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Mois de Mai
Mois de Marie et du Saint-Esprit

Deux méditations pour la retraite du mois

I. Vie de pureté a l’exemple de Marie

Missus est angelus Gabriel a Deo in ci­vitatem Galilaeae cui nomen Nazareth, ad virginem desponsatam viro cui nomen erat Joseph de domo David, et nomen vir­ginis Maria (S. Luc, l, 26).

Dieu envoya l'ange Gabriel à Nazareth de Galilée, vers une vierge appelée Marie et dont l'époux s'appelait Joseph (S. Luc, 1, 26).

1er Prélude. - Je verrai Marie agenouillée et priant dans les dispositions les plus pu­res, quand l'ange Gabriel vient la visiter.

2e Prélude. Par la virginité de Marie, ô Jésus, effacez toutes les souillures de mon cœur, purifiez-moi et conservez-moi désormais dans la pureté.

Ier POINT: De la pureté. - La pureté a ses exigences, même pour les personnes du monde. Elles n'entreront point dans le royaume des cieux, si elles n'ont pas conservé la pureté selon leur état, ou si du moins elles n'ont pas réparé leurs fautes par la pénitence.

«Qu'elle est belle, dit le Livre de la Sagesse, la génération chaste! Sa gloire ne périra pas, elle sera honorée de Dieu et des hommes» (La Sa­gesse, 4, 1). Ce qui provoquait ce cri d'admiration, c'était la vue de ceux qui, au milieu de ce monde corrompu, quelle que soit leur vocation, gar­dent leur cœur dans l'innocence et la pureté.

Mais l'apôtre saint Jean est saisi d'une admiration plus profonde en­core, quand il contemple au ciel ceux qui, non contents de garder leur cœur pur de toute corruption, sont restés vierges. Il s'écrie: «J'ai eu une vision: L'Agneau était debout sur la montagne de Sion; et autour de lui il y avait cent quarante quatre mille élus qui chantaient un cantique nou­veau; et ceux-là suivent l'Agneau partout où il va, parce qu'ils sont vier­ges» (Apoc., 14, 1).

Pour entrer au ciel, il faut donc appartenir à la génération des chastes, mais pour faire partie au ciel de la cour intime du Sauveur, il faut être du nombre des âmes vierges.

Heureuses les âmes généreuses et vigilantes qui entendent l'appel de l'époux divin: Ecce sponsus venit, et se lèvent aussitôt pour le suivre! Il les fera entrer au festin nuptial. Elles reposeront sur son Cœur.

IIe POINT: Le divin modèle des vierges. - Marguerite-Marie se plaisait à voir dans la blancheur de l'hostie un symbole de la pureté éminente de la divine Victime. Jésus avait voulu que son amour pour la pureté fût sym­bolisé par la blancheur des agneaux qui le représentaient dans l'ancien­ne loi. Il a voulu aussi que cette pureté nous fût rappelée par la blan­cheur de l'hostie.

«Cette blancheur nous apprend, disait-elle, qu'il faut être une victime pure pour être immolée a Jésus; une victime sans tache pour le posséder; une victime pure de corps, de cœur, d'intention et d'affection».

Jésus ne peut pas agréer une victime qui n'ait pas cette pureté complè­te. On peut juger combien Notre-Seigneur doit tenir chez nous à la pu­reté de cœur, de pensée et d'intention d'après les exigences de l'ancien­ne loi relativement à la pureté et à la blancheur des agneaux du sacrifice.

Le bon Maître se servait encore d'une autre comparaison dans un de ses entretiens avec la Bienheureuse: «Conserve en pureté le temple du Seigneur, disait-il et Dieu t'assistera d'une spéciale présence de protec­tion et d'amour». C'est notre cœur qui devient le temple du Seigneur par la communion. Notre-Seigneur veut demeurer dans ce temple par une présence spéciale d'amour et de bienveillance, mais il veut pour cela que ce temple soit parfaitement pur, exempt de toute souillure et orné des meilleures dispositions.

On sait quelles longues et solennelles cérémonies de consécration il a ordonnées pour le temple de Jérusalem et quelles purifications l'Eglise exige pour la consécration de nos temples.

Dieu voudrait-il moins de pureté dans nos cœurs?

IIIe POINT: Moyens à employer pour conserver la pureté. - Marguerite­Marie les enseigne et elle en a donné l'exemple.

Le premier est d'aimer la vie de retraite et de se tenir à l'écart du monde. Et pour cela il faut éviter les conversations mondaines, les lectu­res dangereuses ou inutiles. Il faut même se garder de l'amour excessif de la famille, en s'intéressant, surtout par la prière, au salut des tiens.

Le second moyen est la pénitence avec une vie mortifiée. - «O mon Dieu, disait la Bienheureuse, vous me fîtes connaître que votre Sacre-Cœur m'ayant enfantée sur le Calvaire avec tant de douleur, la vie que vous m'y aviez donnée ne pouvait s'entretenir que par l'aliment de la croix, laquelle serait mon mets délicieux».1) Elle aimait le jeûne et la di­scipline, pour mettre sa virginité en sûreté, comme au milieu d'une haie d'épines (Vol. 1. p. 580).

Un troisième moyen, c'est la dévotion envers la Très Sainte Vierge. C'est elle qui nous conservera dans la fidélité à son divin Fils. «Un jour, dit la Bienheureuse, mon Sauveur me dit: Je t'ai choisie pour mon épou­se et nous nous sommes promis la fidélité… et puis je t'ai mise en dépôt aux mains de ma sainte Mère»,

Enfin, le moyen le plus efficace, c'est l'amour pour l'Eucharistie et pour le Sacré-Cœur. «Dès que Jésus m'a promis de sauvegarder ma chasteté, dit la Bienheureuse, toute mon inclination fut d'aller vers le Saint-Sacrement» (Sa vie, p. 304).

Résolutions. - Ma résolution sera de prendre ces quatre moyens pour garder la pureté et particulièrement de m'attacher à Jésus, le plus beau, le plus riche, le plus parfait de tous les amis (Marg.-Marie).

Colloque avec la Très Sainte Vierge.

II. La mort de la sainte vierge

Adjuro vos, filiae Jérusalem, si invene­ritis dilectum meum, ut nuntietis ei quia amore langueo (Cant., V, 8).

Je vous conjure, filles de Jérusalem, si vous trouvez mon Bien-Aimé, de lui dire que je languis d'amour (Cant., V, 8).

1er Prélude. - Voir à Jérusalem, au cénacle, l'incomparable Mère de Dieu, vivant près du tabernacle et déjà dans le ciel par le désir et le mérite. Comme elle languissait d'amour, les apôtres étant réunis auprès d'elle, son âme s'envola au ciel auprès de son Bien-Aimé.

2e Prélude. Que mon âme meure de la mort des justes! (Aux Nombres, III).

Ier POINT: L'attente. - Pourquoi le Sauveur qui avait tant d'affection pour sa sainte Mère l'a-t-il pas, en montant au ciel, emmenée avec lui pour la récompenser de ses mérites et de ses souffrances incompa­rables?… Pourquoi l'a-t-il laissée pour vingt-trois années encore loin de lui, son unique amour, et au milieu des misères de cette vie?… Pour­quoi? Pour elle-même, pour l'Eglise et pour nous.

Pour elle-même, afin qu'elle pût encore accumuler des mérites innom­brables et embellir définitivement sa couronne… Pour l'Eglise naissante, afin de lui laisser une Mère pour l'élever, une Maîtresse pour l'instruire, une Reine pour l'encourager et la fortifier au milieu des persécutions des juifs et des Gentils.

Marie soutient les apôtres, découvre aux évangélistes les secrets de la vie cachée de son Fils, anime les premiers martyrs, inspire aux vierges et aux veuves les célestes attraits de la pureté. Elle est l'âme des ouvriers évangélistes et des nouveaux convertis, la règle des bonnes mœurs, l'inspiratrice de la piété…

Mais pourquoi encore ce délai? - Pour nous; pour qu'elle nous ensei­gne à bien vivre et à bien mourir; pour qu'elle nous apparaisse comme un modèle parfait et fidèle de son divin fils, plus accessible à notre fai­blesse et à notre imitation que le type suréminent du Dieu-Martyr. Pure créature, femme forte et virile par excellence, elle sera l'idéal et l'exem­ple de la sainteté jusqu'aux derniers jours d'une longue vie. Elle n'a point de découragement dans la plus douloureuse des séparations, celle de son divin Fils; mais debout, toujours ferme et intrépide, vierge, apô­tre, confesseur, elle nous précède dans la voie royale de la prière, du tra­vail, de la souffrance et de l'apostolat.

Où en suis-je dans cette voie?… C'est la condition d'une bonne mort.

IIe POINT: Les conditions du triomphe. - La mort est la solde du péché (aux Rom., 6). La Vierge immaculée, Mère de Dieu, était digne de ne pas mourir; mais son divin Fils, qui s'était chargé des péchés du monde, était mort; Marie allait mourir pour payer son tribut à la nature et pour s'unir au sacrifice de son divin Fils.

Dans quelles conditions mourrait-elle pour aller droit au ciel partager la gloire de son Fils? Dans la disposition du plus parfait abandon à la vo­lonté divine et du plus entier détachement des choses de la terre.

Elle s'élèvera au ciel comme une colombe toute blanche de pureté, comme une flamme toute brûlante d'amour. C'est ainsi que la tradition, développée par la piété des orateurs sacrés, nous représente ce saint tré­pas.

Parvenue à l'âge de soixante-douze ans, Marie vivait dans la maison du Cénacle. Elle priait pour la propagation de l'évangile. L'ange Ga­briel vint de la part du Seigneur lui annoncer que le moment de sa ré­compense était proche. Comme au jour de l'Annonciation, elle pronon­ce son Ecce ancilla! Elle réitère le sacrifice de sa vie qu'elle a fait tant de fois. Elle laisse ses deux tuniques aux fidèles qui l'avaient assistée. Notre-Seigneur a disposé les évènements pour que les apôtres soient présents. Saint Pierre offre le sacrifice eucharistique et communie Ma­rie.

Puis elle s'incline sur sa couche et le cœur embrasé d'amour elle répè­te les dernières paroles de son Fils: «Mon Dieu, je remets mon âme entre vos mains». Son âme se détache de son corps par la véhémence de l'amour divin, pour être transportée dans le sein de Dieu au séjour du bonheur éternel.

Ma vie s'achemine-t-elle vers cette fin? Quel est mon détachement? Quelle est ma ferveur?

IIIe POINT: Celui qui s'humilie sera glorifié. - C'est là le principe de la gloire de Marie. Elle a été toute humble devant Dieu, et l'humilité est la source de toutes les grâces et de la gloire du ciel.

La doctrine spirituelle nous enseigne les degrés de l'humilité: l'obéis­sance aux préceptes divins qui est le degré le plus élémentaire; l'obéis­sance aux conseils, si j'y suis appelé; l'amour des humiliations, si je veux suivre plus pleinement Jésus, m'unir à son divin Cœur et contribuer avec lui au salut des âmes.

Marie a été l'humilité même, et Dieu a regardé avec amour et comblé de ses grâces son humble servante.

Où en suis-je, vis-à-vis des préceptes, des conseils, des humiliations?

Résolutions. - O Marie, je ne puis pas vous suivre jusqu'aux plus hauts sommets de la vertu, il faut cependant que je marche sur vos traces si je veux aller au ciel. Il faut que je pratique le détachement, la pureté, l'humilité. Je vous prie de m'en obtenir la grâce.

Colloque avec Marie au jour de sa mort.

1er MAI
Saint Philippe et saint Jacques

Quae autem desursum est sapientia, primum quidem pudica est, deinde pacifi­ca, modesta, suadibilis, bonis consen­tiens, plena misericordia et fructibus bo­nis, non judicans, sine simulatione. Fruc­tus auteur justitiae in pace seminatur fa­cientibus pacem (Ep. S. Jac., 3, 17).

Mais la sagesse qui vient d'en haut est premièrement chaste, puis amie de la paix, modérée et équitable, docile, su­sceptible de tout bien, pleine de miséri­corde, riche en fruits de bonnes œuvres; elle ne juge pas témérairement, elle n'est pas double ni dissimulée. Or, les fruits de la justice se sèment dans la paix par ceux qui font des œuvres de paix (Ep. S. Jac­ques, 3, 17).

1er Prélude Saint Philippe et saint Jacques ont été deux apôtres bien chers à Notre­-Seigneur. Saint Jacques en décrivant ici la sagesse chrétienne, nous dépeint son propre cœur.

2e Prélude. Saints apôtres, obtenez-moi l'amitié de Notre-Seigneur.

Ier POINT. Saint Philippe, l'ami familier de Notre-Seigneur. - Saint Phi­lippe, de Bethsaïde, fut un des premiers disciples de Notre-Seigneur. Jé­sus l'ayant rencontré dès les premiers jours de sa vie publique, lui dit: «Suis-moi». Philippe le suivit aussitôt et lui amena un de ses amis, Na­thanaël.

Philippe mérita par sa simplicité et sa droiture d'être un des disciples les plus familiers de Notre-Seigneur. Quand Jésus multiplia les pains au désert, c'est à Philippe qu'il demanda où l'on pourrait acheter des pains pour nourrir une foule aussi considérable.

Lorsque Notre-Seigneur fit son entrée triomphale à Jérusalem, quel­ques jours avant sa Passion, des païens s'adressèrent à Philippe et lui di­rent qu'ils voulaient voir Jésus Philippe en parla à André et tous deux présentèrent ces païens au Sauveur.

Au moment de la dernière Cène, Philippe demanda à Notre-Seigneur de leur montrer son Père. Jésus lui répondit: «Celui qui me voit, voit mon Père», parce que le Père et le Fils ne font qu'un.

Saint Philippe mourut sur la croix en Phrygie après vingt ans d'apo­stolat. Moi aussi je puis obtenir l'amitié familière de Notre-Seigneur, si je travaille constamment à mon union avec le Sacré-Cœur.

IIe POINT: Saint Jacques, frère du Seigneur. - On l'appelait Jacques le juste, ou Jacques le mineur, pour le distinguer de saint Jacques le ma­jeur, frère de saint Jean. On l'appelait souvent aussi le frère du Seigneur, parce qu'il était parent de Notre-Seigneur.

On dit qu'il avait sur son visage des traits frappants de ressemblance avec le divin Sauveur. Il était le frère de saint Jude qui fut aussi apôtre. Après la Pentecôte, il fut nommé évêque de Jérusalem. Il était austère comme saint Jean-Baptiste et doux comme le bon Maître. Pendant toute sa vie, il s'abstint de viande; il ne buvait que de l'eau et ne portait point de sandales. Il avait un manteau grossier et une seule tunique. Il passait de longues heures en oraison et à genoux.

Il prit la parole au concile de Jérusalem pour demander qu'on n'in­quiétât pas les juifs convertis au sujet des pratiques mosaïques et qu'on n'obligeât pas les païens à suivre ces pratiques.

Il était vénéré de tous, même de beaucoup de juifs. Saint Pierre le fait avertir de sa délivrance de la prison. Saint Paul va le visiter.

Le frère du Seigneur est pour tous un conseiller spirituel.

Il confessa hautement la divinité de Notre-Seigneur et le Sanhédrin le condamna à mort, comme il avait condamné Jésus. Saint Jacques mou­rut comme son bon Maître en priant pour ses bourreaux et en disant à Dieu: «Pardonnez-leur, Seigneur, parce qu'ils ne savent ce qu'ils font».

Si je veux que mon apostolat soit fécond, comme celui de saint Jac­ques, il faut que je confesse Notre-Seigneur non seulement par mes pa­roles, mais aussi par la pratique de toutes les vertus chrétiennes.

IIIe POINT: Conseils de sagesse. - Saint Jacques nous a laissé sa belle épître adressée à toutes les Eglises.

Il y décrit d'une manière lumineuse la vie chrétienne, telle qu'il la pratiquait journellement. Il établit la nécessité des bonnes œuvres, il re­commande la constance dans les épreuves, la charité pour le prochain, le bon usage de la langue. Il parle du sacrement de l'extrême-onction, que l'on donne aux malades.

Il résume toute la vie chrétienne sous le nom de sagesse qui vient d'en-haut, comme saint Paul l'a résumée sous le nom de charité.

«La sagesse est chaste, dit-il, elle est modeste, pacifique, docile aux sa­ges conseils, pleine de miséricorde, dévouée aux bonnes œuvres. Elle évite les jugements téméraires, les mensonges, la duplicité. Elle est sur­tout amie de la paix intérieure et du recueillement qui sont la condition pour entendre la voix de Dieu et pour pratiquer la justice dans la pureté d'intention».

Oui, c'est dans la paix intérieure, dans l'union avec le Sacré-Cœur, que je pourrai pratiquer la vie d'amour et de réparation que Notre­-Seigneur attend de moi. La modestie, le recueillement et l'humilité m'y prépareront.

Résolutions. - J'admire l'amitié familière de saint Philippe et de saint Jacques avec Notre-Seigneur, mais cette amitié ne m'est pas interdite, au contraire, elle m'est offerte par Notre-Seigneur. Ne m'a-t-il pas ap­pelé tout spécialement à la dévotion à son Sacré-Cœur? C'est pour faire de moi un ami intime, un apôtre, un disciple aimant et aimé.

Colloque avec les deux saints apôtres.

2 Mai
De l'union aux Saints Cœurs
de Jésus et de Marie

D’après le r. p. Eudes

Et hoc est mandatum ejus: Ut creda­mus in nomine Filii ejus Jesu Christi: et diligamus alterutrum, sicut dedit manda­tum nobis. Et qui servat mandata ejus, in illo manet et ipse in eo: et in hoc scimus quoniam manet in nobis de Spiritu quem dedit nobis (1 Joan, 3, 23).

Et voici les commandements de Dieu, c'est que nous croyions au nom de son Fils Jésus-Christ et que nous nous ai­mions les uns les autres, comme il nous l'a ordonné. Et celui qui observe ses com­mandements demeure en Jésus et Jésus en lui, et nous savons qu'il demeure en nous par le Saint-Esprit, qu'il nous a don­né (1 S. Jean, 3, 23).

1er Prélude. Jésus demeure en nous par le Saint-Esprit, mais combien plus en Marie. Les Cœurs de Jésus et de Marie n'en font qu'un.

2e Prélude. Demeurez en mon cœur, ô Jésus, par Marie et avec Marie.

Ier POINT: Le Cœur de Jésus est la source de notre vie surnaturelle. - Jésus nous communique sa vie divine en s'unissant à nous par la grâce: «Je suis la vie, dit-il, et je suis venu pour la répandre en vos âmes» (S. Jean, 10, 10). - «Je vis et vous vivez de ma propre vie» (S. Jean, 4, 19). - «Celui qui a le Fils de Dieu en soi, a la vie», dit saint Jean (S. Jean, 5, 12).

C'est par son Cœur que Jésus nous communique cette vie divine. «Ce Cœur sacré, dit le Père Eudes, est le principe de la vie non seulement de l'Homme-Dieu, mais de la mère et des enfants de Dieu. - Le Cœur spirituel de Jésus, c'est-à-dire son âme très sainte, unie à sa divinité, est le principe de sa vie spirituelle et morale. - Il est aussi le principe de la vie de la Mère de Dieu. L'enfant-Dieu recevait de Marie la vie matériel­le et lui transmettait la vie spirituelle et surnaturelle. - Le Cœur de Jésus est aussi le principe de la vie surnaturelle de tous les enfants de Dieu. Comme il est la vie du chef, il est aussi la vie des membres. En Jésus, dit saint Thomas, est la plénitude de la grâce ou de la vie des âmes. Elle est déposée dans son Cœur, comme dans un réservoir universel, d'où elle découle dans l'humanité afin de la sanctifier». Notre-Seigneur nous l'a dit plusieurs fois: «Si quelqu'un m'aime, mon Père l'aimera, et nous viendrons à lui, et nous ferons en lui notre demeure» (S. Jean, 4, 10). Jésus habite en nous par sa grâce, et son Cœur s'unit à notre cœur pour y devenir le principe vivant de la vie spirituelle et divine en nous (Père Eu­des: Le royaume de Jésus, et le cœur admirable de Marie).

IIe POINT: Il y a des degrés dans cette vie divine. - Il y a des degrés sans nombre dans cette union et cette vie spirituelle. Le simple état de grâce est le premier degré d'union spirituelle avec le Cœur de Jésus dans l'Esprit-Saint, et c'est le degré essentiel au salut.

«Le Cœur de Jésus, dit le Père Eudes, vit en ceux qui l'aiment froide­ment, qui le servent lâchement et négligemment; mais c'est d'une vie imparfaite, languissante et presque éteinte.

Il est vivant d'une vie plus noble, plus vigoureuse et plus parfaite en ceux qui l'aiment et le servent avec plus d'ardeur; et ces cœurs, s'ils sont fermes et stables dans leur amour, ils sont du nombre de ceux dont il est écrit: Vivent corda eorum in saeculum saeculi: leurs cœurs vivront aux siècles des siècles (Ps., 21).

«Il y en a d'autres où il n'est pas seulement vivant, mais où il règne. Ce sont ceux qui ont fait mourir en eux l'amour-propre et la volonté propre, et qui ne prétendent autre chose en ce monde et en l'autre que de plaire à Dieu, de le contenter en tout et d'accomplir parfaitement et amoureu­sement sa volonté adorable. Ce Cœur sacré est le principe de tous leurs mouvements et de tous leurs actes; il est absolument le maître dans leur cœur et il y dispose de tout comme il lui plaît» (Le Cœur admirable de Marie).

C'est à cette union parfaite que nous devons tendre, si nous voulons être agréables à Jésus et attirer sur nous ses plus précieuses faveurs.

IIIe POINT: C'est par Marie et par son Cœur immaculé que le Cœur de Jésus se donne à nous. - Comme c'est par Eve qu'Adam nous a transmis la mort, c'est par Marie, c'est par son Cœur immaculé que le Cœur de Je-sus s'est donné à nous pour nous communiquer sa vie divine. C'est donc avec raison, dit le Père Eudes, que la sainte Eglise appelle la très sainte Vierge «notre vie, vita nostra». Son Cœur est, avec son divin Fils, la sour­ce de notre vie temporelle et éternelle, puisque, par nos péchés, nous avions mérité d'être privés de l'une comme de l'autre, et qu'elles nous ont été rendues par l'entremise du Cœur de la Mère de grâce et de misé­ricorde, qui nous a donné le Cœur de Jésus, notre divin Rédempteur.

La très sainte Vierge nous assiste intérieurement, mais, pure créatu­re, elle n'est pas substantiellement en nous comme le Verbe de Dieu; toutefois la grâce qui nous unit réellement et substantiellement au cœur du Verbe incarné, nous unit aussi, mais spirituellement, au cœur de Marie.

Le Cœur immaculé de Marie est uni aussi intimement que possible à

Celui de son divin Fils, qui y vit et règne de la manière la plus parfaite. Plus donc notre cœur est uni au cœur de Jésus, plus il se rapproche par là même du Cœur de la très sainte Vierge; plus ce Cœur béni nous ai­me, plus il nous assiste et nous entoure de ses soins maternels.

Nous devons avoir pour devise: Tout au Cœur dé Jésus par le Cœur de Ma­rie.

Résolutions. - O ma céleste Reine, ô ma divine Mère, vivez et régnez en mon cœur, pour y faire vivre et régner le Cœur de Jésus. Anéantis­sez en mon cœur tout ce qui peut déplaire à votre divin Fils. Etablissez-y parfaitement le souverain empire de son Cœur et du vôtre, afin que ces deux cœurs, si étroitement unis, y règnent souverainement et éternelle­ment pour le pur amour de Dieu et pour sa plus grande gloire.

Colloque avec le saint Cœur de Marie.

3 Mai
L'invention de la sainte Croix

Erat autem hora tertia et crucifixerunt eum. Et erat titulus causae ejus inscrip­tus: Rex Judaeorum. Et cum eo crucifi­gunt duo latrones: unum a dextris et alte­rum a sinistris ejus (S. Marc, 15, 25).

C'était la troisième heure et ils le cruci­fièrent. Et le titre de la croix portait pour son accusation: Le roi des juifs. Et avec lui ils crucifièrent deux larrons: un à sa droite et l'autre à sa gauche (S. Marc, 15, 25).

1er Prélude. La croix précieuse du Bon Maître s'éleva entre celle des deux larrons.

2e Prélude. Je vénère, Seigneur, l'instrument de notre rédemption. Apprenez-moi à comprendre le sens de la croix.

Ier POINT: La tradition. - C'était en 326, sainte Hélène voulait re­trouver le lieu du crucifiement et du sépulcre du Sauveur. Elle fit détrui­re les temples que les païens avaient élevés là en l'honneur de Vénus et de Jupiter. On retrouva le sépulcre et les trois croix qui avaient été en­terrées, suivant l'usage, au lieu du supplice. Une guérison miraculeuse fit reconnaître la vraie Croix. Sainte Hélène fit construire là une basili­que et une autre à Rome, pour recevoir une partie de la vraie Croix. Saint Cyrille de Jérusalem, saint Paulin, saint Ambroise, saint Chryso­stôme et d'autres rapportent ces faits.

Il était dans les desseins de Notre-Seigneur de faire honorer sa croix, qui a été l'instrument de notre rédemption. Il la montra à Constantin comme un signe de victoire et il en révéla le bois sacré à sainte Hélène. Le culte public commençait, Notre-Seigneur voulait lui donner son orientation symbolique.

La croix devait être le signe du chrétien. Elle devait être honorée sur tous nos autels et marquer de son signe salutaire toutes les cérémonies du culte. Notre-Seigneur nous conduit comme il veut par sa douce pro­vidence. La croix n'apparaît guère dans les catacombes, elle devient le signe universel de tout acte chrétien au temps de Constantin. C'est elle qui nous prêchera l'amour de Notre-Seigneur, en attendant la révélation du Sacré-Cœur.

IIe POINT: La croix enseigne l'amour de Notre-Seigneur. - En attendant que Notre-Seigneur nous dise: «Voilà ce Cœur qui a tant aimé les hom­mes», il nous disait par toute la liturgie: «Voilà la croix sur laquelle le Cœur de votre Rédempteur a été brisé par amour pour vous». La croix était notre étendard, notre sauvegarde, notre porte-bonheur. Ce signe sacré résume tout l'Evangile. Il parle aux illettrés comme aux savants. Il dit à tous: «Le Verbe de Dieu s'est incarné. Il a souffert sous Ponce-­Pilate, il a été crucifié pour votre amour!».

La croix est devenue le signe de toutes les bénédictions. On répète fré­quemment ce signe dans la célébration de la messe, dans l'administra­tion des sacrements et dans tous les actes de la vie chrétienne. C'est une prière en action, c'est un sacrement qui nous obtient des grâces.

La croix parle à nos âmes et elle parle à Dieu. A nous, elle dit: «Aimez votre Sauveur, servez votre Dieu, qui est mort pour votre salut». A Dieu elle dit: «Bénissez tout ce qui est marqué de ce signe rédempteur».

L'ange de la justice en Egypte épargna les maisons marquées du sang des agneaux, parce que ces agneaux figuraient le Messie. Dieu bénit tout ce qui est marqué de la croix, parce que la croix du Sauveur a été la rançon de toutes nos fautes et le prix de toutes les grâces.

