 75.000 bâtards qui naissent tous les ans un tiers est reconnu. Les deux autres tiers ou 50.000 ne le sont pas. C'est en somme dans la nation 1.500.000 français privés d'état civil. - En dehors de Paris, d'après M. Maurice Block, sur 100 bâtards, le père en reconnaît 7 et la mère 32. A Paris en 1869, on a compté 3.509 enfants reconnus (p. 86. col. 1) sur 15.366 naissances, soit moins du quart.

Pour 100 habitants, la population urbaine (celle des communes au-dessus de 2.000 âmes) est en 1846 de 24.42, celle rurale de 75.58; en 1851, l'urbaine de 25.52, la rurale de 74.48; en 1856, l'urbaine de 27.31, la rurale de 72.69; en 1861, l'urbaine de 28.86, la rurale de 71.14; en 1866, l'urbaine de 30.46, la rurale de 69.54; en 1872, l'urbaine de 31.06, la rurale de 68.94. Il résulte de ce tableau que, de 1846 à 1872, en vingt-six ans, les villes ont gagné et les campagnes perdu 2.500.000 habitants. (Journal de la société de sta­tistique, janvier 1874).

Prop. XXIX du Syllabus.

St Augustin, ép. 185e, demande s'il peut y avoir sur la terre un homme assez fou pour dire aux chefs des Etats: «L'ordre religieux et moral ne vous regarde pas!» ou: «il ne vous appartient pas de vous préoccuper de la piété ou des sacrilèges, de la pudeur ou du libertinage de vos peuples». Platon, De Rep. 1. II: dans toute républi­que bien constituée il faut, avant tout, avoir soin de la vraie religion (cura esto de vera religione). 1. VII: «Le prince doit inculquer à ses sujets qu'en dehors de la vertu, de la justice et de la (p. 86. col. 2) vraie piété envers Dieu, rien n'est utile ni agréable dans les choses humaines. La vraie religion est la base de la république et par con­séquent toute impiété doit être punie (Vera religio, basis reipubli­cae, ideoque omnis impietas punienda).

Gibbon dit que les nations ne périssent jamais par défaut d'argent, mais par défaut de principes. (Causes de la chute de l'empire romain).

Ce sont les doctrines de Voltaire et de Rousseau qui ont amené la révolution, précipité le trône et assassiné le roi. La révolution a aboli la religion de l'Etat et proclamé la liberté des cultes.

Il est impossible d'admettre sans restriction que l'état doit égale­ment protéger tous les cultes, c'est-à-dire qu'il doit également proté­ger la vérité et l'erreur. Cette doctrine supposerait que tous les cul­tes sont également vrais, ce qui est absurde, ou qu'ils sont tous éga­lement faux, ce qui est un blasphème.

Si le gouvernement n'admet rien de certain en religion, les gou­vernés peuvent prétendre qu'il n'y a rien de vrai ni de juste en poli­tique et le droit ne serait qu'un mot condamné à disparaître devant la force.

S. Th. De regim. princ., 1. 11, c. 14.

«La fin de toute communauté politique est la même que celle des individus. Or, si vous demandez à un chrétien, (p. 87. col. 1) pourquoi Dieu vous a-t-il mis au monde? Il vous répond: il m'a créé et mis au monde pour le connaître, l'aimer et le servir, et par ce moyen arriver à la vie éternelle qui est ma fin. Interrogé sur le même point, toute société chrétienne vous fait la même réponse et elle ne peut en faire d'autre sans se mettre en contradiction avec elle-même.

- Ainsi la fin de la société politique, aussi bien que celle de tout individu, n'est ni la richesse, ni le plaisir, mais bien et exclusive­ment l'acquisition de la vertu, et cela non pas dans un but pure­ment temporel, mais dans un but éternel et divin, car, encore une fois, pour toute société comme pour tout individu, la pratique de la vertu n'a pour dernier objet que la possession du souverain bien qui est Dieu» (1).

(1) Il y a cependant une différence à observer, parce que les sociétés comme telles n'ont pas comme fin dernière une seconde vie.

Le devoir des souverains est de travailler à ce que la société qu'ils régissent atteigne sa fin. Comme le bonheur éternel entre dans la fin de la société, il entre aussi dans les obligations du pouvoir de lui en faciliter la conquête par tous les moyens dont il dispose, et par conséquent, dans le cercle de ses devoirs entre l'obligation de veil­ler au maintien de la vraie religion, puisque la fidélité à la religion est la condition essentielle de tout bonheur pour la société comme pour l'individu, dans le temps et dans l'éternité.

C'est en partant de ce principe, que (p. 87. col. 2) St Augustin a dit: «Les rois ne peuvent servir Dieu comme rois, qu'en tant qu'ils ne commandent que le bien à leurs peuples et qu'ils cherchent à en éloigner tout mal, non seulement en ce qui touche aux condi­tions de la société purement humaine, mais encore en ce qui regar­de l'observance de la religion divine».

Saint Ambroise (ad Grat. de fide), Saint Cyrille (ad Regin.) établis­sent que la vraie religion et la vraie piété et le culte du vrai Dieu sont la base de tout royaume et de toute république.

Tout souverain, dit St Paul, n'est que le ministre de Dieu pour le bien, minister Dei in bonum.

Philostrate (in Sophist.) dit que les magistrats d'Athènes firent brûler par les mains du bourreau sur la place publique les livres de Protagoras, parce qu'il insinuait l'athéisme. Tite Live, (Liv. X.) nous parle de semblables autodafés qui avaient eu lieu à Rome à l'égard de certains livres contre la religion. Valère Maxime (liv. VI) affirme que les Spartiates renvoyèrent de Sparte les écrits d'Archiloque, parce qu'ils offensaient la religion et plus encore les moeurs. Or, personne, que nous sachions, n'a jamais blâmé de pareilles rigueurs comme des abus de pouvoir, et le pouvoir chrétien n'aurait pas le (p. 88. col. 1) droit de faire ce qu'a légitimement fait le pouvoir payen! Comment, il se trouverait des écrivains spéculant sur les plus mauvais instincts de la populace, administrant tous les jours à une nation des leçons de cynisme et d'irréligion, la mettant dans la possibilité de boire à longs traits le venin de l'insubordina­tion, de l'impiété et de la débauche, et le pouvoir n'aurait aucun devoir à leur égard que celui de les laisser faire!

On invoque la liberté de discussion. Des discussions sérieuses dont la religion et la vérité ne s'effrayent pas parce qu'elles n'ont qu'à gagner à être connues et prouvées par la contradiction, nous l'accordons, et l'Église l'accorde complètement; mais des discus­sions où il n'y a que l'insulte et le dénigrement contre tout ce qu'il y a de plus sacré pour la conscience publique, non.

On invoque la liberté de conscience. Sans doute il n'appartient pas à l'État de juger de ce qui se passe dans ce sanctuaire de l'hom­me où personne n'a le droit de pénétrer, excepté Dieu. L'Église elle-même (in foro externo) ne juge pas les opinions et les senti­ments renfermés dans les profondeurs de la conscience: Ecclesia non judicat de internis.

Mais aussitôt que ces sentiments et ces opinions se produisent au-dehors par la parole ou l'écriture, ils deviennent des actes publics et par conséquent tombent sous la juridiction (p. 88. col. 2) du pouvoir public. Les opinions mises au jour dans la société ne sont plus des opinions, ce sont des actes sociaux, et dès lors elles ne sont et ne peuvent être libres qu'autant qu'elles ne portent pas atteinte à l'ordre social.

Les passions révolutionnaires demandent qu'on leur abandonne l'Église, quand on ne peut pas obtenir qu'on leur livre l'État. Aussi les Etats aveuglés leur lâchent l'Église et s'imaginent par là se sau­ver. C'est là la plus insigne folie, car l'État n'est solide que lorsqu'il est appuyé sur l'Église qui seule donne la foi, la religion et le respect aux peuples. Donc isoler l'État de l'Église, c'est l'isoler de ses appuis et des principes de sa conservation.

Tout souverain, dit St Paul, n'est que le ministre de Dieu pour le bien, minister Dei in bonum. C'est par Dieu que règnent les rois, per me reges regnant. Comment donc ne compromettrait-il pas son pro­pre pouvoir, s'il laissait un libre cours aux insultes et aux blasphè­mes contre le Dieu qui le lui a conféré? Comment ne déchirerait-il pas de sa propre main l'acte de son investiture, le diplôme authen­tique de son droit de commander aux intelligences? Comment enfin un pouvoir laissant détrôner Dieu dans (p. 89. col. 1) la con­science des peuples pourrait-il éviter d'être détrôné lui-même?

«Tout électeur est obligé, sous peine de péché mortel, et de damnation par conséquent, de donner son suffrage en connaissan­ce de cause, et de faire des recherches sur la capacité de la person­ne à élire. En négligeant cette recherche et ces investigations, les votants pèchent, en effet, en matière grave, puisqu'ils sont tenus, en vertu de leur office, de prendre les précautions nécessaires pour éviter l'élection des indignes, ou des moins capables, au préjudice de la communauté et de ses membres qui seraient gouvernés par de tels hommes» (3) (Decret. Greg. De electione, 7. Cum in cunctis… De officio archidiaconi 9. Ea quae Decret. 1 p., Dist. XIX. c. Nulli. Dist. VIII c. Dictum. je prends le résumé de ces canons dans Ferraris canoniste des plus autorisés).

Que dis-je? avec le scrutin de liste, les votants ne connaissent pas même les noms de ceux auxquels ils donnent leurs voix.

D'autres canons confirment l'obligation grave, pour tout élec­teur, de voter en connaissance de cause:

«L'électeur qui a voté pour un indigne (p. 93. col. 2) doit être puni (par la privation de son droit à l'élection suivante). Et s'il prétend qu'il a ainsi voté par ignorance, il doit prouver que cette ignorance n'était point coupable. Car une pareille ignorance ne se présume pas, attendu que tout électeur est tenu, en vertu de son office, de s'assurer des qualités de la personne à élire. Et s'il ne s'en est pas assuré, il ne peut invoquer l'excuse d'ignorance parce qu'alors son ignorance est une ignorance crasse, honteuse, volontaire, affectée, vincible. Elle n'est pas la cause mais l'effet de la négligence qui a déterminé son mauvais vote (4)».

(4) (Ferraris V°. Electio. Citant les canons Innotuit 20, de Elect., avec la glose au mot Ignorantiam et arguant des c. ad hoc, de Postul. Praelatorum 1; cum in tua, 6; et de la loi romaine Nec supinam 6 ff de Iuris et facti ignorantia»).

Non seulement l'électeur est tenu de choisir des personnes dignes, mais il est «obligé sous peine de péché mortel, et de damnation, par conséquent de choisir ceux qu'il juge lui-même les plus dignes (5)».

(5) (Concile de Trente, Sess. 24, 1. De Reform.). Optimus eligatur! Les suffrages au meilleur entre tous (6).

(6). (Decr, 1 part. Dist. LXIII, 19. Optimus ordinetur).

Pour remplir cette obligation est-ce assez d'une connaissance vague, telle que celle qui peut résulter, pour un très petit nombre (non pas la masse votante (p. 94. col. 1) c'est constaté), de cette rumeur confuse des journaux stipendiés et au service des partis et des factions? ou des phrases déclamatoires d'une prétendue profes­sion de foi?

Et cependant, quel est-ce meilleur entre tous, et quelle qualité doit-il avoir?

«Il doit être distingué au milieu du peuple, c'est-à-dire supérieur en sciences, éminent et supérieur en toutes vertus. (7)».

