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Mois de Juin
Mois du Sacré-Cœur et du saint sacrement

Deux méditations pour la retraite du mois

I. Vie de charité, a l’exemple du Sacré-Cœur

Qui non diligit, non novit Deum, quo­niam Deus charitas est. In hoc apparuit charitas Dei in nobis, quoniam Filium suum unigenitum misit Deus in mundum ut vivamus per eum (1 Joan, 4, 8).

Celui qui n'aime pas ne connaît pas Dieu, parce que Dieu est amour. Dieu nous a montré son amour en envoyant son fils unique dans le monde pour nous faire vivre en lui (1 ép. de S. Jean, 4, 8).

1er Prélude. Je verrai le Cœur de Jésus au Saint-Sacrement, tout enflammé d'amour pour son Père et tout rayonnant d'amour pour ses créatures.

2e Prélude. Divin Cœur de Jésus, communiquez-moi un peu de votre amour: infunde amorem cordibus.

Ier POINT: Aimer Dieu par le Cœur de Jésus. - L'amour du Cœur de Jésus pour son Père est le modèle de notre amour. Jésus est le coryphée de l'amour des créatures pour Dieu. Il y a bien l'amour des Anges et de quelques bonnes âmes, mais qu'est-ce que cela pour Dieu? Jésus est ve­nu et il offre à son Père un amour digne de lui. Son Père se complaît en cet amour, il nous l'a dit sur les bords du Jourdain.

Jésus aime son Père, c'est sa vie. Il l'a aimé dans sa vie mortelle, il l'aime dans l'Eucharistie et au ciel. Il accomplit toujours le grand pré­cepte: «Tu aimeras le Seigneur de tout ton cœur, de toute ton âme, de toutes tes forces».

Parmi les hommes, Dieu est si peu aimé! Nous sommes ingrats. Nous oublions celui de qui nous tenons tout: la vie, le pardon, la grâce, l'espé­rance du ciel. Et cependant il nous demande notre cœur: Praebe, fili, cor tuum mihi. Incapables de bien l'aimer par nous-mêmes, aimons-le par le Cœur de Jésus. Ce divin Cœur est à nous, il suppléera à notre impuis­sance.

Je commencerai donc cette vie d'amour en union avec le Cœur de Jésus. Ami de Dieu, j'aimerai tout ce qui me rapproche de lui: la prière, le recueillement, la visite au Saint-Sacrement, la sainte communion.

IIe POINT: Aimer le prochain comme le Cœur de Jésus et avec lui. - L'amour de Jésus pour les hommes est le modèle de celui que nous de­vons avoir. Combien Jésus nous a aimés! Pourquoi le Fils de Dieu s'est-­il fait homme? Pourquoi a-t-il choisi une vie de pauvreté, de travail et de souffrance? C'est pour nous et notre salut! Son amour est la seule expli­cation de ses mystères de Bethléem, de Nazareth, de l'Agonie et du Cal­vaire. «Il m'a aimé et il s'est livré pour moi» (aux Galates, 2). C'est pour nous aussi qu'il a voulu demeurer dans l'Eucharistie, et pour nous enco­re qu'il intercède au ciel.

Jésus est charité, comme Dieu est charité. - La charité c'est aussi son commandement: «Aimez-vous les uns les autres, comme je vous ai ai­més», nous dit-il (S. Jean, 15). - «Si Jésus, dit saint Jean, a sacrifié pour nous sa vie, nous devons aussi être prêts à sacrifier la nôtre pour nos frères» (1 Ep. de S. Jean, 3).

Dieu demande rarement un tel sacrifice, mais il demande au moins que nous pratiquions la douceur et la patience. Nous devons nous mon­trer serviables, souffrir les contrariétés, assister les malheureux, prier pour les pécheurs. Nous devons être affables et prévenants, rendre servi­ce au prochain, ne pas le critiquer ni le mépriser.

Examinons-nous! Est-ce là ce que nous avons fait jusqu'à présent? Corrigeons-nous pendant ce mois de grâces dédié au Sacré-Cœur.

IIIe POINT: Amour constant et généreux. - La Bienheureuse Marguerite-Marie recommande sans cesse l'amour de Notre-Seigneur Jésus-Christ et de son Cœur Sacré, mais elle redit souvent aussi que Jésus ne peut pas se contenter d'un amour tiède et lâche. Il demande un amour constant et généreux. Il veut un amour qui se soutienne égale­ment dans les afflictions et dans les consolations. «Quelle faiblesse de n'aimer Notre-Seigneur que quand il nous caresse, disait-elle, et d'être refroidi aussitôt qu'il nous éprouve! Ce n'est pas là un vrai amour. Celui qui aime ainsi, s'aime trop soi-même pour aimer Jésus-Christ de tout son cœur».