Aimons la croix, parce qu'elle nous rappelle tout l'amour du Sauveur. Aimons surtout le Rédempteur qui est mort pour nous sur la croix. La croix et le Sacré-Cœur sont deux signes sacrés, deux symboles qui nous tiennent le même langage. Tous deux nous disent: «Dieu vous a tant aimés, qu'il a livré son Fils pour vous sauver!». Le Fils de Dieu vous a tant aimés qu'il a accepté et même choisi et aimé la croix pour vous ra­cheter et pour vous prouver son amour!

IIIe POINT: La croix prêche la réparation. - La croix est devenue dans le langage chrétien synonyme de sacrifice, de pénitence, de réparation. Si la croix nous crie que Notre-Seigneur nous a aimés, elle nous dit aussi qu'il a souffert pour nous, qu'il a expié cruellement nos péchés. Il a aimé la croix parce qu'elle réparait la gloire de son Père et parce qu'elle payait nos dettes. Il s'est chargé de nos péchés, mais il a voulu cependant nous réserver l'honneur de le suivre dans cette voie. Il ne nous applique les fruits de ses réparations que si nous y prenons quelque part. Il veut que nous partagions ses dispositions, ses sentiments. Il faut que nous ayons aussi le désir, la volonté de réparer la gloire de son Père et de payer nos dettes. Il faut donc que derrière sa grande et douloureuse croix nous portions notre petite croix: la croix du labeur quotidien, de la péni­tence, de l'obéissance, du détachement; la croix de la patience dans les épreuves de la vie. «Celui qui veut venir après moi et partager mon royaume, doit prendre sa croix et me suivre». C'est là le résumé de l'Evangile. Notre-Seigneur a prêché la pénitence et il a envoyé ses apôtres la prêcher à toute la terre. Il n'y a pas une autre voie pour aller au ciel. Il y faut quelque courage et de la bonne volonté. Le royaume des cieux exige quelque force d'âme et quelque vigueur de la part de ceux qui veulent le conquérir: Regnum coelorum vim patitur

Résolutions. - Salut, ô bonne croix, ô croix rédemptrice! Vous êtes ma gloire, ma rançon et toute ma richesse. Je ne veux pas que mon Jésus vous porte tout seul. Je me renouvelle dans votre amour, tous les jours aux heures de l'après-midi, je vous saluerai et vous reprendrai avec joie sur mes épaules.

Colloque avec Jésus portant sa croix.

4 Mai
Excellence et avantages de l'union
aux saints cœurs de Jésus et de Marie

Sicut dilexit me Pater, et ego dilexi vos. Manete in dilectione mea. Si praecepta mea servaveritis, manebitis in dilectione mea, sicut et ego Patris mei praecepta ser­vavi, et maneo in ejus dilectione. Haec lo­cutus sum vobis, ut gaudium meum in vobis sit, et gaudium vestrum impleatur (S. Joan, 15, 9).

Comme mon Père m'a aimé, je vous ai aimés. Demeurez dans mon amitié. Si vous gardez mes commandements, vous demeurerez dans mon amitié, comme moi j'ai observé les préceptes de mon Père et je reste dans son amitié. Je vous ai dit cela pour que ma joie soit en vous et que votre joie soit pleine (S. Jean, 15, 9).

1er Prélude. Si je demeure uni à Notre-Seigneur et fidèle à ses commandements, j'au­rai la joie et la paix de l'âme.

2e Prélude. O Marie, tenez-moi uni au divin Cœur de Jésus, c'est mon plus ardent désir.

Ier POINT: Etre intimement uni au Cœur de Jésus et de Marie par la grâce et par l'amour, c'est ici-bas la grandeur suprême. - Nous ne sommes sur la terre que pour y continuer la vie sainte que Jésus y a menée. Au baptême, nous avons fait profession de vivre de sa vie, c'est-à-dire de le former en nous, selon l'expression de saint Paul: Donec formetur Christus in vobis (aux Gal., 4, 19). Nous devons nous approprier ses vertus, ses sentiments, son esprit, ses dispositions et inclinations toutes divines. La vie et le rè­gne de Jésus dans nos cœurs nous déifie.

«Notre-Seigneur, dit le P. Eudes, descend et habite en nous par la grâ­ce, afin de nous transformer en lui-même. Il nous tient intérieurement par les mains toutes puissantes de l'Esprit-Saint, comme une petite hostie qu'il veut consacrer, pour l'offrir avec lui à la gloire de son Père céleste: sacrifice admirable, consécration déifiante, précieuse et ineffable élévation! Elle fait de nous des êtres surnaturels; de terrestres elle nous rend célestes, et de pauvres néants, de pécheurs indignes, elle fait des chrétiens, des saints, des fils de Dieu» (P. Eudes: La vie intérieure).

Unis au Cœur de Jésus, nous devenons les membres vivants du Christ. Nous participons à la lumière du soleil de Vérité. L'amour de son Cœur embrase le nôtre. Est-il rien de plus noble, de plus sublime que cette vie?

IIe POINT: Le Cœur de Jésus et de Marie vivant et régnant en nos cœurs est aussi la source de toutes les richesses. - C'est le plus précieux de tous les tré­sors. «Notre âme, dit saint Ambroise, est le vrai paradis terrestre de ce Cœur sacré. Au milieu de l'Eden jaillissait la source d'eau vive qui le fertilisait. Quelle est cette source, sinon le Cœur sacré de Jésus-Christ, source de vie éternelle, jaillissant au milieu de l'âme chrétienne, pour y répandre toutes sortes de bénédictions célestes, et la rendre féconde en mérites et en fruits de vertus» (S. Amb. de paradiso, 3, 12).

Faire vivre et régner en nous ce Cœur sacré, c'est notre grande et uni­que affaire.

1° C'est le moyen d'atteindre notre fin. Nous sommes faits pour cette union au Cœur de Jésus par le Cœur de Marie et au Cœur de Dieu par celui de Jésus. «Tout est pour vous, dit saint Paul, vous êtes pour Jésus­Christ, et Jésus-Christ est pour Dieu; c'est ainsi que Dieu est tout en toutes choses» (1 Cor., 3 et 15).

2° C'est l'unique moyen d'être agréable à Dieu. Par là nous accom­plissons le désir qu'a le Père éternel de voir son divin Fils vivre et régner dans nos cœurs avec sa sainte Mère.

3° C'est le seul moyen que nous ayons de glorifier Dieu d'une maniè­re digne de lui. Il faut que ce soit le Cœur de Jésus qui le glorifie en nous et par nous: ut in omnibus honorificetur Deus per Jesum Christum (1 Petr., 4, 11).

4° C'est le moyen d'accomplir les désirs de Jésus lui-même, de lui être agréable et d'en obtenir d'immenses faveurs. N'est-il pas venu sur la ter­re pour vivre et régner en nous et y faire régner son Père? Notre­-Seigneur nous fait dire par son fidèle serviteur, le P. Eudes: «En me fai­sant vivre et régner dans votre cœur avec ma très sainte Mère, vous se­rez les vrais enfants de mon Cœur. Mon Cœur et mes yeux seront tou­jours appliqués à vos besoins…».

5° Enfin, par la vie du Cœur de Jésus et de Marie en nous, nous en­trons en participation de leurs mérites, nous unissons nos œuvres à leurs œuvres et nous nous enrichissons infiniment.

IIIe POINT: Faire vivre et régner en nous le très saint Cœur dé Jésus et de Ma­rie, c'est enfin pour nous le suprême bonheur. - Nous avons été créés pour cet­te union et c'est là seulement que notre cœur peut trouver la paix et le repos.

«Demeurez en moi et moi en vous, nous dit le divin Maître, demeurez en mon amour», (c'est-à-dire dans mon Cœur); puis il ajoute aussitôt: «Je vous dis cela, afin que ma joie soit en vous et que votre joie soit plei­ne» (S. Jean, 15, 4). Ce bonheur est une participation à celui du Verbe incarné, à la béatitude ineffable dont il jouit à jamais dans le sein de son Père. C'est une joie que personne ne peut nous ravir. «Personne ne peut m'enlever Jésus-Christ, disait un saint religieux à ceux qui lui deman­daient la raison de sa joie continuelle».

«Dans le Cœur de Jésus, disait saint Laurent Justinien, se trouve la paix intérieure, le repos inaltérable, le bonheur tranquille, la vive allé­gresse, la sérénité confiante, la société de l'amour, le charme de la con­templation et la suavité de l'Esprit-Saint. Là est la porte du ciel».

Cette union au Sacré-Cœur de Jésus et de Marie est notre vivant pa­radis, «et ce paradis, s'écrie saint Bernard, est bien supérieur à l'Eden de nos premiers parents; il est plus délicieux, plus riche et plus suave».

L'union à Jésus-Christ et à Marie c'est le ciel, puisque c'est le règne de Jésus et de Marie.

Crions tous, dit le P. Eudes: «Vivent Jésus et Marie dans nos cœurs! Vive dans tous les cœurs le Cœur très aimable de Jésus et de Marie».

Résolutions. - «O Cœur sacré, source de vie et de bonheur, que mon cœur meure à toute autre vie, qu'il vive de la vôtre, qu'il soit animé de votre esprit, qu'il soit embrasé de votre amour!

O Cœur tout aimable et tout amour, soyez le cœur de mon cœur, l'âme de mon âme, l'esprit de mon esprit, la vie de ma vie, l'unique principe de toutes mes pensées, paroles et actions, de tout l'usage que je ferai des sens de mon corps et des facultés de mon âme!».

Colloque avec le Cœur de Jésus et de Marie.

5 Mai
La pratique de l'union
aux saints Cœurs de Jésus et de Marie

Ego sum vitis, vos palmites: qui manet in me et ego in eo, hic fert fructum mul­tum; quia sine me nihil potestis facere. Si quis in me non manserit, mittetur foras sicut palmes, et arescet, et colligent eum et in ignem mittent et ardet. Si manseritis in me et verba mea in vobis manserint, quodcumque volueritis petetis et fiet vobis (S. Joan, 15, 5).

Je suis la vigne, vous êtes les branches: celui qui demeure en moi et moi en lui porte beaucoup de fruits; car sans moi vous ne pouvez rien faire. Si quelqu'un ne demeure pas en moi, on le jettera de­hors comme une branche, il sèchera, on le ramassera, on le mettra au feu, il brûlera. Si vous demeurez en moi et gardez mes paroles, demandez ce que vous voulez et vous l'obtiendrez (S. Jean, 15, 5).

1er Prélude. Demeurer uni à Jésus et observer ses commandements et ses conseils, c'est la source de toute fécondité spirituelle.

2e Prélude. Seigneur Jésus, tenez-moi uni à votre Sacré-Cœur et à celui de Marie qui n'en fait qu'un avec le vôtre.

Ier POINT: Les premières conditions de l'union avec le Sacré-Cœur de Jésus et de Marie, sont de nous maintenir en état de grâce et de nous détacher des créatures. - C'est au baptême que commence l'union de notre cœur au Sacré­Cœur de Jésus et de Marie. Or, dès que nous avons l'usage de la raison, notre devoir est de nous appliquer à conserver en nous cette union toute céleste, et à développer chaque jour la vie et le règne de ce Cœur sacré dans nos âmes.

Le premier moyen est de nous maintenir en état de grâce par la fuite du péché. «Demeurez en moi et je demeurerai en vous», nous a dit Notre-Seigneur. Quand nous sommes en état de grâce, quand nous sommes en Jésus, Jésus est en nous, son Cœur est uni au Cœur de sa chétive créature.

Mais pour que le Cœur sacré de Jésus et de Marie vive et règne plei­nement et parfaitement en nous, il faut encore en bannir tout le reste. Nous devons regarder le monde et tout ce qu'il renferme comme anéanti pour nous, et ne plus voir les créatures en elles-mêmes, mais unique­ment en Jésus et en Marie, en sorte qu'il n'y ait plus pour nous que le di­vin Cœur de Jésus et de Marie au monde et que nous n'ayons plus rien que lui à aimer et à contenter.

Plus notre cœur sera détaché de nous-mêmes et des créatures, plus le Cœur de Jésus et de Marie y fera sentir la sainte efficacité de sa pré­sence.

IIe POINT: Vivre de la foi et entretenir en nous le feu de la charité. - Saint Paul nous enseigne que Jésus-Christ habite en nos cœurs par la foi: Chri­stus habitare per fidem in cordibus nostris (aux Eph., 3). La foi est le premier épanouissement de la grâce dans une âme, «Elle ouvre la porte de notre cœur à Notre-Seigneur, dit Saint Ambroise, et il y vient habiter».

Pour former en nous une foi vive, habituons-nous à regarder le Cœur de Jésus et de Marie en tout ce que nous faisons. N'ayons point d'autre objet en vue dans tous nos exercices de piété. Efforçons-nous de l'imiter, rappelons-nous ses vertus et ses mystères, efforçons-nous de nous revêtir de ses divines intentions, de ses dispositions admirables.

Mais ce n'est pas tout de former le Cœur de Jésus et de Marie en no­tre esprit par la foi, par le souvenir de ses mystères, par l'imitation de ses vertus, il faut aussi le former dans notre cœur par le fréquent exercice de son amour.

«La foi plante Jésus-Christ en nous, dit saint Grégoire le Grand; mais la charité seule, la seule fidélité de l'amour fait grandir cet arbre divin qui, dans la terre de notre cœur, produit d'abondants fruits pour le pa­radis. Jésus introduit dans l'âme par le baptême et par la grâce de la foi, y commence un travail de formation et de développement semblable à celui du petit enfant dans le sein de sa mère. Il prend, il détruit, il absor­be tout ce qu'il voit en nous de corruptible, ut absorbeatur quod mortale est a vita (2 aux Cor., 5), le remplissant par le don céleste de la grâce et rem­plissant ainsi lui-même les vides qu'il fait en nous; laborieux travail de la vie chrétienne, de la piété et de la perfection, qui a pour objet unique la formation de Jésus en nous: donec formetur Christus in nobis (aux Gal., 4)».

IIIe POINT: Communier avec ferveur. - La communion eucharistique, et à son défaut la communion spirituelle, accroît et fortifie notre union spirituelle avec le Cœur de Jésus et de Marie, «Par ce sacrement dit saint Thomas, la grâce s'accroît en nous et la vie spirituelle se parfait de plus en plus; car la perfection de l'homme consiste dans l'intimité de son union avec Dieu. L'Eucharistie est instituée pour parachever l'œuvre des autres sacrements, par lesquels Notre-Seigneur nous communique sa vertu et sa vie» (Somme, 3e p. art. 79 et 75).

«Ceux qui font bonne digestion corporelle, dit saint François de Sales, ressentent un renforcement dans tout leur corps. Ainsi ceux qui reçoivent bien la sainte communion, ressentent que Jésus-Christ, qui est leur nourriture, s'épanche et se communique à toutes les parties de leur âme et de leur corps. Il purifie tout, il vivifie tout. Il aime dans le cœur; il entend au cerveau; il anime dans la poitrine; il voit aux yeux; il parle en la langue et ainsi du reste. Il fait tout en tout. Et alors nous vivons, non plus nous-mêmes, mais Jésus-Christ vit en nous. Oh! Quand sera­-ce? quand sera-ce?… Mais cependant je vous montre ce à quoi il faut prétendre, bien qu'il se faille contenter d'y atteindre petit à petit. Tenons-nous humbles et communions hardiment» (Lettres spirituelles, 130).

Résolutions. - Oui, tenons-nous humbles, c'est-à-dire: défiants de nous-mêmes, obéissants à Notre-Seigneur, à notre règle, à notre direc­teur. Et communions hardiment, par la communion sacramentelle fer­vente, mais aussi par la communion spirituelle aux mystères de Notre­-Seigneur, suivant les heures de la journée et conformément à notre rè­glement de vie.

Colloque avec le Cœur Sacré de Jésus et de Marie.

6 Mai
Saint Jean, sa formation, sa profession

Tunc accessit ad eum mater filiorum Zebedaei cum filiis suis, adorans et petens aliquid ab eo.

Qui dixit ei: Quid vis? - Ait illi: Dic ut sedeant hi duo filii mei, unus ad dexteran tuam et unus ad sinistram, in regno tuo. - Respondens autem Jésus dixit: Nesci­tis quid petatis. Potestis bibere calicem quem ego bibiturus sum? Dicunt ei: Pos­sumus… (S. Mat., 20, 20).

Alors la mère des enfants de Zébédée s'approcha de Jésus avec ses fils et l'adora pour lui parler.

Jésus dit: Que voulez-vous? - Elle dit: Ordonnez que mes fils soient assis l'un à votre droite et l'autre à votre gauche, en votre royaume. -Jésus dit: Vous ne sa­vez pas ce que vous demandez. Pouvez­vous boire le calice que je boirai? - Ils di­rent: Nous le pouvons… (S. Mat., 20, 20).

1er Prélude. L'Eglise fête aujourd'hui le martyre de saint Jean, mais il a été dans tout son apostolat le modèle des victimes du Cœur de Jésus.

2e Prélude. Saint apôtre, demandez pour moi cet esprit que vous avez reçu au Céna­cle et au pied de la croix.

Ier POINT: Formation de saint Jean. La préparation à sa profession. - Notre-Seigneur a formé saint Jean comme le modèle des prêtres parfaits, des victimes de son Cœur, des victimes de l'amour et de la réparation. Il devint postulant lorsqu'il demanda: «Maître, où demeurez-vous?» (Jean, 1, 38). Il fut reçu lorsque ensuite il quitta son père et ses filets et suivit Notre-Seigneur (S. Mat., 4, 22). La vêture eut lieu dans la salle du festin au Cénacle, à la dernière Cène, quand il fut revêtu du manteau de la dignité sacerdotale et qu'il fut instruit sur l'offrande du saint sacrifice de la messe, la commémoration de la dernière Cène, de la Passion et de la mort du Sauveur: Hoc facite in meam commemorationem.

Il a fait profession sur le mont du Calvaire, sous la croix de l'Agneau victime expirant, aux côtés de Marie, la mère de la victime, qui était elle-même devenue victime et une victime sainte, la plus sainte et la plus parfaite après l'Agneau divin.

C'est là que son âme virginale s'unit à jamais à l'Epoux des âmes pu­res. Il était le premier-ne de l'Eglise et il la représentait. C'est en sa per­sonne que les enfants de l'Eglise furent adoptés par Marie comme ses en­fants et par Dieu le Père comme les frères et les cohéritiers de son Fils unique.

IIe POINT: Saint Jean apprend par les exemples et les paroles de Jésus les vertus qui font les victimes du Sacré-Cœur: Obéissance, patience, charité, abandon, répa­ration. - Saint Jean était le premier-ne et le modèle des victimes du Sacré-Cœur. Le temps entre sa vêture et sa profession ne fut pas long. Cependant il passa par un noviciat, par un temps d'épreuve, durant le­quel il apprit davantage, il avança plus en vertu, en pureté et en perfec­tion, il souffrit plus dans son cœur et dans son esprit que la raison hu­maine ne le peut concevoir. Là il apprit jusqu'où va le véritable, saint et pur amour de Dieu et que la mesure de cet amour est d'aimer sans me­sure.

Le soir de la Cène, il vit comment Notre-Seigneur se donna tout en­tier dans le mystère de l'Eucharistie. Le jour suivant, il fut témoin de l'offrande douloureuse de la victime sanglante sur la croix. Par sa pré­sence, sa fidélité et sa constance, il a ouvertement témoigné qu'il con­naissait Notre-Seigneur, qu'il était et voulait rester son disciple. A cette heure solennelle, il fit en son cœur rempli d'amour, de reconnaissance, de compassion et de zèle, les promesses les plus saintes pour l'avenir. Il prit la résolution de n'abandonner jamais Jésus et sa doctrine. Puis il reçut en partage le Cœur blessé de Jésus, le Cœur sur la croix, entouré des épines de l'humiliation, de l'outrage, de la douleur, de l'ingratitude, de l'infidélité et de la lâcheté de ses disciples, de ceux d'alors et de ceux de l'avenir.

Il vit comment Notre-Seigneur était à la fois sacrificateur et victime, comme doit être tout vrai prêtre de la nouvelle loi.

IIIe POINT: Les paroles que Notre-Seigneur prononça sur la croix enseignèrent à saint Jean ce que doivent être l'amour et l'immolation d'une victime du Sacré­-Cœur. - «Mon Dieu, pardonnez-leur, car ils ne savent pas ce qu'ils font». Ces paroles d'un Dieu méprisé, outragé, crucifié par ses créatu­res, sont une leçon de douceur, de patience, d'amour des ennemis.

«Aujourd'hui encore tu seras avec moi en paradis». Cette parole dite au bon larron est encore une leçon de charité, de miséricorde, de par­don.

«Femme, voilà votre fils. - Fils, voilà votre mère». C'est le témoigna­ge d'un amour généreux, sacrifiant tout, se dépouillant de tout et ne ré­servant pour soi que les souffrances, la croix et la mort.

«J'ai soif!». - Mais de quoi avait-il soif? De la gloire de son Père, de l'accomplissement de sa volonté, de la réparation, de la rédemption et du salut des âmes. Il avait soif des souffrances et des outrages pour répa­rer nos péchés. Il avait soif d'être connu et aimé de nous, soif de nous donner son cœur. Notre soif peut-elle être différente de la sienne? Ne devons-nous pas chercher à éteindre sa soif d'amour et de réparation? «Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'avez-vous abandonné?». Une victime est prête à tout ce que Dieu veut lui envoyer, Elle accepte même l'abandon apparent de Dieu et elle persévère sans découragement.

«Tout est consommé!». L'amour de Notre-Seigneur avait tout donné, tout souffert, tout accompli.

«Mon Dieu, je remets mon âme entre vos mains». Depuis son Ecce venio, Notre-Seigneur a pleinement accompli la volonté de son Père. Donnons-nous aussi tout entiers dans le travail, l'obéissance, l'abandon par amour à Notre-Seigneur.

Telles furent les règles données à saint Jean. Il les accomplit jusqu'à leur consommation dans son épreuve, dans l'huile bouillante.

Résolutions. - Nous voulons, Seigneur, devenir comme saint Jean, de vraies victimes d'amour et d'immolation en union avec Marie. Nous voulons renouveler fidèlement ces résolutions et ces dispositions plu­sieurs fois le jour afin de vivre dans cet esprit que vous demandez de nous.

Colloque avec saint Jean.

7 Mai
Demander l'union au Cœur de Jésus
et de Marie avec humilité et confiance

Ego Jésus misi angelum meum testifi­cari vobis haec in ecclesiis. Ego sum radix et genus David, stella splendida et matuti­na. Et spiritus et sponsa dicunt: Veni. Et qui audit, dicat: Veni. Et qui sitit veniat; et qui vult accipiat aquam vitae gratis (Apoc., 22, 16).

Moi Jésus, j'ai envoyé mon ange vous attester cela dans les églises. Je suis la ra­cine et la race de David, la brillante étoile du matin. Et l'esprit et l'épouse disent: Viens. Que celui qui entend dise: Viens. Et que celui qui a soif, vienne; et celui qui vient recevra l'eau de la vie gratis (Apoc., 22, 16).

1er Prélude. J'ai entendu votre appel, Seigneur Jésus! J'ai soif, venez, donnez-moi l'eau de la vie.

2e Prélude. Je vous en prie, Seigneur, donnez-moi cette union avec vous, qui est la source de la vraie vie.

Ier POINT: O Cœur de Jésus, vivant dans le Cœur de Marie, venez et régnez dans le cœur de vos serviteurs. - L'œuvre de la transformation de notre cœur en celui de Jésus et de Marie surpasse incomparablement toutes les forces humaines. Nous devons, pour y réussir, implorer avec humili­té et ferveur le secours de la grâce divine Livrons-nous à la puissance du Père et à la grâce du Saint-Esprit, nous dit le P. Eudes, et prions le Cœur adorable de Jésus de s'unir au nôtre. Et il commente dans cet esprit la prière connue: «O Jésus, vivant en Marie». - «O Cœur sacré, vous vivez et régnez parfaitement dans le Cœur de votre divine Mère, vous êtes tout et vous opérez tout en elle; vous êtes sa vie, son cœur, son esprit, son trésor… Mais, ô Cœur tout aimable, vous avez aussi un désir immense de vivre et de régner dans le cœur de vos enfants, et de les faire vivre avec vous d'une vie toute sainte et toute céleste. Pardonnez-moi tous les obstacles que j'ai apportés jusqu'ici à l'accomplissement de ce désir, par mes péchés et mes infidélités sans nombre… De nouveau je me donne et me sacrifie tout à vous, et je ne veux plus respirer que pour travailler sans cesse à vous faire vivre et régner dans mon âme et dans toutes les âmes qu'il vous plaira de me confier. J'y veux employer toutes mes pensées, mes paroles et mes œuvres».

IIe POINT: Venez et vivez dans l'esprit de votre sainteté, dans la plénitude de votre puissance, dans la perfection de vos voies. - Venez donc, ô Cœur tout miséricordieux, dans la plénitude de votre vertu pour détruire en moi tout ce qui vous déplaît et pour y opérer tout ce que réclame votre gloire. - Ve­nez dans la sainteté de votre esprit, pour me détacher des créatures et me gui­der saintement dans toutes mes actions. - Venez dans la pureté de vos voies, et conduisez-moi dans les droits sentiers de l'amour divin, sans permettre que je décline à droite ou à gauche, et sans rien laisser aux sentiments et aux inclinations de l'amour-propre et de la nature corrom­pue! Venez en moi pour y imprimer une image parfaite de votre vie et de vos vertus; faites régner dans mon cœur votre humilité, votre dou­ceur, votre charité, votre patience, votre obéissance, votre pureté, votre modestie. - Venez à moi dans la communion de vos mystères divins, afin de les glorifier et de les continuer dans ma personne, et de me gouverner et sanctifier par l'esprit et la grâce de ces adorables mystères. Faites que mon être et ma vie soient entièrement consacrés à honorer votre vie et tous les états par lesquels vous avez voulu passer pour notre amour. Que toutes mes pensées, mes paroles et mes actions rendent honneur à vos actions, à vos paroles, à vos pensées. Que tous mes pas, mes travaux et mes souffrances rendent gloire aux vôtres. Que toutes les puissances de mon âme, que tous les membres et les sens de mon corps soient consa­crés à l'honneur des puissances de vôtre âme. des membres et des sens de votre corps divin. Enfin que tout ce qui est en moi soit uniquement occupé à vous aimer, à vous adorer et à publier vos louanges…». Que je m'unisse à vos mystères particulièrement selon les heures du jour par la coutume de mes pieux rendez-vous.

IIIe POINT: Dominez, Seigneur, toute puissance adverse, par la puissance de votre Esprit et pour la gloire de votre Père. - «Soyez le maître, ô divin Cœur, et dominez pleinement sur mes ennemis et les vôtres. Anéantissez mon amour-propre, mon propre esprit, mon orgueil, mes passions, mes senti­ments et toutes mes inclinations perverses, afin de régner absolument dans mon cœur, d'être tout en moi et d'y opérer toutes choses. Revetez­moi de votre divin Esprit, de cet esprit d'amour qui est votre Cœur et celui de votre Père, en sorte que je n'aie plus d'autres pensées, d'autres sentiments, d'autres affections ni d'autres vouloirs que les vôtres. Enfin, daignez vous aimer vous-même et vous glorifier en moi; aimez-y et glorifiez-y dignement votre Père céleste» (Royaume de Jésus).