(7) (Decret. II part. Licet, 15. Can. VIII. 2.1).

La première règle qui en découle est celle-ci: «Toute élection est nulle lorsqu'on restreint le choix des votants à un nombre déter­miné de personnes parmi lesquelles ils sont contraints de choisir à l'exclusion d'autres».

«C'est une coutume perverse qui comprime et détruit la liberté, dit le pape saint Célestin V et nous statuons qu'il faut l'abolir et le déraciner (3)».

(3) (De Elect: et Elect. pot. - Greg. c. XIV.1) .

Cette coutume perverse, cette loi humaine à abolir et à déraci­ner, nous l'avons encore en France en matière électorale! En effet, nous ne pouvons voter que pour les personnes qui se présentent elles-mêmes pour ceux qu'on appelle candidats. Autrement notre droit (p. 94. col. 2) d'électeur est illusoire et nos voix sont ce qu'on appelle perdues.

Ainsi la loi humaine veut que l'on brigue les suffrages des votants, et elle organise le vote de façon que quiconque ne donne pas (sa voix) à quelqu'un de ceux qui la briguent, la perde.

Ecoutons l'enseignement du code pontifical sur la liberté électo­rale c'est-à-dire la liberté du choix.

«La subornation ôte la liberté du choix et rend l'élection nulle (6)». (6) (Ferraris, Ve, electio, art. IV, n° 54).

Il y subornation quand on emploie les sollicitations ou les priè­res pour obtenir les voix (7).

(7) (Canon. Per inquisitionem, XXVI, De Elect. Greg.).

C'est une indignité de solliciter les suffrages, et les votants qui les donnent à ceux qui les sollicitent nomment des indignes (8). (8) (Ibid. ex eodem canone arg. 11).

Quiconque est parvenu à une fonction élective en la briguant, lors même ensuite qu'il ne scandaliserait pas le peuple par sa con­duite et ses actions, ne laisse pas d'être un homme scandaleux, à cause de l'exemple pernicieux de son mauvais début. Il est d'ail­leurs bien difficile de bien finir quand on a mal commencé (9).

(9) (Décr II, part. Causa 1, Q. 1.25).

Etonnons-nous maintenant des (p. 95. col. I) incertitudes de prin­cipes et de conduite et des lâches compromis si fréquents dans nos Assemblées. Qu'on ne permette à qui que ce soit l'accès à l'épisco­pat par la brigue. Si cet excès est incriminé dans la vie laïque, à plus forte raison jette-t-il l'opprobre sur les hommes religieux et liés par état au service de Dieu, (10)».

(10) (Ibid. CXVIII) .

J'ai cité à dessein ce canon, parce qu'il constate comment on envisageait dans le monde laïque à cette époque un procédé hon­teux que nous trouvons tout naturel. Le canon est du pape Symmaque, et de la fin du Ve siècle. Aujourd'hui, la brigue est de droit; elle est légale, obligatoire de par la loi; elle est la condition indispensable de ce qu'on appelle bien à faux l'élection. Qu'est-ce que le progrès?

«Quiconque aura suborné les électeurs en cherchant à procurer des voix ou suffrages, soit pour son propre compte, soit pour le compte d'autrui, soit pendant les élections, soit pendant les six mois qui précèdent, qu'il soit excommunié ipso facto (11)».

(11) (Saint Pie V, Constit. Pastoralis, Officii).

Cette prescription, non plus que la suivante, n'implique pas que les électeurs doivent voter sans avoir discuté et conféré ensemble. Loin de là, cette consultation et cette (p. 95. col. 2) discussion sont même requises sous peine de nullité (12).

(12) (Nisi tractatum et discussum. Canon In Genesi 6. De Electione. Dec. Greg.)

En effet, dit la glose, comment pourraient-ils élire (lisez toujours choisir et réunir leurs choix), s'ils n'avaient pas auparavant traité du choix à faire? Cette discussion sur les qualités, les aptitudes et les mérites (13) (Ferraris, V°, Electio, art. IV°, n° 5), de la personne à élire, doit avoir lieu, d'après la constitution que nous venons de citer, immédiatement avant le vote, pour empêcher les brigues.

Il semble que nous prenions à tâche de tout faire en France en dépit du bon sens et des règles les plus naturelles. La loi française actuelle autorise les réunions d'électeurs dès les quinze jours qui précèdent le vote, en ayant soin de les interdire les cinq derniers jours!

Remarquons que cette discussion ne doit pas rouler sur les opi­nions, mais bien sur les qualités, les aptitudes et les mérites des per­sonnes à élire. Saint Paul les a énumérés et le corps du droit ponti­fical admirablement expliqué. Il faut entre autres qualités, la pru­dence qui comprend la science du (gouvernement) (p. 96. col. 1) des choses humaines; «même pour les évêques; à plus forte raison pour les représentants et les magistrats civils»; la bonté pour les petits et les faibles; une probité sévère; une justice éclairée, tempérée par la miséricorde; un ensemble de vertus et de dignité qui reluise sans ostentation sur la personne toute entière; il faut s'être fait remar­quer par la bonne éducation de ses fils, qui doivent être soumis et chastes jusque dans leurs manières; par la prudente administration de sa maison, car celui qui ne sait pas administrer sa propre maison comment pourra-t-il diriger la communauté, (14) (Décret. I part. Distinct. XXX. 1).

Parmi les vices opposés qui ne doivent point se montrer dans un élu, se trouve précisément l'esprit de contention et de lutte d'opi­nions comme on parle aujourd'hui. Il caractérise, dit Gratien, ces bohèmes? (rusticorum) qui prennent leurs bavardages pour de la science et de l'autorité, et, toujours prêts aux querelles, traitent leur pays comme s'ils en étaient les maîtres: arrogance et orgueil manifes­te, ajoute (p. 96. col. 2) le vieux moine (15). Hélas! Hélas! (15 Distinct. XLVI. Nihil impudentius arrogantia rusticorum qui garrulitatem auctoritatem putant, et parati semper ad lites, in subjectos tumidi intonant: quod ex arrogantia et superbia fieri manifestum est.).

La subornation a encore lieu, et par contre-coup, la nullité de l'élec­tion, lorsque l'on emploie les menaces, les blâmes, les calomnies, les insi­nuations, les révélations des fautes secrètes, les dons ou les promesses et d'autres moyens, artifices et procédés malhonnêtes, pour émouvoir ou déterminer (moralement) quelqu'un à donner son suffrage, soit à celui qui use de ces moyens illicites soit à ses amis, au profit de qui il les met en œuvre (18) (Ferraris V° Electio, n° 55).

Il est évident, encore une fois que la position de la candidature donne lieu à tous ces excès. Tout est divisions et factions dans notre pauvre pays, et l'on pourrait écrire des volumes commentant ces six lignes du droit papal. Ce serait chose superflue. Toutes nos tur­pitudes et nos corruptions électorales sont notoires et même, hélas! passées à l'état des moeurs. En haut comme en bas, qu'il s'agisse de chambres des conseils locaux, ce n'est qu'intrigues, par­tis et compétitions passionnées. Or la passion (p. 97. col. 1) aveuglant et troublant la raison, est incompatible avec le choix qui suppose la lumière intellectuelle et la liberté morale, c'est-à-dire est incompa­tible avec l'élection. Elire c'est choisir.

Il est donc péremptoirement établi et irréfutablement démontré qu'il n'y en a en France aucune espèce d'élections. La candidature doublée du vote du scrutin de liste et du vote mécanique annule doublement les élections aux Chambres ou Assemblées nationales. La candidature seule avec ses conséquences immondes annule les élections locales. Conclusion logique, conclusion forcée: suppri­mez le scrutin de liste et le vote mécanique et abolissez la candida­ture. Quand il aura plu à la Providence de Dieu de redonner un homme à la France, cet homme aura à nous apprendre l'a b c d, du bon sens. Il dira qu'il n'est d'aucun parti, qu'il n'épouse ni clas­ses, ni factions, ni opinions. Il dira qu'il n'entend pas que des opi­nions soient des titres au suffrage des électeurs, mais bien les qua­lités, les aptitudes et les mérites.

Conclusions logiques - 1. Le suffrage universel moderne n'est que la caricature ignoble du suffrage universel d'autrefois.

2. Il n'y a pas d'élection en France. Ce qu'on décore de ce nom n'est que mensonge, hypocrisie et corruption.

3. La pose des candidatures est la principale cause de la corrup­tion du suffrage universel.

4. Le droit pontifical est le flambeau qui éclaire nos ténèbres, nos ignorances, nos vices, nos sottises et nos hontes en matière électorale comme en matière de droit des gens.

5. Le mieux serait de consulter le Pape, vicaire de Jésus-Christ, père des nations chrétiennes, pour lui demander la direction et la voie.

6. Une nation est composée de familles et non pas d'individus isolés.

9. Il est absurde que le fils de famille ait la faculté d'annihiler le droit du chef de famille,

Au 31 déc. 1871, il y avait en France 13.367 bureaux constitués. Le nombre total des indigents secourus était de 1.608.129, repré­sentant 528.242 ménages, ce qui donne un pauvre pour treize habi­tants.

Les recettes ordinaires des bureaux ont été pendant la même période de 26 millions 424.000 fr. et les recettes extraordinaires de 5.421.000 fr.

644 bureaux ne fonctionnaient pas (p. 98. col. 2) faute de ressour­ces;

1,062 avaient moins de 50 f de revenu;

1,116 de 51 à 100 fr.;

5,240 de 101 à 500 fr.;

2,216 de 501 à 1000 fr.;

3,089 au-dessus de 1000 fr.

Les bureaux ayant moins de 500 fr. de recettes formaient donc plus de la moitié du chiffre total.

L'immense majorité des bureaux se borne à donner des secours alimentaires. Il n'en est pas de même des 301 bureaux dont la dépense a été supérieure à 10.000 fr. et qui ont à eux seuls dépensé 16.112.000 fr. Ceux-ci ont dépensé en secours en nature 74%; secours en argent, 10%; secours moraux et préventifs 2,5%; char­ges de la dotation et frais d'administration, 12%.

Il y avait en 1833 un bureau de bienfaisance pour 5 189 h.; en 1847, un pour 3 792 h.; en 1871 un pour 2 700.

Ces bureaux qui existaient dans les paroisses importantes n'avaient pas seulement pour but de soulager les souffrances physi­ques, mais de contribuer à la moralisation, à la réhabilitation, à l'éducation des pauvres. Voir l'ordre d'administration pour soula­gement des pauvres de la (p. 99. col. 1) paroisse de St-Sulpice (Paris 1777 et 1778) - (et aussi le règlement de l'aumône publique à St-­Quentin). Le bureau de St-Sulpice avait quatre sections, composées chacune de quatre prêtres de la communauté et de quatre dames bourgeoises ayant à leur tête deux dames de qualité. - Règles con­cernant la distribution des secours. - Les secours consisteront:

1° à fournir de l'ouvrage aux pauvres en état de travailler. On donnera aux femmes et aux filles à filer et à coudre… Pour les hommes, il y aura un bureau d'adresses dans la paroisse, où l'on indiquera de l'ouvrage à ceux qui en manqueront.

2° à donner le pain à six liards la livre à ceux dont la pauvreté sera bien constatée. Deux raisons ont déterminé la suppression du pain gratuit. a) les boulangers choisissaient les plus mauvaises fari­nes, b) les pauvres habitués à manger un pain qu'ils n'avaient pas gagné se dégoûtaient du travail.