«Le fruit de cet amour constant, généreux et uniforme, disait-elle en­core, c'est une adhésion absolue à toutes les volontés de Dieu. Celui qui aime généreusement est prêt à souffrir avec patience les événements qui le chagrinent».

«Dieu aime ceux qui se donnent à lui avec allégresse et avec joie», nous dit saint Paul (2 aux Cor., 11).

La Bienheureuse disait aussi: «C'est la vraie marque de l'esprit de Dieu que de le servir avec paix et contentement. - Faites toutes choses, disait-elle, avec un esprit libre en la présence de Dieu, dans le seul désir de lui plaire».

Le signe d'un amour de Dieu bien affermi, c'est la joie calme et paisi­ble, sanctifiée par l'union avec le Cœur de Jésus.

Résolutions. - Seigneur, donnez-moi de vous aimer. De mon côté, je veux m'appliquer à votre amour. Je vous offrirai toutes mes actions mieux que par le passé et je vous demanderai souvent ce que vous voulez que je fasse.

Colloque avec le Cœur aimant de Jésus.

II. La mort du pêcheur

Unus autem de his qui pendebant, la­tronibus, blasphemabat eum dicens: Si tu es Christus, salvum fac temetipsum et nos (S. Luc, 23, 39).

Mais un des malfaiteurs qui étaient crucifiés avec lui, blasphémait et l'insul­tait en disant: Si tu es le Christ, sauve ta vie et la nôtre (S. Luc, XXIII, 39).

1er Prélude. Considérons cette mort horrible du mauvais larron, qui blasphème au moment de paraître devant Dieu.

2e Prélude. Sainte Marie, Mère de Dieu, priez pour nous, maintenant et à l'heure de notre mort.

Ier POINT: La mort est ordinairement semblable à la vie. - Le livre de l'Ec­clésiastique, si rempli de graves conseils, nous en avertit: «L'arbre tom­be du côté où il penche et il y demeure» (chap. XI).

Une vie insouciante laisse craindre une mauvaise mort. Une vie habi­tuellement coupable prépare une mort terrible. La mort des prévarica­teurs est épouvantable, dit le psalmiste: Mors peccatorum pessima (Ps., 33). Ceux qui n'observent pas la justice pendant leur vie, dit-il encore, ont une mort misérable: Virum injustum mala capient in interitu (Ps., 139).

Quel exemple terrible de mauvaise mort, que celle du mauvais larron! Il blasphème! Il est insensible dans un moment et devant un spectacle où tous les témoins sont émus, où la nature elle-même est troublée. Les juifs se frappaient la poitrine, le centurion disait: «Ce condamné était vrai­ment un juste». La terre tremblait, les rochers se fendaient, le soleil se voilait la face.

Oh! l'endurcissement! A quel point une âme peut s'illusionner et sa­crifier, par orgueil ou par bassesse, ses intérêts éternels!

IIe POINT: Mort du pécheur insouciant. - Il y a la mort de l'homme négligent. Sa vie a été tiède et mondaine. L'intérêt, la récréation, la vie facile, ont été les seuls soucis de son âme.

A-t-il prié? Comment l'a-t-il fait?

Quelle vigilance a-t-il eue sur ses regards, sur ses pensées, sur ses af­fections? - «Il y a des hommes dit job, qui boivent l'iniquité comme de l'eau» (chap. XV). Cela veut dire qu'ils pèchent avec insouciance et sans y prendre garde. Et l'auteur inspiré ajoute que c'est là une chose abomi­nable.

Ils ont peu de souci des lois de l'Eglise, de la réputation du prochain. Et s'ils reçoivent les sacrements, dans quelles dispositions les reçoivent-­ils?

Ils sont fixés dans leur tiédeur et Dieu les y laisse. Ils ont tant abusé de la prière, des grâces quotidiennes, et peut-être des sacrements, que rien ne leur fait plus d'impression. Tout cela les a laissés froids pendant leur vie et les laisse froids à leur mort.