«O Vierge sainte, vous qui êtes notre divine Mère, faites germer et cultivez dans nos cœurs ce divin fruit de vie, qui fut le fruit de vos chastes entrailles. Obtenez, par votre intercession toute puissante, que nous ne soyons plus rien et que le Cœur de votre fils soit tout en nous, qu'il soit notre être, notre vie, notre esprit, notre lumière, notre amour,

notre force, notre trésor, notre joie, notre gloire, notre tout, afin qu'en jetant les yeux sur ses créatures, notre Père céleste n'y aperçoive plus que Jésus, l'unique objet de son amour et de ses complaisances».

Résolutions. - O Marie, donnez-nous le Cœur de Jésus et le vôtre, afin que les enfants n'aient plus qu'un même cœur avec leur père et leur mère; afin que les membres n'aient pas d'autre vie que celle de leur di­vin Chef; afin que nous puissions adorer, louer, aimer et servir Dieu avec un cœur pur, saint, immense, digne de son infinie majesté, Corde magno et animo volenti; et que toutes nos actions soient accomplies dans l'esprit, l'amour, l'humilité et toutes les autres dispositions de ce Cœur incomparable.

Colloque avec le saint Cœur de Marie.

8 Mai
Saint Michel, archange
protecteur de l'église

Et factum est praelium magnum in coe­lo: Michael et angeli ejus praeliabantur cum dracone, et draco pugnabat et angeli ejus; et non prae valuerunt, neque inven­tus est locus eorum in coelo… Et audivi vocem magnam in coelo dicentem: nunc facta est salus et virtus, et regnum Dei no­stri et potestas Christi ejus (Apoc., 12, 7).

Il se fit un grand combat dans le ciel: Michel et ses anges combattaient avec le dragon, et le dragon menait ses anges au combat, mais ils furent vaincus et chassés du ciel… Et j'entendis une grande voix au ciel qui disait: maintenant c'est la victoire et le règne de notre Dieu et la puissance de son Christ (Apoc., 12, 7).

1er Prélude. C'est pour Dieu et pour le Christ que saint Michel a mené ses anges au combat et il chante la victoire divine.

2e Prélude. Saint archange, combattez pour moi contre l'ennemi de notre Dieu.

Ier POINT: Excellence et dignité de saint Michel et des saints anges. - Les anges sont d'une nature bien plus excellente que la nôtre. Ce sont de purs esprits. Leurs connaissances sont beaucoup plus étendues que celles des hommes. Saint Clément d'Alexandrie les appelle les premiers nés de Dieu. Ils sont, dit saint Sophrone, les images vivantes et représentatives de la divinité.

Ils sont innombrables: «Qui pourrait, dit job, compter les soldats de l'armée céleste?» (Job., 25, 3).

Ils ont été créés dans un état où ils pouvaient mériter et démériter; mais ceux qui ont persévéré dans la justice, ont été confirmés en grâce et couronnés d'une gloire éternelle. Ils font l'ornement de la sainte Sion.

Les Esprits dont chaque ordre céleste est composé ont des perfections qui les caractérisent et des fonctions qui leur sont propres. Les Chéru­bins représentent et glorifient la toute science divine; les Séraphins son amour infini.

Saint Michel, le chef des Séraphins et de toutes les hiérarchies est le coryphée de l'amour divin. C'est l'Ange du Sacré-Cœur. C'est lui sans doute qui offre comme un encens toutes les prières des justes et des saints sur l'autel d'or qui est devant le trône de Dieu; et cet autel d'or ne peut être que le Cœur de Jésus, le seul autel qui soit agréé de Dieu.

IIe POINT: Leurs fonctions saintes. - Les anges vivent au ciel, devant le trône de Dieu. Ils sont occupés à contempler ses perfections infinies, ils s'enivrent dans le torrent de délices que produisent la vue et l'amour de son ineffable beauté. Leur emploi pendant toute l'éternité sera de l'ado­rer sans cesse, de le louer, de bénir et de glorifier son nom.

Ils s'entretiennent entre eux par la simple volonté qu'ils ont de se communiquer leurs pensées et leurs sentiments.

Ils sont aussi préposés à notre garde et protection. Plusieurs passages de la sainte Ecriture nous montrent que Dieu emploie souvent leur ministère dans l'exécution des décrets de sa Providence par rapport à nous.

Les anges des plus modestes hiérarchies sont préposés â notre garde quotidienne, les archanges sont envoyés par Dieu pour exécuter ses des­seins les plus importants.

Les anges entendent le langage de nos âmes quand nous nous adres­sons à eux. Ils connaissent ce qui nous concerne, ils s'intéressent à notre bonheur. Ils peuvent agir sur notre imagination et éveiller en nous de bonnes pensées. Ils conduiront nos âmes dans le séjour de la gloire, si nous mourons dans la grâce de Dieu.

Saint Michel est leur chef. Il était le Prince des anges fidèles qui s'op­posèrent à Lucifer et aux compagnons de sa révolte. Son nom signifie en hébreu: «Qui est semblable à Dieu?». C'était sa devise lorsqu'il s'éleva contre les anges apostats et qu'il réprima leur révolte. Il continue encore de nous protéger contre leurs assauts. Invoquons-le avec confiance, il déléguera vers nous autant d'anges qu'il sera nécessaire pour combattre Satan et les autres esprits mauvais.

IIIe POINT: Saint Michel est le protecteur de l'Eglise. - Saint Michel, chef des milices célestes, est le porte-étendard du ciel, habens signum Dei vivi. Le signe traditionnel du règne de Jésus-Christ, c'est la croix; mais le si­gne nouveau, c'est le Sacré-Cœur. L'un et l'autre sont les instruments et les symboles de la Rédemption.

Ce saint archange était déjà le protecteur de la synagogue et du peuple de Dieu, comme nous l'apprennent les prophètes Daniel (Ch. 12) et Za­charie (Ch. 1). Il est devenu le protecteur de l'Eglise. Saint Jean, dans l'Apocalypse, nous le montre souvent conduisant la lutte contre les dé­mons qui veulent entraîner loin de Dieu le peuple fidèle.

Plusieurs fois dans le cours des siècles saint Michel a manifesté sa pro­tection en apparaissant sur plusieurs points de la terre pour secourir l'Eglise en des dangers pressants ou pour demander des sanctuaires qui seraient des sources de grâces. L'apparition à Rome sur le château saint Ange est célèbre. C'était en 590 sous le Pape saint Grégoire le grand.

Comme on faisait une procession de pénitence en temps de peste, on vit saint Michel sur le Môle d'Adrien remettant son épée dans le fourreau, pour signifier que la colère de Dieu était apaisée.

L'apparition au Mont saint Michel en Normandie en 709 a créé un des beaux pelerinages de France.

Celle que nous fêtons le 8 mai est l'apparition au Mont Gargan en Ita­lie, au temps du Pape Gélase, l'an 492. C'est aussi la fête du Patronage de saint Michel, l'office du jour le dit: «Celui, disent les leçons, que la synagogue des juifs tenait pour Patron, l'Eglise aujourd'hui le vénère comme Patron et protecteur».

Résolutions. - J'invoquerai saint Michel le matin et le soir comme mon protecteur et mon guide et spécialement comme l'ange du Sacré-Cœur. Je l'appellerai à mon secours dans les tentations et les difficultés.

Je le prierai tous les jours pour l'Eglise, spécialement dans ces temps dif­ficiles. Je dirai avec attention et ferveur la prière à saint Michel après la sainte messe.

Colloque avec l'archange saint Michel.

9 Mai
Placer le cœur de Jésus et de Marie
comme un sceau sur notre cœur

Pone me ut signaculum super cor tuum, quia fortis est ut mors dilectio, du­ra sicut infernus aemulatio: lampades ejus lampades ignis atque flammarum. Aquae multae non potuerunt extinguere carita­tem, nec flumina obruent illam: si dederit homo omnem substantiam domus suae pro dilectione, quasi nihil despiciet eam (Cant., 8, 6).

Place-moi comme un sceau sur ton cœur… parce que l'amour est fort com­me la mort et le zèle de l'amour est infle­xible comme l'enfer. Ses lampes sont de feu et de flammes. Les grandes eaux n'ont pu éteindre la charité et les fleuves ne l'étoufferont pas; quand un homme aurait donné toutes les richesses de sa maison pour l'amour, il les mépriserait comme s'il n'avait rien donné (Cant., 8, 6).

1er Prélude. Que l'amour est puissant, surtout quand il a pour objet la beauté infinie!

2e Prélude. Seigneur, je veux tout donner pour votre amour et j'estime que ce n'est rien.

Ier POINT: Le Cœur Sacré de Jésus et de Marie est le temple du divin amour. - «Placez-moi comme un sceau sur votre cœur et sur votre bras, dit le Seigneur, à l'épouse des Cantiques». Le cachet royal est la marque de l'autorité suprême. Si nos requêtes et nos actes sont revêtus du sceau royal, ils ont une puissance indiscutable. L'Epoux divin a permis à Ma­rie, puis à l'Eglise et à nos âmes de marquer leurs œuvres du sceau de son Cœur. Nos sacrifices sont marqués de ce sceau, ou plutôt le Cœur de Jésus est le temple même, et l'autel de nos sacrifices et l'encensoir où brûlent nos prières.

Le Cœur de Jésus est le Temple magnifique où Dieu reçoit les adora­tions et les louanges dignes de lui.

Le Cœur de Marie est le second sanctuaire de l'amour divin.

Dans ces deux temples qui n'en font qu'un, j'offrirai à Dieu le culte d'adoration et d'amour que je lui dois. Ce Cœur béni sera adorateur pour moi. Je serai adorateur en lui et par lui. Il sera aussi le sanctuaire et l'organe de mon amour. Jésus et Marie uniront mon faible amour au leur, et ainsi mon amour se présentera muni du sceau divin.

IIe POINT: Le Cœur Sacré de Jésus et de Marie est l'autel d'or où nos cœurs doivent être offerts et immolés à Dieu. - Le Cœur de Jésus et de Marie est l'autel d'or où le feu sacré de l'amour est allumé jour et nuit. Sur cet au­tel, le souverain prêtre, Jésus, s'offre lui-même, avec sa très sainte Mè­re, et il offre aussi tous les sacrifices des saints et des justes. J'offrirai là les sacrifices d'actions de grâces et d'expiation que je dois à mon Dieu. Je dois rendre grâces à la bonté divine pour les bienfaits sans nombre que j'en ai reçus et que je reçois continuellement de sa main libérale. Je puiserai dans le Cœur de Jésus et de Marie tout ce qui me manque. Ce Cœur Sacré qui vit en moi rend à Dieu de continuelles actions de grâces pour moi et pour toutes les créatures, je m'unirai à lui et je l'offrirai lui-même à la souveraine Bonté.

J'offrirai aussi sur l'autel d'or du Cœur de Jésus toutes mes répara­tions pour mes péchés et pour mes négligences innombrables. Comment pourrais-je m'acquitter de cette dette immense, si je n'avais ce moyen providentiel? Je présenterai à mon Dieu que j'ai offensé, le Cœur Sacré de Jésus avec celui de sa très sainte Mère; j'offrirai toutes les douleurs, les angoisses et les souffrances que ces Cœurs sacrés ont endurées à cau­se de moi. J'unirai mes larmes et ma contrition à leur douleur, et c'est par eux que je demanderai pardon au Père éternel.

Si le Cœur de Jésus et de Marie paie mes dettes et sollicite ma grâce, je n'ai plus rien à redouter de la justice de Dieu.

IIle POINT: Le Cœur Sacré de Jésus et de Marie est l'encensoir d'or du divin amour. - Cet encensoir d'or est rempli de parfums qui ne sont autres que les prières des saints et des justes. C'est là que je veux déposer toutes mes requêtes et mes supplications. Je sens trop mon indignité pour pui­ser en moi-même la confiance d'être exaucé. Aussi je m'unirai au Cœur Sacré de Jésus et de Marie. C'est par lui et avec lui que je demanderai à Dieu ses grâces, pour moi, pour mes parents et mes amis, pour mes bienfaiteurs et mes ennemis, pour les pécheurs de la terre et pour les âmes du purgatoire. C'est par lui et avec lui que je prierai pour la sainte Eglise, ma mère, pour le souverain Pontife, pour les Pasteurs des âmes et pour tous mes supérieurs, afin que Dieu les comble de lumières et de grâces. Je puis tout espérer et tout obtenir en priant de cette manière. J'en ai pour garant la parole même du Sauveur: «Tout ce que vous demande­rez à mon Père en mon nom, il vous l'accordera (S. Jean, 16, 23), si vous demeu­rez en moi et que mes paroles demeurent en vous, vous demanderez ce que vous vou­drez, et il vous sera accordé» (S. Jean, 15, 7). Quand nous prions au nom de Jésus et par son Cœur, c'est lui qui prie en nous, c'est sa voix qui se fait entendre au Père céleste; nos prières se confondent avec les siennes; ses prières absorbent les nôtres et les revêtent de ses mérites, pour les pr­ésenter devant le trône de l'éternelle Bonté. Or, qu'est-ce que Dieu pour­rait refuser à la prière de son divin Fils?

Voilà comment, malgré notre faiblesse et notre misère, nous avons le pouvoir de payer à Dieu toutes nos dettes et d'en acheter toutes les grâ­ces (Le P. Eudes, résumé par le P. Dauphin, eudiste).

Résolutions. - Ainsi donc, je ne me contenterai pas d'aimer Dieu de tout mon pauvre cœur d'homme, c'est trop peu et ce n'est rien mais je l'aimerai de tout mon grand et divin Cœur, c'est-à-dire de tout le Cœur de Jésus, qui est à moi par la grâce divine. Avec lui, j'adorerai Dieu, je le remercierai, je lui ferai réparation, je le prierai pour tous mes besoins. J'y penserai dans ma prière et souvent dans la journée.

Colloque avec le Sacré-Cœur de Jésus et de Marie.

10 Mai
Placer le Cœur de Jésus et de Marie
comme un cachet sur notre bras

Quae est ista quae ascendit in deserto, deliciis affluens, innixa super dilectum suum? sub arbore malo suscitavi te: ibi corrupta est mater tua, ibi violata est ge­nitrix tua. Pone me ut signaculum super cor tuum, ut signaculum super brachium tuum (Cant., 8, 5).

Qui est celle-ci qui monte du désert, remplie de charmes, appuyée sur son bien-aimé? - Je vous ai ressuscitée sous le pommier, car c'est là que votre mère a perdu sa pureté. Mettez-moi comme un sceau sur votre cœur, comme un cachet sur votre main (Gant., 8, 5).

1er Prélude. Jésus a racheté son Eglise, et nos âmes sur la croix. Il veut que nous gra­vions en nos cœurs sa passion et son amour.

2e Prélude. Vous voulez aussi, Seigneur, que mon bras et mes œuvres soient au ser­vice de votre amour. J'y suis résolu, aidez-moi.

Ier POINT: Faire nos exercices spirituels en union avec le Sacré-Cœur de Jésus et de Marie. - Mettre le cachet du Sacré-Cœur de Jésus et de Marie sur notre bras, c'est faire toutes nos actions dans l'esprit de ce très saint Cœur. Rien ne peut mieux nous y aider que toutes les délicieuses orai­sons jaculatoires suggérées par le P. Eudes. Il faudrait les relire, les ap­prendre et s'en bien pénétrer.

Au réveil: «Vive Jésus et Marie dans mon cœur et que je vive éternelle­ment dans le Cœur sacré de Jésus et de Marie! - O Cœur béni, je vous donne mon cœur, qu'il soit à vous tout entier et pour toujours, avec tout ce que j'ai, tout ce que je suis et tout ce que je puis vous offrir».

Avant la prière: «O Cœur de Jésus et de Marie, venez à mon aide, prêtez-moi vos sentiments et votre ferveur. - Que ma prière monte vers le trône de l'Eternel, comme un encens d'agréable odeur sur l'autel d'or du Cœur sacré de Jésus et de Marie».

Avant la méditation: «O Cœur tout brûlant de mon Jésus, je vous donne mon esprit et mon cœur. Je vous prie de les posséder et de les conduire dans l'oraison selon votre sainte volonté».

IIe POINT: Pour les actions communes de la vie. - Avant le travail: «O Cœur tout aimable et tout aimant de Jésus et de Marie, je vous offre cet­te action en l'honneur de celles que vous avez faites en ce monde, et je m'unis aux saintes intentions et aux dispositions parfaites que vous ap­portiez dans tous vos travaux. - Pour vous ce travail, ô Cœur de Jésus et de Marie; faites-le vous-même avec moi et donnez-moi votre sainte bénédiction».

Avant le repas: «O mon Sauveur, ô ma divine Reine, je vous offre ce re­pas en union avec ceux que vous avez pris sur la terre. - Que chaque bouchée soit un acte de louange et d'amour à la très sainte Trinité».

Avant la récréation: «O Jésus, je vous offre le délassement que je vais prendre en union avec les saintes récréations et les divines réjouissances que vous avez prises durant votre vie mortelle, avec votre Père éternel, avec votre sainte Mère, avec vos anges et avec vos saints. Je m'unis aux dispositions de votre Cœur sacré et à celles de votre divine Mère».

Avant de converser avec le prochain: «O Jésus, ô Marie, que toutes mes conversations avec mes frères soient consacrées à honorer les divines conversations que vous avez eues sur la terre entre vous et avec les hom­mes. Inspirez à mon cœur l'humilité, la douceur, la modestie, avec lesquelles vous avez conversé en ce monde».

Dans les allées et venues: «O mon souverain Maître, ô mon auguste Rei­ne, que tous mes voyages et mes pas soient unis aux pas et aux voyages que vous avez faits en ce monde. - O Cœur de Jésus et de Marie, faites que tout usage que je ferai de mes yeux, de ma bouche, de mes mains, de mes pieds et de tous mes sens, procède de vous et soit animé de votre saint amour».

En se couchant: «O mon Dieu, je vous offre le repos que je vais prendre en l'honneur du repos que mon Jésus et sa divine Mère ont pris en ce monde».

IIIe POINT: A l'occasion de divers actes de vertus. - En faisant un acte d'hu­milité: «O Cœur très aimable de Jésus et de Marie, je vous offre cette ac­tion, cette humiliation, en l'honneur et union de toutes les humiliations que vous avez subies vous-même sur la terre. Détruisez l'orgueil et la va­nité dans mon cœur, et faites-y régner votre sainte humilité».

En faisant un acte de pénitence et de mortification: «O Cœur adorable de Jésus, je veux supporter cette privation, cette pénitence, pour votre pur amour et en union des dispositions saintes avec lesquelles vous et votre divine Mère avez enduré ici-bas tant de mortifications et de souffrances».

En faisant un acte d'obéissance. «O Cœur très obéissant de Jésus et de Marie, je vous offre cette action en l'honneur de la parfaite obéissance que vous avez pratiquée vis-à-vis des hommes et même de vos ennemis».

En faisant un acte de charité: «O Cœur très charitable de Jésus et de Ma­rie, je vous offre cette action en l'honneur et union de votre charité sans bornes».

En prenant soin des pauvres: «O Cœur très compatissant de Jésus, je vous offre cette action en l'honneur et union de l'amour avec lequel vous êtes descendu du ciel pour visiter les pauvres et consoler ceux qui souffrent».

Il faut, dit le saint Père Eudes, que tout cela se fasse naturellement et que l'habitude de ces saintes pratiques passe pour ainsi dire en notre na­ture.

Résolutions. - O Cœur sacré de Jésus et de Marie, puisque vous êtes la règle et la vie de nos cœurs, vivez et régnez en nous, afin que nous n'ayons qu'un cœur avec notre divin Roi et notre auguste Reine. Soyez le cœur de notre cœur et le principe de nos pensées, de nos paroles et de nos actions, afin que nous ne vivions plus que de votre vie, et que nous n'ayons plus d'autres sentiments ni d'autres inclinations que les vôtres.

Colloque avec le Cœur sacré de Jésus et de Marie.

11 Mai
Méditation sur les vertus
du Sacré-Cœur de Jésus et de Marie

Venite ad me omnes qui laboratis et onerati estis et ego reficiam vos. Tollite jugum meum super vos et discite a me quia mitis sum et humilis corde; et inve­nietis requiem animabus vestris. Jugum enim meum suave est et onus meum leve (S. Mat., 11, 28).

Venez à moi, vous tous qui travaillez et souffrez et je vous relèverai. Prenez sur vous mon joug et apprenez de moi que je suis doux et humble de cœur et vous trou­verez la paix de vos âmes. Mon joug est doux et mon fardeau léger (S. Mat., 11, 28).

1er Prélude. Apprenez de moi que je suis doux et humble de cœur, nous dit le bon Maître. Il nous enseigne à méditer sur ses vertus.

2e Prélude. Je veux, Seigneur, considérer vos vertus si parfaites pour les imiter dans la mesure de mes forces. Aidez-moi.

Ier POINT: Adorons Notre-Seigneur en contemplant dans son Cœur sacré la vertu d'humilité et de douceur. - Nous donnons ici un modèle de méditation sur les vertus de Notre-Seigneur, fourni par le P. Eudes.

Nous méditons sur la vertu d'humilité et de douceur. On peut appli­quer la même méthode aux autres vertus du divin Cœur de Jésus, à son obéissance, sa pureté, sa patience, sa miséricorde, sa charité.

Considérons avec attention comment Notre-Seigneur a pratiqué cette vertu en son intérieur et en son extérieur, à Nazareth, en sa vie publique et en sa Passion.

Par l'exercice de cette vertu, il a rendu une gloire infinie à son Père; - il a réparé pleinement les offenses que nous lui avions faites par les pé­chés contraires à cette même vertu; - il nous a délivrés des peines éter­nelles que nous pouvions avoir méritées par ces péchés; - il nous a en­seigné par son exemple la manière de bien pratiquer cette vertu; - enfin il nous a mérité la grâce nécessaire et convenable pour le faire.

Rendons-lui nos actions de grâces pour toutes ces faveurs; - offrons-nous à lui pour effectuer les désirs très ardents qu'il a de nous voir ornés de cette vertu; - prions-le de nous donner toutes les grâces dont nous avons besoin pour accomplir en nous les saints désirs de son Cœur.

IIe POINT: Adorons le Fils de Dieu, imprimant par la force de sa grâce, une image parfaite de cette vertu dans le Cœur sacré de sa très sainte Mère. - Considé­rons comment cette glorieuse Vierge a coopéré soigneusement avec son Fils à former dans son propre Cœur une ressemblance très exacte de cet­te vertu de douceur et d'humilité, s'appliquant à la contempler en Jésus, pour la retracer en soi par une fidèle imitation.

Voyons comment, pour atteindre cette fin, la sainte Vierge a pratiqué cette vertu d'humilité et de douceur en son intérieur et en son extérieur; - en ses pensées, paroles et actions; - en tous lieux, en toute occasion, à tous les instants de sa vie, allant toujours croissant de jour en jour dans la perfection de cette vertu; - comment enfin, par ce moyen elle a ren­du une très grande gloire à Dieu, et nous a mis devant les yeux un admi­rable modèle que nous n'avons plus qu'à suivre.

Rendons nos actions de grâces au Fils bien-aimé de Marie, d'avoir ainsi imprimé dans le Cœur de sa divine Mère une si merveilleuse res­semblance des perfections de son propre Cœur.

Remercions aussi la Mère de Jésus de toute la gloire qu'elle a rendue à Dieu par l'imitation des vertus de son Fils, et spécialement de sa douceur et de son humilité.

Offrons-nous au Fils et à la Mère pour marcher par le chemin qu'ils ont suivi, et prions cette divine Mère de nous obtenir de son Fils les grâ­ces dont nous avons besoin pour le faire.

IIIe POINT: Considérons que, la Mère de Dieu étant notre Mère, et nous étant ses enfants, quoique infiniment indignes, nous sommes obligés de lui être semblables. - Comme le Cœur de Marie est un vif portrait du Cœur de Jésus, no­tre cœur doit être aussi une image vivante de celui de cette divine Mère. Voyons donc si notre cœur a, sous le rapport de la douceur et de l'humi­lité, quelque ressemblance avec le sien.

Examinons-nous sur les fautes que nous avons faites, pendant toute notre vie, contre cette vertu et nous trouverons là une infinité de sujets de nous confondre devant Dieu, de lui demander pardon et de prendre la résolution de vivre autrement que nous n'avons fait jusqu'ici…

Prions la sainte Vierge de nous obtenir miséricorde, de suppléer à nos manquements, de nous obtenir les grâces dont nous avons besoin pour nous corriger et pour être plus fidèles à l'avenir dans l'exercice de cette vertu.

Enfin, offrons et donnons notre cœur à Marie, Reine de toutes les vertus; prions-la d'anéantir en nous tout ce qui est contraire à l'humilité et à la douceur et d'y graver une parfaite image de toutes les vertus de son Cœur et spécialement de son humilité et de sa douceur, pour la plus grande gloire de son divin Fils et pour la sienne.

O Cœur du Roi des humbles, abîme d'humilité, écrasez en moi tout ce qui est contraire à cette sainte vertu et faites-la régner parfaitement dans mon cœur.

O Reine des cœurs humbles, faites régner dans mon cœur l'humilité de votre Fils et la vôtre, afin que le cœur des enfants ait quelque ressem­blance avec celui de leur Mère tout aimable.

Résolutions. - O Vierge très humble, qui avez procuré tant de gloire à Dieu par l'humilité de votre Cœur, quel grand désir j'éprouve de vous imiter en cette belle vertu! Aidez-moi, rendez-moi participant de vos di­vines lumières, afin que je connaisse les sujets infinis que j'ai de m'abaisser. Mes péchés m'en font un si grand devoir!

Colloque avec le Cœur humble et doux de Jésus et de Marie.

12 Mai
Consécration et amende honorable
au Sacré-Cœur de Jésus et de Marie

Dixit Dominus ad Salomonem: Exau­divi orationem tuam et deprecationem tuam quam deprecatus es coram me: sanctificavi domum hanc quam aedifica­sti, ut ponerem nomen meum ibi in sem­piternum, et erunt oculi mei et cor meum ibi cunctis diebus (3 lib. Reg. 9, 3).

Dieu dit à Salomon: J'ai entendu ta prière et les supplications que tu m'a adressées: j'ai sanctifié cette maison que tu as édifiée, pour y mettre mon nom pour toujours, et mes yeux et mon cœur seront là tous les jours (3e liv. des Rois, 9, 3).

1er Prélude. Salomon a consacré à Dieu son beau temple, il s'est consacré aussi à Dieu avec tout son peuple et Dieu a promis de veiller sur eux avec la tendresse de son cœur divin.

2e Prélude. Disons avec Salomon: Que notre cœur sont parfaitement uni à Dieu, pour que nous observions tous les jours sa volonté (Ibid, 8, 61).

Ier POINT: Consécration au Sacré-Cœur de Jésus et de Marie. - O Jésus, mon très miséricordieux et très adorable Sauveur, humblement proster­né à vos pieds, et m'unissant à tous les cœurs qui vous aiment au ciel et sur la terre, je vous bénis et vous adore de toute la puissance de mon âme. Je choisis aujourd'hui votre divin Cœur pour le Roi de mon cœur, et celui de votre très sainte Mère pour mon refuge dans toutes mes nécessités spirituelles et corporelles, je vous offre, vous donne et vous con­sacre mon corps, mon âme et tout ce que je suis, désirant que tous les battements et tous les sentiments de mon cœur, toutes mes pensées, mes paroles et mes actions, pour le présent et pour l'avenir, soient autant d'actes d'adoration et d'amour à votre Cœur Sacré, ô Jésus, autant d'actes de confiance et de louange à celui de votre sainte Mère.