3° à relever le commerce de ceux qui ont éprouvé des malheurs, et les rétablir dans leur état par un secours considérable une fois donné, mais en prenant les plus sages précautions pour n'être pas trompés. (p 99. col. 2)

4° à soigner les malades et leur fournir tout ce qui sera nécessai­re: le chirurgien, le médecin, les drogues, le bouillon et dans leur convalescence ce qu'on appelle la «portion», qui consiste en un pain mollet et un morceau de viande chaque jour.

5° à donner le lait et la farine pour les petits enfants nourris par leurs mères, lesquelles seront averties qu'à moins de raisons très fortes, on ne les aidera pas à payer les mois de nourrice, parce que leur premier devoir est de nourrir leurs enfants.

6° à délivrer les prisonniers pour dette, quand ce sera l'avantage de leur famille et en prenant les précautions nécessaires.

7° à mettre des enfants en apprentissage, quand les parents n'en ont pas la faculté.

8° à faire de petites pensions aux vieillards et aux infirmes; mais ceux qui n'auront personne auprès d'eux pour les soigner, ni parents ni amis, seront placés dans les hôpitaux.

9° à fournir des layettes, des lits, des habits, des outils pour le travail, mais rarement des secours en argent, les pauvres en abusant presque toujours par défaut d'économie ou pour se divertir.

10° à aider pour un quart ou un cinquième du loyer ceux qui malgré (p. 100. col. 1) leur assiduité au travail et leur économie, auront besoin de ce secours.

Le règlement ajoute que ceux qui ne sont pas de la religion catholique seront secourus comme les autres. On profitera de cette circonstance avec les ménagements convenables pour les instruire de la vérité et les détromper de leurs erreurs.

Dépenses depuis le ler octobre 1777 jusqu'au ler oct. 1778

136 layettes 952 livres
lait et farine pour 290 enf. 3.450 -
mois de nourrice de 43 enf. 1.532 -
14 écoles gratuites de garçons ou de filles 6.019 -
apprentissage de métiers 1.500 -
pour des apprentis et apprenties 5.870 -
habillements de 180 personnes 3.240 -
555 chemises et linge 2.421 -
351 lits et couvertures 3.849 -
bois 3.152 -
petites pensions par mois à
270 personnes âgées ou infirmes
15.890 -
Secours extraord. pour relever de pauvres familles, rétablir leur commerce et p. les pauvres honteux 57.367 -
Les dépenses p. les malades qui sont habituellement 100 30.000 -

De plus on a donné pendant l'hiver 186.000 livres de pain à 6 liards et 360 rouets à filer. - Nous ne parlons pas des avances faites pour les nouvelles institutions, notamment une maison de prêts gratuits.

Les pères et mères qui négligeaient (p. 100. col. 2) d'envoyer leurs enfants au catéchisme et aux écoles de charité étaient privés de secours jusqu'à ce qu'ils remplissent cet important devoir.

Il s'agissait de rechercher les causes de la folie paralytique. Cette terrible maladie se développe dans d'effroyables proportions. Les statistiques montrent qu'elle s'accroît plus rapidement que la population elle-même de telle sorte qu'un mathématicien pourrait calculer le jour et l'heure où, la partie folle de l'humanité étant plus nombreuse que la partie raisonnable, mettra celle-ci sous la clef et gouvernera à sa guise. En lisant les journaux on se demande même parfois si ce temps n'est pas déjà venu. Il y a dans le monde un autre fléau qui marche du même pas que la folie elle-même qui provient vraisemblablement des mêmes causes et qui nous rensei­gne ainsi sur ses allures. C'est le suicide. Le fait est tellement évident qu'il ne prête plus à l'équivoque. Or le suicide s'étend d'une façon inquiétante. Ce ne sont plus seulement les classes riches qui en sont atteintes. Il sévit dans l'armée enfin, ce qu'on avait jamais vu, l'enfance même en est atteinte, et l'on voit à chaque instant (p. 101. col. 1) que des enfants se sont donné la mort. Il semble que sous des causes inconnues les ressorts de l'âme se détraquent, que la raison humaine s'oblitère et que la volonté fléchisse sous la pre­mière épreuve qui vient la charger.

Quelles sont ces causes? Elles sont obscures et fort complexes. Nous n'avons pas l'intention de les démêler. Mais le Docteur Lefebvre qui avait toute la compétence nécessaire, l'a fait, et c'est le résultat de ses observations que nous voulons enregistrer. Il a constaté que la folie paralytique provenait presque toujours d'une altération des organes célébraux (sic) déterminée par la violation d'une loi d'hygiè­ne ou de morale. L'alcool, le tabac, la débauche et le travail du dimanche, voilà les quatre grands pourvoyeurs des maisons de fous.

Des trois premiers nous n'avons rien à dire. Ils sont connus, et la science daigne constater le mal qu'ils nous causent. Nous ne fai­sons en passant qu'une observation, c'est que tandis que la morale les réprouve, le gouvernement réserve ses faveurs au moins aux deux premiers. Il les taxe. Ils sont une source de revenus… Si la France venait à se guérir de ces deux vices, l'Etat ferait banquerou­te.

Mais M. le Dr Lefèvre a signalé une autre cause de la folie, moins connue. C'est le travail opiniâtre, sans repos ni trêve, auquel l'hom­me se livre, cet effort prolongé du cerveau sous la pression de l'ambition, de la curiosité scientifique, de l'amour du gain, de toutes les passions en un mot, dont l'ensemble constitue la fièvre du siècle.

Il est certain que le cerveau, sous (p. 101. col. 2) l'action d'un tra­vail continue s'injecte de sang et qu'à la longue ses tissus s'altèrent et peuvent amener la folie. Le repos est une nécessité d'hygiène en même temps qu'une loi morale et l'expérience de tous les siècles et de tous les pays a démontré que le repos nécessaire est justement celui du septième jour…

La loi du dimanche, les fêtes chrétiennes et jusqu'à nos prières de chaque jour en déplaçant le siège de l'activité dans l'homme, assurent un certain repos à un organe surmené…

Comparaison de la consommation actuelle des habitants de Paris à celle que Lavoisier a constatée en 1789, depuis les relevés de la ferme générale.

Consommation moyenne par habitant

Par an en 1784 en 1869
Vin 114 lit. 196 lit.
alcool 3,6 7
bière 9 lit. 18 lit.
par jour
viande de boucherie 191 gr. 187 gr.
pain 460 gr. 397 gr.

Qu'est-ce donc que la démocratie? Est-ce la révolution radicale? Sont-ce les grandeurs de l'intelligence, les grandeurs de la vertu, la hiérarchie sociale prosternées devant la force du nombre? Est-ce ce niveau brutal qui passe sur tout pour abaisser et broyer? Ah! cette fausse et perverse démocratie serait le dernier mot de la barbarie!

Mais si la démocratie est l'ascension graduelle, pacifique, triomphante des masses laborieuses et souffrantes qui remplissent les campagnes et s'appellent les paysans, qui remplissent les cités (p. 103. col. 2) et s'appellent les ouvriers; si c'est leur ascension à l'instruction plus complète, au bien-être plus étendu, à une mora­lité de plus en plus épurée et efficace, et, par une conséquence nécessaire et légitime à une influence politique plus développée; si la démocratie est cela, nous sommes tous démocrates, non pas seu­lement parce que nous sommes les fils d'un siècle que nous ne renions pas, mais parce que nous sommes les fils de l'évangile et que nous y croyons… P. Hyacinthe. (p. 104. col. 1)

Notes. - Epiciers - Merciers - 1730. Patron St Marcoul. 17 juillet - Chapelle derrière le choeur de l'Eglise royale de St Quentin.

Pâtissiers - cuisiniers. Patron St Honoré, chaque samedi le mayeur va toucher six deniers tournois chez chaque maître pour le service divin. Messe pour la confrérie (sic) chaque jeudi dans l'église St­-André. Les maîtres paient douze deniers à la confrérie comme denier à Dieu, quand ils font festins de noces. La confrérie a son curé ou chapelain. Les enterrements sont célébrés avec vigiles à neuf leçons et messe à diacre et s.diacre. Jugement de 1662 qui ordonne que pendant le service divin les dimanches et fêtes ils fer­ment leurs boutiques et lesdits jours, après et avant le service ne les ouvrent qu'à moitié. 1630: défense de servir de la viande la vigile de St Quentin sous peine d'amende.

Macons: tailleurs de pierres et couvreurs de tuiles - Fête: l'ascen­sion. Obligation d'assister tous ce jour-là à la procession avec le cierge ou torche de la confrérie. (p. 104. col. 2)

Charrons: Patronne Ste Catherine. La fête se solemnise chaque année en l'église des pp. Cordeliers. Pour qu'on ne l'ignore, le mayeur porte ou envoie la veille les images selon la coutume chez tous les confrères.

Apothécaires: patron St Marcoul; service à l'église des jacobins. Le mayeur fait parer pour la fête la chapelle de St Marcoul et paie le luminaire, les jacobins et les hommes d'église. Il fait présenter aux maîtres des images de St Marcoul la veille de la fête. A l'offrande le nouveau mayeur fait présenter à l'ancien une branche de laurier avec une image du Saint. Après l'apprentissage, stage de 4 ans. Réception solennelle à la maîtrise à 25 ans après harangue et exa­men. Ils prêtaient un serment professionnel dont le 1er art. était qu'ils vivraient et mourraient dans la foi catholique.

Taillandiers. Patron St Eloi. Fête en l'église St-Jean.

Drapiers Chaussetiers 1660. Patronne Ste Madeleine. Chapelle en l'église St-André. Le mayeur est tenu d'avancer vingt huit livres pour une messe qui s'y chante chaque dimanche de l'année en l'honneur de la Sainte.

Potiers d'étain. Patron St Eloi.

Couvreurs d'ardoises et plombiers. Fête: la translation de St Eloi, le 25 juin (fête patronale du diocèse de Noyon).

Cordiers: Conversion de St Paul. 25 Janv. (p. 105. col. 1)

Tanneurs et Gohorliers (selliers): Fête St-Eloi, deux fois par an en l'église St-Eloi.

Orfèvres: Leurs ouvrages portent la marque de la ville qui est en St-Quentin la marque du maître qui les ont [a] faits et une lettre de l'alphabet qui indique le juré de l'année.

Cordonniers: fête, la St-Crépin d'octobre: quatre jurés renouvelés deux par an. Deux ans d'apprentissage. Pour chef-d'œuvre il faut couper et façonner sans modèle une paire de bottes à l'usage du temps et une paire de souliers à usage de femme. Ceux qui sont reçus maîtres paient dix livres à la communauté lors de la St-Crépin suivant pour les nécessités de la confrairie. Un apprenti à la fois. La deuxième année on peut en prendre un autre. Si un apprenti quit­te, un autre maître ne peut l'employer sous peine de dix livres d'amende. Fête en l'église St-André. Règlements pour les qualités de cuir à employer suivant les espèces de chaussures.

Charpentiers: patron St Joseph: fête célébrée en l'église qui sera choisie.

Pain d'épiciers. Patron St Claude.

Savetiers. Ordonnance du 25 oct. 1752. Défense aux savetiers d'employer leurs deniers communs en festins et buvettes. Ils doi­vent les employer à l'acquit des charges annuelles de leur comu­nauté.

Menuisiers. Ste Anne. La fête se célèbre en l'église St­ (p. 105. col. 2) Quentin, à la chapelle de N.-D.-de-Lorette. Haute mes­se et vêpres en musique. Une messe basse le 1er dim. chaque mois.

Toiliers - lingers. St Marcoul, fête en l'église St-André.