Notre-Seigneur a exhalé son amertume à leur sujet dans l'Apocalypse et dans ses révélations à la bienheureuse Marguerite-Marie. Cela a duré trop longtemps, Notre-Seigneur les a vomis de sa bouche. Ils meurent dans une paix apparente, qui n'est pas l'indifférence glaciale des gens du monde incroyants, mais qui est la trompeuse sécurité d'une fausse con­science.

IIIe POINT: Mort troublée et désespérée. - D'autres âmes sont agitées par les tortures du doute, de la crainte ou de la fausse honte.

Mille péchés qu'elles regardaient comme rien leur reviennent à l'esprit. Mille doutes s'élèvent dans leur pensée. Tout leur devient su­spect: les faux principes qu'elles ont suivis sur certains commandements du décalogue ou sur les engagements personnels qu'elles ont pris vis-a­vis de Dieu; les libertés qu'elles se sont données dans la pratique de leurs devoirs ou dans l'accomplissement de leurs vœux; les sentiments qu'el­les ont entretenus contre la charité; les sacrements même qu'elles ont mal reçus.

L'humilité et le repentir les sauveraient; le trouble et le désespoir les accablent. Elles comprennent leurs fautes, mais sans profit, comme An­tiochus se souvenait à sa mort des sacrilèges qu'il avait commis à Jérusa­lem: Nunc reminiscor malorum quae feci in Jerusalem (Macch. ). Et puis, il y a des aveux difficiles, ou bien le temps manque, la mort est si souvent brusque, imprévue. Elle vient comme un voleur.

Oh! que ces morts sont tristes! Qu'elles sont terribles! Et c'est un mo­ment décisif, d'où dépend une éternité!

Comment mourrai-je?

Telle vie, telle mort; n'est-ce pas la règle ordinaire?

Résolutions. - Puisqu'il m'importe tant de bien mourir, ne vais-je pas commencer à bien vivre, à vivre dans la ferveur, dans l'amitié avec Notre-Seigneur, qui sera mon juge?

Quelles étaient les dispositions du Cœur de Jésus à sa mort? «Tout est consommé». J'ai accompli en tout la volonté de mon Père. Je meurs dans la paix la plus parfaite: «Mon Père, je remets mon âme entre vos mains». Accomplissons toute la loi, pour mourir dans la paix.

Colloque avec Jésus mourant sur la croix.

1er Juin
La devotion au Sacré-Cœur a un double objet:
le cœur de chair du Sauveur
et son amour pour nous

Erat ergo recumbens unus ex discpulis ejus in sinu Jesu, quem diligebat Jésus. Innuit ergo huic Simon Petrus, et dixit ei: Quis est, de quo dicit? Itaque cum recubuisset ille supra pectus Jesu, dixit ei: Domine, quis est? (S. Joan, 13, 23). Il y avait donc un des disciples qui re­posait sur le sein de Jésus, le disciple que Jésus aimait. Simon Pierre lui fit signe et lui dit: De qui parle-t-il? Alors celui qui reposait sur la poitrine de Jésus lui dit: Maître, qui est-ce? (S. Jean, 13, 23).

1er Prélude. Saint Jean porte sa tête sur le cœur de Jésus, parce qu'il y sent palpiter l'amour du Sauveur.

2e Prélude. Cet organe si uni par ses battements à l'amour du Sauveur mérite évi­demment un honneur particulier.

Ier POINT: Double objet de la dévotion au Sacré-Cœur: le Cœur de chair de Notre-Seigneur et l'amour du Sauveur pour nous. - Cela résulte d'abord des révélations de Marguerite-Marie. C'est bien son Cœur de chair que Notre-Seigneur lui montre sans cesse, mais en appelant toujours aussi son attention sur son amour: «Voilà ce Cœur qui a tant aimé les hom­mes… ». Il y a donc deux éléments ans cette dévotion: un élément sensi­ble, le cœur de chair; un élément spirituel, ce que rappelle et représente ce cœur de chair. Et les deux éléments ne font qu'un, comme ne font qu'un le signe et la chose signifiée.

Les auteurs disent couramment qu'il y a deux objets dans la dévotion: l'un principal, qu'ils ramènent à l'amour; l'autre secondaire qui est le cœur, et cela est vrai. Ces deux éléments sont essentiels. Ils sont unis, comme l'âme et le corps sont unis dans l'homme. Marguerite-Marie ne nous présente jamais l'un sans l'autre. C'est toujours le «cœur tout ai­mable et tout aimant de Jésus qu'elle voit et qu'elle; propose à nos-adora­tions» (R. P. Bainvel).