O mon Sauveur, unissez si étroitement mon cœur à votre Cœur Sa­cré et à celui de votre divine Mère, que je n'aie plus d'autre sentiment, d'autre affection, ni d'autre volonté que les vôtres, pour la plus pure gloire et le seul contentement du Fils et de la Mère et que, vivant et mou­rant dans l'exercice du pur amour de ces divins Cœurs, je continue de les aimer et de les glorifier pendant toute l'éternité (Extrait d'un opuscu­le du P. Eudes).

IIe POINT: Amende honorable au Cœur de Jésus dans le très Saint-Sacrement. - O Cœur adorable de Jésus, vous avez voulu, par l'excès du plus pro­digieux de tous les amours, vous mettre en état de victime dans le sacre­ment de l'Eucharistie, afin de vous y offrir continuellement à votre Père, en sacrifice de propitiation pour nos péchés. Mais hélas! la plupart des hommes ne répondent à vos tendresses que par la dureté, l'oubli, le mé­pris et l'offense.

Ah! n'est-il pas juste que touchés par tant d'ingratitudes criminelles nous tachions de les réparer de tout notre pouvoir? C'est pour cela, ô di­vin Cœur de Jésus, que, prosternés et anéantis devant vous, nous vous en faisons aujourd'hui une réparation sincère.

Pardon, ô Cœur très miséricordieux, pardon de toutes les injures, de tous les mépris et outrages que vous avez reçus dans tout le cours de vo­tre vie sainte et de votre douloureuse passion; pardon de toutes les im­piétés, de toutes les irrévérences, de tous les sacrilèges qui ont été com­mis contre vous jusqu'à ce jour dans l'adorable sacrement de l'Euchari­stie; pardon, ô Cœur plein de bonté, pardon de toutes nos froideurs, de notre insensibilité et de nos distractions sans nombre en votre divine pré­sence.

Mais, ô Cœur Sacré, vous savez notre impuissance: soyez donc vous-même, avec le saint Cœur de Marie, notre réparateur et notre média­teur; apaisez la colère de votre Père céleste que nos péchés ont irrité con­tre nous; couvrez nos défauts de votre ardente charité, de votre humilité profonde, de votre douceur, de votre patience et de toutes vos divines vertus (Manuel des enfants de la Mère admirable).

IIIe POINT: Consécration au très saint Cœur de Marie. - Prosterné de­vant vous, ô Mère de miséricorde, j'honore votre Cœur béni avec le plus profond respect dont je suis capable; je vous remercie des senti­ments de miséricorde et d'amour dont vous avez si souvent été touchée à la vue de mes misères; je vous rends grâces de tous les bienfaits que j'ai reçus de votre maternelle bonté; je m'unis à toutes les âmes pures qui trouvent leurs délices et leur consolation à vous honorer, à vous louer et à vous aimer. Elles ont appris de l'Esprit-Saint que c'est par vous que nous devons aller à Jésus-Christ et nous acquitter envers lui de tous nos devoirs.

Vous serez, ô Cœur tout aimable, mon refuge dans mes afflictions, ma consolation dans mes peines, mon secours dans tous mes besoins. J'irai apprendre de vous la pureté, l'humilité, la douceur et surtout l'amour de Jésus. Je demanderai ces vertus par vos mérites, sûr qu'elles ne pourront m'être refusées.

J'ose vous présenter mon pauvre cœur souillé de mille péchés, tout indigne qu'il est de vous; j'espère que vous ne le mépriserez pas. Faites, par votre puissante médiation, qu'il soit purifié et détaché de toutes les créatures; pénétrez-le de la douleur de ses péchés; remplissez-le de l'amour du divin Cœur de Jésus, votre Fils, afin qu'il puisse vous être uni dans le ciel et y aimer Dieu éternellement avec vous.

Résolutions. - Je vous donne et vous consacre à jamais mon cœur, ô Jésus, ô Marie. Prenez-le avec toutes ses affections; qu'il n'aime que vous, qu'il ne soupire que pour vous. Je le jette dans la fournaise de vo­tre Cœur Sacré, qui est un seul cœur. C'est là que je veux faire ma de­meure, vivre et mourir d'amour. Non, je l'espère, rien ne me séparera plus de l'amour du Cœur de Jésus et de Marie.

Colloque avec le Cœur Sacré de Jésus et de Marie.

13 Mai
De la docilité a la conduite du Saint-Esprit

Et ego rogabo Patrem, et alium Paracli­tum dabit vobis, ut maneat vobiscum in aeternum, spiritum veritatis, quem mun­dus non potest accipere, quia non videt eum, nec scit eum; vos autem cognoscetis eum: quia apud vos manebit et in vobis erit (S. Joan, 14, 16).

Je prierai mon Père et il vous donnera un autre Consolateur, pour qu'il demeure toujours avec vous, l'esprit de vérité, que le monde ne peut pas recevoir, parce qu'il ne sait pas le voir et le connaître, mais vous, vous le connaîtrez, il demeurera parmi vous et il sera en vous (S. Jean, 14, 16).

1er Prélude. Le monde est trop agité pour entendre l'Esprit-Saint et reconnaître sa voix. Il faut pour cela le calme de la vie intérieure.

2e Prélude. Bon Maître, je vous supplie de purifier mon âme pour qu'elle entende la voix du Saint-Esprit.

Ier POINT: En quoi consiste cette docilité. - Quand une âme s'est aban­donnée à la conduite du Saint-Esprit, il l'élève peu à peu au dessus de la vie naturelle et il la gouverne. Au commencement, elle ne sait où elle va, mais peu à peu la lumière intérieure l'éclaire et lui fait voir toutes ses ac­tions et le gouvernement de Dieu en ses actions, de sorte qu'elle n'a presque autre chose à faire que de laisser Dieu faire en elle, et par elle, ce qu'il lui plaît; ainsi elle avance merveilleusement.

Nous avons une figure de la conduite du Saint-Esprit en celle que Dieu tint à l'égard des Israélites au sortir de l'Egypte, pendant leur voyage dans le désert, pour arriver à la terre de promission. Il leur don­na pour les conduire, le jour une colonne de nuée, la nuit une colonne de feu. Ils suivaient le mouvement de cette colonne et ils s'arrêtaient quand elle s'arrêtait. Ils ne la devançaient pas, ils la suivaient seulement, et ja­mais ils ne s'écartaient d'elle. C'est ainsi que nous devons nous compor­ter à l'égard du Saint-Esprit.

Il faut pour cela beaucoup de calme, de recueillement et d'esprit de foi (P. Louis Lallemant).

IIe POINT: Les moyens de parvenir â cette docilité. - Les principaux moyens de parvenir à cette docilité sont les suivants: 1. Obéir fidèlement aux volontés de Dieu que nous connaissons déjà. Il y en a plusieurs que nous ne connaissons pas, car, nous sommes tout pleins d'ignorance; mais Dieu ne nous demandera compte que des connaissances qu'il nous aura données; faisons-en un bon usage, il nous en donnera de nouvelles.

Accomplissons ce qu'il nous a déjà fait connaître de ses desseins, et il nous manifestera ensuite les autres.

2. Renouveler souvent le bon propos de suivre en toutes choses la vo­lonté de Dieu, et nous affermir en cette résolution autant qu'il est possi­ble.

3. Demander sans cesse la lumière et la force du Saint-Esprit pour ac­complir les volontés de Dieu, nous lier au Saint-Esprit et nous tenir atta­chés à lui, comme Saint Paul qui disait aux prêtres d'Ephèse: «Etant lié par le Saint-Esprit je m'en vais à Jérusalem»; surtout au changement des actions les plus importantes demander à Dieu la lumière du Saint­-Esprit, et lui protester sincèrement que nous ne désirons autre chose que de faire sa volonté. Après quoi, s'il ne nous donne pas de nouvelles lu­mières, nous commencerons à faire ce que nous sommes accoutumés de faire et ce qui nous semblera pour lors le meilleur.

4. Remarquer exactement les divers mouvements de notre âme. Par cette diligence, nous viendrons peu à peu à reconnaître ce qui est de Dieu et ce qui n'en est pas. Ce qui vient de Dieu dans-une âme soumise à la grâce est ordinairement paisible et tranquille. Ce qui vient du dé­mon est violent et porte avec soi le trouble et l'anxiété.

IIIe POINT: Qu'il est facile de connaître la conduite du Saint-Esprit. - 1. Les lumières et les inspirations du Saint-Esprit, qui sont nécessaires pour faire le bien et pour éviter le mal, ne nous manquent jamais, princi­palement si nous sommes en état de grâce.

2. Si nous sommes fidèles à suivre la lumière qui nous est donnée, elle ira toujours croissant. Comme cette vérité est encourageante!

3. Si nous retranchons avec soin les péchés et les imperfections, qui, comme autant de nuées, nous dérobent cette lumière, nous verrons de jour en jour plus clair.

4. Ne souffrons point que nos sens extérieurs s'égarent et se souillent par des sensualités, et Dieu nous ouvrira les sens intérieurs.

5. Ne sortons jamais s'il est possible de notre intérieur, ou retournons-­y au plus tôt, et soyons attentifs à ce qui s'y passe, nous remarquerons les mouvements des différents esprits qui nous font agir.

6. Découvrons sincèrement tout le fond de notre cœur à notre Supé­rieur ou à notre père spirituel. Une âme qui a cette candeur et cette sim­plicité ne manque jamais d'être favorisée de la direction du Saint-Esprit.

7. Ajoutons qu'il faut se défier du démon, qui est l'ennemi acharné du Saint-Esprit. Il cherche toujours à nous détourner de la conduite du Saint-Esprit. Il se sert des occasions qui se présentent, du souvenir des choses passées, des nouvelles qu'on entend, des objets qui frappent les sens, de notre humeur et de nos passions, faisant jouer tous ces ressorts, tantôt l'un et tantôt l'autre, pour tenir notre esprit et notre cœur occu­pés de quelque bagatelle, à quoi nous nous arrêtons, ou par des pensées ou des réflexions inutiles ou par de vains désirs ou de vaines craintes, ou par quelque autre mouvement d'une passion immortifiée.

Tout ce qui ôte la paix et la tranquillité de l'intérieur vient du démon. Les grâces non seulement sanctifient l'âme, mais encore la consolent et la remplissent de paix et de douceur.

Résolutions. - Je veux me livrer désormais à la conduite du Saint-­Esprit. Je veux m'y donner tout à fait et sans réserve. Parlez, Seigneur, votre serviteur écoute. Je ne veux plus m'arrêter aux bagatelles de la vie. Soyez mon guide, mon précepteur. Parlez à mon âme, dans son inté­rieur. Je veux me détourner des distractions et vous écouter toujours. Seigneur que voulez-vous que je fasse?

Colloque avec le Saint-Esprit.

14 Mai
Des motifs qui nous portent à cette docilité
à la conduite du Saint-Esprit

Haec locutus sum vobis apud vos ma­nens. Paraclitus autem Spiritus Sanctus, quem mittet Pater in nomine meo, fille vos docebit omnia, et suggeret vobis omnia, quaecumque dixero vobis (S. Joan, 14, 25).

Je vous ai dit tout cela, étant avec vous. Mais l'Esprit-Saint consolateur que mon Père enverra en mon nom vous enseigne­ra tout et vous suggérera tout ce que je voudrai vous dire (S. Jean, 14, 25).

1er Prélude. C'est Notre-Seigneur lui-même qui nous dirige par son Esprit. Quelle folie de n'y être pas attentif!

2e Prélude. Parlez, Seigneur, par votre Esprit Saint, votre serviteur écoute.

Ier POINT: Que la Perfection et même le salut dépendent de la docilité à la grâce. - Les deux éléments de la vie spirituelle sont la purgation du cœur et la direction du Saint-Esprit. Ce sont là les deux pôles de toute la spirituali­té. Par ces deux voies, on parvient à la perfection selon le degré de pure­té que l'on a acquis, et à proportion de la fidélité qu'on a eue à coopérer aux mouvements du Saint-Esprit et à suivre sa conduite.

Toute notre perfection dépend de cette fidélité, et l'on peut dire que l'abrégé de la vie spirituelle consiste à remarquer les voies et les mouve­ments de l'Esprit de Dieu en notre âme, et à fortifier notre volonté dans la résolution de les suivre, employant pour cet effet tous nos exercices et tous nos actes religieux, l'oraison, la lecture, les sacrements, la pratique des vertus et des bonnes œuvres.

Le but où nous devons aspirer, après que nous nous serons longtemps exercés dans la pureté de cœur, c'est d'être tellement possédés et gou­vernés par le Saint-Esprit, que ce soit lui seul qui conduise toutes nos puissances et tous nos sens, et qui règle tous nos mouvements intérieurs et extérieurs comme il dirigeait la sainte humanité du Sauveur, et que nous nous abandonnions nous-mêmes entièrement à lui par un renonce­ment spirituel de nos volontés et de nos propres satisfactions. Ainsi nous ne vivrons plus en nous-mêmes, mais en Jésus-Christ et selon son Cœur, par une fidèle correspondance aux opérations de son divin Esprit, et par un parfait assujettissement de toutes nos rebellions au pou­voir de sa grâce.

IIe POINT: Peu de personnes parviennent aux grâces que Dieu leur avait desti­nées. - La plupart manquent de courage à se vaincre et de fidélité à bien ménager les dons de Dieu. quand nous entrons dans le chemin de la ver­tu, nous marchons au commencement dans l'obscurité, mais si nous sui­vons constamment et fidèlement la grâce, nous arriverons infaillible­ment à une grande lumière et pour nous et pour les autres. - Nous vou­drions être saints en un jour, et nous n'avons pas la patience d'attendre le cours ordinaire de la grâce. Cela vient de notre orgueil et de notre lâ­cheté. Soyons seulement fidèles a coopérer aux grâces que Dieu nous présente; et il ne manquera pas de nous conduire à l'accomplissement de ses desseins.

Le principal point de la vie spirituelle consiste tellement à se disposer à la grâce par la pureté de cœur, que de deux personnes qui se consacrent en même temps au service de Dieu, l'une se donnant toute aux bonnes œuvres, et l'autre s'appliquant entièrement à purifier son cœur et à re­trancher ce qui s'oppose en lui à la grâce, celle-ci arrivera deux fois plus tôt à la perfection que l'autre.

Ainsi notre plus grand soin doit être, non pas tant de lire les livres spi­rituels, que de donner beaucoup d'attention aux inspirations divines qui suffisent avec un peu de lecture et d'être extrêmement fidèles à cor­respondre aux grâces qui nous sont offertes. - Nous devons encore de­mander souvent à Dieu qu'il nous fasse réparer avant la mort toutes les pertes de grâces que nous avons faites, et qu'il nous fasse arriver au com­ble de mérites où il nous voulait conduire selon sa première intention, que nous avons jusqu'ici frustrée par nos infidélités: enfin qu'il nous pardonne les péchés d'autrui dont nous avons été cause, et qu'il répare aussi dans les autres les pertes de grâces qu'ils ont faites par notre faute (P. Louis Lallemant).

IIIe POINT: Le mal est que beaucoup d'âmes ne suivent presque en tout que la nature et le sens humain. - La plupart des religieux, même bons et ver­tueux, ne suivent dans leur conduite particulière et dans celle des autres, que la raison et le bon sens: en quoi plusieurs d'entre eux excellent. Cet­te règle est bonne, mais elle ne suffit pas pour la perfection chrétienne.

Ces personnes-là se conduisent d'ordinaire par le sentiment commun de ceux avec lesquels elles vivent, et comme ceux-ci sont imparfaits, bien que leur vie ne soit pas déréglée, parce que le nombre des parfaits est fort petit, jamais elles n'arrivent aux sublimes voies de l'esprit: elles vivent comme le commun et leur manière de gouverner les autres est imparfai­te. - Le Saint-Esprit attend pendant quelque temps qu'ils entrent dans leur intérieur, et qu'en y remarquant les opérations de la grâce et celles de la nature, ils se disposent à suivre sa conduite: mais s'ils abusent du temps et de la faveur qu'il leur offre, il les abandonne à la fin à eux-­mêmes, et les laisse dans cette obscurité et cette ignorance de leur inté­rieur qu'ils ont affectée, et dans laquelle ils vivent désormais parmi de grands dangers de leur salut.

Peu de personnes se tiennent constamment dans les voies de Dieu. Plusieurs s'en écartent sans cesse: le Saint-Esprit les rappelle par ses in­spirations, mais comme ils sont indociles, pleins d'eux-mêmes, attachés à leurs sentiments et à leurs sens, ils ne se laissent pas conduire et n'en­trent que rarement dans la voie des desseins de Dieu. Ils sont surpris à la mort, n'ayant fait que vingt pas où ils en eussent pu faire dix mille.

Résolutions. - Je vous supplie, Seigneur Jésus, de réparer par les mé­rites de votre divin Cœur, toutes les pertes de grâces que j'ai faites. Faites-moi arriver an point où vous vouliez me conduire. Mettez-moi sous la conduite du Saint-Esprit, comme vous étiez vous-même. Pardonnez-moi les péchés d'autrui dont j'ai été cause, et réparez aussi dans les autres les pertes de grâces qu'ils ont faites par ma faute.

Colloque avec le Saint-Esprit.

15 Mai
Excellence de la grâce du Saint-Esprit
et injustice de l'opposition qu'on y apporte

Respondit Jésus et dixit ei: Si scires do­num Dei et quis est qui dicit tibi: Da mfhi bibere, tu forsftan petiisses ab eo et dedis­set tibi aquam vivam. Aqua quam ego da­bo cuidam fiet in eo fons aquae salientis in vitam aeternam (S. Joan, 4, 10).

Jésus lui répondit: si tu savais le don de Dieu et celui qui t'a dit: Donne-moi à boi­re, tu lui en aurais sans doute demandé à lui, et il t'aurait donné de l'eau vive… L'eau que je donnerai à quelqu'un de­viendra en lui une source d'eau jaillissan­te pour la vie éternelle (S. Jean, 4, 10).

1er Prélude. Si les âmes savaient le don de Dieu, elles seraient assoiffées de grâce, mais elles sont insouciantes.

2e Prélude. Seigneur, donnez-moi cette soif et cette eau vivifiante.

Ier POINT: L'excellence de la grâce. - Nous devons recevoir chaque in­spiration comme une parole de Dieu, qui procède de sa sagesse, de sa miséricorde, de sa bonté infinie, et qui peut opérer en nous de merveil­leux effets, si nous n'y mettons point d'obstacle.

Considérons ce qu'une parole de Dieu a pu faire; elle a créé le ciel et la terre, et a tiré toutes les créatures du néant en les faisant participer à l'être de Dieu, parce qu'elle n'a pas trouvé de résistance dans le néant. Elle opérerait en nous quelque chose de plus si nous ne lui résistions pas. Elle nous tirerait du néant moral à la participation surnaturelle de la sainteté de Dieu dans l'état de la grâce, et à la participation de la félicité de Dieu dans l'état de la gloire; et pour des bagatelles, pour quelques sa­tisfactions de l'amour-propre ou des sens, nous empêchons ces grands effets de la parole de Dieu, de ses inspirations et des impressions de son Esprit. Après cela, n'avouerons-nous pas que la sagesse a eu raison de dire que le nombre des fous est infini?

Les inspirations de Dieu restent à la surface de notre âme, à cause de l'opposition qu'elles trouvent en nous; mais elles pénètrent doucement dans les âmes qui sont possédées de Dieu et elles les remplissent de cette admirable paix qui accompagne toujours l'Esprit de Dieu.

IIe POINT: Injustice et folie de l'opposition que nous y apportons. - L'un de nos plus grands malheurs est que nous sommes si sensuels et si vains que nous n'estimons et ne goûtons que ce qui a de l'éclat et ce qui flatte nos sens; et cependant, il est de foi que la moindre inspiration de Dieu est une chose plus précieuse et plus excellente que tout le monde entier, pui­squ'elle est d'un ordre surnaturel, et qu'elle a coûté le sang et la vie d'un Dieu.

Quelle folie! nous sommes insensibles aux inspirations de Dieu, parce qu'elles sont spirituelles et infiniment élevées au-dessus des sens. Nous n'en faisons pas grand cas, nous préférons le succès, les commodités, les satisfactions. Prodigieuse illusion, dont cependant plusieurs ne se dé­trompent qu'à l'heure de la mort.

Nous commettons deux grandes injustices à l'égard de Dieu: la pre­mière, c'est d'ôter au Saint-Esprit la direction de notre âme, qui lui re­vient et de l'usurper nous-même; la seconde est que, la partie supérieure de notre âme devant être toute à Dieu, nous la remplissons de créatures à son préjudice: et au lieu de la dilater et de la purifier et sanctifier par la présence de Dieu, nous la rabaissons en l'occupant de quelques miséra­bles petits objets de néant. Voilà ce qui nous empêche d'arriver à la per­fection.

Il résulte même de nos habitudes de tiédeur et d'affections naturelles, que le Saint-Esprit se tait vis-à-vis de nous. Dieu nous refuse les secours de ses grâces, parce qu'il prévoit que s'il nous les donnait, dans les di­spositions où nous sommes, elles ne nous serviraient de rien, notre vo­lonté étant liée de mille liens qui l'empêcheraient d'y consentir.

Quand on en est là, il faut se remettre à travailler à la pureté de son cœur, par l'humilité, la contrition et le détachement. Là, il n'y a pas à craindre l'illusion du démon, parce qu'il ne porte jamais les âmes à se purifier.

IIIe POINT: Comment le Saint-Esprit est pour nous un consolateur. - Saint Athanase remarque que le Saint-Esprit n'a pas reçu ce nom dans l'An­cien Testament. La raison en est dans ces paroles de Notre-Seigneur: «Si je ne m'en vais point, le Consolateur ne viendra pas à vous; mais si je m'en vais, je vous l'enverrai». C'est un don du cœur de Jésus glorifié. C'est pour cela que Notre-Seigneur disait: «Il vous est utile que je m'en aille».

Le Saint-Esprit nous console d'abord dans l'incertitude de notre salut. Nous y rencontrons tant d'obstacles! Notre nature est si opposée au bien! C'est cette incertitude qui fait trembler les saints. Mais dans cette peine, le Saint-Esprit nous console, étant l'Esprit de l'adoption des enfants de Dieu, et comme dit saint Paul, le gage et l'assurance de l'héritage céleste. Le Saint-Esprit rend aux âmes ferventes et fidèles un témoignage intérieur de ce qu'elles sont à Dieu et de ce que Dieu est à elles; et ce témoignage bannit leur crainte et fait leur consolation.

Le Saint-Esprit nous console aussi dans les tentations et les afflictions de la vie. L'onction qu'il répand dans nos âmes les fortifie, adoucit leurs peines et leur fait goûter le prix des croix.

Il nous console enfin dans l'exil où nous vivons ici bas, loin de Dieu. Nous languissons, loin de notre bien suprême. C'est un martyre qui nous serait insupportable, sans les consolations que le Saint-Esprit nous donne de temps en temps.

Résolutions. - Suivre la conduite du Saint-Esprit, correspondre aux inspirations divines, telle doit être mon occupation constante et toute ma vie. C'est par le Saint-Esprit que le Sacré-Cœur me parle et me conduit. Pardon, Seigneur, d'avoir été si longtemps sourd à votre voix! Ne m'abandonnez pas, revenez encore vers ma pauvre âme si ingrate. Parlez-lui fortement et ne la quittez plus.

Colloque avec le Saint-Esprit.

16 Mai
Les dons du Saint-Esprit:
la sagesse

Requiescat super eum spiritus sapien­tiae et intellectus, spiritus consilii et forti­tudinis, spiritus scientiae et pietatis, et re­plebit eum spiritus timoris Domini: non secundum visionem oculorum judicabit, neque secundum auditum aurium arguet (Is., 11, 2).

L'esprit de Dieu reposera sur lui: l'esprit de sagesse et d'intelligence, l'esprit de con­seil et de force, l'esprit de science et de pié­té; il sera rempli de l'esprit de crainte de Dieu; il ne jugera pas d'après ce que les yeux voient, ni d'après ce que les oreilles entendent (Is., 11, 2).

1er Prélude. Notre-Seigneur nous a promis son Esprit, mais son Esprit avait été décrit par Isaïe, il est riche en dons qui élèvent l'âme au-dessus de la vie naturelle.

2e Prélude. Donnez-moi, Seigneur, ces dons précieux qui découlent de votre divin Cœur.

Ier POINT: Des dons du Saint-Esprit en général. - Les dons du Saint­Esprit sont des habitudes ou qualités permanentes que Dieu communi­que à l'âme avec la grâce sanctifiante et avec les vertus infuses, pour for­tifier les puissances naturelles, et pour les rendre souples aux mouve­ments de son divin Esprit, et capables d'exercer les actes des vertus les plus difficiles et les plus nobles, qu'on appelle héroïques.

C'est le Cœur de Jésus qui en est la source.

Les dons ne subsistent pas dans l'âme sans la charité; et à proportion que la grâce croît, ils croissent aussi. De là vient qu'ils sont fort rares et n'arrivent point à un haut degré d'excellence, parce qu'ils ne sont pas soutenus par une fervente et parfaite charité; les péchés véniels et les moindres imperfections les tenant comme liés, et les empêchant d'agir. Leur progrès est en rapport avec celui de l'oraison.

Les dons du Saint-Esprit, par leur action intime, sans discours, sans perplexité, nous montrent ce qui est le meilleur, nous le faisant voir dans la lumière de Dieu, avec plus ou moins d'évidence, selon le degré où nous les possédons.

On compare ceux qui se conduisent par les dons du Saint-Esprit, à un navire qui vogue à pleines voiles, le vent en poupe; et ceux qui se con­duisent par les vertus, et non encore par les dons, à une chaloupe qu'on fait aller à force de rames, avec bien plus de travail et de bruit, et bien plus lentement.

IIe POINT: Du don de sagesse. - Le don de sagesse est une connaissan­ce savoureuse de Dieu, de ses attributs, de Jésus-Christ, de son Cœur et de ses mystères. L'intelligence nous aide seulement à concevoir Dieu et ses attributs; mais la sagesse nous représente Dieu, sa grandeur, sa beauté, ses perfections, ses mystères comme infiniment adorables et ai­mables: et de cette connaissance résulte un goût délicieux qui s'étend même quelquefois jusqu'au corps, et qui est plus ou moins grand selon l'état de perfection et de pureté où l'âme se trouve.

Saint François était si rempli de ce goût de sagesse, que prononçant le nom de Dieu ou le nom de Jésus, il sentait en sa bouche et sur ses lèvres une saveur plus douce mille fois que le miel et que le sucre.

Saint Bernard nous dit que le nom de Jésus est un miel à ses lèvres, une harmonie à ses oreilles, une douce jouissance à son cœur. - C'est au don de sagesse qu'appartiennent particulièrement les douceurs et les consolations spirituelles et les grâces sensibles.

Au commencement de la vie spirituelle, les choses divines sont insipi­des et l'on a de la peine à les goûter; mais dans la suite elles deviennent douces et si savoureuses qu'on les goûte avec plaisir, jusqu'à n'avoir plus que du dégoût pour le reste.