Chaircuitiers - saussissiers, fête: St Antoine au mois de janvier, en l'église St André. Comme pour les autres confréries, messe pour les trépassés le lendemain de la fête et repas commun fourni en partie par le nouveau mayeur. Ils ne peuvent tuer ni vendre [du] porc que depuis le 15 septembre, jusqu'au 15 mai suivant, non compris le carême.

Meuniers. St Victor. 21 juillet. Jour chaumé par eux. Fête en l'égli­se des pp. Cordeliers.

Chapeliers. St Barbe. 4 déc. en l'église des Cordeliers. Assistent à la procession du St-Sacrement comme les autres confréries avec leur torche et l'image de la Patronne.

Vitriers. St Luc, fête en l'église St Jacques. Ils ont une «boîte» pour les œuvres pies de la confrérie. Tous les maîtres donnent cinq sols par mois. Ceux qui se marient mettent soixante sols à la boîte. Pour tous jurements ou blasphèmes dans leurs relations, dix livres d'amende.

Brasseurs. Ne peuvent commencer à brasser ni charrier les jours (p. 106. col.1) de fêtes de N.-S. ou de N.-D. sous peine de dix livres d'amende, moitié à la ville, moitié aux pauvres. Avant d'être entonnées leurs bières doivent être goûtées par les délégués du corps de ville pour voir si elles sont bonnes et dignes d'entrer dans le corps humain. Tarifs pour la vente. Les élections ont lieu à la St­-Remy.

Tisserands. Pour qui travaille le dimanche ou les fêtes, interdic­tion du dit métier et amende arbitraire. 1633. Nul maître ne peut tenir plus de six métiers.

Serruriers. St Eloi d'été.

Engagement particulier à porter révérence et honneur à M. le gouverneur et aux magistrats avec l'obéissance requise en ce qui concerne le service de Sa Majesté.

Tailleurs d'habits. Patron St Boniface. 1600-1590 [sic]. Fête aussi le jour de la Trinité. Une messe chaque lundi pour les vivants et les défunts alternativement. Les habits que les chaussetiers feraient en fraude seraient confisqués pour les lépreux. La confrérie a son valet. Si un confrère est malade et sans ressource, les maîtres sont tenus de lui donner chacun six deniers par semaine; cela est recueilli par le valet. Les veilles de la solennité de la Vierge Marie et de la Trinité, ils ne peuvent travailler au-delà de (p. 106. col. 2) neuf heures du soir. Ils doivent suivre leur chandelle au jour du St­-Sacrement sous peine d'amende. Les Egards peuvent convoquer tous les maîtres quand besoin est.

Chaudronniers. 1629. Elisent deux jurés ou Egards le mercredi des Cendres. Sont tenus de prendre pour l'apprentissage de pau­vres garçons de la ville en leur baillant trente setiers de blé pour les trois ans de leur apprentissage. Patron St Eloi. Le mayeur est tenu de payer soixante sols pour le déjeuner des confrères au retour de la messe de St Eloi.

Bouchers. Ils peuvent exposer en vente seulement un boeuf ou une vache et autant de veaux et moutons qu'ils voudront. Ils peu­vent vendre jusqu'au mardi à 10 h. la viande du samedi. Ils peuvent le mardi en exposer de nouvelle. Les hommes qu'ils présentent pour le métier doivent avoir bonne haleine, être sains et nets et entendus pour mettre la viande en bon état et suffisant pour l'usa­ge du corps humain. - Les dimanches ils peuvent vendre depuis le matin jusqu'au gros coup de prime. - Le temps de tuer brebis est du ler oct. à la St-André.

Mondeliers. Patron St Antoine au mois de janvier.

Tonneliers, fête et élections à la N.-D. de Septembre. (p. 107. col. 1)

Mulquiniers (toiles fines). Patronne Ste Elisabeth. 1697.

Corroyeurs. 1600. Patron St Crépin. La fête religieuse est plus ancienne.

Bonnetiers, réunis ensuite aux merciers. Fête, la présentation de N.-D. 21 novembre.

Barbiers - perruquiers baigneurs et étuvistes. Statuts pour toutes les communautés du royaume. Fête, St Louis. Le premier chirurgien en chef du Roy est le gardien des Chartes et statuts de toute la Chirurgie et Barberie du royaume.

(Ici commence l'écriture d une main inconnue. Toutefois, la précision: «de erroribus hodiernis» a été ajoutée de la main de Léon Dehon)

Ad apostolicam sedem delatae cum censuris a nonnullis theolo­gis propositis.

De progressu civili. De lege morali. De influxu salutari religionis christianae. Jura Ecclesiae. Principatus civilis Romanorum Pontificum. De populari suffragio et voluntate nationali. An princi­patus haereditarius opponatur principiis juris naturalis et spiritui evangelii. Errores de societate domestica et matrimonio.

Theses cum censuris propositis communicatae fuerunt episcopis mense junio anni 1862 Romae adunatis pro canonizatione marty­rum Japonensium, ut suffragium ea de re ederent. Cum vero tunc nulla resolutio prodierit, post biennium editus est Syllabus de quo mentionem alibi fecimus (ser. 7). Theses autem cum propositis censuris Illmus ac Rmus episcopus Marianopolitanus provinciae Quebecensis in vulgus edidit. (p. 111. col. 1)

1. Progressus civilis requirit ut humana societas constituatur super fondamentis mere humanis, nullo habito respectu ad religio­nem perinde ac si ea non existeret.

Impia, injuriosa religioni, in atheismum inducens, subversiva ordinis moralis et verbo Dei contraria.

2. Lex moralis, actionum humanarum moderatrix, est a religio­ne radicitus separabilis, nec ulla indiget sanctione divina. Complexive sumpta falsa, impia, haeresim sapiens et erronea.

3. Intelligentia humana intra sensationum fines sistit, doctrina moralis in utilitatum supputatione, politices in sola materialium virium conjunctione.

Complexive sumpta falsa: quoad primam partem, materiali­smum invehens et haeresi proxima; quoad secundam partem, totius moralitatis eversiva; quoad tertiam partem, ordinis moralis et socialis destructiva.

4. Ea est intelligentiae humanae spontanea vis, ut omnis divina revelatio sit ordini sociali inutilis.

Haeretica.

5. Dogma de peccato originali ac dogma de instauratione totius humani generis per Christum nihil confert ad praesentem societa­tis conditionem ejusquae leges agnoscendas.

Falsa, erronea et haeresi proxima.

6. Immutabilitas dogmatum chris- (p. 111. col. 2) tianorum obstat progressui societatis.

Falsa, christianae religioni injuriosa, sapiens haeresim.

7. Christianismus prout ab Ecclesia Catholica traditur, neque exercuit neque natura sua exercere potest influxum salutarem in jus civile, in jus politicum neque in jus gentium.

Falsa, erronea, Ecclesiae injuriosa, et quatenus supponit christia­nismum melius tradi posse quam in Ecclesia catholica, haeretica.

8. Dottrina evangelica de mutuo fratrum auxilio non respicit nisi personas privatas: neque unquam applicare potest relationibus politicis in favorem legitimorum guberniorum, quae injuste hostes sive interni sive externi aggressi sunt.

Perniciosa societati, seditiosa, juris publici et gentium destructi­va, haeretica.

9. Bonum societatis christianae postulat, ne spiritualis potestas sit a civili potestate distincta et independens.

Falsa et haeretica.

10. Spiritualis potestatis distinctio et independentia a civili efficit ut spiritualis potestas absorbeat essentialia jura civiles potestatis. Falsa et haeretica.

11. Haec spiritualis potestatis distinctio et independentia a civili potestate spectari debet ut accidentalis ac temporanea, minime vero tanquam normalis (p. 112. col. 1) conditio societatis per Christum regeneratae.

Falsa et haeretica.

12. In qualibet rette constituta societate legislatio actusque regi­minis debent tanquam regulam settari indifferentiam systematicam inter veritatem et errorem in negotio religionis.

Impia, indifferentissimum inducens, rectae rationi et religioni injuriosa.

13. Licet theologice verum sit, unamquamque nationem christia­nam debere partem constituere unius ejusdemque Ecclesiae uni­versalis, uni capiti supremo subjectae; politice tamen utile foret, ut quaelibet earum constitueret Ecclesiam nationalem sub primatu respective imperantis.

In schisma inducens et haeresi proxima.

14. Politica gubernia tam clero quam populo imponere possunt extheses seu formularia theologica, licet ejusmodi sint, quae nequeant ab Apostolica Sede aut ab oecumenicis concilies probari. Schismatica et haeretica.

15. Ecclesia nihil debet decernere, quod obstringere possit fide­lium conscienctias in ordine ad usum rerum temporalium. Haeretica. (p. 112. col.2)

16. Opponitur spiritui Evangelii quod Ecclesia bona temporalia possideat: nec ipsa legitime acceptare potest aut acquirere proprie­tates seu possessiones ad ministrorum substentationem, ad cultus exercitium et pauperum levamen.

Dudum dannata in concilio Constantiensi et in bulla Martini V, ac haeretica.

17. Ecclesiae regimen a Christo Jesu institutum non est vere monarchicum.

Haeretica et contraria definitioni concilii Florentini.

18. Possunt gubernia legitime impedire circulationem vitae catholicae ponendo obstacula relationibus Apostolicae Sedis cum variis catholicitatis partibus.

Schismati et haeresi favens, Ecclesiae constitutionis et libertatis eversiva, Sedi Apostolicae injuriosa.

19. Episcopus aut concilium provinciale a theologiae regulis deflectit, dum intra suae jurisdictionis ambitum prohibet, quomi­nus doceatur judicia gravioris momenti ac solemniora Romani Pon­tificis indigere sanctione civili.

Injuriosa auctoritati Ecclesiae, schismati et haeresi favens, et quatenus supponit judicia gravioris momenti et solemniora Romani Pontificis indigere sanctione civili, haeretica.

20. Ecclesiae leges non obligant in conscientia nisi cum promul­gantur a civili potestate. (p. 113. col. 1)

Haeretica.

21. Cum necessitatis aut magnae utilitatis casus sese offerunt, in quibus potestatem suam Romanus Pontifex exercere debet per actus, qui sint extra aut supra canones in universa Ecclesia vigentes, ipsius non est decernere, utrum ejusmodi casus existant nec ne.

Detrahens potestati summi Pontificis laesiva, et proxima haeresi.

23. Nulla ecclesiastica potestas neque ipse summus Pontifex aut concilium oecumenicum potest excommunicationis sententiam ferre in supremum imperantem.

Haeretica.

24. Auctoritas spiritualis Romani Pontificis est suapse natura potestati civili infensa.

Falsa et haeretica.

25. Primus ex Romanis Pontificibus, qui acceptavit potestatem temporalem, ac principes, qui ad eam constituendam concurre­runt, errarunt.

Temeraria, erronea, et constanti Ecclesiae doctrinae contraria.

26. Dominatio temporalis Romani Pontificis adversatur doctri­nae evangelicae.

(p. 113. col. 2) Haeretica.

27. Haec dominatio temporalis non est magni momenti pro spi­ritualibus catholicitatis negotiis neque potest componi cum princi­piis boni civilis regiminis.

Complexive sumpta falsa, haeresim sapiens et erronea.

28. Falsum est dominationem temporalem summi Pontificis vi suae sacrae destinationis induere indolem spiritualem.

Erronea, contraria concilio Tridentino et constitutionibus apo­stolicis.

29. Romanus Pontifex cum excommunicationis sententiam pro­nuntiat contra invadentes Status Ecclesiae utitur armis spiritualibus ad mundanum dumtaxat bonum prosequendum.