IIe POINT: L'amour du Fils de Dieu est l'objet principal de ce culte. -C'est ce que disent bien clairement les théologiens de cette dévotion. Le E. Croiset commence ainsi son ouvrage sur la dévotion au. Sacré-Cœur. «L'ob­jet particulier de cette dévotion est l'amour immense du Fils de Dieu, qui l'a porté à se livrer pour nous à la mort et à se donner tout à nous dans le Très Saint Sacrement de l'autel». Et après quelques explications: «Il est aisé de voir que l'objet et le motif principal de cette dévotion est l'amour immense que Jésus-Christ a pour les hommes, qui n'ont pour la plupart que du mépris ou de l'indifférence pour lui».

Le P. de Gallifet, à ceux qui prétendaient que la fête nouvelle ne se distinguait pas des autres fêtes du Sauveur, comme celle de la Passion, du Saint-Sacrement, etc., répondait: «L'objet immédiat de ces fêtes n'est pas proprement l'amour du Christ. Dans celle du Cœur de Jésus, au contraire, l'amour dont brûle ce Cœur très saint, est l'objet immé­diat de la fête, en union avec son Cœur; de sorte qu'on peut dire en vérité que l'amour du Christ envers les hommes est proprement et immédia­tement visé en cette fête». Il disait un peu plus tard: «Personne ne peut examiner avec un peu d'attention la nature de cette fête sans voir aussi­tôt que, sous le nom et le titre du Cœur de Jésus, il s'agit en réalité de la fête de l'amour de Jésus, car c'est là l'essence du cœur de Jésus».

Les documents officiels disent la même chose. «Sous l'image symboli­que du cœur, dit le décret de Pie VI, nous méditons et vénérons l'im­mense charité et l'amour libéral de notre divin Rédempteur». L'oraison de la fête nous invite aussi à méditer les principaux bienfaits de l'amour divin.

Comme cette doctrine éclaire bien cette dévotion! C'est la dévotion à l'amour, à la charité du Christ.

IIIe POINT: Le cœur de chair est le symbole de l'amour et il est si étroitement uni â la faculté d'aimer, qu'il nous donne l'illusion de le prendre pour l'organe mê­me de l'amour. - Le cœur de chair est le symbole de l'amour. C'est un fait, c'est l'usage général de le prendre pour le symbole de l'affection, de la tendresse, de l'amour. Ne dit-on pas: «Je vous donne mon cœur», pour dire je vous promets mon affection?

Mais pourquoi le langage humain a-t-il adopté cette expression sym­bolique? C'est parce que le cœur est intimement lié aux mouvements de notre affection. Quand nous aimons vivement, notre cœur bat plus fort, sous la pression d'un sang plus chaud et plus vif. Le cœur se comporte, comme s'il était l'organe de l'affection. Il n'en est pas l'organe principal, nous dit la science. Soit! mais il est assez lié à tous ses mouvements pour que le langage humain ait pu prendre instinctivement son nom pour de­signer l'organe de l'amour.

En honorant le Sacré-Cœur de Jésus, nous honorons donc principale­ment l'amour du Fils de Dieu et secondairement le cœur de chair qui est assez intimement uni à cet amour pour en être appelé familièrement l'organe et le symbole.

Quand Saint Jean veut s'unir à l'amour de Jésus, quel geste fait-il? il appuje sa tête sur ce cœur qui bat pour lui d'un amour si tendre et si fort.

Quelle n'est pas la noblesse de ce cœur de chair, qui a été uni par tous ses battements aux affections, aux joies, aux souffrances de l'Homme­-Dieu!

Résolutions. - Ma nature qui est mixte s'applique plus aisément à un objet qui est mixte comme elle. Je comprendrai mieux l'amour du Sau­veur en le considérant dans son Cœur de chair.

Merci, ô Jésus, de m'avoir révélé dévotion si touchante, je veux m'y appliquer en vivant en union avec votre divin Cœur.

Colloque avec le Sacré-Cœur de Jésus.

2 Juin
Par extension, le Cœur de Jésus
s'entend de tout l'intérieur de Jésus
et même de la personne de Jésus
en tant qu'il est aimant

Implete gaudium meum, ut idem sa­piatis, eamdem charitatem habentes, una­nimes, idipsum sentientes; nihil per con­tentionem, neque per inanem gloriam: Sed in humilitate superiores sibi invicem arbitrantes… Hoc enim sentite in vobfs quod et in Christo Jesu (ad Philip., 2, 2).