Saint Bernard dit: La sagesse est l'amour de la vertu et la saveur du bien. Dès qu'on lui donne entrée dans une âme, elle amortit les senti­ments de la chair, purifie l'entendement, guérit le goût corrompu du cœur, rend à l'âme une parfaite santé, qui la met en état de goûter la sa­veur du bien et celle de la sagesse même, qui de tous les biens est le plus excellent et le plus doux (P. Lallemant).

Me POINT: La sagesse du monde est folie aux yeux de Dieu. - La sagesse divine réfère tout à notre fin souveraine, qui est la gloire de Dieu. La sa­gesse humaine, qui est folie, prend pour fin et pour premier principe, ou l'honneur, ou le plaisir, ou quelque autre bien temporel, ne goûtant que cela et y référant tout, ne cherchant et n'estimant que cela et méprisant tout le reste.

Le vrai sage, dit saint Thomas, juge bien des choses qui regardent sa conduite, parce qu'il en juge par rapport au premier principe et à la fin dernière, qui est Dieu; et l'autre juge mal parce qu'il ne prend point cet­te cause souveraine pour règle de ses sentiments et de ses actions.

Le monde est plein de cette sorte de folie. La plupart des hommes ont le goût dépravé, parce qu'ils mettent leur fin, au moins en pratique, dans la créature et non en Dieu. Chacun a quelque objet auquel il s'atta­che et à quoi il réfère tout et c'est une folie.

Le monde appelle folie ce qui est la vraie sagesse devant Dieu. Le Sacré-Cœur de Jésus a aimé l'humilité, la pauvreté, la croix et l'abjec­tion, comme des moyens de réparer nos fautes. Les âmes dotées du don de sagesse goûtent une saveur délicieuse dans ces objets que Notre­-Seigneur a aimés, mais peu d'âmes ont les sens assez épurés pour sentir cette odeur et pour goûter cette saveur qui sont toutes surnaturelles.

Les saints ont couru après l'odeur de ces parfums. Les apôtres étaient joyeux de porter la croix pour Jésus.

Résolutions. - Seigneur, donnez-moi cette eau à boire, l'eau de votre sagesse, qui découle de votre divin Cœur. J'en ai soif, je la désire, je la demande. Donnez-moi cette sagesse, je veux m'y préparer autant qu'il est en moi par la pureté de cœur et la vigilance. Je veux éviter le péché véniel et la tiédeur, qui vous éloignent de mon cœur. Pardonnez-moi le passé, aidez-moi à l'avenir.

Colloque avec le Sacre-Cœur.

17 mai
Les dons du Saint-Esprit:
l'intelligence et la science

Quae Dei sunt, nemo cognovit, nisi spiritus Dei. Nos autem non spiritum hu­jus mundi accepimus, sed spiritum qui ex Deo est, ut sciamus quae a Deo donata sunt nobis… Animalis autem homo non percipit ea quae sunt Spiritus Dei (1 Cor., 2, 11).

Ce qui est de Dieu, personne ne le connaît, si ce n'est l'esprit de Dieu. Mais nous, nous n'avons pas reçu l'esprit de ce monde, mais l'Esprit qui est de Dieu, pour que nous sachions ce que Dieu nous a donné… L'homme animal ne comprend pas ce qui est de l'Esprit de Dieu (1 Cor., 2, 11).

1er Prélude. Saint Paul, dans les premiers chapitres de cette belle Epître, nous ensei­gne abondamment l'excellence de l'esprit d'intelligence et de science et sa supériorité sur la science humaine.

2e Prélude. Donnez-moi, Seigneur, cette intelligence et cette science, qui me sont si nécessaires pour ma propre direction et pour aider les âmes à aller à Dieu.

Ier POINT: Le don d'intelligence. - Le don d'intelligence est une lumiè­re que le Saint-Esprit donne pour pénétrer intimement les vérités de la foi; et cette pénétration, dit saint Thomas, doit faire concevoir une vraie idée et une estime juste de la fin dernière et de tout ce qui s'y rapporte.

L'objet de notre foi, c'est Dieu et ses mystères, avec notre vie en Dieu et nos relations surnaturelles avec le prochain.

Ce que la foi nous fait simplement croire, le don d'intelligence nous le fait pénétrer plus clairement. - Ceux dont l'office est d'instruire les au­tres, les prédicateurs, les directeurs, doivent être remplis de ce don. Il est particulièrement nécessaire pour bien entendre le sens de l'Ecriture sain­te et ses figures allégoriques.

Saint Jérôme a eu le don d'intelligence, particulièrement pour le sens littéral; saint Grégoire pour le sens moral; saint Ambroise et saint Augu­stin pour le sens allégorique.

Saint Bernard par la grande pureté de son cœur, goûtait le sens moral le plus élevé, le sens mystique de l'Ecriture.

Entrons dans les dispositions de ces Saints pour lire avec fruit la sainte Ecriture.

IIe POINT: Le don de science. - Le don de science est une participation de la science de Dieu, une lumière du Saint-Esprit qui éclaire l'âme pour connaître les choses humaines en Dieu et selon la foi.

Quand on connaît Dieu par les créatures et qu'on s'élève de la con­naissance des causes secondes à la cause première et universelle, c'est un acte de la science.

La sagesse discerne les esprits par voie de goût et d'expérience; et la science, par voie de connaissance.

Le don de science nous fait voir promptement et certainement tout ce qui regarde notre conduite et celle des autres. Il nous fait connaître: 1. l'état de notre âme, nos actes intérieurs, les mouvements de notre cœur, leurs qualités, leurs défauts, leurs principes, leurs motifs, leurs fins, leurs intentions, leurs effets et leurs suites, les vertus à pratiquer, l'ordre et le soin qu'il y faut mettre.

2. Le jugement que nous devons porter des créatures et l'usage que nous en devons faire pour la vie intérieure et surnaturelle; combien elles sont fragiles, vaines, de peu de durée, nuisibles ou dangereuses pour le salut, et peu capables de nous rendre heureux.

3. La manière de converser et de traiter avec le prochain, par rapport à la fin surnaturelle de notre création. Un prédicateur connaît par ce don ce qu'il doit dire à ses auditeurs et comment il doit les presser; un direc­teur connaît l'état des âmes qu'il a sous sa conduite, leurs besoins spiri­tuels, les remèdes à leurs défauts, les obstacles qu'elles mettent à leur perfection, la voie la plus sûre et la plus courte pour les bien conduire; combien il les faut consoler ou mortifier; ce que Dieu opère en elles et ce qu'elles doivent faire de leur part pour coopérer avec Dieu et pour rem­plir ses desseins. Un supérieur connaît de quelle manière il doit gouver­ner ses inférieurs.

IIIe POINT: Du besoin que nous avons du don de science et des moyens de l'ac­quérir. - Ceux qui participent au don de science sont les plus éclairés pour leur propre avancement et pour la direction des âmes. Ils ont de grandes lumières pour la pratique des vertus. Ils en découvrent la perfec­tion. Ils voient d'une simple vue si les actions sont inspirées de Dieu et conformes à ses desseins. Sitôt qu'ils s'écartent tant soit peu des voies de Dieu, ils s'en aperçoivent. Ils sont éclairés sur ce qu'ils doivent répondre aux âmes scrupuleuses, sur les exhortations qu'ils doivent faire à des re­ligieux ou à des religieuses.

C'est par ce don que saint Vincent Ferrier prêchait avec tant de suc­cès. Il s'abandonnait au Saint-Esprit, soit pour préparer ses sermons, soit pour les prononcer, et tout le monde en était touché.

Tout prédicateur doit se rendre extrêmement dépendant de l'Esprit de Dieu. La principale préparation pour la chaire est l'oraison et la pureté de cœur. Dieu se fait quelquefois attendre, pour vous éprouver; mais ayez confiance, faites ce qui est de votre devoir et il viendra, il ne man­quera pas de répandre en vous ses lumières. Vous en sentirez les effets et vous verrez qu'il vous suggèrera quelque pensée saisissante.

Il y a une science spéciale du Sacré-Cœur (in quo sunt omnes thesauri sa­pientiae et scientiae). Par cette science, nous apprenons à reconnaître le symbolisme du Sacré-Cœur dans la nature et son action providentielle dans le monde. Nous lisons dans le Sacré-Cœur le sens de ses mystères et nous apprécions ses vertus pour les imiter, ses bienfaits pour l'en re­mercier et sa conduite pour nous y soumettre.

Résolutions. -J'ai un immense besoin de ces deux dons, d'intelligence et de science. Je les demande au cœur de Jésus, qui en est la source, je les demande à Marie qui en est le canal. Mais je dois m'y préparer par la pureté du cœur, par le recueillement, la prière, l'union avec Notre­-Seigneur.

Colloque avec la Mère de la sainte science, Mater agnitionis et sanctae spei.

17 Mai
L'ascension

Eduxit autem eos foras in Bethaniam, et elevatis manibus suis benedixit eis. Et factum est, dum benediceret illis, recessit ab eis et ferebatur in coelum (S. Luc, 24, 50).

Il les conduisit hors de la ville vers Bé­thanie, et levant les mains, il les bénit. Et comme il les bénissait, il s'éleva au-dessus d'eux vers le ciel (S. Luc, 24, 50).

1er Prélude. Jésus s'en va, mais il a promis son Esprit qui sera l'intermédiaire entre nos âmes et lui.

2e Prélude. Faites, Seigneur, que je reste uni à votre Cœur par la grâce de l'Esprit saint.

Ier POINT: Préparation. - Pendant quarante jours après sa Passion, Jésus s'est encore adonné à la formation de ses apôtres. Il leur a apparu souvent. Dix apparitions sont rapportées par la sainte Ecriture, et ce n'est pas tout, comme dit saint Augustin. Les Actes des apôtres nous di­sent que pendant ces quarante jours il s'est manifesté à ses apôtres en beaucoup de circonstances: in multis argumentis. Il les a instruits sur l'or­ganisation de l'Eglise, sur l'administration des sacrements: Loquens eis de regno Dei. Il leur a expliqué longuement toutes les prophéties et les figures messianiques de la sainte Ecriture, tout ce qui se rapportait à lui dans les livres de Moïse et des prophètes et dans les psaumes (S. Luc, 24, 44). Et ce qui était le plus important, il leur a fait comprendre comment le Christ avait dû souffrir avant d'entrer dans sa gloire. C'est là ce que les juifs charnels n'avaient jamais voulu reconnaître dans la sainte Ecriture (S. Luc, 24, 46).

Il visita sans doute plusieurs fois sa sainte Mère. Un grand nombre de saints de l'Ancienne, Loi étaient sortis du tombeau pour le voir et lui fai­re cortège. Ils apparurent à beaucoup de personnes. Comment croire que Jésus ne les conduisit pas à sa sainte Mère? Adam, Moïse, David, Isaïe, voulaient voir la Vierge qu'ils avaient annoncée. Saint Joseph voulait revoir Marie (S. Mat., 27, 52).

Toute cette période de quarante jours avait donc été remplie par d'in­cessantes effusions du Cœur de Jésus.

IIe POINT: Adieux et promesses. - Les adieux privés à Marie ont dû être bien émouvants.

Les adieux publics aux apôtres et aux disciples ont commencé au Cénacle et se sont terminés au Mont des Oliviers.

Notre-Seigneur a voulu les réunir une dernière fois au Cénacle et s'entretenir longuement avec eux. Comme au jour de la sainte Cène, les apôtres étaient là réunis, et les saintes femmes étaient dans un apparte­ment voisin. Notre-Seigneur prit un dernier repas avec les apôtres. Il compléta ses enseignements, ses conseils, ses promesses; il leur ordonna de passer là dix jours dans la retraite pour se préparer à la Pentecôte: Convescens praecepit eis ab Jerosolymis ne discederent, sed expectarent promissionem Patris (Act., 1, 4).

C'étaient les derniers adieux et le testament d'un père. Cette scène est plus grandiose encore que celle de Jacob bénissant ses enfants avant de mourir.

Notre-Seigneur promet le Saint-Esprit. «Ce sera, dit-il, un nouveau baptême qui vous transformera; c'est mon Esprit qui demeurera en vous, qui vous enseignera, qui vous consolera». Il leur indique leur mis­sion: ils iront prêcher partout la pénitence et la rémission des péchés; ils donneront le baptême et les sacrements, ils organiseront l'Eglise, le rè­gne spirituel de Dieu. Les apôtres pensent encore à la restauration du royaume d'Israël. Ils interrogent Notre-Seigneur à ce sujet. Il leur ré­pond de ne pas s'en inquiéter: «Dieu seul, leur dit-il, connaît l'heure et le temps de chaque chose».

Après ces longs entretiens, plus émouvants que nous ne saurions le di­re, Notre-Seigneur les conduit vers le Mont des Olives, comme au soir du jeudi saint, mais aujourd'hui ce n'est plus pour s'y livrer à la souf­france, c'est pour y être glorifié: Eduxit eos foras in Bethaniam. Sur le che­min et jusqu'au sommet de la montagne, il continue a leur prodiguer ses consolations et ses avis: «Vous serez mes témoins, leur disait-il, vous prêcherez ce que vous avez vu et entendu, a Jérusalem d'abord, puis en Judée, en Palestine et jusqu'à l'extrémité du monde» (Act., 1, 8).

Et comme il finissait de parler, il s'éleva vers le ciel en leur donnant sa grande bénédiction pour eux et pour toute l'Eglise. Représentons-nous ses derniers regards à Marie, à Madeleine, à saint Jean, à saint Pierre et les flots de larmes que versèrent tous ceux qu'il abandonnait ainsi.

IIIe POINT: La fête, le triomphe. - Notre-Seigneur s'élève entouré d'anges, avec saint Joseph et sans doute quelques-uns des saints de l'An­cienne Loi, qui étaient ressuscités avec lui et qui ne revirent pas la mort, et avec les âmes des justes tirées des limbes.

Le ciel s'ouvre, N.-S. s'asseoit à la droite de son Père. Les anges chantent leurs plus beaux chants de triomphe. Saint Jean nous donne dans l'Apocalypse une expression sans doute trop faible encore de cet éclat des joies célestes. «C'était, dit-il, comme la voix des grandes eaux et le bruit du tonnerre et comme une symphonie de plus de cent mille instruments» (14, 2). Les anges se réunirent autour du trône divin et ils chantaient: «Gloire à notre Dieu et à l'Agneau; bénédiction, louange, action de grâces, honneur et puissance à notre Dieu, dans les siècles des siècles» (Apoc., 7, 10). C'est une fête de neuf jours là-haut en attendant la descente du Saint-Esprit.

L'Agneau immolé a gardé ses stigmates. Son Cœur ouvert brille com­me le soleil. Il déverse toutes les douceurs de son amour sur les anges et les saints du ciel, en attendant qu'il vienne se manifester sur la terre pour réchauffer nos cœurs refroidis.

Résolutions. - J'unis mes humbles louanges à celles du ciel: gloire à notre Dieu et à l'Agneau divin. Comme les apôtres, je vais me préparer à la Pentecôte, pour me livrer ensuite à l'apostolat avec un nouveau zèle. Les cicatrices de Jésus m'enseignent qu'on ne gagne le ciel que par la croix. Son Cœur ouvert attire particulièrement mon amour.

Colloque avec Jésus glorifié.

18 Mai
Les dons du Saint-Esprit:
le don de conseil

Ego sapientia habito in consilio, et eru­ditis intersum cogitationibus. Timor Do­mini odit malum, arrogantiam et super­biam, et viam pravam, et os bilingue de­testor. Meum est consilium, et aequitas, mea est prudentia, mea est fortitudo (Sap., 8, 12).

Moi, la sagesse, j'habite dans le conseil et je préside aux sages pensées. La crainte de Dieu hait le mal, l'arrogance et l'or­gueil. Je déteste le désordre et la duplicité. J'aime le conseil, l'équité, la prudence et la force (Sap. 8, 12).

1er Prélude. La sagesse vit de conseil, elle aime le conseil et s'y complaît.

2e Prélude. Divin Cœur de Jésus, en qui habite toute sagesse, donnez-moi par Marie le don de conseil.

Ier POINT: Du don de conseil. - Le conseil est un acte de la prudence, qui prescrit le choix des moyens pour arriver à une fin.

Ainsi le don de conseil regarde la direction des actions particulières. C'est une lumière par laquelle le Saint-Esprit montre ce qu'il faut faire dans le temps, dans le lieu et dans les conjonctures où l'on se trouve. Ce que la foi, la sagesse et la science enseignent en général, le don de conseil l'applique aux cas particuliers. En quoi il est aisé de voir combien il nous est nécessaire pour la pratique de la vertu.

La conduite la plus sûre pour la vie quotidienne, est donc celle qu'on reçoit du Saint-Esprit par le don de conseil, et nous n'en devrions point suivre d'autre. Premièrement parce qu'en la suivant, nous sommes as­surés de marcher dans la voie de Dieu et de sa divine Providence; secon­dement, parce que c'est le moyen de n'errer jamais, le Saint-Esprit étant la règle infaillible aussi bien de nos actions que de nos connaissances; troisièmement parce que cette dépendance de la direction du Saint­Esprit nous fait vivre dans un grand repos, sans inquiétude et sans souci, comme les enfants d'un prince, qui ne se mettent point en peine de leur table, ni de leur entretien, se reposant de tout cela sur le soin du prince leur père.

L'union habituelle au cœur de Jésus nous tient à la source du conseil comme des autres dons.

IIe POINT: Du besoin que nous avons de ce don et des moyens de l'obtenir. - Etant très mêlés à la vie active, nous avons bien besoin du don de con­seil, plus même que les contemplatifs, qui ne rencontrent pas les mêmes difficultés; et si ce don du Saint-Esprit nous manque, nous ne ferons rien qu'avec bien des fautes, et toute notre conduite sera purement humaine. Nous ne suivrons que les inventions de notre esprit, qui sont pour l'ordi­naire fort opposées à l'esprit de Dieu.

Il faut demander le matin au Saint-Esprit son assistance pour toutes les actions de la journée, reconnaissant humblement notre ignorance et notre faiblesse, et protestant de suivre sa conduite avec une entière doci­lité de cœur et d'esprit.

Ensuite au commencement de chaque action, il faut encore demander la lumière du Saint-Esprit pour la bien faire, et à la fin demander pardon des fautes qu'on y a faites. De cette manière, on se tient pendant tout le cours de la journée dépendant de Dieu, qui seul peut nous conduire sû­rement en toutes occasions par son conseil.

La pureté de cœur est un excellent moyen pour obtenir le don de con­seil, aussi bien que les dons précédents.

Une personne d'un bon jugement, qui s'étudierait constamment à la pureté de cœur, acquerrait une prudence surnaturelle et une dextérité divine pour manier toutes sortes d'affaires, aurait une abondance de lu­mières et de connaissances infuses pour la conduite des âmes, et trouve­rait mille saintes industries pour l'exécution des entreprises qui regar­dent la gloire de Dieu.

Les directeurs des âmes et les supérieurs doivent particulièrement ti­rer de l'oraison les lumières qui les conduisent dans les fonctions de leurs charges.

IIIe POINT: Des défauts opposés à ce don. - Le vice opposé au don de conseil est la précipitation, lorsqu'on agit avec trop de promptitude et sans avoir auparavant bien considéré toutes choses, qu'on suit le mouve­ment de son activité naturelle et qu'on ne se donne pas le loisir de con­sulter le Saint-Esprit.

Ce défaut devient un péché quand on s'y abandonne par négligence; quand on ne prend pas assez de temps pour demander conseil au Saint-­Esprit avant d'agir, et qu'en agissant on se presse tellement qu'on n'est pas en état de recevoir son assistance, ou qu'on se laisse emporter par l'impétuosité d'une passion, qui obscurcit notre intelligence.

L'empressement est fort contraire au don de conseil. Saint François de Sales combat souvent ce défaut dans ses écrits. L'empressement obscurcit l'entendement, trouble le cœur et nourrit l'amour-propre en nous faisant prendre appui sur nous-mêmes, au lieu que le don de con­seil, en éclairant l'esprit, répand dans le cœur une onction et une paix tout opposées à l'empressement et à ses effets.

La témérité est encore fort contraire à ce don. C'est un manque d'at­tention aux lumières de la raison elle-même et de la grâce, parce qu'on se confie trop en soi-même.

La lenteur dans l'exécution est aussi un défaut contraire au don de conseil. Il faut user de maturité dans les délibérations; mais quand une fois la résolution est prise selon la lumière du Saint-Esprit, il faut en ve­nir promptement à l'exécution, par le mouvement du même Esprit.

Résolutions. - Seigneur, j'ai un immense besoin de ce don de votre Cœur, le conseil, et je sens qu'il est à ma disposition; mais il faut que je veille davantage à la pureté de mon cœur, à l'union avec vous, à la doci­lité à votre grâce. Aidez-moi par l'intercession de Marie, la Mère du Bon Conseil.

Colloque avec la Mère du Bon Conseil.

19 Mai
Les dons du Saint-Esprit:
la
piété

Apparuit gratia Dei Salvatoris nostri omnibus hominibus, erudiens nos, ut ab­negantes impietatem, et saecularia desi­deria, sobrie et juste et pie vivamus in hoc saeculo, exspectantes beatam spem, et ad­ventum gloriae magni Dei et Salvatoris nostri Jesu-Christi (Ad Titum, 2, 11).

La grâce de notre Dieu Sauveur s'est manifestée à tous les hommes, nous ensei­gnant à rejeter l'impiété et les désirs mon­dains, pour vivre en ce monde dans la tempérance, la justice et la piété, en atten­dant nos bienheureuses espérances et l'avènement glorieux de notre grand Dieu et Sauveur Jésus-Christ (A Tite, 2, 11).

1er Prélude. L'aimable Sauveur nous a enseigné à vivre dans la piété, il nous en donne la grâce par son Esprit.

2e Prélude. O Jésus, donnez-moi quelques gouttes de la piété de votre divin Cœur.

­

Ier POINT: Le don de piété. - Le don de piété est une disposition habi­tuelle que le Saint-Esprit met dans l'âme, pour l'exciter à une affection filiale envers Dieu.

La religion et la piété nous portent toutes deux au culte et au service de Dieu; mais la religion considère Dieu comme créateur, et la piété comme Père, en quoi celle-ci est plus excellente que l'autre.

La piété envers Notre-Seigneur et son divin Cœur est encore plus fa­cile et plus douce.

La piété s'étend non seulement à Dieu, mais encore à tout ce qui a rapport à lui, comme l'Ecriture Sainte qui contient sa parole, les bien­heureux qui le possèdent dans la gloire, les âmes souffrantes du purga­toire, les hommes qui vivent sur la terre.

Le don de piété nous donne un esprit d'enfant pour nos supérieurs, un esprit de père pour nos inférieurs, un esprit de frère pour nos égaux, des entrailles de compassion pour ceux qui sont dans le besoin et dans les peines et une tendre inclination à les secourir.

Dans la partie supérieure de l'âme, ce don nous communique une grande onction et suavité spirituelles. Dans la partie inférieure, il excite en nous des mouvements de douceur et de dévotion sensibles. De là viennent les larmes des saints et des personnes pieuses, le doux attrait qui les porte à Dieu, la promptitude qui les fait courir au service de Dieu, et la charité qui les porte à se faire tout à tous.

IIe POINT: Le vice opposé au don de piété. - C'est la dureté de cœur, la­quelle naît de l'amour déréglé de nous-mêmes, car cet amour fait que naturellement nous ne sommes sensibles qu'à nos propres intérêts et que rien ne nous touche que par rapport à nous, que nous voyons les offenses de Dieu sans larmes et les misères du prochain sans compassion; et que nous ne voulons point nous incommoder pour obliger les autres; que nous ne pouvons supporter leurs défauts, que nous nous emportons con­tre eux pour le moindre sujet, et que nous conservons pour eux dans no­tre cœur des sentiments d'aigreur et de vengeance, de haine et d'antipa­thie.

Au contraire, plus une âme a de charité ou d'amour de Dieu, plus elle est sensible aux intérêts de Dieu et à ceux du prochain.

Cette dureté est extrême dans les riches avares, dans les personnes vo­luptueuses, et dans ceux qui n'amollissent point leur cœur par les exer­cices de piété et par l'usage des choses spirituelles.

Elle se rencontre encore souvent dans les savants qui ne joignent pas la dévotion avec la science, et qui, pour se flatter dans ce défaut, l'appel­lent solidité d'esprit; mais les vrais savants ont été les plus pieux comme un saint Augustin, un saint Bonaventure, un saint Bernard.

Une âme qui ne peut pleurer ses péchés, du moins avec les larmes du cœur, a beaucoup ou d'impiété ou d'impureté, ou de l'une et de l'autre à la fois, ainsi qu'il arrive d'ordinaire à ceux qui ont le cœur endurci (P. Lallemant).

Le Cœur de Jésus est le trône de la piété. Tous les dons du Saint­-Esprit y résident comme en leur source mais s'il était possible que l'un d'eux y dominât, ce serait le don de piété, de même que sa miséricorde semble l'emporter sur sa justice.

IIIe POINT: Un péril à éviter. - C'est un grand malheur quand on estime plus dans la religion les talents naturels et acquis que la piété. - Vous verrez quelquefois des chrétiens, des prêtres ou des religieux, qui feront bien plus de cas d'un esprit capable d'affaires, que de toutes ces menues de­votions, qui sont, disent-ils, bonnes pour des femmes, mais non pas le propre d'un esprit solide, appelant solidité d'esprit cette dureté de cœur si opposée à l'esprit de piété. Ils devraient songer que la dévotion est un acte de religion, ou un fruit de la religion et de la charité, et par consé­quent qu'elle est préférable à toutes les vertus morales, la religion venant immédiatement après les vertus théologales et leur étant souvent mêlée. Quand un homme grave et âgé exprime devant les jeunes gens cette pensée qu'il estime le talent et la science plus que la piété, cela nuit ex­trêmement à ces jeunes gens et cela leur reste comme un poison dont ils ne se guériront pas.

Cela peut détruire en un moment tout le fruit du noviciat.

La béatitude qui répond au don de piété est la seconde: Bienheureux ceux qui sont doux. La douceur retranche les empêchements à la piété, les troubles, les empressements et tous les mouvements des passions.

La dévotion au Cœur de Jésus est la source la plus féconde de la piété. Ce sont les eaux de la piété et de la charité que l'on puise au Cœur de Jésus, Notre-Seigneur ne nous a pas recommandé la passion de la science, mais la douceur et la piété: «Quoniam non cognovi litteraturam, introibo in po­tentias domini».

Résolutions. - O mon Sauveur, donnez-moi quelques gouttes de la piété qui déborde de votre divin Cœur. Vous surabondez de piété filiale envers votre Père céleste et de piété fraternelle envers nous, je vous de­mande un peu de ce don: Da mihi bibere…

Colloque avec le Sacré-Cœur.

20 Mai
Les dons du Saint-Esprit:
la force

Tunc venit ad discipulos suos et dicit il­lis: dormite jam et requiescite: ecce ap­propinquavit hora, et Filius hominis tra­detur in manus peccatorum. Surgite, ea­mus, ecce appropinquavit qui me tradet (S. Mat., 26, 45).

Il vint de nouveau à ses apôtres et leur dit: Dormez maintenant et reposez-vous: voici l'heure où le Fils de l'homme sera li­vré aux mains des pécheurs. Levez-vous, allons, voici venir le traître (S. Mat., 26, 45).