30. Excommunicatio lata in Concilio Tridentino et bulla Caenae contra invadentes dominationes ecclesiasticas innititur confusioni ordinis spiritualis et ordinis civilis ac politici.

Falsa, temeraria, injuriosa Concilio Tridentino et Romanis Ponti­ficibus, haeresi proxima.

31. Principia et juramenta, quibus se obstringunt Pontifices ad conservandam integritatem Statuum Ecclesiae eo tantummodo spectant, ut ipsi non distrahant quamlibet eorum partem in favo­rem suorum propinquorum.

Falsa. (p. 114. col. 1)

32. Orbis catholicus nullum habet jus ad tuendam conservatio­nem et integritatem dominii temporalis Papae.

Falsa, temeraria, erronea.

33. Catholicorum conscientia considerare non debet concursum quem ipsi praebere possunt utilitati dominii temporalis Sanctae Sedis, nisi ut negotium, quod nullum prae se fert characterem spi­ritualem seu religiosum.

Falsa, temeraria, pietati fidelium detrahens, ad minus erronea.

34. In qualibet politica societate necessaria non est existentia potestatis jure divino.

Politicae potestati destructiva, haeretica.

35. Praeceptum Pauli apostoli, quod continetur his verbis: «Omnis anima subdita sit potestatibus sublimioribus» temporariam dumtaxat inducit obligationem, neque omnibus epochis, omnibu­sque generibus societatis applicari potest.

Haeretica.

36. Voluntas populi seu populare suffragium ejusmodi est per se auctoritatis, ut nulla indigeat ratione ad suorum actorum validita­tem.

Quatenus constituat voluntatem populi seu suffragium populare supremam legem independentem a jure naturali et divino, haeretica.

37. Principia, quorum vi quilibet supremus princeps non est nisi primus populi deputatus, identica sunt cum sanae theologiae prici­piis. (p. 114. col. 2)

Falsa, injuriosa theologiae et seditiosa.

38. Principia insurrectionis, quae proclamata sunt in favorem recentium eventuum in Italia, concordant cum sanae theologiae doctrina circa tyrannidem. Falsa, injuriosa theologiae et seditiosa.

39. Institutio principatus haereditarii opponitur principiis juris naturalis ac spiritui Evangelii.

Falsa, erronea et haeresi proxima.

40. Traditio Ecclesiae catholicae doctrinam continet tyrannidi seu despotismo faventem.

Falsa et haeretica.

41. In qualibet christiana politica societate nullum reperitur jus, quod suum principium seu fontem non habeat in jure Status. Falsa et haeretica.

42. Societas domestica seu familia a lege tantum civili suae exi­stentiae legitimitate derivat.

Falsa, contraria juri naturali et divino; quatenus vero intelligatur de societate seu familia christiana, haeretica.

43. Ad societatis christianae bonum est universim admittendum, conditiones essentiales conjugalis vinculi immutari debere ad guberniorum et opinionum nationalium nutum.

Haeretica.

44. Progressus socialis inducere debet abolitionem indissolubili­tatis vinculi conjugalis.

Haeretica. (p. 115. col. I)

45. Causae matrimoniales non spectant ad judices ecclesiasticos. Haeretica.

46. Praeceptum ab Apostolo promulgatum de subjectione uxoris viro suo adversatur legitimae emancipationi foeminae: quod si prae­teritis temporibus bonum extitit, non item dicendum de futuris. Impia et haeretica.

47. Proprietas non minus adversatur legi justitiae, quam legi cha­ritatis christianae, neque fundatur in jure naturae et gentium, uni­ce injure civili.

Falsa et haeretica.

48. Conforme est sanae theologiae ac juris publici doctrinae, quod gubernia sint vera proprietaria bonorum, quae obtinent Ecclesiae, familiae religiosae, hospitia, aliaque loca pia.

Falsa, contraria concilio Tridentino (Sess. 22 c. XI de Refor.). et alias dannata in constitutione cujus initium Licet juxta Joan. XXII, N kal. nov. 1327.

49. Optima oeconomiae politicae ratio in quolibet Statu exigit, civibus et Ecclesiae interdici, quominus charitas erga inopes exer­ceatur.

Perniciosa, jurium Ecclesiae et privatorum laesiva, et sacris cano­nibus contraria.

50. Proprietates et filii ita ad nationem pertinent, ut jura pro­prietatis, et jura parentum in filios eorumque educationem a natio­nis concessione dimanent.

(p. 115. col. 2)

Complexive sumpta impia, juri naturali ac divino contraria.

51. Bona proinde societatis constitutio postulat, ut natio quae per Statum repraesentatur, sub una alterave forma, directe aut indi­recte monopolium habeat institutionum ac domiciliorum educatio­nis, eorumque proprietatem, sive individualiter sive collective sumantur.

Erronea, perniciosa, juris divini et ecclesiastici laesiva.

52.Obligationes speciales quae ordinum religiosorum essentiam constituunt, ex Evangelio originem non trahunt.

Haeretica.

53. Perpetuitas votorum religiosorum oppugnari potest solidis rationibus fundatis in naturae humanae inconstantia, in libertatis jure ac in prudentiae regulis.

Jam dannata in bulla Auctorem fidei.

54.Communitates religiosae, quae operibus exterioribus charita­tis minime devoventur, nullam existentiae legitimam rationem habent.

Falsa, erronea, perniciosa et haeresi proxima.

55. juxta recta politicas principia statui debet, ut religiosos ordi­nes a guberniis catholicis a priori tanquam suspecai habeantur. Injuriosa statui religioso, detrahens institutioni ab Ecclesia pro­batae et fundatae in verbo Dei ac de haeresi suspecta. (p. 116. col. 1)

56. Quidquid sit de ultimo uniuscujusque hominis fine in altera vita, finis supremus, ad quem societates politicae debent omnes leges omnesque actiones dirigere, est cultura et perfectio ordfinis materialis.

Impia, materialismo favens, erronea, ordinis moralis ac socialis eversiva.

57. Principia evangelica eo tendunt, ut extenuent et fere extin­guant legitimos activitatis humanae progressus in ordine materiali.

Falsa, religioni christianae injuriosa, calumniosa et haeresi proxima.

58. Elementum materiale sibi primas partes vindicare debet in juventutis educationem.

Impietati favens, perniciosa, erronea, verbo Dei contraria.

59. Lex religiosa, quae vetat quibusdam diebus servilia opera exercere ad Dei cultui vacandum, principiis bonae oeconomiae politicae adeversaretur.

Impia, temeraria, Deo et Ecclesiae injuriosa.

60. Protestationes episcoporum catholici orbis in favorem domi­nii temporalis summi Pontificis, a studio partium politicarum origi­nem traxerunt.

Falsa, temeraria, calumniosa, coetui episcoporum injuriosa.

61. Exercitia spiritualia, extraordinaria seu missiones, quibus ex mandato episcopi operam dant sacerdotes sive saeculares sive regu­lares, non alium generatim effectum producunt, quam (p. 116. col. 2) vanum religionis rumorem, et natura sua paci publicae sunt infensa.

Jam dannata in Bulla Auctorem fidei, prop. 65.

Adnotatio

Censurae theologicae quibus propositiones praefatae conficiun­tur, auctoritatem dumtaxat privatam praeseferunt. Nam, ut supra innuimus, nec Ronanus Pontifex nec aliqua ex S.S. Cardinalium Congregationibus Romae institutis, neque episcopi, seu concilia provincialia, neque universitas aliqua catholica easdem recepit sua­sque fecit. An auten Rmus episcopus Marianopolitanus, qui hujus­modi theologicas censuras publici juris fecit, dum sub lege secreti episcopis Romae communicatae fuerant (uti jan diximus) licen­tiam ad hanc evulgationem obtinuerit specialem, id nobis valde probabiliter videtur omninoque existimandum.

Consulter «Le village sous l'ancien régime» par A. Babeau, 1878 chez Didier; «L'Ancien régime dans la province de Lorraine et Barrois», 1879 chez Hachette.

«Les collèges, les facultés de théologie, de médecine, des arts et de droit sont supprimés sur toute la surface de la république» (15 sept; 1793 art. 3).

«Les biens formant la dotation des collèges et de tous autres éta­blissements d'instruction publique, sous quelque (p. 117. col. 1) dénomination qu'ils existent, seront dès à présent vendus dans la même forme et aux mêmes conditions que les autres domaines de la république» (10 mars 1793, art. 1).

- Statistique établie par M. Villemain, ministre de l'instruction publique, rapport du 3 mars 1843.

En 1789 = 562 collèges dont 108 de plein exercice et 72, 747 col­légiens, dont 40,621 boursiers„ parmi lesquels 33,422 jouissaient de la gratuité complète.

En 1842 = 358 collèges dans 194 de plein exercice; 44,901 collé­giens, dont 5760 gratuits.

M. Villemain ajoute: «les 562 collèges qui existaient alors, et où l'on comptait jusqu'à 70.000 élèves, devaient bientôt disparaître, ces deux chiffres qui n'ont jamais été atteint depuis, attestent du moins combien était florissante à cette époque l'instruction secon­daire en France».

- Parlant ensuite de la gratuité presque générale dont jouis­saient alors nos collégiens, il ajoute: «cet état de choses n'était pas du tout un don du gouvernement, mais l'ouvrage des libéralités de plusieurs siècles, et pour ainsi dire l'expression même des progrès de cette civilisation qui avait porté si loin la gloire de la France dans (p. 117. col. 2) les lettres et dans les sciences.

Tout est à refaire pour créer un peuple chrétien: cela ne se fera pas par un miracle ni par une série de miracles surtout; cela se fera par le ministère sacerdotal, ou bien cela ne se fera pas du tout et alors la société périra. Ibid.

Les bourgeois ne rendront les armes qu'au socialisme qui les égorgera. - Ce sont les rois de l'opinion et de l'avenir - c'est contre leurs erreurs et leurs illusions, leur naturalisme, (p. 130. col. 1) leur libéralisme, leur rationalisme et leur sensualisme que l'apostolat doit dresser ses batteries, pour les forcer de se rendre à J.C. vain­queur. Ibid.

Il s'agit de rétablir à tous les degrés de l'échelle sociale et politi­que la sainte morale des principes et des devoirs. Que les vertus d'abnégation et de renoncement, que l'esprit de foi et de sacrifice, que les préceptes chrétiens redeviennent la devise et la loi de tous les hommes appelés à exercer ou à seconder le pouvoir, et la France qui végète avec la morale vulgaire des intérêts et des jouissances, redeviendra bientôt la nation incomparable qu'ont [a] comme nos pères, le pays des grandes choses et des nobles caractères. (Mgr Pie)

C'est le régime de la cupidité et de la volupté: amour du (p. 131. col. 1) luxe, recherche du bien-être, du confortable, des super­fluitès de détail et de mode.

Les hommes du jour mettent la gloire de la nation dans la pro­duction et la consommation, dans le développement de l'industrie et du commerce.

Fureur d'agiotage et spéculation, entreprises scandaleuses de la cupidité, rage de faire fortune, le dimanche violé, les églises désertées, la parole de Dieu méprisée…

C'est le droit de Dieu de commander aux Etats comme aux indi­vidus. J.-C. doit régner en inspirant les lois, en sanctifiant les moeurs, en éclairant l'enseignement, en dirigeant les conseils, ou réglant les actions des gouvernements comme des gouvernés.