1er Prélude. Quel contraste entre la faiblesse des apôtres et la force d'âme du Sau­veur! C'est qu'ils n'ont pas encore reçu l'esprit de force.

2e Prélude. Laissez-moi, Seigneur, puiser à votre divin Cœur la force qui en débor­de.

Ier POINT: Le don déforce. - La force est une vertu qui nous affermit contre la crainte et contre l'horreur des difficultés, des dangers et des tra­vaux qui se présentent dans l'exécution de nos entreprises.

C'est ce que le don de force fait excellemment: car ce don est une disposition habituelle que le Saint-Esprit met dans l'âme et dans le corps pour faire et souffrir des choses extraordinaires, pour entreprendre des actions difficiles, pour s'exposer aux dangers, pour surmonter les tra­vaux les plus rudes, pour supporter les peines les plus fâcheuses et cela constamment et d'une manière héroïque.

Ce don est nécessaire en de certaines occasions où l'on se voit exposé à perdre les biens, l'honneur ou la vie, pour le service de Dieu. Le Cœur de Jésus assiste alors puissamment du don de conseil et de force une âme fidèle qui, se défiant d'elle-même et ayant connaissance de sa faiblesse et de son néant, implore son secours et met en lui sa confiance.

Nous avons grand besoin de ce don à cause de la difficulté de certains emplois auxquels l'obéissance peut nous appliquer, comme d'aller aux missions, de rester dans le travail des classes, ou de demeurer dans un lieu qui nous paraît moins favorable à notre santé.

L'occasion d'une belle mort est si précieuse que nul homme sage ne doit la perdre quand elle se présente. Par ce seul acte de générosité chré­tienne, on mérite autant qu'on ferait le reste de sa vie si on vivait plus longtemps et on est mis hors de péril. C'est une belle mort de prendre la maladie au service des malades, d'aller dans les missions dangereuses, de se dépenser pour son troupeau, comme font les supérieurs. On ne saurait dire combien ceux qui s'exposent ainsi attirent de grâces sur leur famille religieuse.

IIe POINT: Beaux exemples. - Ce fut par cet esprit de force que Notre­-Seigneur, dans l'agonie du jardin, surmonta la crainte de sa passion et de sa mort, et se levant de l'oraison tout embrasé de zèle, dit à ses disci­ples: «Levez-vous, allons, celui qui doit me trahir est près d'ici».

C'est cet esprit qui faisait que les saints ne craignaient aucun danger lorsqu'il s'agissait d'exécuter les desseins de Dieu et de procurer sa gloire. Un saint Chrysostome ne craignait que le péché. - Saint François Xavier, animé de cet esprit, bravait les armées d'ennemis infidèles, les tempêtes, les naufrages, la mort, imitant en cela le grand apôtre saint Paul, le modèle des missionnaires.

Ainsi devons-nous être magnanimes et intrépides dans le service de Dieu, pour avancer dans la perfection et pour être capables de faire de grandes choses. Sans le don de force, on ne fait pas de progrès notables dans la vie spirituelle. La mortification et l'oraison, qui en sont les prin­cipaux exercices, demandent une généreuse détermination à passer par­dessus toutes les difficultés qui se rencontrent dans la voie de l'esprit, si opposée à nos inclinations naturelles.

Les martyrs tiennent le premier rang entre les héros du christianisme, parce que la force se manifeste mieux dans la souffrance que dans l'ac­tion.

L'action développe et élève la nature, la souffrance lui est toute con­traire.

Le beau spectacle de la force des martyrs a conquis toute la terre à l'Eglise.

IIIe POINT: Le vice contraire à la force. - C'est la timidité ou la crainte humaine, et une certaine lâcheté naturelle qui vient de l'amour de notre propre excellence et de nos commodités. Ces faiblesses nous arrêtent dans nos entreprises et nous font fuir à la vue de l'objection et de la peine.

Le respect humain arrête toutes nos bonnes intentions et détruit la vie spirituelle en nous. On ne saurait dire tout le tort qu'il nous fait. Quelqu'un aura dessein de parler des choses spirituelles, de garder la règle du silence ou quelque autre règle, de faire quelque acte de mortifi­cation; cependant, s'il vient à se rencontrer avec tels et tels, il n'aura pas le courage d'exécuter sa bonne résolution bien qu'il sache qu'il aura en­suite un sensible regret d'y avoir manqué. Voilà d'un côté notre règle et l'intérêt de Dieu, et de l'autre, la satisfaction d'un tel, la crainte de lui déplaire. Nous balançons ces deux considérations, et la dernière l'em­porte. Quelle infidélité! quelle lâcheté! C'est ce que nous faisons tous les jours. Y a-t-il rien qui marque mieux notre peu de vertu et le grand em­pire que le respect humain a sur nous? C'est pour cela que Dieu nous dé­laisse, qu'il retire ses grâces, et que nous tombons ensuite insensible­ment en de grandes misères.

C'est ainsi que la prudence humaine empêche souvent le bien que les supérieurs peuvent faire. Ils écoutent cette prudence plutôt que d'agir fortement dans l'esprit de foi.

Résolutions. - Bon Maître, donnez-moi la grâce d'avoir faim et soif de la justice. Animé par cette soif et soutenu par la force du Saint-Esprit, je me mettrai à l'œuvre pour faire ou souffrir de grandes choses, selon vo­tre divine volonté. Cœur Sacré de Jésus, faites descendre sur mon cœur quelques rayons de votre force.

Colloque avec le Sacré-Cœur.

21 Mai
Les dons du Saint-Esprit:
la crainte de Dieu

Verba sapientium sicut stimuli, et qua­si clavi in altum defixi, quae per magistro­rum consilium data sunt a pastore uno. His amplius, fili mi, ne requiras. Faciendi plures libros nulla est finis: frequensque meditatio carnis afflictio est. Finem lo­quendi pariter omnes audiamus: Deum time et mandata ejus observa: hoc est enim omnis homo (Eccl., 12, 11).

Les paroles des sages sont comme des aiguillons et des avertissements affichés en haut lieu, préparés par le pasteur en son conseil. Ne cherche pas plus loin, mon fils. On ne finirait pas d'écrire des li­vres et trop de réflexion fatigue. Enten­dons tous ce dernier avis: Crains Dieu et observe ses volontés: car c'est là tout l'homme (Eccl., 12, 11).

1er Prélude. Ce conseil résume tout: Crains Dieu et observe sa loi.

2e Prélude. Seigneur Jésus, vous avez voulu que votre Cœur fût rempli de la crainte filiale, communiquez-la à mon cœur.

Ier POINT: La crainte de Dieu et ses effets. - Le don de crainte de Dieu est une disposition habituelle que le Saint-Esprit met dans l'âme pour la tenir dans le respect devant la majesté de Dieu et dans la dépendance et la soumission à ses volontés, l'éloignant de tout ce qui peut déplaire à Dieu.

Ce don est le fondement et la base de tous les autres, parce que la pre­mière démarche dans la voie de Dieu est la fuite du mal, laquelle appar­tient à ce don. La crainte met sur le chemin de la sagesse, mais la sagesse à son tour perfectionne la crainte en la rendant filiale et amoureuse.

Notre-Seigneur n'avait pas besoin de la crainte, parce qu'il n'avait rien à redouter, ni le péché, ni le jugement, mais il a voulu en être rem­pli pour la déverser dans nos cœurs.

Les effets de ce don sont d'inspirer à l'âme, premièrement une conti­nuelle retenue, un saint tremblement ou un profond anéantissement de­vant Dieu; secondement, une extrême horreur des moindres offenses de Dieu et une constante résolution d'en éviter toutes les occasions; troisiè­mement une humble confusion de toute faute où l'on tombe; quatrième­ment, une soigneuse vigilance à refréner les inclinations déréglées de l'appétit, de fréquents retours sur soi-même pour reconnaître l'état de son intérieur et voir ce qui s'y passe relativement au service de Dieu.

IIe POINT: La délicatesse de conscience. - C'est une grande illusion de penser comme font quelques-uns, qu'après avoir fait une confession générale, il n'est pas nécessaire d'être si scrupuleux à éviter ensuite les pé­chés les plus légers, les moindres imperfections, les plus petits dérègle­ments du cœur, les premiers mouvements. Ceux qui en usent ainsi pour eux-mêmes, par un secret désespoir d'une plus grande perfection, inspi­rent d'ordinaire aux autres les mêmes sentiments et tiennent cette con­duite large à l'égard des âmes qu'ils dirigent, en quoi ils se trompent ex­trêmement.

Il faut avoir une telle délicatesse de conscience, une si grande exactitu­de, qu'on ne se pardonne pas la moindre faute et que l'on combatte, qu'on retranche jusqu'aux moindres dérèglements du cœur. Dieu méri­te qu'on le serve avec cette parfaite fidélité, et il nous présente sa grâce pour cela: nous y devons coopérer.

Jamais nous ne parviendrons à une parfaite pureté de cœur, si nous ne veillons tellement sur tous les mouvements de notre cœur et sur tou­tes nos pensées, qu'il ne nous échappe presque rien dont nous ne puis­sions rendre compte à Dieu, et qui ne tende à sa gloire; que dans l'espace de huit jours, par exemple, nous ne faisions que fort peu d'actions exté­rieures ou d'actes intérieurs qui n'aient la grâce pour principe. Que si nous en faisons quelques autres, ce ne soit que par surprise et pour quel­ques moments, notre volonté étant si étroitement liée à Dieu, qu'elle les réprime dès l'instant qu'elle les aperçoit.

Dès qu'on s'aperçoit qu'on a commis une faute, il faut incontinent s'en repentir et produire un acte de contrition, de peur que ce péché n'empêche les grâces suivantes, ce qui arriverait si on n'en faisait pas pé­nitence.

Il ne faut pas toutefois pousser l'esprit de crainte jusqu'au scrupule. La crainte doit rester filiale et confiante.

IIIe POINT: Le vice opposé. - C'est un esprit d'orgueil et d'indépen­dance, qui fait qu'on ne veut suivre que ses inclinations et qu'on ne peut supporter aucun assujettissement, qu'on pèche sans scrupule et qu'on ne tient aucun compte des petites fautes; que l'on paraît devant Dieu avec peu de respect, qu'on méprise ses inspirations, qu'on néglige les occa­sions qui se présentent de pratiquer la vertu et que l'on vit dans le relâ­chement et dans la tiédeur.

On dit qu'une pensée inutile, qu'une parole qu'on a dite à la volée, qu'une action qu'on a faite sans diriger son intention, c'est peu de cho­se. Cela serait vrai si nous étions dans un état purement naturel; mais ne sommes-nous pas élevés à un état surnaturel qui nous a été acquis par le sang précieux d'un Dieu; et chaque action de notre vie n'a-t-elle pas ses conséquences éternelles, dans la possession ou la privation d'un degré de gloire? Nous faisons tous les jours par notre négligence des pertes incon­cevables.

Le chemin de la tiédeur est infiniment dangereux. Dieu souffre pen­dant un temps les péchés que l'on commet sans scrupule; mais si l'on y persévère, il arrive, par un juste châtiment de la justice divine, ou que l'on tombe dans un péché manifestement mortel, ou qu'on se trouve en­veloppé dans quelque fâcheuse affaire que Dieu permet pour nous corri­ger.

Les jugements de Dieu sont sévères. Nous ayant appelés à une haute perfection et nous ayant attendus en vain, il nous ôte les grâces qu'il nous avait données et nous prive de celles qu'il nous avait préparées.

Résolutions. - Seigneur, pénétrez mon cœur et mes sens de votre sain­te crainte. Divin Cœur de Jésus, vous débordiez de cette crainte, qui ne vous était pas nécessaire; versez-la abondamment dans mon cœur. Pardonnez-moi tous mes manquements passés à cette crainte salutaire. Guérissez-moi de ma témérité et de ma tiédeur.

Colloque avec le Sacré-Cœur.

22 Mai
Le fruits du Saint-Esprit:
la charité

Fructus autem Spiritus est: caritas, gaudium, pax, patientia, benignitas, bo­nitas, longanimitas, mansuetudo, fades, modestia, continentia, castitas. Adversus hujusmodi non est lex (ad Gal., 5, 22).

Le fruit du Saint-Esprit est la charité, la joie, la paix, la patience, la bénignité, la bonté, la longanimité, la mansuétude, la fidélité, la modestie, la continence, la chasteté. Ceux qui vivent ainsi n'ont rien à craindre de la loi (aux Gal., 5, 22).

1er Prélude. Le fruit principal du Saint-Esprit est la charité, qui est répandue dans nos cœurs par l'Esprit-Saint (aux Rom., 5, 5); mais cette charité est paisible, joyeuse, patiente et douce.

2e Prélude. Faites descendre, Seigneur, de votre Cœur dans le mien un rayon de vo­tre charité.

Ier POINT: Les fruits du Saint-Esprit en général. - Il arrive aux vertus ce qui arrive aux arbres. Comme ceux-ci portent des fruits qui, quand ils sont venus à leur maturité, n'ont plus d'aigreur, mais sont doux et d'une agréable saveur, de même quand les actes de vertu en sont venus à une certaine maturité, ils se font avec plaisir et on y trouve un goût délicieux. Alors ces actes de vertu, inspirés par le Saint-Esprit, se nomment fruits du Saint-Esprit, et certaines vertus les produisent avec une telle perfection et une telle suavité, qu'on les nomme béatitudes.

Ceux qui tendent à la perfection par la voie des pratiques et des actes méthodiques, sans s'abandonner entièrement à la conduite du Saint­-Esprit, n'ont jamais cette douceur et comme cette maturité de la vertu; ils sentent toujours de la difficulté et des répugnances; ils ont toujours à combattre et souvent sont vaincus et font des fautes, au lieu que ceux qui marchent sous la direction du Saint-Esprit dans la voie du recueillement simple, pratiquent le bien avec une ferveur et une joie dignes du Saint­-Esprit.

D'où il suit que les âmes tièdes ont deux fois plus de peine dans la pra­tique de la vertu que les ferventes qui s'y adonnent tout de bon avec la joie du Saint-Esprit.

IIe POINT: La charité est le don des dons. - La charité est comme l'uni­que fruit du Saint-Esprit. Saint Paul dit aux Galates: «Le fruit de l'Esprit est la charité, la paix, la joie, etc.». En énumérant les douze fruits, il les réunit en un, car il ne dit pas «les fruits du Saint-Esprit sont…» mais. «Le fruit du Saint-Esprit est la charité, etc.». Or voici le mystère de cette façon de parler: «La charité de Dieu est répandue en nos cœurs par le Saint-Esprit, qui nous est donné» (Rom., 5, 5).

La charité est comme le fruit unique, qui a une infinité d'excellentes propriétés, que l'on peut énumérer à sa suite.

Saint Paul ne veut donc pas dire autre chose sinon que le fruit du Saint-Esprit est la charité, laquelle est joyeuse, paisible, patiente, béni­gne, bonne, longanime, douce, fidèle, modeste, continente, chaste; c'est-à-dire que le divin amour nous donne une joie intérieure avec une grande paix du cœur, qui se conserve parmi les adversités par la patience, et qui nous rend gracieux et bénins à secourir le prochain par une bonté cordiale envers lui, bonté qui n'est point variable et inconstante, mais longanime et toujours loyale, et qui est accompagnée de simplicité, de mo­destie, d'une continence opposée à tous les excès et d'une soigneuse chasteté.

N'est-ce pas le même don de charité, si fécond en fruits, que Saint Paul exalte encore quand il dit aux Corinthiens (1 ad Cor., 13): «La cha­rité est patiente, elle est bénigne; elle n'est pas envieuse, malveillante, orgueilleuse, égoïste, irascible, c'est-à-dire encore qu'elle est paisible, douce, patiente et bonne».

Oui, elle est bien le fruit par excellence du Saint Esprit.

IIIe POINT: Les qualités de la charité. - La charité a le premier rang parmi les fruits du Saint-Esprit, parce qu'elle ressemble le plus au Saint­Esprit, qui est l'amour personnel. Elle est la première condition de la sainteté. Comme le remarque Saint Paul aux Corinthiens: «Quand j'au­rais tous les talents et beaucoup de vertus, si je n'ai pas la charité, je ne suis rien». C'est la charité surtout que Dieu demande de nous. La chari­té, c'est la sainteté.

Le moindre degré de charité est préférable aux richesses, à la science, à la puissance.

C'est la charité qui produit la félicité au ciel. Si nous perdons l'occa­sion de faire chaque jour des actes de charité, nous perdons des degrés infinis de félicité au ciel.

Demandons au Cœur de Jésus de nous faire avancer dans la charité. Comme vertu, elle nous rend obéissants aux commandements de Dieu, à ses volontés, à ses conseils et inspirations. - Comme don, elle nous rend souples et maniables aux inspirations intérieures. Elle com­prend tous les dons, elle en est le lien et la force. - Comme fruit, elle nous donne un goût et un plaisir extrême en la pratique de la vie dévote qui se manifeste par tous les fruits. - Comme béatitude elle nous fait prendre goût aux sacrifices, aux humiliations pour le règne du Sauveur et pour le salut des âmes. Elle se nourrit surtout de la méditation de la Passion et du Sacré-Cœur.

Résolutions. - Divin Cœur de Jésus, donnez-moi un accroissement de charité. Je sais que votre amour amène avec lui les dons et les fruits du Saint-Esprit. Vous ne refusez rien à ceux qui vous aiment, donnez moi la grâce de vous aimer tendrement et fidèlement.

Colloque avec le Sacré-Cœur.

23 Mai
Les fruits du Saint-Esprit:
paix et joie

Non enim est regnum Dei esca et po­tus: sed justitia et pax et gaudium in spiri­tu sancto: qui enim in hoc servit Christo, placet Deo et probatus est hominibus. Ita­que quae pacis surit sectemur; et quae ae­dificationis surit, in invicem custodiamus (ad Rom., 14, 17).

Le royaume de Dieu ne consiste pas dans les aliments, mais dans la justice, la paix et la joie du Saint-Esprit. Celui qui sert le christ dans ces dispositions plaît à Dieu et aux hommes. Aimons donc la paix et édifions-nous les uns les autres (aux Rom., 14, 17).

1er Prélude. La paix et la joie du Saint-Esprit sont des fruits précieux pour les com­munautés et pour les âmes.

2e Prélude. Si j'abonde en charité pour Dieu et pour les âmes, la paix et la joie régne­ront dans mon cœur.

Ier POINT: La sainte joie au service de Dieu. - La charité ou l'amour fer­vent fait qu'on possède Dieu; la joie naît de la possession de Dieu, n'étant autre chose que le repos ou le contentement qui se trouve dans la jouissance du bien qu'on possède.

Notre-Seigneur lui-même nous a dit tout le prix de la sainte joie. Comme ses disciples revenaient de leurs courses apostoliques et se félici­taient de leurs succès, et des guérisons obtenues et des victoires sur le dé­mon, il leur dit: «Oui, réjouissez-vous et soyez dans l'allégresse, non pas cependant, à cause de ces succès, mais parce que vous êtes devenus les enfants de Dieu et que vos noms sont écrits dans le ciel»; et lui-même alors s'abandonna à une sainte allégresse - exultavit in spiritu sancto - et il exprima sa joie en disant: «Merci, mon Père, parce que vous avez ap­pelé ces âmes simples à vous connaître et à se réjouir en vous».

L'amitié de Dieu et l'ordre que met en notre âme la pratique de la vertu sont des sources de joie pure et de contentement surnaturel.

IIe POINT: La paix avec Dieu. - Il n'y a que Dieu dont la possession nous affermisse contre les troubles et les craintes, au lieu que la posses­sion des créatures cause mille appréhensions et mille inquiétudes. Qui possède Dieu n'est troublé de rien, parce que rien des biens créés ne peut nous suffire, ni nous contenter pleinement. Videz la mer de ses eaux et mettez-y ensuite une goutte d'eau, remplirez-vous ce vide immense? Quand Dieu ferait à l'infini des créatures toujours plus parfaites, elles ne sauraient toutes ensemble remplir notre âme: elle a un vide qui ne peut être rempli que de Dieu.

C'est la possession de Dieu qui nous donne la paix de l'âme, mais ré­ciproquement c'est aussi la paix de l'âme qui favorise le règne de Dieu en nous et qui le rend pleinement maître de notre intérieur. Il faut que l'âme se maintienne dans la paix pour vivre dans la parfaite dépendance qu'elle doit avoir de Dieu.

Par la grâce sanctifiante, Dieu se fait dans l'âme comme une citadelle où il est retranché. Il peut sortir avec l'âme pour aller aux œuvres, aux études, aux conversations nécessaires, puis il rentre avec elle dans la paix de la forteresse. C'est ainsi que les saints sont aussi unis à Dieu dans l'action que dans l'oraison, et les plus fâcheux accidents ne les jettent point dans le trouble. Ils possèdent toujours la paix, parce qu'ils possè­dent toujours le Dieu de paix.

La paix avec Dieu est surtout assurée par les vertus d'obéissance, de régularité, de mortification. quand la chair, la volonté propre et les con­cupiscences sont maintenues dans la soumission, les causes de trouble sont écartées.

IIIe POINT: La paix avec le prochain. - Le défaut de la paix que nous devons avoir les uns avec les autres est la source d'où procèdent la plu­part des souffrances qui affligent le monde. L'ambition, l'avidité, la su­sceptibilité, le désir des honneurs et des prééminences ruinent les âmes en détruisant la paix. Le remède est dans la charité, qui est douce, pa­tiente, bienfaisante, qui rejette l'orgueil, l'ambition, la cupidité.

Notre-Seigneur nous a donné cette paix en nous montrant l'exemple de la charité, de la douceur, de l'humilité et du sacrifice. Il est venu com­me le Prince de la paix. Les anges à sa naissance ont chanté le bienfait de la paix: Pax hominibus bonae voluntatis.

La paix est dans l'union avec nos frères, que Notre-Seigneur nous a tant recommandée. Cette union a pour type suprême l'unité divine dans la sainte Trinité! Notre-Seigneur en priant pour nous disait à son Père: «Faites qu'ils soient un comme nous sommes un; faites qu'ils soient un en nous».

Saint Paul, pour exprimer son amour de l'union et de la paix disait: «Je me suis fait tout à tous: je ris avec ceux qui rient et je pleure avec ceux qui pleurent» (Rom., 12, 19). - «Autant que vous pouvez, disait-il, ayez la paix avec tous» (Rom., 12, 18).

Le salut quotidien de Jésus n'était-il pas: «Pax vobis, la paix soit avec vous!».

Résolutions. - Paix et joie, c'est le fruit de la conscience pure, le fruit de l'état de grâce, le fruit de la charité et de l'habitation du Saint-Esprit en nous. Je veillerai à la pureté de ma conscience en évitant le péché vé­niel, et si j'ai la paix avec Dieu, je l'aurai facilement avec le prochain.

Colloque avec le Sacré-Cœur.

24 Mai
Les fruits du Saint-Esprit:
patience, bénignité, bonté

Caritas patiens est, benigna est: caritas non aemulatur, non agit perperam, non inflatur, non est ambitiosa; non quaerit quae sua surît, non irritatur, non cogitat malum… (1 ad Cor., 13, 4).

La charité est patiente, elle est bénigne: la charité n'est pas envieuse, malfaisante, altière, ambitieuse; elle ne cherche pas ses avantages, elle ne s'emporte pas et ne pense pas le mal (1 aux Cor., 13, 4).

1er Prélude. La patience et la bonté dérivent de la charité, qui est le don et le fruit par excellence.

2e Prélude. Seigneur, mettez en mon cœur la charité qui animait le vôtre, elle m'inspirera la patience et la bonté.

Ier POINT: La patience. -Le propre de la vertu de patience est de mo­dérer les excès de la tristesse, comme la douceur tempère les mouve­ments de la colère. Ces deux vertus sont des vertus de combat. Elles ne remportent la victoire que par des efforts violents et non sans peine; mais quand la patience et la douceur sont les fruits du Saint-Esprit, elles ran­gent leurs ennemis dans le devoir sans combat; ou si elles combattent c'est sans difficultés, c'est avec plaisir. L'homme patient voit avec joie les objets capables de causer de la tristesse aux autres. Ainsi les martyrs se réjouissent à la nouvelle des persécutions et à la vue des supplices.

C'est parce que la charité a mis dans leur cœur le désir d'imiter Notre-Seigneur, de réparer la gloire de Dieu outragée par les pécheurs et de sauver les âmes.

Notre-Seigneur a porté sa croix avec une patience joyeuse. Les apô­tres s'en allaient joyeux, s'estimant heureux d'avoir eu à souffrir des in­jures pour le nom de Jésus.

La patience devient facile et douce à celui qui aime Jésus et qui aime le prochain. C'est une floraison de la charité.

IIe POINT: La bénignité. - La bénignité et la bonté regardent le bien que l'on fait au prochain. La bonté est l'inclination qui porte à obliger les autres et à leur communiquer ce qu'on a. - La bénignité consiste en la manière aimable, douce et gracieuse d'obliger les autres, en le faisant volontiers, cordialement, avec joie, sans ressentir la difficulté que ressent celui qui a la bénignité seulement en qualité de vertu, et non pas encore en qualité de fruit du Saint-Esprit.

Notre-Seigneur est souverainement riche en bénignité comme en tous les fruits de l'Esprit-Saint. Saint Paul n'a pas vécu avec lui comme les autres apôtres; il l'a entrevu seulement à la porte de Damas, et il a en­tendu les récits des autres. Il exalte la bénignité et la bonne grâce de Notre-Seigneur. «La grâce de notre Dieu sauveur s'est manifestée à tous les hommes», dit-il à Tite. - «La bénignité et l'humanité de notre Dieu sauveur s'est manifestée à nous» (Tite, 2, 11 et 3, 4).

La bénignité, comme la douceur et la bonne foi, sont les ornements et le reflet des vertus évangéliques: Ut doctrinam salvatoris nostri Dei ornent in omnibus (ad Titum, 2, 10). La bénignité est comme la fleur et l'ornement de la charité. Elle manifeste sur les lèvres et sur le visage la bonté qui rè­gne dans le cœur. Elle est le sourire de la charité. Elle aide beaucoup à l'édification et à l'apostolat.

C'est par sa bénignité comme par ses bienfaits que Notre-Seigneur at­tirait tout le peuple à lui.

La bénignité est la charme de la sainteté. C'est elle qui donne aux âmes saintes et bonnes ce doux sourire qui leur gagne les cœurs et qui fait aimer la vertu.

C'est par leur bénignité surtout et par leur douceur que les saints sont aimables à Dieu et aux hommes, comme Moïse: Dilectus Deo et hominibus.

IIIe POINT: La bonté. - La bonté nous incline à obliger les autres et à leur communiquer ce que nous avons.

Notre-Seigneur a passé en faisant le bien parce qu'il est souveraine­ment bon. Il donnait à tous ses conseils, ses soins, ses secours; c'était l'inclination de son cœur, et il se donnait lui-même pour notre rançon.

Saint Paul, inspiré par l'esprit de Jésus, disait: «Je dépenserai tout ce que j'ai et je me donnerai moi-même; je voudrais être anathème pour mes frères».

Les bonnes œuvres sont le caractère même de la vie chrétienne. Les chrétiens ont appris de Notre-Seigneur à pratiquer les œuvres de miséri­corde spirituelle et de miséricorde corporelle. Ils seront jugés sur leur bonté, sur leurs bonnes œuvres. «La foi sans les bonnes œuvres, dit saint Jacques, est une foi morte».

C'est un précepte fondamental pour tous les chrétiens. C'est leur ca­ractère propre. C'est la manifestation du règne de la grâce dans une âme. Mais pour ceux qui abondent en grâce; pour ceux qui sont très unis au Saint-Esprit et qui possèdent en leur cœur le don d'une charité vive et agissante, la bonté est chez eux un fruit surnaturel de la charité et du Saint-Esprit. Ils inclinent à toutes les bonnes œuvres et à toutes les manifestations de la charité envers le prochain. Leur cœur devient une source de bonté et de bienveillance.

Résolutions. - Divin Cœur de Jésus, permettez que je puise en vous comme en leur source ces fruits de patience, de bénignité, de bonté. Vous nous avez dit dans Isaïe: «Vous tous qui avez faim et soif, venez, achetez sans argent cette eau et ces fruits; venez, buvez et mangez; vous recevrez gratuitement le vin et le miel…» (Is., 51). Je viens, Seigneur, donnez-moi ces fruits qui sont plus doux que le miel et le vin.

Colloque avec le Sacré-Cœur.

25 Mai
La bienheureuse Sophie-Madeleine Barat
1779-1865

Stabant autem omnes noti ejus a longe, et mulieres quae secutae eum erant a Ga­lilaea, haec videntes. Subsecutae autem milieres viderunt monumentum, et que­madmodum positum erat corpus ejus, et revertentes paraverunt aromata et un­guenta (S. Luc, 23, 49).

Les amis se tenaient au loin et les fem­mes qui l'avaient suivi depuis la Galilée regardaient. Ces femmes ayant suivi la sé­pulture virent le monument et comment on avait placé son corps, et revenant elles préparèrent des aromates et des parfums (S. Luc, 23, 49).

­1er Prélude. Comme les saintes femmes de l'évangile. Sophie Barat et ses filles suivent Notre-Seigneur depuis son apostolat jusqu'à l'ouverture de son Cœur.

2e Prélude. Par l'intercession de cette sainte âme, ô Jésus, donnez-moi la grâce de vous suivre dans une intime union.

Ier POINT: Union avec le Sacré-Cœur. - Sophie-Madeleine Barat fut une des âmes les plus dévouées au Sacré-Cœur au XIXe siècle et une de celles qui travaillèrent le plus à sa gloire.

C'est en 1800 que Sophie Barat, au sortir de la grande Révolution, pensa à former une nouvelle congrégation sous le vocable du Sacreé-Cœur, et destinée à pratiquer son culte et à le propager en formant les jeunes filles de bonne famille par une éducation dont la dévotion au Sacré-Cœur serait la base. Ce Cœur sacré. enseigné, aimé, servi, imité, devait être le centre d'où tout partirait et où tout aboutirait.

Le grain de sénevé est devenu un grand arbre et plus de cent maisons donnent «l'éducation du Sacré-Cœur» chez toutes les nations. Ces reli­gieuses s'appliquent, suivant la recommandation de la fondatrice, à «tourner ces jeunes cœurs vers le Cœur adorable de Jésus, leur faisant reconnaître dans cet aimable Cœur le centre et le foyer de cet amour ar­dent dont le Sauveur a brûlé pour les hommes».

La Mère Barat pratiquait et conseillait avant tout l'union au Sacré-Cœur. «La Supérieure, disait-elle, doit être la personne la plus intime­ment unie au Cœur de Jésus, afin de puiser dans cette source les lumiè­res et les grâces nécessaires pour elle-même et pour tous les membres de la Société». Le Sacré-Cœur était toute sa vie. Elle disait fréquemment: «O Cœur de Jésus, ma lumière, mon amour et ma vie, faites que je ne connaisse que vous, que je ne vive que de vous, en vous et par vous». Elle recommandait constamment à ses filles de vivre du divin Cœur: «Tenez-vous près de son Cœur. - Union perpétuelle ou au moins ten­dance fidèle au Cœur de Jésus. - Faites passer vos tristesses comme vos joies par le Cœur de Jésus; vous composerez ainsi le miel de votre per­fection».

IIe POINT: Apostolat de la prière. - Elle pratiquait et prêchait avec instance l'apostolat de la prière pour les âmes et pour le règne du Sacré-Cœur.

«Désormais, disait-elle, votre fonction sera l'oraison, et les âmes se sauveront par ce moyen en plus grand nombre que par l'action, croyez-­le».

Sa règle prescrit une heure d'oraison le matin devant le Saint­-Sacrement, et une demi-heure le soir.

«Priez la sainte Trinité, disait-elle, par le Cœur de Jésus. Ne dirait-on pas que dans ces temps malheureux Dieu ne bénit et ne se laisse vaincre qu'au nom de ce Cœur adorable?». Elle disait encore: «Pour que le règne de Notre-Seigneur arrive, recourez directement au Sacré-Cœur. Combien de conversions accordées par le Cœur de Jésus! Faites parve­nir vos prières à ce Cœur adorable par sa bien-aimée servante Marguerite-Marie. C'est de lui que découle cette huile qui se répand, éclaire, pénètre, guérit. - Vous ferez l'Heure sainte devant le Saint­-Sacrement, et chacune de vous s'acharnera à une âme jusqu'à ce qu'elle l'ait obtenue de Jésus».

Elle ajoutait: «A quel degré de perfection ne devons-nous pas attein­dre pour remplir cette sublime vocation? Mettons notre néant dans le Cœur de Jésus; il le ranimera, lui donnera son essence comme le fer dans le feu. Alors nous agirons avec une puissance sans bornes, sans li­mites; tout nous sera possible, même l'impossible».

IIIe POINT: Apostolat de l'immolation et de la réparation. - A l'apostolat de la prière, la Mère Barat joignait, avec un dévouement sans limites, celui de la croix, de la souffrance et de l'expiation.

Le Père de Ravignan, prêchant à la communauté du Sacré-Cœur, lui disait un jour: «Vous pouvez souffrir, cela console de tout». Ces paroles trouvèrent écho dans le cœur de la sainte supérieure qui disait, de son côté, à ses filles: «Nous aurions plus de repos chez les Carmélites; mais nous souffririons moins; c'est ce qui doit nous consoler de ne l'être pas. - Nous devons avoir la passion du sacrifice. Un torrent de crimes inon­de la terre. Voilà pourquoi la grande victime veut s'en adjoindre d'au­tres. Heureuses celles qui ont mérité d'être choisies pour se dévouer à cette grande fonction en union avec le Cœur de Jésus! C'est la seule cho­se qui puisse adoucir la peine de l'exil».

Elle faisait partager ces sentiments à ses filles. Mme Duchesne qui fut en Amérique le François-Xavier du Sacré-Cœur, écrivait: «Je sens que le repos n'est pas pour cette vie. Il faut avoir le corps à la gêne et le cœur sous le pressoir. Si je puis servir à la moindre petite œuvre pour la gloire du Sacré-Cœur, je consens à vieillir sans succès, sans reconnaissance».

Résolutions. - Amour et immolation au Sacré-Cœur, c'est tout le pro­gramme de la sainte fondatrice des Dames du Sacré-Cœur, comme c'était le programme de Marguerite-Marie. C'est ma vocation, c'est mon devoir, puisque j'ai entendu l'appel que le Sacré-Cœur adresse à ses amis. Il faut que je fasse toutes mes actions dans cet esprit.

Colloque avec le Sacré-Cœur.

26 Mai
Saint Philippe de Neri

Tu autem, o homo Dei, haec fuge (cu­piditatem); sectare vero justitiam pieta­tem, fidem, caritatem, patientiam, man­suetudinem. Certa bonum certamen fi­dei; apprehende vitam aeternam, in qua vocatus es, et confessus bonum confessio­nem coram multis testibus (Ep., 1 ad Tim., 6, 11).

Mais toi, homme de Dieu, fuis toute concupiscence; pratique la justice, la pié­té, la foi, la charité, la patience, la dou­ceur. Combats le bon combat de la foi, et tu obtiendras la vie éternelle à laquelle tu es appelé, après que tu auras confessé la foi devant un grand nombre de témoins (Ep., à Tim., 6, 11).

1er Prélude. Cette description du saint prêtre, adressée par saint Paul à Timothée, correspond admirablement à la vie de saint Philippe de Néri.

2e Prélude. Saint apôtre de Rome, priez pour moi, priez pour le Pape.

Ier POINT: Les vertus chrétiennes. - Dès l'âge de cinq ans, Philippe obéit à ses parents avec la plus grande ponctualité. Il est patient dans les maladies. Après sa première communion il passe chaque jour de longues heures à l'église. Son bonheur est de prier et d'entendre la parole de Dieu. On admire sa ferveur, son humilité, sa douceur, son affabilité. Tous ceux qui le connaissent aiment le bon Philippe.

Devenu précepteur dans une famille de Florentins, il édifie tout le monde par sa sainteté. Il ne fait qu'un repas par jour, ordinairement avec du pain et de l'eau. Il repousse avec horreur des jeunes gens qui voulaient le séduire.

Etudiant à Rome, il vit pauvrement. Il visite souvent les basiliques et les catacombes, il fonde la confrérie de la Sainte-Trinité pour assister les pèlerins. Il voulait demeurer laïque par humilité! Il accepte le sacerdoce par obéissance à son confesseur.

Devenu prêtre, il se dépense pour le bien des âmes. Il catéchise les en­fants, il passe des journées au confessionnal.

Il fonde l'Oratoire pour perpétuer ses œuvres. Son idéal est toujours l'humilité et l'obéissance à l'exemple du Sauveur.

IIe POINT: Vie d'amour. - Comme ce cher saint aime Notre-Seigneur et combien il en est aimé! Jésus lui fait goûter de si grandes douceurs dans son oraison, qu'il s'écrie: «C'en est assez, Seigneur, je me meurs d'amour, si vous ne me secourez».

On l'entendait aussi dire souvent: «O mon Dieu! puisque vous êtes si aimable, pourquoi ne m'avez-vous donné qu'un cœur pour vous aimer! Pourquoi du moins, ce cœur est-il si petit et si étroit!».

L'amour divin agissait sur lui avec tant d'impétuosité, qu'il en ressen­tait de violentes palpitations de cœur. Il arriva, dit son biographe, que l'amour de Dieu dilata un jour son cœur de manière à rompre les carti­lages qui joignent les côtes du côté gauche ce qui donna plus de jeu au cœur et aux grands vaisseaux. Il resta dans cet état pendant les cinquan­te dernières années de sa vie.

Au jour de sa première messe, son âme reçut des consolations extraor­dinaires. Il tremblait de tout son corps et dut s'appuyer à l'autel pour se soutenir.

Il célébra toujours la sainte messe avec une extrême ferveur. Souvent il avait des extases à l'autel ce qui prolongeait sa messe assez longtemps. Dans l'oraison aussi, il fut souvent favorisé de ravissements. Son corps s'élevait de terre et son visage rayonnait de lumière. C'était com­me un séraphin sur la terre.

Combien il aimait aussi la sainte Vierge! Elle lui apparut et le guérit une fois d'une grave maladie.

Quand il était près de mourir, comme le cardinal Borromee lui appor­tait le saint viatique, il s'écria en versant des larmes: «Voici mon amour! Il vient à moi celui qui fait les délices de mon âme. Donnez-moi promp­tement mon amour!».

IIIe POINT: Vie de réparation. - Le cher saint aimait la pénitence. Il s'était fait une loi de penser chaque jour aux souffrances de Jésus-Christ et de méditer sur les péchés et l'ingratitude des hommes. C'était une âme réparatrice. Souvent, en jetant les yeux sur un crucifix, il versait un torrent de larmes, il pleurait les péchés de ceux qui se confessaient à lui.

Avant son sacerdoce, il avait mené à Rome la vie d'un ermite, en pra­tiquant toutes sortes de pénitences et de macérations.

Il souffrait particulièrement quand il reconnaissait dans ses pénitents des âmes qui n'étaient pas chastes ou qui n'étaient pas sincères.

Il montra la plus admirable patience dans les épreuves. On tourna en ridicule sa piété et sa manière de célébrer la messe. On le calomnia à cause des audiences qu'il donnait à des pécheurs pour les convertir.

On l'accusa auprès du cardinal Vicaire d'être un ambitieux qui re­cherchait la popularité, et il fut privé pour un temps de pouvoir célébrer la messe et d'entendre les confessions. Il fut même menacé de la prison, mais il souffrit tout cela avec tant d'humilité qu'il eut bien vite reconquis l'estime de tous.

La vue des pécheurs scandaleux le touchait si vivement, qu'il n'était plus maître de retenir ses larmes.

Il avait d'avance l'esprit de la dévotion au Sacré-Cœur.

Résolution. - Grand saint, obtenez-moi par vos prières les vertus qui vous ont caractérisé: l'humilité qui sied si bien à mes misères, l'obéis­sance à mes supérieurs et à mon directeur, l'ardent amour de Jésus, de la croix, de l'Eucharistie, la haine du péché, le zèle pour la réparation. Rendez-moi fidèle à mes pratiques quotidiennes d'amour et de répara­tion.

Colloque avec saint Philippe de Néri.

26 Mai
La veille de la Pentecôte

Si diligitis me, mandata mea servate. Et ego rogabo Patrem, et alium Paracli­tum dabit vobis, ut maneat vobiscum in aeternum, Spiritum veritatis, quem mun­dus non potest accipere, quia non videt eum nec scit eum, vos autem cognoscetis eum, quia apud vos manebit et in vobis erit (S. Joan, 14, 15).

Si vous m'aimez, gardez mes comman­dements. Et je prierai mon Père et il vous donnera un autre consolateur, afin qu'il demeure éternellement avec vous, l'Esprit de vérité que le monde ne peut recevoir parce qu'il ne le voit pas et ne le connaît pas; mais pour vous, vous le connaîtrez, parce qu'il demeurera avec vous et qu'il sera en vous (S. Jean, 14, 15).

1er Prélude. Notre-Seigneur veut nous donner demain son esprit d'amour, son esprit de force et de vérité, mais il demande que nos cœurs soient préparés.

2e Prélude. Aidez-moi, Seigneur, à écarter les obstacles: le péché, la dissipation, l'at­tachement aux créatures.

Ier POINT: L'Esprit-Saint nous apportera la science, la force et l'amour, mais il demande certaines dispositions. - Dans son discours après la Cène, Notre­-Seigneur avait annoncé suffisamment à ses apôtres sa passion et sa résur­rection. Ils ne le comprenaient guère. Il leur expliqua alors longuement quels seraient les dons et les fruits de l'Esprit-Saint qu'il voulait leur en­voyer et quelles étaient les conditions pour le bien recevoir. Ces conseils s'appliquent à nous aujourd'hui.

Nous nous sommes unis à Notre-Seigneur selon les mystères de la li­turgie. A Noël, il est né en nous; au temps de sa Passion, il nous a incor­poré ses souffrances et ses réparations. A Pâques, il nous a communiqué sa vie nouvelle, dégagée de la terre. Avec l'ascension, il nous a formés à la vie céleste. Jusque là, il se forme en nous: donec formetur Christus in vobis (ad Gal., 4, 19).

Maintenant, c'est l'Esprit-Saint, qui va venir en nous avec sa lumière, sa force et son feu divin. L'Esprit de vérité continuera et complètera les enseignements de Notre-Seigneur; - l'Esprit de force ou de consola­tion nous encouragera et nous fortifiera dans les épreuves de la vie; - l'Esprit d'amour nous unira fermement à Notre-Seigneur et à son Père. Mais il nous demande de nous préparer et de correspondre à ces grandes grâces.

«Observez mes commandements», dit-il. C'est-à-dire, écartons le pé­ché, l'attachement au péché, même véniel; mettons-nous dans la dispo­sition d'observer tous les commandements. Ecartons tout ce qui nous entraîne au péché: la recherche de nous-mêmes, de nos aises, de nos sa­tisfactions, la dissipation, la distraction.

L'Esprit-Saint va venir en nos âmes pour y apporter et entretenir la vie, comme la sève va du corps de la vigne dans ses branches; mais il faut que les branches soient attachées à la vigne et soigneusement émondées pour qu'elles donnent des fruits.

IIe POINT: L'union à Notre-Seigneur et le repentir. - Si la branche n'est pas attachée à la vigne, elle meurt. Les vignerons émondent les branches pour qu'elles portent plus de fruit (Jean, 15). Le vigneron, c'est le Père céleste. Toute branche qui ne fructifiera pas en Notre-Seigneur, il l'émondera et si elle reste encore stérile, il la retranchera, il la rejettera loin de lui; privée de la grâce, elle tombera dans la mort-spirituelle. Tou­tes celles qui promettent du fruit, il les émondera assidûment, ils les pu­rifiera de leurs penchants dépravés, afin qu'elles portent encore plus de fruit.

Quant à nous, Notre-Seigneur nous dit comme à ses apôtres: Vous êtes déjà émondés et purifiés par les grâces que les mystères de ma vie et de ma résurrection vous ont apportées; mais afin que cette préparation soit de plus en plus parfaite, unissez-vous intimement à moi, demeurez en moi, et moi je demeurerai en vous et je vous vivifierai par l'Esprit­-Saint que je vous communiquerai et qui sera la sève de votre âme. - Réforme de la vie et union, ce n'est pas tout, il faut encore un commen­cement d'amour effectif et pratique, pour recevoir l'esprit d'amour. C'est à ceux qui l'aiment que Notre-Seigneur a promis son esprit: Si dili­gitis me, rogabo Patrem et alium Paraclitum dabit vobis (S. Jean, 14, 17).

IIIe POINT: L'amour pour Notre-Seigneur. - C'est à ceux qui vont à Notre-Seigneur avec empressement, confiance et amour, qu'il donne son Esprit. Les âmes dissipées ne peuvent pas le recevoir: quem mundus non potest accipere. C'est à ceux qui observent sa loi avec amour: Qui habet mandata mea et servat ea, ille est qui diligit me. Excitons-nous donc aujourd'hui à son amour. Rappelons-nous ce qu'il a fait pour nous. «Comme son Père nous a aimés, lui aussi nous a aimés». Il s'est fait homme pour nous, il a donné sa vie pour nous; il nous a élevés jusqu'à une union intime avec lui et nous traite comme ses amis les plus chers. Répondons à son amour par le nôtre. Le moyen de persévérer dans son amour, c'est l'obéissance filiale à ses préceptes. «Si vous gardez mes commandements, vous demeurerez dans mon amour, comme moi­-même j'ai gardé les commandements de mon Père et je demeure dans son amour». L'amour sans les œuvres est une illusion. - Et parmi ses préceptes, Notre-Seigneur nous recommande surtout la charité pour le prochain, c'est son commandement préféré.

Faisons un retour sur nous-mêmes. Connaissons-nous assez l'Esprit­Saint, ce qu'il est dans l'adorable Trinité, les dons qu'il apporte, le be­soin que nous avons de lui? Le désirons-nous avec une ardeur qui répon­de au besoin que nous avons de lui et aux avantages que nous pouvons attendre de sa venue? Sommes-nous préparés à le recevoir par un désir sincère d'accomplir toute la loi avec un amour filial?

Résolution. - Venez, Esprit d'amour, du Cœur de Jésus, j'ai soif de vous recevoir, je ne puis plus vivre sans vous. Venez, je veux être docile. J'écouterai ce que vous me suggérerez. Venez et pardonnez-moi mes ré­sistances passées. Ma règle et l'union avec vous, voilà désormais ma vie. Colloque avec Notre-Seigneur.

27 Mai
Le jour de la Pentecôte

Sicut dilexit me Pater, et ego dilexi vos, manete in dilectione mea… Vos amici mei estis, si feceritis quae ego praecipio vobis. Jam non dicam vos servos, quia servus nescit quid faciat dominus ejus, vos autem dixi amicos, quia quaecumque audivi a Patre meo, nota feci vobis (S. Joan, 15, 9).

Je vous ai aimés, comme mon Père m'a aimé. Demeurez dans mon amour… Vous serez mes amis si vous observez mes commandements. Je ne vous appellerai plus désormais serviteurs, parce que le serviteur ne sait ce que fait son maître; mais je vous ai appelés mes amis, parce que je vous ai fait savoir tout ce que j'ai appris de mon Père (S. Jean, 15, 9).

1er Prélude. C'est l'esprit d'amour que Notre-Seigneur veut surtout nous donner au­jourd'hui pour que nous accomplissions ses commandements par amour.

2e Prélude. Seigneur, donnez-moi votre amour, afin que je sois généreux à votre ser­vice.

Ier POINT: Notre-Seigneur s'est servi de la comparaison de la vigne, pour mon­trer combien nous devons être unis à lui. - Au moment des adieux de Notre­-Seigneur à ses apôtres après la Cène, son Cœur débordait d'amour. Il leur expliqua comment il voulait rester uni avec eux par le lien de l'amour. Il se servit de la comparaison de la vigne. «Il faut, leur disait-il, que vous soyez vivifiés par l'Esprit-Saint, que je vous communiquerai. Il sera comme la sève de votre âme. Etant l'esprit d'amour, il vous unira à moi et moi à vous. Celui qui ne demeurera pas en moi, qui cessera de m'être uni par la charité, sera jeté dehors comme un sarment inutile. Persévérez dans mon amour. Comment ne seriez-vous pas dévoués à mon service, après ce que j'ai fait pour vous? - Comme mon Père m'a aimé de toute éternité, jusqu'à mettre en moi toutes ses complaisances et à me communiquer sa divinité et sa puissance, ainsi je vous ai aimés d'un amour ineffable; je me suis sacrifié pour vous, je vous ai traités comme mes amis les plus chers.

Répondez donc à mon amour par le vôtre; demeurez, persévérez dans cet amour, comme je demeure moi-même dans l'amour de mon Père. Gardez les commandements pour demeurer dans mon amour, comme moi-même j'ai gardé les commandements de mon Père et je demeure dans son amour. Si vous observez ces choses, ma joie demeurera en vous, non la fausse joie du monde, mais la joie pure, céleste, ineffable, que je fais goûter à toute âme qui m'est intimement unie par l'amour».

IIe POINT: Notre-Seigneur nous a aimés d'un amour éternel et il demande l'amour de retour. - C'est ainsi que Notre-Seigneur disposait ses disciples à recevoir son esprit d'amour. Pour nous disposer nous-mêmes, rappelons-nous son amour pour nous. Il est semblable à celui qui l'unit à son Père: Sicut dilexit me Pater, et ego dilexi vos. Il nous a aimés de toute éternité, il n'a eu en vue que notre bonheur. Son amour pour nous a été désintéressé jusqu'au sacrifice absolu de lui-même. Il a consacré sa vie tout entière à notre salut. Il est mort pour nous sur la croix: Majorem hac dilectionem nemo habet.

Ce qu'il nous demande, c'est un amour réciproque pour son Père et pour lui, qui nous ont aimés les premiers et qui veulent bien nous appe­ler leurs amis: Vos autem dixi amicos.

Notre amour doit se modeler sur le sien. Le sien fut obéissant à la vo­lonté de son Père, le nôtre doit se manifester par une obéissance entière, absolue, filiale à la loi divine. Il nous a aimés jusqu'à mourir pour nous, nous devons l'aimer jusqu'à mourir, s'il le faut, pour lui ou pour nos frè­res qui sont les siens. Notre amour doit être infatigable, dévoué et prêt à tous les sacrifices.

L'esprit d'amour qu'il nous donne aujourd'hui doit nous établir dans une intimité pleine de confiance avec lui, et dans une union puissante et féconde. Il ne nous a rien caché de ce que son Père lui a confié. Il nous a initiés à la connaissance de ses desseins qui ont tous pour a but le bon­heur des hommes.

IIIe POINT: Les effets et avantages de l'Esprit d'amour. - L'Esprit-Saint est un lien d'amour. De même qu'il unit Notre-Seigneur à son Père, il nous unit à lui et il veut nous unir entre nous. C'est le lien le plus étroit. Il fortifie en nous l'amour, pour le rendre obéissant et dévoué, de notre part, miséricordieux et généreux de la sienne.

Il est un lien d'amitié et de douce intimité. Il est la source de toute joie pure et véritable: Haec locutus sum vobis ut gaudium meum in vobis sit et gau­dium vestrum impleatur. Il est la source de vie, comme la sève pour les ar­bres et il nous rend féconds en fruits de salut.

Cette union nous ouvre le Cœur de Jésus et le dispose à nous accorder tout ce que nous demanderons: Quodcumque volueritis, petetis et fiet vobis. El­le attire sur nous des grâces de salut et la bénédiction sur nos travaux. Pouvons-nous concevoir rien de plus désirable que cette union, que cet amour?

Mais Notre-Seigneur lui-même désire nous donner cet amour, il a soif de nos cœurs, il frappe à notre porte. Ne le faisons pas attendre. Il a tout fait pour obtenir de nous un amour tendre et empressé. Il voudrait trouver dans notre amour un dédommagement pour l'ingratitude et l'indif­férence de bien des âmes, disposons-nous donc pour recevoir pleinement le don de son amour.

Résolutions. - Seigneur, donnez-moi aujourd'hui votre Esprit d'amour, afin que je vous demeure uni désormais comme le sarment à la vigne, que je vous serve avec fidélité et avec une affection toute filiale. je veux vous rendre amour pour amour, et comme un enfant dévoué vous obéir par amour et me faire une joie et un bonheur de faire votre vo­lonté.

Colloque avec Notre-Seigneur.

27 Mai
Les fruits du Saint-Esprit :
longanimité, douceur, fidélité

Dixit ergo Jésus ad duodecim: Num­quid et vos vultis abire? Respondit ergo ei Simon Petrus: Domine, ad quem ibimus? Verba vitae aeternae habes. Et nos credi­dimus et cognovimus quia tu es Christus Filius Dei (S. Joan, 6, 68).

Jésus dit donc aux douze: Est-ce que vous voulez aussi vous en aller? Mais Simon-Pierre répondit: Maître, à qui irions-nous? Vous avez les paroles de la vie éternelle. Et nous avons cru et recon­nu que vous êtes le Christ, Fils de Dieu (S. Jean, 6, 68).

1er Prélude. Saint Pierre est le modèle de la fidélité. Sa foi lui a valu son privilège d'inerrance pour lui et pour ses successeurs.

2e Prélude. Divin Cœur de Jésus, donnez-moi le courage, la douceur et la foi qui sont les fruits de votre esprit.

Ier POINT: La longanimité ou la persévérance. - Elle empêche l'ennui qui naît de l'attente des grâces ou des croix à porter ou du travail à accom­plir. Elle nous maintient dans le zèle, elle entretient le feu sacré. C'est une disposition spirituelle qui correspond au courage naturel, à l'activi­té, à l'endurance.

Les vierges folles ont manqué de longanimité. Les apôtres pensaient tous comme saint Pierre et saint Thomas: «Allons avec le Sauveur à Jé­rusalem et mourons avec lui, s'il le faut». C'était une générosité superfi­cielle et ils ont manqué de longanimité.

Saint Pierre faillit se décourager encore à Rome. Il voulait s'en aller, mais Notre-Seigneur est venu lui remettre au cœur le fruit de longani­mité. - Jésus apparaît: «Où allez-vous, Seigneur?» lui dit saint Pierre. - «Je vais à Rome pour être crucifié une seconde fois». - La parole di­vine porte son fruit et c'est un fruit de longanimité. Saint Pierre conti­nuera à travailler à Rome sans faiblesse et sans découragement, dût-il voir ses labeurs donner peu de résultats. Il persévérera jusqu'à la mort et sa récompense sera la fondation de l'Eglise romaine.