Le but de la révolution, c'est l'anéantissement du christianisme public, le renversement de l'orthodoxie sociale. Détruire les derniers restes de l'antique édifice de l'Europe chrétienne et afin que la démolition soit définitive, abattre la clef de voûte autour de laquelle les derniers débris encore subsistants pourraient tôt ou tard se rap­procher et se rejoindre, voilà l'œuvre à laquelle les mille voix de l'impiété convient ouvertement notre génération; voilà le travail de désorganisation auquel nous assistons. Et parce que le monde n'a jamais porté un établissement aussi vaste que l'établissement chré­tien, jamais il n'aura vu de si gigantesques ruines. (Mgr Pie).

Non seulement la séparation de l'Eglise et de l'Etat ne doit pas être érigée en principe, ce qui serait une hérésie, mais les catholi­ques doivent prendre garde de s'habituer aux maximes libérales: «que (p. 132. col. 2) la religion ne doit point être mêlée aux affaires, que l'Eglise ne doit point entrer dans la politique, que l'enseigne­ment et le reste doivent être laïcisés, etc., etc.».

- Ils ne doivent pas cesser de travailler à l'amélioration de l'état présent des choses, en faisant le plus possible pénétrer l'esprit chrétien dans les institutions et les législations.

Malheur à ceux qui ne comprennent pas la nature de la charité chrétienne et la force qu'elle communique à un bon prince! Malheur à ceux qui ignorent ce que peut le zèle de la maison de Dieu dans le cœur des rois qui marchent résolument sur les traces des Constantin, des Théodose, des Charlemagne, des Henri et de tant d'autres héros sacrés! (Mgr Pie)

Les gouvernements ont le devoir de faire observer la loi du dimanche sous peine de périr. «O roi du ciel, nous ameutons les hommes contre vous, nous fomentons la révolte contre votre loi; puis nous nous plaignons des passions révolutionnaires, et nous nous étonnons de ne plus trouver ici-bas la stabilité des pouvoirs et le respect des institutions (p. 133. col. 1) humaines»! Id.

Les époux chrétiens invitent Jésus à leurs noces par la commu­nion. «Et vocatus est Jésus ad nuptias». C'est un gage d'amour dura­ble que cette alliance préalable contractée avec l'Eternel. Sanctifiées par un tel hôte et consacrées sous de tels auspices, vos noces ne seront pas de celles dont les premiers transports mêlés d'ivresse ne tardent pas à dégénérer au dégoût: «et cum inebriati fuerint, tune id quod deterius est». Si longue que doive être votre existence conjugale, vous en savourerez toujours davantage la dou­ceur et sur le déclin de vos ans, vous connaîtrez par une heureuse expérience que là où le festin nuptial est présidé par Jésus, le meil­leur vin est encore celui qui est réservé pour la fin: «tu autem serva­sti bonum vinum usque adhuc».

Le corps politique peut être considéré comme un corps organisé vivant et semblable à celui de l'homme. Le pouvoir souverain représente la (p. 137 col.2) tête. Les lois et les coutumes sont le cer­veau, principe des nerfs et siège de l'entendement, de la volonté et des sens, dont les juges et les magistrats sont les organes. Le com­merce, l'industrie et l'agriculture sont la bouche et l'estomac qui préparent la subsistance commune. Les finances publiques sont le sang, qu'une sage économie, en faisant les fonctions du cœur, ren­voie distribuer par tout le corps la nourriture et la vie. Les citoyens sont le corps et les membres qui font mouvoir, vivre et travailler la machine, et qu'on ne saurait blesser en aucune partie qu'aussitôt l'impression douloureuse ne s'en porte au cerveau.

Aveux du journal «la République française»: La séparation des Eglises et de l'Etat! Mais nous vivons depuis longtemps en pleine séparation de l'Etat et des Eglises. Quand le gouvernement de la République et les Chambres républicaines ont séparé l'Eglise de l'école, l'Eglise de l'hôpital, l'Eglise du cimetière, l'Eglise de la commune, en rendant facultatifs les crédits naguère obligatoires pour le service des cultes, qu'ont-ils fait sinon séparer l'Eglise de l'Etat? Et demain, quand le service (p. 138. col. 1) des séminaristes sera obligatoire, quand la loi qui fondera la liberté des associations réglementera les droits des congrégations; quand vous préparerez une loi sur la police des cultes, que feront le gouvernement et le parlement, sinon continuer à séparer l'Etat des Eglises? - En tout cela l'hérésie libérale qui méconnaît le règne social de J.-C., prête la main à la révolution païenne et assure son succès.

La crainte actuelle des bourgeois conservateurs est que, puis­qu'il faut se résigner à une royauté, la royauté bourbonienne soit trop timide, trop bénigne, trop paternelle, et ne dompte pas (p. 139. col. 1) les passions et les entreprises anti-sociales. De là les aspi­rations persistantes chez ces soi-disant libéraux, en retour du césari­sme napoléonien.

Comme le mot de «religion d'Etat» effarouche aujourd'hui, il faudrait changer le mot et laisser la chose en disant dans la Constitution: «la religion catholique qui est pour les Français la religion de quatorze siècles dans le passé et de trente cinq millions de citoyens sur trente six dans le présent est la religion du pays et de ses institutions. - Les citoyens qui professent les autres cultes jouissent de toutes les garanties assurées par la loi». (p. 139 col. 2)

Pourquoi placer sur un même rang l'Eglise catholique et les cul­tes dissidents? - «Dominus zelotes - Deus est aemulator» - Dieu est jaloux et il met sa force au service de cette légitime jalousie - «for­tis et zelotes».

Est-il étonnant, Seigneur, que vous jetiez périodiquement à bas ces institutions qui affectent d'élever au même niveau que vous tout ce qui n'est pas vous? Votre débonnaireté peut supporter le mal pendant la durée temporaire des siècles: mais elle ne tolère pas qu'il soit authentiquement assimilé au bien. - L'Etat ignore l'Eglise, ont dit les politiques, eh bien! Dieu leur dit aussi: «nescio vos». Et l'on sait ce qu'il en coûte: «Principes extiterunt et non cognovi». (p. 140 col.1)

Cicéron n'aimait pas l'aristocratie qui le dédaignait à cause de sa naissance (il était simple chevalier); mais il aimait encore moins la démocratie. Le gouvernement populaire est le pire de tous, disait-il avant Corneille (De rep. 1,26), et en le disant il suivait l'opinion de la plupart des philosophes grecs, ses maîtres. Presque tous ont manifesté une grande aversion pour la démocratie… Ils répu­gnaient à la souveraineté du nombre qui donne la même importan­ce à un ignorant et à un sage. Cicéron dit positivement que l'éga­lité entendue de cette façon est la plus grande de toutes les inéga­lités, «ipsa aequitas iniquitissima est».

L'Eglise trouvant en face d'elle à son origine les plaies sociales les plus invétérées, et s'appliquant tout aussitôt à les guérir par la réforme progressive des moeurs, des lois et des institutions, d'abord au sein de l'empire romain où elle cherche à faire triompher les deux principes de la justice et de la charité, depuis Constantin jusqu'à Justinien; ensuite au milieu des races barbares qu'elle transforme en nations chrétiennes sous l'influence de sa doctrine, de sa hiérarchie, de ses ordres monastiques; l'Eglise déployant tout son zèle et toute son activité pour protéger et pour défendre la chrétienté contre l'Islamisme au dehors, et au dedans contre l'action dissolvante des sectes anti-sociales; l'Eglise travail­lant, de concert avec le pouvoir civil, à la constitution chrétienne des Etats par la consécration solennelle du principe d'autorité par le maintien des libertés publiques, nationales, provinciales et muni­cipales, par l'organisation équitable et régulière du travail, par la vie corporative qui embrassant tout ordre de personnes et de cho­ses, depuis les corps de métiers jusqu'aux universités, tend à substi­tuer partout la force (p. 173 col.2) de l'association à la faiblesse de l'isolement; l'Eglise inspirant et bénissant les grandes inventions et les merveilleuses découvertes du quinzième siècle, en même temps qu'elle s'efforce d'en diriger l'usage, et d'en prévenir l'abus, pour les faire servir à étendre le règne de la justice et de la vérité; l'Eglise sauvant l'Europe et le monde civilisé de l'anarchie intellec­tuelle et morale où les sectes protestantes les auraient infaillible­ment plongés, sans une autorité capable d'arrêter le libre examen sur la pente d'une négation radicale et universelle; l'Eglise, enfin, luttant avec la Révolution, soit pour maintenir l'ordre social chré­tien, soit pour relever de ses ruines un édifice détruit par la haine et par la violence.

La vérité est que au lieu de se borner à de vastes réformes généralement désirées et opérées dans le sens même de l'histoire reli­gieuse et civile de notre pays, le mouvement de 1789 est venu abou­tir à une révolution radicale, inspirée et gouvernée par les fausses théories du Contrat social de Rousseau; révolution dont le caractè­re propre est de substituer à l'ordre social chrétien un état de cho­ses fondé soit sur le déisme rationaliste, soit sur l'athéisme et le matérialisme; révolution qui, faisant table rase de tout le passé, a mis l'homme à la place de Dieu, comme sources unique de tout droit, de toute justice, de tout pouvoir, de toute moralité.

Voilà pourquoi il en résulte pour la (p. 174 col.1) France une vie de troubles et d'agitations dont nous ne verrons pas la fin tant que l'on s'obstinera à chercher en dehors du Décalogue et de l'Evangile les bases de l'ordre social.

Tel est, messieurs, le sens incontestable de la Révolution françai­se, abstraction faite de certaines réformes qui auraient été opérées sans elle bien plus sûrement et surtout plus équitablement; or je le répète, il est bien nécessaire de se pénétrer de cette vérité pour voir d'où provient le mal et où il faut appliquer le remède. Déjà de grandes lumières se sont faites sur ce point capital, et la jeunesse française n'en est plus réduite à se former une opinion dans des ouvrages superficiels où les grands mots ne rachètent pas l'absence d'idées justes. De même que naguère, dans des (un mot qui man­que?) qui ont mis en émoi toute l'Allemagne protestante et dont nous attendons impatiemment la traduction complète, le docteur Jansen remontait aux sources pour refaire le procès véridique de la prétendue réforme, qui n'a pas été autre chose qu'une déforma­tion du christianisme; ainsi les savantes analyses de M. Le Play et de M. Taine et d'autres écrivains ont-elles commencé à faire justice des faux dogmes et des fausses légendes de la fin du siècle dernier. (p. 174 col.2)

Sous l'ancien régime le talent et le génie pouvaient se faire jour malgré l'humble naissance de ceux qui les possédaient.

Sous Louis XI Jehan Bourré, fils d'un savetier devient trésorier de France, il est anobli - Olivier le Daim de coiffeur devient mini­stre.

- Les avocats Olliver, Poyel, Boucherat, Brulart, Séguier, Marillac, à diverses époques, deviennent chanceliers de France. Michel de l'Hôpital est fils d'un médecin. - Nogaret, duc d'Epernon est fils d'un notaire. Colbert est fils d'un drapier, Fléchier est fils d'un épicier, Molière, d'un tapissier, Quinault (p. 175. col. 1) d'un boulanger; Sedaine, d'un maçon; J.-B. Rousseau, d'un cordonnier; - Girardin est fils d'un fondeur; Greuze d'un couvreur; Pigalle, d'un menuisier; Prudhon (sic), d'un tailleur de pierres - Philibert Delorme est doté d'un bénéfice; Lebrun devient surintendant des beaux-arts; Poussin, de Troy, Coypel Jean Boulogne, Mignard, Largillère, Van Loo, Rigaud sont anoblis. Mansard et Le Nostre également - Sully, aussi.