IIe POINT: La douceur. - L'esprit de douceur est le véritable esprit des disciples de Jésus-Christ. Dieu n'est-il pas tout amour? Dieu le Père est le père des miséricordes; Dieu le fils se nomme un agneau; Dieu le Saint-Esprit se montra sous la forme d'une colombe qui est la douceur même.

S'il y avait quelque chose de meilleur. Notre-Seigneur nous l'aurait dit, mais il ne nous donne que deux leçons à apprendre de lui: la man­suétude et l'humilité de cœur.

La douceur est comme le parfum de la vie de Notre-Seigneur. Il a été sujet à bien des contradictions, des critiques, des murmures. On l'a re­gardé comme un imposteur, un séditieux, un samaritain, un possédé du démon. On a pris des pierres pour le lapider. Il a tout supporté avec douceur en possédant son âme dans la paix.

La douceur donne un grand empire sur le cœur des hommes. Bien­heureux les hommes doux: ils posséderont la terre, c'est-à-dire qu'ils se­ront les maîtres des cœurs et toutes les volontés seront entre leurs mains.

Le patriarche Joseph, renvoyant ses frères d'Egypte en la maison de leur père, leur donna ce seul avis: «Ne vous courroucez pas en chemin». Suivons le même avis. Cette vie n'est qu'un acheminement à la vie bien­heureuse; ne nous courrouçons donc point en chemin les uns avec les au­tres. Marchons avec la troupe de nos frères et compagnons, doucement, paisiblement et aimablement.

C'est quand l'âme est en état de tranquillité et sans sujet de colère, qu'il faut faire provision de douceur et en bien prendre l'habitude. Mais par la vie d'union avec Notre-Seigneur et de fidélité aux grâces du Saint-Esprit, la douceur nous devient naturelle, elle est un fruit de la charité qui règne alors en nos cœurs.

La charité ardente nous fait doux et patients. Vivons donc sous la douce influence de l'Esprit-Saint, qui est l'esprit du Sacré-Cœur.

IIIe POINT: La foi ou la fidélité. - La foi, en qualité de fruit du Saint­Esprit est une certaine facilité à croire tout ce qui est de la créance des fi­dèles, avec la fermeté de s'y attacher.

Pour cela, il faut dans la volonté une pieuse affection qui incline l'en­tendement à croire ce qui lui est proposé.

Les juifs quoique convaincus par les miracles de Notre-Seigneur ne crurent point en lui, ayant l'entendement obscurci par la malice de leur volonté. Or, ce qui arriva aux juifs pour la substance de la foi, nous arri­ve souvent pour la perfection de la foi. Nous croyons, par exemple, à la divinité de Notre-Seigneur, mais nous ne concluons pas pratiquement à la nécessité de l'aimer, de le visiter dans l'Eucharistie et de vivre sous l'influence constante de sa grâce.

Nous croyons au Saint-Esprit, mais nous ne savons pas nous mettre pratiquement sous sa conduite. Avec l'esprit de foi, nous ferions des pro­grès constants et rapides dans toutes les vertus. Demandons à Notre­ Seigneur la foi pénétrante et parfaite qui nous fera vivre comme les an­ges en la présence de Dieu et à son service.

Cette foi pratique peut aussi s'appeler la fidélité. Elle vient du cœur et de la volonté plus que de l'esprit. elle est une récompense des âmes sim­ples et de la pureté de cœur qui écarte tout péché véniel.

Résolutions. - Divin Cœur de Jésus, donnez-moi cette foi simple, qui surnaturalise toute la vie; cette foi simple qui nous fait vivre en Dieu, en sa présence, en son amour et sous la conduite constante de son Esprit. Donnez-moi aussi la douceur de votre grâce et la longanimité des âmes fortes. Je viens, Seigneur, pour puiser ces eaux salutaires en votre Cœur, ouvrez-le moi.

Colloque avec le Sacré-Cœur.

28 Mai
Les fruits du Saint-Esprit:
modestie, tempérance, chasteté

Nox praecessit, dies autem appropin­quavit. Abjiciamus ergo opera tenebra­rum et induamur arma lucis. Sicut in die honeste ambulemus; non in comessationi­bus et ebrietatibus, non in cubilibus, et impudicitiis, non in contentione et aemu­latione: Sed induimini Dominum Jesum Christum, et carnis curam ne feceritis in desideriis (ad Rom., 13, 12).

La nuit est passée, le jour vient. Rejetons-donc les œuvres de ténèbres et revêtons-nous de l'armure du plein jour. Marchons honnêtement dans la lumière, non pas dans les festins et l'ivresse, ni dans les débauches secrètes, ni dans la dé­sunion et l'envie; mais revêtez-vous de Notre-Seigneur Jésus-Christ et ne suivez pas les convoitises de la chair (aux Rom., 13, 12).

1er Prélude. Revêtons-nous de Jésus-Christ, de son esprit de modestie, de tempéran­ce, de chasteté. Ce sera facile si notre cœur est bien épris d'amour pour lui.

2e Prélude. Donnez-moi, Seigneur, ces fruits qui mûrissent facilement dans un cœur fidèle à votre grâce et docile à la conduite de votre Esprit.

Ier POINT: La modestie. - La vertu de modestie règle tous les mouve­ments du corps, les gestes et les paroles. En tant que fruit du Saint-­Esprit, elle fait cela sans peine et comme naturellement; et de plus elle compose tous les mouvements intérieurs de l'âme, comme en la présence de Dieu.

Notre esprit est mobile, inquiet, dissipé. La modestie l'arrête, le mo­dère, et met l'âme dans une profonde paix, qui la dispose à devenir le séjour et le royaume de Dieu; le don de présence de Dieu suit bientôt le fruit de modestie. Le don de présence de Dieu est une haute lumière dans laquelle l'âme se voit devant Dieu et remarque tous ses mouve­ments intérieurs, tout ce qui se passe en elle, plus clairement que nous ne voyons les couleurs en plein midi.

La modestie nous est entièrement nécessaire, à cause de ses suites, qui sont le recueillement, la présence de Dieu, l'union avec Dieu; elle est la marque d'un véritable esprit religieux.

IIe POINT: La tempérance. - Les vertus de tempérance et de chasteté regardent les plaisirs du corps, répriment les illicites et modèrent ceux qui sont permis. Celle-là refrène l'affection désordonnée du boire et du manger, et empêche les excès qu'on y pourrait commettre. Celle-ci règle ou retranche l'usage des plaisirs de la chair.

Mais les fruits de tempérance et de chasteté dégagent tellement l'âme de l'amour de son corps, qu'elle n'en ressent presque plus les révoltes, le contenant sans peine dans la soumission.

Aimons à contempler la tempérance du divin Maître. Il vit à Nazareth de la vie la plus modeste des ouvriers. Il commence sa vie publique par un jeûne de quarante jours. Plusieurs fois pendant sa vie apostolique, il n'a pas le temps de manger et n'en a pas de souci.

Nous le voyons au puits de Jacob, absorbé par son dessein de conver­tir la Samaritaine. Ses apôtres lui offrent à manger. Il répond: «J'ai un repas plus pressant à faire, c'est de faire la volonté de mon Père».

Quelle était sa nourriture habituelle? du pain d'orge et du poisson sé­ché; c'est ce que portait pour les repas du Sauveur et des apôtres, l'en­fant dont les provisions ont été multipliées au bord du lac de Galilée.

Jésus partageait les modestes repas de ses apôtres. Après sa résurrec­tion, il leur prépare du poisson, du pain et du miel (S. Luc, 24).

Il recommande le jeûne à ses disciples (S. Mat., 6).

Au calvaire, il reçoit du vin mêlé de fiel pour se désaltérer.

Il manifeste partout ce fruit de la tempérance qu'il mettra en nos cœurs, si nous les préparons par la pureté de conscience et la ferveur.

IIIe POINT: La chasteté. - Le fruit de chasteté rend notre cœur tout incliné à l'unique amour de Notre-Seigneur et tout détaché des affec­tions terrestres.

La chasteté est le lis des vertus; elle rend les hommes presque égaux aux anges. On la nomme honnêteté, parce qu'elle est honorable; on l'appelle aussi la belle vertu. Elle est un des plus beaux ornements du ciel. Elle nous donne la facilité d'être tout à Dieu, de cœur, de corps et d'esprit.

Saint Paul nous dit: «Observez la sainteté sans laquelle personne ne verra Dieu» (Heb., 12, 14). Or, par la sainteté ici il entend la chasteté, comme le remarquent saint Jérôme et saint Chrysostome: «Nul ne verra Dieu sans la chasteté et la pureté de cœur». Bienheureux ceux qui ont le cœur pur, parce qu'ils verront Dieu, dit Notre-Seigneur.

Mais la chasteté est un don de Dieu. Personne ne peut être chaste si le Seigneur ne lui en fait la grâce. Prions donc et demandons cette belle vertu en esprit d'humilité. C'est par la prière qu'on l'obtient et qu'on la conserve.

Le jeûne et la mortification peuvent y aider, mais cela ne suffirait pas sans une humble prière.

Tenons-nous toujours près de Notre-Seigneur et méditons surtout les mystères de la Passion. Ils ont une influence particulière pour inspirer la chasteté.

Aimons la sainte Eucharistie, qui est un ferment de virginité.

Et puis, Marie est là, notre Mère très pure, très chaste, toujours vier­ge et protectrice des vierges. Demandons par Marie au Cœur de Jésus le fruit de la pureté.

Résolutions. - Divin Cœur de Jésus, quels beaux dons vous offrez à mes prières: la modestie, la tempérance, la chasteté. Mais je sais que pour les recevoir, il faut m'y disposer par la pureté de cœur, par la vie intérieure, par l'union habituelle avec vous.

Emitte spiritum tuum et creabuntur, et renovabis faciem terrae. Colloque avec le Sacré-Cœur.

29 Mai
De la vigilance sur notre intérieur

Non cesso gratias agens pro vobis, me­moriam vestri faciens in orationibus meis: ut Deus, Domini nostri pater gloriae, det vobis spiritum sapientiae et revelationis, in agnitione ejus: illuminatos oculos cor­dis vestri, ut sciatis quae sit spes vocatio­nis ejus (Eph., 1, 16).

Je ne cesse pas de rendre grâces à Dieu et de prier pour vous, pour que Dieu, le Père glorieux de Notre-Seigneur, vous donne l'esprit de sagesse et d'intelligence pour le connaître: pour que les yeux de votre cœur soient éclairés et que vous compreniez les espérances de votre voca­tion (aux Eph., 1, 16).

1er Prélude. Si nous sommes recueillis et vigilants sur notre intérieur, l'Esprit-Saint nous guidera dans la connaissance et l'amour du Sacré-Cœur.

2e Prélude. Parlez, Seigneur, votre serviteur écoute.

Ier POINT: De la vigilance sur notre intérieur pour en reconnaître et en corriger les désordres. - Nous demeurons embrouillés et comme ensevelis dans une infinité de fautes et d'imperfections que nous ne voyons jamais et que nous ne verrons qu'à l'heure de la mort, si nous ne nous exerçons pas en la connaissance des mouvements de notre intérieur, où le démon et la nature jouent d'étranges personnages, pendant que nous sommes tout absorbés dans le tracas des occupations extérieures.

La ruine des âmes dans le chemin de la perfection, vient de la multi­plication des péchés véniels, d'où s'en suit la diminution des lumières et des inspirations divines, des consolations spirituelles et des autres se­cours de la grâce, puis une grande faiblesse à résister aux attaques de l'ennemi, et enfin la chute en quelque lourde faute qui nous fait ouvrir les yeux et voir que tandis que nous pensions à autre chose, notre cœur nous trahissait, faute de veiller à le garder et d'y rentrer souvent pour reconnaître ce qui s'y passait (P. Lallemant).

IIe POINT: Le dommage qui résulte du défaut de vigilance. - C'est cette ab­sence de chez nous et cette nonchalance à régler notre intérieur, qui sont cause que les dons du Saint-Esprit sont en nous presque sans effet, et que des grâces sacramentelles qui nous sont données en vertu des sacrements que nous avons reçus ou que nous fréquentons, demeurent inutiles.

C'est bien manifeste pour les dons du Saint-Esprit. Nous ne sentons pas comme nous devrions l'influence des dons de sagesse et de piété, qui nous rendraient fervents comme les saints.

La grâce sacramentelle est un droit que chaque sacrement nous ac­quiert auprès de Dieu, pour recevoir de lui certains secours qui main­ tiennent en nous l'effet de ce sacrement. Ainsi la grâce sacramentelle du baptême nous donne le droit de recevoir des lumières et des inspirations pour mener une vie surnaturelle, comme membres de Jésus-Christ, ani­més de son esprit. La grâce sacramentelle de la confirmation est un droit à recevoir de la force et de la constance, pour combattre contre nos enne­mis comme soldats de Jésus-Christ. La grâce sacramentelle de la confes­sion est un droit à recevoir un accroissement de pureté de cœur. Celle de la communion est un droit à recevoir des secours efficaces pour nous unir à Dieu par la ferveur de son amour.

D'où vient que le plus souvent nous recevons les sacrements sans fruits ou du moins sans que leurs fruits persévèrent? C'est parce que nos défauts habituels, nos affections déréglées, nos attaches, nos passions immortifiées ont plus de force que la grâce sacramentelle. C'est surtout parce que nous ne rentrons pas en nous-mêmes pour reconnaître nos défauts, pour les corriger et pour être attentifs aux mouvements de la grâce.

IIIe POINT: La vigilance est nécessaire pour nous mettre sous la conduite du Saint-Esprit. - En veillant sur notre intérieur, nous acquerrons une grande connaissance de nous-mêmes et nous discernerons les divers mouvements de la nature et de la grâce.

Par la seule attention à veiller sur notre intérieur, nous faisons d'ex­cellents actes de vertu, nous nous remettons dans l'état de ferveur et nous avançons merveilleusement dans la perfection; comme au contrai­re, en négligeant notre intérieur, nous faisons des pertes inconcevables.

Cet exercice peut se pratiquer en tout temps et en tout lieu, dans nos fonctions extérieures et dans nos maladies, et il n'y a point d'affaire si embarrassante qui ne nous permette de rentrer en nous-mêmes de temps en temps, pour observer et redresser les mouvements de notre cœur.

Ceux qui abandonnent le soin de leur intérieur sous prétexte de zèle et de charité, commettent une infinité de péchés véniels et tombent dans la tiédeur. Leurs travaux ne produisent que fort peu de fruits, n'étant points animés de cette force qui vient de l'esprit intérieur ni accompa­gnés des bénédictions que Dieu donne aux hommes d'oraison et de re­cueillement. Ils ne font rien purement pour Dieu, ils se cherchent en tout et mèlent toujours secrètement leur propre intérêt avec la gloire de Dieu dans leurs meilleures entreprises.

On passe ainsi sa vie dans ce mélange de nature et de grâce, sans avancer dans la perfection, avec l'esprit aussi distrait et le cœur aussi dur que si l'on n'avait pas eu tout le secours des exercices de la piété chrétienne et de la vie religieuse.

Enfin la mort vient et l'on tremble avec raison à la pensée des juge­ments de Dieu.

Résolutions. - Vigilate et orate. Veillons, Notre-Seigneur nous l'a tant recommandé. - Videte, vigilate et orate. Voyez, veillez et priez. Je veux donc observer mon intérieur, veiller et m'entretenir toujours dans la disposition de ferveur. Je veux m'y remettre au commencement de chaque action. O Marie, Mère de la persévérance, aidez-moi.

Colloque avec la sainte Vierge.

30 Mai
Marie, reine du saint rosaire

Benedixerunt eam omnes una voce di­centes: Tu gloria Jerusalem, tu laetitia Israel, tu honorificentia populi nostri; quia fecisti viriliter… Ideo et manus do­mini confortavit te et ideo eris benedicta in aeternum. Et dixit omnis populus: Fiat! Fiat! (Judith, 15, 10).

Tous (prêtres et peuple) la bénirent en disant ensemble: Tu es la gloire de Jéru­salem, la joie d'Israël et l'honneur de no­tre peuple; parce que tu as agi viri­lement… Et la main du Seigneur t'a forti­fiée et pour cela tu seras bénie éternelle­ment. Et tout le peuple dit: Fiat! Fiat! (Judith, 15, 10).

1er Prélude. Oui, Fiat! Fiat! que Marie, comme Judith, et plus que Judith, soit bénie éternellement parce qu'elle a sauvé son peuple.

2e Prélude. O Marie, je vous offre tous les jours la couronne du rosaire, donnez-moi en retour les vertus que m'enseignent les mystères de cette couronne.

Ier POINT: Une pluie de grâces. - Léon XIII a été, comme saint Pie V, l'apôtre du Rosaire. Dix fois il s'est adressé à l'Eglise tout entière pour lui recommander le Rosaire par des encycliques toutes pénétrées de la piété de son cœur envers Marie. C'est qu'il a vu la triste situation dans laquelle se trouve l'Eglise. Il a souvent comparé notre temps au douziè­me siècle et les siècles d'aujourd'hui à ceux des Albigeois, qui voulaient bouleverser et détruire tout l'ordre social.

Marie est venue au secours de la société chrétienne au XIIe siècle. Le moyen qu'elle employa, ce fut le Rosaire dont elle confia la propagande à saint Dominique. La récitation du Rosaire ramena parmi les fidèles l'habitude de la prière et répandit la connaissance exacte des mystères de Notre-Seigneur, avec les sentiments que la méditation de ces mystères éveille dans les âmes. La paix revint dans les esprits. C'était comme une pluie bienfaisante tombant sur un sol aride, selon l'expression de la Vierge Marie elle-même. Comme saint Dominique se désolait à ses pieds, à la vue des malheurs de son temps la sainte Vierge lui dit: «cette terre restera stérile jusqu'à ce que la pluie y tombe». Elle lui fit compren­dre que cette pluie était la dévotion du Rosaire et qu'il devait la répan­dre partout.

La très sainte Vierge nous a de nouveau offert le salut à Lourdes en demandant avec instance la récitation du Rosaire. Léon XIII a répondu au désir de Marie. Les miracles de guérison et de conversion se multi­plient à Lourdes. Le Rosaire finira bien aussi par guérir notre pauvre so­ciété et par lui rendre le sens chrétien.

IIe POINT: Le Rosaire éloigne le démon. - Citons avec saint Liguori un des beaux miracles, opérés par saint Dominique, grâce à la récitation du Rosaire: saint Dominique prêchait à Carcassonne. On lui amena un Al­bigeois tombé au pouvoir du démon, pour avoir publiquement attaqué la dévotion du Rosaire. Le saint ayant, de la part de Dieu, commandé aux démons de déclarer si, dans ses prédications sur le Rosaire, il n'avait rien dit qui fût contre la vérité! «Ecoutez, s'écrièrent les démons en poussant des hurlements, écoutez, chrétiens, cet homme qui est notre ennemi ne vous a dit sur Marie et le Rosaire que la vérité». Ils ajoutèrent qu'ils ne pouvaient rien contre les serviteurs de la sainte Vierge; qu'à la mort beaucoup de pécheurs se sauvent, parce qu'ils invoquent Marie. «Nous sommes contraints, dirent-ils encore, de faire connaître que, par­mi tous ceux qui persévèrent dans la dévotion envers Marie et le Rosai­re, aucun ne se damne; car, à ceux qui sont en péché mortel, Marie ob­tient, avant leur mort, la grâce d'un vrai repentir». Saint Dominique se mit ensuite à réciter le Rosaire avec le peuple; et pendant ce temps-là on vit plusieurs démons sortir du corps de ce malheureux, jusqu'à ce qu'en­fin le Rosaire étant entièrement récité, cet homme se trouvât parfaite­ment délivré. A la suite de ce miracle, beaucoup d'hérétiques se conver­tirent.

Le Rosaire a donc la puissance d'éloigner le démon. Soyons fidèles à le réciter, il nous obtiendra la protection de Marie pour nous et pour la société.

IIIe POINT: La couronne de Marie. - Réciter le rosaire, c'est tresser une couronne de roses à Marie pour orner son front royal. Les saluta­tions angéliques dont il est composé, sont en effet les louanges qui plai­sent le plus à Marie.

Comme le doux parfum des roses plaît, attire et délecte, dit le bien­heureux Albert-le-Grand, ainsi les parfaites louanges renfermées dans ce salut, l'odeur si suave de sainteté et de dévotion que répand cette prière composée par l'ange, tout cela forme un cantique souverainement agréable à Marie et comme une couronne de roses qui orne son front et réjouit son Cœur.

Offrir à Marie ce tribut de louanges, c'est lui rappeler l'honneur qu'elle reçut lorsqu'elle fut couronnée Reine du ciel, en récompense de la part qu'elle avait prise aux mystères de Notre-Seigneur. Rien ne peut lui plaire davantage et rien ne peut nous mieux assurer sa bienveillance.

Récitons donc fidèlement le Rosaire ou du moins le chapelet. Médi­tons brièvement en le récitant les mystères de la vie de Notre-Seigneur. Formons pour chaque dizaine une intention spéciale.

Les annales de l'Eglise nous redisent les grâces innombrables obte­nues par cette dévotion.

Résolutions. - Mon chapelet est un de mes bons exercices de chaque jour, un des plus agréables à Marie, un des plus féconds en grâces. Je le dirai donc fidèlement et bien. J'offrirai chaque dizaine à une intention spéciale, mais il y aura au moins une dizaine chaque jour aux intentions du Pape, pour l'Eglise et la Société.

Colloque avec Notre-Dame du Rosaire.

31 Mai
Sur les rapports de Marie
avec la dévotion au Sacre-Cœur

Ego Mater pulchrae dilectionis et agni- Je suis la Mère du bel amour, de l'intel­tionis et sanctae spei (Eccli., 24, 24). ligence et de la sainte espérance (Eccli, 24, 24).

1er Prélude. Comme Mère du Cœur de Jésus et épouse de l'Esprit de vérité, Marie coopère aux opérations de la grâce. Elle a une tendresse particulière pour les âmes vouées au Cœur de Jésus.

2e Prélude. O Marie, aidez-nous à établir le règne d'amour du Cœur de Jésus dans nos âmes et dans celles de nos frères.

Ier POINT: Le Cœur deJésus est tout amour et Marie est la Mère du bel amour. - C'est Jésus lui-même qui nous a donné Marie pour Mère. Elle a pour mission de nous conduire à son Cœur, à son amour.

La tendresse qu'elle a pour nous surpasse celle des mères les plus ai­mantes. Elle accueille toujours avec bonté ceux qui vont à elle. Elle pré­sente incessamment à son divin Fils les âmes et les cœurs de ses fidèles serviteurs. Jésus aime ceux qu'elle aime. Comme il est le médiateur en­tre son Père et les hommes, elle est la médiatrice entre les hommes et lui. Il lui a donné pour cela tout pouvoir sur son Cœur. Elle en dispose com­me une mère peut disposer du cœur du meilleur des fils.

Adressons-nous donc à la Vierge Immaculée, demandons-lui la dévo­tion au Sacré-Cœur et nous l'obtiendrons.

Jésus est la Vérité et la Vie, mais il nous communique la vie spirituelle par l'Esprit de vérité et d'amour. Marie est l'épouse du Saint-Esprit. El­le coopère à ce double titre de Mère du Sacré-Cœur et d'Epouse du Saint-Esprit aux opérations de la grâce. Elle est la porte du ciel, parce qu'elle est la distributrice des grâces qui y mènent: Mater divinae gratiae.

IIe POINT: Marie désire le triomphe de l'amour de Jésus. - Elle a hâte de voir le triomphe de l'amour de Notre-Seigneur. Ses prières en appellent l'effusion. Elle a donné aux apôtres des soins maternels. Elle réserve aux apôtres du Sacré-Cœur sa toute-puissante protection. Ils doivent déve­lopper l'amour pour Marie, en même temps que l'amour pour le Sacré­-Cœur.

Le plus puissant moyen pour répandre la dévotion au Sacré-Cœur, c'est de s'adresser à Marie. Elle a été associée à toutes les peines, à tou­tes les souffrances de Notre-Seigneur pendant sa vie mortelle. Ayant été associée à la fondation de l'Eglise, elle est naturellement associée à sa ré­novation. Cette rénovation doit se faire par l'amour de Notre-Seigneur, Marie est la créature qui l'a le plus aimé, elle est la mère de son Cœur. C'est par elle qu'il faut aller à lui, si on veut être reçu en enfant privilé­gié; dans les épreuves, dans les difficultés, c'est à elle qu'il faut recourir. Elle sera heureuse d'intercéder pour les amis du Cœur de son Fils. C'est par elle qu'il faut demander les grâces de contemplation et d'union.

IIIe POINT: Marie a une tendresse particulière pour les apôtres du Sacré-Cœur, prêtres ou autres. - Au Calvaire, dépouillé de tout, Notre-Seigneur n'avait aucun bien à laisser à sa Mère; mais il lui laissa quelque chose de meilleur que des biens temporels; jetant un regard d'amour sur saint Jean, il dit à sa Mère: «Femme, voilà votre fils». Et Marie accepta avec amour ce fils nouveau. Pour arriver à cette maternité, elle avait souffert avec Notre-Seigneur pendant trente-trois années, et maintenant cette maternité faisait sa consolation au milieu des douleurs extrêmes qu'elle endurait.

Dans la personne de Jean, tous les chrétiens étaient devenus ses en­fants et particulièrement les prêtres. Les apôtres du Sacré-Cœur lui sont particulièrement chers. Elle se réjouit de tout l'amour qu'ils ont pour son divin Fils.

Comme ils vont à lui pour l'aimer et le faire aimer, son cœur de mère en est touché. Elle les enveloppera d'une tendresse pleine de sollicitude. Mais il faut pour cela qu'elle trouve en eux les vertus qui ont fait de saint Jean le disciple préféré de Notre-Seigneur. La pureté de saint Jean était admirable et charmait particulièrement le Cœur de Jésus. Jean aussi ai­mait Marie, il avait pour elle une profonde vénération. Si les apôtres du Sacré-Cœur veulent que Marie soit leur mère, qu'ils lui témoignent leur affection et leur confiance. Elle sera leur conseillère dans toutes leurs œuvres, leur guide dans toutes leurs entreprises et surtout la grande ou­vrière de leur sanctification. Pour lui témoigner cette confiance, on con­sidérera qu'elle a été mêlée à toutes les actions de Notre-Seigneur: à Bethléem, elle lui prodigue ses soins; à Nazareth, elle est unie à tous les détails de sa vie intime et cachée; elle donne avec lui l'exemple de toutes les vertus: la pureté, l'humilité, le calme inaltérable de l'âme, la pauvre­té noblement supportée; elle est associée aussi aux douleurs de sa Pas­sion: pour le suivre au Calvaire, il faut y accompagner sa mère.

Résolutions. - O Marie, je me consacre à vous pour toujours. je veux au commencement de chaque journée, de chaque action, aller à vous d'abord et par vous à Jésus. Acceptez-moi pour votre serviteur, votre di­sciple, votre enfant, votre saint Jean. Conduisez-moi au Cœur de Jésus et à son amour.

Colloque avec Marie.


1)
Vie par elle-même, p. 291.
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