Le christianisme seul peut dire à la richesse les obligations austè­res et généreuses qui lui sont imposées, à la pauvreté la dignité qui lui appartient et la récompense que Dieu lui réserve, si elle sait honorer sa condition par le travail et la vertu. Il dit aux patrons d'aimer les ouvriers, de les entourer d'une tutelle affectueuse et prévoyante, de voir en eux des frères en J.-C. qu'ils doivent respec­ter dans leur âme, élever dans leurs sentiments, encourager dans leurs efforts, récompenser dans leur travail, protéger dans leur fai­blesse, assister dans leurs malheurs.

- Il dit aux ouvriers d'accepter leur situation en travaillant à l'améliorer, de seconder leurs patrons avec un dévouement sans envie, de considérer le travail et l'épargne comme deux vertus qui si elles semblent diminuer les aises de la vie en assurent la sécurité et ajoutent à la dignité de l'âme, de chercher dans l'association non un instrument de guerre, mais un levier pour le travail, un lien entre les âmes comme entre les intérêts, un gage d'union et de pacification féconde et pour cela d'y (p. 178. col.2) faire entrer la pensée chrétienne comme le grand centre d'où rayonne tout ce qui est bon… de puiser enfin dans la religion les croyances qui seront la force de leur vie et les espérances qui en seront la conso­lation.

Place au christianisme! qu'on le laisse s'approcher du cœur du riche et du cœur du pauvre, du cœur de patron et du cœur de l'ouvrier pour les réconcilier en les unissant dans son amour… le christianisme rendra à notre société française la paix dans la réci­procité des devoirs et des dévouements. - Ibid.

D'après la théorie nouvelle à chaque heure de sa vie un peuple peut reprendre à nouveau selon sa fantaisie ce travail de formation d'un gouvernement et d'une société qui cesserait d'être l'œuvre laborieuse et patiente des générations et des siècles. Il le fait ou il ne le fait pas… à certains moments quelques agitateurs le font pour lui. - Avec un tel principe on peut dissoudre bien vite les sociétés les plus vigoureusement constituées; on ne pourra jamais en faire vivre ni en relever aucune.

Ce n'est pas l'ordre; l'ordre (p. 180. col. 1) vit de stabilité est est [sic] antipathique à cette mobilité perpétuelle.

Ce n'est pas la liberté; la liberté vit de garanties et n'en trouve pas dans les caprices d'une souveraineté qui peut toujours briser le lendemain son œuvre de la veille.

Ce n'est pas la prospérité; la prospérité vit de confiance et la confiance manque là où l'avenir est sans sécurité.

Ce n'est pas la grandeur du pays; elle exige des desseins forte­ment conçus, mûris avec sagesse, poursuivis avec persévérance, tou­tes choses incompatibles avec les hasards d'une souveraineté chan­geante.

Qu'est-ce-donc? C'est un pouvoir absolu, anonyme et irresponsa­ble, mobile et inconscient, que l'esprit de domination ou l'esprit de révolte dirigent, exploitent et égarent tour à tour…

En France, la République par la fatalité de son origine et de son principe est et sera toujours ce pouvoir absolu, cette instabilité révolutionnaire en action; et c'est pour cela qu'elle est condamnée à être le terrain tourmenté de toutes les passions, de toutes les ambitions, de toutes les envies, de toutes les discordes, (p. 180. col. 2) également incapable de supporter les fondations du passé et d'asseoir sur un roc solide celles de l'avenir. Ibid. (p. 181. col. 1)

Nous sommes, il est vrai, une société nouvelle, une société égali­taire, une société démocratique; le mot entendu dans son sens élevé ne m'effraie pas, - car la démocratie, en tant qu'elle a pour objet d'élever le peuple à un plus haut degré de lumière, de mora­lité, de bien-être, de l'associer plus étroitement aux destinées et aux progrès de la patrie commune, cette démocratie, je la veux; et pourvu qu'elle soit une démocratie chrétienne, je crois en elle; et (p. 181. col. 2) voilà pourquoi je m'indigne quand on veut en faire une démocratie athée et matérialiste, qui entraînerait dans sa pro­pre ruine la ruine de sa patrie… Nous sommes donc une société démocratique où la liberté a plus d'exigences, où la voie doit être ouverte à tous, où tous doivent pouvoir s'élever par le travail, par le mérite, par l'effort personnel … A cette société les trois anciennes formes de la monarchie ne sauraient plus convenir. Il lui faut une forme nouvelle. Il lui faut cette monarchie que la France de 1789 appelait de ses voeux… dont le programme nouveau a été tracé naguère avec une hauteur de vues si magistrales dans un document venu de haut; il lui faut la monarchie représentative. Ibid.

La Révolution a aboli l'organisation chrétienne du travail, la cor­poration, elle a même interdit le droit d'association professionnel­le. Elle a paru affranchir l'ouvrier, elle l'a livré à toutes les consé­quences de la concurrence et du conflit des intérêts.

La loi impitoyale veut que chacun ne compte que sur lui-même. L'industriel doit produire beaucoup, vite et à bon marché pour ne pas être écrasé. L'ouvrier est l'instrument de cette lutte, ce n'est plus un homme, c'est une machine, un outil dont il faut tirer le meilleur parti. (p. 189. col. 2)

Il n'y a plus pour lui de lendemain assuré; suivant les alternati­ves de l'offre et de la demande, c'est tantôt un labeur excessif, tantôt le chômage avec tout son lamentable cortège de privations et de souffrances.

Le foyer ouvrier lui-même est atteint et désorganisé.

L'industrie ira prendre la femme et l'enfant que l'on paie moins cher. Ce logis d'où l'épouse est absente, où la main de la ménagère n'entretient plus l'ordre et la propreté, c'est un gîte, un campe­ment, ce n'est plus un foyer.

Que devient alors l'esprit de famille, l'économie, la moralité? Que deviennent les enfants, abandonnés dès le jeune âge aux influences de la rue ou jetés eux-mêmes dans le gouffre de l'atelier?

Comme le remarque un grand industriel suisse (M. Brunner, journal officiel) : moins par la faute des hommes que par la force des choses la grande industrie désorganise la vie de famille et com­me conséquence la société tout entière.

- La femme étiolée par le travail de l'atelier, (p. 190. col. 1) c'est la race elle-même compromise. La statistique médicale accuse un chiffre de deux cents décès de phtisiques par semaine à Paris seule­ment. - La mortalité des enfants pendant la première année qui est de 10%, dans les régions agricoles, dépasse 40% dans les districts manufacturiers. - D'autre part, les exemptions du service militaire atteignent dans les populations industrielles la proportion effrayan­te de 37%. Comme le disait le rapporteur de la loi militaire, les veil­lées excessives, l'abus du travail des femmes dans les ateliers, aussi bien que l'emploi prématuré des enfants sont pour beaucoup dans cet état de choses (Journal officiel). - En résumant ces choses M. Brunner cité plus haut concluait: «telle qu'elle est constituée aujourd'hui, la grande industrie crée une race abâtardie au point de vue physique, intellectuel, moral, économique et qui va s'affai­blissant encore de génération en génération». (p. 1912).

Erreur fondamentale: «L'économie politique actuelle est absolu­ment impuissante à résoudre le problème de la question ouvrière. Cela tient à (p. 190. col. 2) ce que les fondateurs de l'économie politi­que, Quésnay et Adam Smith et après eux tous leurs successeurs sont partis des principes faux qui leur étaient donnés par la philo­sophie du XVIIIe siècle et en particulier de l'optimisme» (Paul Ribot, Rôle social des idées chrétiennes, t. II).

Palliatifs: L'école de Le Play a préconisé comme remède l'huma­nité des patrons: elle peut en effet remédier à beaucoup de maux: l'engagement durable entre patrons et ouvriers, le transfert des usi­nes à la campagne, l'installation de la famille ouvrière dans une maison qui lui appartienne etc.

… ce sont des mesures excellentes qui se résument dans l'exerci­ce du patronat et qui supposent chez le patron la connaissance de son devoir social.

Mais cette solution est insuffisante: tous les patrons n'entreront pas dans ce courant de philanthropie; de plus l'industrie passe de plus en plus aux mains des sociétés anonymes où les directeurs ne sont que des salariés dont le devoir professionnel est de faire ren­dre à l'entreprise les plus gros dividendes.

Utopies: On préconise la liberté, la concurrence; elle a produit le bon marché (p. 191. col. 1) et mis le luxe à la portée de tous, mais n'est-ce pas un bon marché maudit s'il est acheté au prix de la santé et de la vie d'un grand nombre d'ouvriers et d'ouvrières.

Le droit d'association: syndicats d'ouvriers, syndicats de patrons. C'est la bataille rangée au lieu du duel: les forces s'additionnent, les passions se multiplient, la guerre sera plus acharnée et les hai­nes plus irréconciliables.

La science, la diffusion de l'instruction: elle multipliera les préten­tions des classes laborieuses, les détachera des professions manuel­les. La science sans Dieu multipliera l'influence des faux principes.

Remèdes. La loi peut concourir à remédier au mal partiellement. En Angleterre le travail des femmes est réglementé d'une manière sévère, celui des hommes est réduit à 56 heures par semaine, le repos dominical est imposé à tous et les salaires atteignent un taux élevé, tandis qu'en Belgique, pays de liberté à outrance les enfants de douze ans font treize heures de travail par jour, les femmes trei­ze ou quatorze et elles (p. 191. col. 2) descendent dans les mines et les grèves revêtent un caractère de violence qui accuse un malaise et une exaspération dépassant tout ce que l'on voit ailleurs.

C'est dans l'évangile qu'il faut chercher le secret de la paix socia­le. Toute doctrine sociale qui ne s'appuie pas sur le décalogue, c'est-à-dire sur l'amour de Dieu et du prochain ne peut aboutir qu'à l'anarchie. Le détachement et le renoncement sont la base nécessaire de l'édifice social. En ouvrant sa prédication par le «Beati pauperes» N.-S. a formulé le premier principe de l'économie politique capable d'assurer entre les hommes l'ordre et la paix.

La liberté ouverte par la Révolution prépare l'oppression des fai­bles par les forts, des simples par les habiles, des petits par les grands, puis le retour offensif des faibles qui deviennent les forts par la loi du nombre et font servir les pouvoirs publics à la satisfac­tion de leurs convoitises et de leurs vengeances et finalement l'Etat incarné dans la personne de celui-ci ou de ceux-là courbant les uns et les autres sous le joug d'une omnipotence sans contrepoids. (p. 192. col. 1)

Au point de vue économique l'action du pouvoir civil peut se résoudre à ces deux points: protection des faibles, direction des forts. I. Durée du travail dans les ateliers. - Le travail de l'ouvrier en dehors de son domicile ne devrait jamais dépasser dix heures. Si l'on veut que les ouvriers soient honnêtes, il ne faut pas les laisser trop (p. 192. col. 2) longtemps éloignés de leur famille. Qu'on leur laisse le temps de se consacrer à leurs affections de famille et de s'occuper de leurs affaires. Qu'on ne les prive pas surtout du repos dominical pour qu'ils puissent remplir leurs devoirs religieux et prendre le repos nécessaire.

II. Le travail des femmes. La constitution délicate des femmes ne leur permet pas de se charger de travaux fatigants. Il ne convient pas non plus de les faire travailler ensemble avec les hommes. L'emploi de travailleurs des deux sexes dans un même atelier devrait être interdit partout où il ne peut être organisé de façon à éviter tous les inconvénients.

III. L'âge des enfants employés. La loi ne doit point tolérer qu'ils soient employés à un âge trop tendre.

IV. Les précautions à prendre pour les travaux dangereux ou insalubres. Il s'agit de la santé et de la vie de tant de nos frères.

V. Il semble que la loi peut établir un minimum de salaire. (Civiltà). - Comment peut-on soutenir que la meilleure méthode économique soit d'abandonner (p. 193. col. 1) toute direction écono­mique au hasard des tendances individuelles selon la maxime «lais­sez faire, laisser passer»? Si dans les questions économiques l'ordre pouvait naître du choc des intérêts privés, on ne voit point pour­quoi il n'en pourrait être de même dans les autres branches de l'activité sociale. Dans ce cas l'anarchie serait l'idéal du régime politique.

L'excès d'industrie a introduit aux Etats-Unis le paupérisme qui n'y était pas connu, il y a vingt ans. Comme conséquence on y voit s'établir le travail des femmes et des enfants dans les manufactures. Le gouvernement interdit la venue d'ouvriers étrangers et certains Etats refusent aux étrangers le droit d'acquérir des propriétés.

Le gouvernement prend des mesures contre les déclassés. Il ordonne aux directeurs des gymnases de restreindre le chiffre des admissions, de ne pas recevoir les enfants des cochers, des laquais, des cuisiniers, des petits boutiquiers, qu'il ne (p. 193. col. 2) faut pas élever en dehors du milieu auquel ils appartiennent. Sur cent mil­lions d'habitants 2700 seulement sortent annuellement des collè­ges.

(p. 196. col. l)

A propos de la loi sur le revenu le gouvernement a déclaré que le revenu de la France était de 16 milliards par an. 16 milliards! Il en faut maintenant quatre pour l'impôt. Il en reste 12. Cela paraît beaucoup et c'est l'extrême pauvreté. 38 millions d'habitants à 1 fr par jour mangeraient près de 14 milliards. 1 fr par jour! pour l'ali­mentation, le logement, le vêtement et le reste! Comme les riches consomment notablement plus que cela, que reste-t-il (p. 196. col.2) aux pauvres? A peine de quoi ne pas mourir. N'est-il pas à peu près certain que la France ne peut plus épargner et doit commencer à manger son capital?

Le régime conforme au génie de notre race, c'était une extraor­dinaire intensité de vie communale et provinciale; les grands servi­ces publics, assistance, enseignement, religion, justice, assurés par des corporations autonomes.

C'est à la Renaissance que le droit (208. col. 2) de l'Etat change d'étendue et de nature. L'Etat avait pour mission de subordonner à l'unité nationale ces indépendances diverses.

Mais en même temps que furent rendus au jour les trésors de l'art, de la littérature et du droit antiques, fut exhumé le gouverne­ment de la société païenne, cette majesté et cette simplicité appa­rente d'un peuple et d'un César, d'une foule remettant tous ses droits à un homme.

Au dix-septième siècle, nos communes et nos provinces perdent toutes leurs franchises: des intendants vont porter partout la volonté d'un maître et la régularité de l'administration française. Toutes les corporations sont dépendantes, les parlements domestiqués, l'Eglise de France asservie. Le roi étend sa main souveraine sur les croyances et sur l'enseignement. Les droits de l'Etat sont fondés. C'est une con­quête violente sur les institutions séculaires du pays.

Pour que nos vieilles libertés cèdent, il faut que l'absolutisme trouve coup sur coup pour ministre un Richelieu et pour souverain un Louis XIV.

Louis XIV avait tellement de grandeur dans le conseil, d'ordre dans l'exécution, un don si rare pour discerner les hommes et le choix entre des serviteurs (p. 209. col. 1) si illustres, que la France parut d'abord fortifiée par sa dépendance.

Mais un siècle après il y a un tel désordre dans les affaires, un tel gouffre dans les finances, un tel étouffement de la liberté que le pays se sent menacé d'un péril nouveau. Avec une unanimité, pareille à celle qui l'avait soulevé contre la maison d'Autriche et contre l'Anglais, il se soulève contre l'absolutisme.

En 1789 la France inscrit dans la Déclaration des droits que «le but de toute association politique est la conservation des droits naturels, inaliénables et imprescriptibles de l'homme». Puis elle restaure ses vieilles franchises locales en organisant l'autonomie des départements et des communes.

Malheureusement, par peur du pouvoir absolu, on ne laissa pas à la royauté l'autorité suffisante pour maintenir l'unité et l'ordre. L'impuissance de l'Etat amena l'anarchie des 36.000 communes. L'usurpation d'une minorité violente à Paris rétablit le despotisme à son profit. L'Etat se reprit à tout régler, l'enseignement, les cons­ciences et jusqu'au prix des marchandises.

La force seule promène le pouvoir du 31 mai et de fructidor à Brumaire, des terroristes à (p. 209. col.2) Napoléon.

Le génie de Bonaparte perfectionna le despotisme, comme il perfectionna la guerre. Jamais la concentration de l'autorité n'a été comparable.

Tuteur universel, l'Etat soumet le commerce et le travail à ses règlements; il distribue seul l'opinion par la censure de la presse; il donne seul l'enseignement par le monopole de l'université; il pré­tend n'avoir pas moins de prises sur la religion.

La réaction de 1814 fut incomplète. Depuis lors nos gouverne­ments sentant leur faiblesse ont considéré comme un puissant secours cette autorité de l'Etat et ils n'ont pas su renoncer à tenir en tutelle les intérêts locaux et à opprimer l'enseignement et les croyances.

L'esprit public s'est atrophié. L'habitude d'être conduits et con­traints en toutes matières empêche de s'indigner quand l'Etat par sa mainmise sur l'enseignement et les croyances attente à la liberté de l'esprit. La vision de la liberté s'est tellement restreinte qu'on n'en est venu depuis trois quarts de siècle à ne réclamer à l'Etat que des libertés de presse, de réunion et de parole, sans s'inquiéter des libertés d'action. (p. 210. col. 1)

Sous les régimes les plus divers, la constitution de l'an VIII, intacte dans ses grandes lignes, n'a pas cessé de régner.

Cependant, qu'est-ce que l'Etat aujourd'hui? La réunion de trois pouvoirs, tous électifs et temporaires: le Sénat, la Chambre, la Présidence. Et comme un de ces pouvoirs domine les autres, l'Etat aujourd'hui, c'est la Chambre, la majorité, un groupe d'hommes nommés pour quatre ans, pas autre chose.

Et un tel Etat prétend exercer les prérogatives de Louis XIV et de Napoléon!

Il n'a pour lui ni l'impartialité, ni la compétence. C'est un grou­pe de politiciens intéressés, qui use du pouvoir pour essayer de s'y perpétuer.

La première reprise à exercer contre l'Etat est de lui enlever la part excessive qu'il s'est faite dans le gouvernement des affaires locales. La véritable garantie de tous dans une démocratie, c'est de soustraire à la volonté d'autrui tout ce qu'il se peut de la volonté de chacun. Tenons pour à jamais caduque la prétention de l'Etat à former un esprit public, à conduire les intelligences. C'est la condi­tion de la paix publique.

Le problème social se résoudra par la liberté. Le mal de (p. 210. col. 2) l'ouvrier n'est pas seulement matériel, il est moral et sur ce mal moral l'Etat ne peut rien. Tout ce que l'ouvrier obtiendrait

par la loi n'adoucirait pas son cœur; il le recevrait pour son dû, et, le recevant d'un être abstrait, l'Etat, il ne saurait gré envers personne. Laissez libre la charité. Croit-on qu'après avoir affronté les pires détresses aux siècles des grandes épidémies et des grandes famines, elle s'effraiera de sa tâche nouvelle et se déclarera incapable d'apporter un remède à l'existence précaire où vit l'ouvrier? Supprimez donc les lois qui ont mis des menottes à la générosité française. Déliez ses mains et vous vous étonnerez de ce que par elles il s'accumulera de ressources.

Quand les classes trop longtemps étrangères et hostiles, dégagées des liens qui les empêchent de s'unir auront fait en se connaissant mieux la plus consolante, la plus belle des découvertes, la découverte de la bonté humaine, et de la charité chrétienne, elles finiront par s'aimer. Lamy.

(p. 211. col.1)

Notre grand siècle, qui a débuté par une incomparable épopée guerrière, qui, depuis, a renouvelé l'histoire, l'érudition, la poésie, l'art, arraché à la nature tant de secrets non encore révélés, qui s'est donné toutes les fêtes et toutes les bonnes fortunes du beau et du vrai, n'a pas cessé de poursuivre, avec inexpérience parfois, avec conviction toujours, et souvent (p. 211. col. 2) avec efficacité, la réali­sation du bien social. Fidèle à cette liberté contractuelle, qui a si heureusement succédé aux antiques servitudes corporatives, par elle, il a vu la condition du travailleur s'accroître en bien-être aussi bien qu'en dignité. Dans nos campagnes, des millions de travail­leurs agricoles, assiette immuable de la nation, de plus en plus maî­tres de la terre, sont satisfaits de leur sort.

Dans nos usines, d'admirables institutions patronales abritent l'enfance, l'infirmité, la décrépitude de l'ouvrier…

Il semble que le siècle, désenchanté de tant d'illusion, et fatigué de ce qu'il a accompli de prodigieux, ne conserve d'ardeur que pour son œuvre d'amélioration sociale. (Emile Ollivier, disc. à l'acad.)

(p. 212. col. 2)

=====La fin d’un régime social 1848-1892

Dans les rangs de la bourgeoisie, combien d'individus, étourdis et comme grisés par l'étonnant progrès économique qui naissait de leurs efforts et dont ils tiraient d'immenses bénéfices, en proie à une fièvre de gain, de spéculation et de jouissance, irritaient le prolétariat par leur égoïste indifférence, en même temps que leurs exemples leur enseignaient toutes les convoitises matérialistes. De là le cri de révolte et d'envie qui semblait parfois répondre d'en bas au culte du veau d'or qui régnait en haut. Là encore, n'était-ce pas la religion qui eût pu apporter le vrai remède au mal social, en apprenant à cette société bourgeoise la leçon trop oubliée du renoncement pour soi et de la charité envers les autres? (p. 213. col. 1). Dès 1837, Ozanam considérant d'un côté le camp des pauvres, de l'autre le camp des riches, «dans l'un, l'égoïsme qui veut tout retenir, dans l'autre, l'égoïsme qui veut s'emparer de tout» demandait «qu'au nom de la charité, les chrétiens s'interposas­sent entre les deux camps, qu'ils allassent, transfuges bienfaisants, de l'un à l'autre, obtenant des riches beaucoup d'aumônes, des pauvres beaucoup de résignation»; qu'ils se fissent «médiateurs» entre «un paupérisme furieux et désespéré» et une «aristocratie financière dont les entrailles s'étaient endurcies»; … Mais, hélas! bien petit était le nombre de ceux qui pensaient et surtout agis­saient comme Ozanam!

- Thureau-Dangin, historien de la Monarchie de juillet, t.6, p. 150.

- Le mal est bien le même aujourd'hui. La religion seule possè­de le remède. Le palliatif de l'aumône ne suffit pas. Il faut avec la charité faire régner la justice.

NOTE de l'ÉDITEUR: le texte complet des Excerpta sera publié dans le volume MISCELLANEA («Mélanges») de l «'OPERA OMNIA» du père Dehon, y compris les textes sur thèmes sociaux qui n'ont pas été retenus par le Père A. Vassena scj, pour le VI ° volume des «Œuvres sociales».

  • oscmnd-0006-0025.txt
  • ostatnio zmienione: 2022/06/23 21:40
  • przez 127.0.0.1