Mettez le comble à ma joie: ayez les mêmes goûts, la même charité, l'unani­mité, les mêmes sentiments, sans conten­tion, sans vaine gloire; estimez humble­ment que les autres vous sont supé­rieurs… Ayez en vous les sentiments de Jésus (Phil., 2, 2).

1er Prélude. Saint Paul nous donne comme modèle l'intérieur de Jésus, son humilité, sa charité; en réalité, c'est le Sacré-Cœur.

2e Prélude. Seigneur, donnez-moi la grâce de bien comprendre votre intérieur, c'est­-à-dire votre Cœur sacré.

Ier POINT: Dans le langage pieux, le Sacré-Cœur s'entend de tout l'intérieur de Jésus. - Notre-Seigneur lui-même nous y a autorisés. N'a-t-il pas dit: «Apprenez de moi que je suis doux et humble de cœur?». Il ne s'agit pas là de son cœur proprement dit, mais de son âme, de son intérieur, de ses vertus.

C'est le langage de Marguerite-Marie et de ses interprètes, les Pères de la Colombière et de Gallifet. Sous le nom du Sacré-Cœur, Marguerite-Marie nous présente toutes les vertus de Notre-Seigneur, tous les actes de sa vie intérieure.

«Plusieurs s'y trompent, dit le P. de Gallifet (liv. 1, chap., 4). En en­tendant ce nom sacré, le Cœur de Jésus, ils bornent leur pensée au cœur matériel de Jésus-Christ. Mais que l'idée qu'on en doit avoir est différente et bien autrement magnifique! Il faut qu'on le considère com­me uni intimement à l'âme et à la personne de Jésus-Christ, plein de vie, de sentiment et d'intelligence; comme le plus noble et le principal organe des affections sensibles de Jésus-Christ, de son amour, de son zèle, de son obéissance, de ses désirs, de ses douleurs, de ses joies, de ses tristes­ses; comme le principe et le siège de ces mêmes affections et de toutes les vertus de l'Homme-Dieu…». - «L'offrande au Sacré-Cœur, dit le P. de la Colombière, se fait pour honorer son divin Cœur, le siège de toutes les vertus, la source de toutes les bénédictions et la retraite de toutes les âmes saintes…».

Les litanies du Sacré-Cœur énumèrent aussi toutes les richesses cachées dans l'humanité sainte de Notre-Seigneur, dans sa vie terrestre, dans sa Passion, dans son Eucharistie et au ciel même.1)

III POINT: Pourquoi en est-il ainsi? - C'est d'abord parce que dans le langage ordinaire on prend souvent le cœur pour toute l'âme. C'est aus­si et tout spécialement parce que Jésus est tout amour, parce que son amour pour son Père et pour nous animait toute sa vie, dirigeait toutes ses actions. C'est la pensée de saint Augustin, de saint Thomas, de Bos­suet. Pourquoi les douleurs de Jésus? parce qu'il a aimé. Que sont ses miracles? des effets de son amour et de sa bonté.

Le langage courant est d'ailleurs basé sur des réalités profondes quand il rattache au cœur toute la vie morale et affective de l'homme: les vertus comme les sentiments, les principes d'action et les mobiles intimes. C'est que le cœur est l'écho de toute notre vie affective, il est impres­sionné par toutes nos dispositions morales.

C'est donc une extension légitime et naturelle de concevoir la dévotion au Sacré-Cœur comme allant au cœur réel et vivant de Jésus, pour y ho­norer tout ce qu'il est, tout ce qu'il fait, tout ce qu'il rappelle et représente à l'esprit. De ce chef la dévotion au Sacré-Cœur n'est plus seulement la dé­votion à l'amour du cœur de Jésus, elle devient la dévotion à tout l'intime du Sauveur, en tant que cet intime a dans le cœur vivant un écho, un cen­tre de résonnance, un symbole ou un signe de rappel (Bainvel).

IIIe POINT: Par extension, le Sacré-Cœur c'est encore toute la personne de Jésus. - Dans le langage courant, le mot cœur est souvent employé (par une figure que les grammairiens ont appelée du nom grec de synecdo­que) pour désigner la personne. On dit: c'est un grand cœur, c'est un bon cœur.

Cela s'est fait tout naturellement dans la dévotion au Sacré-Cœur, Marguerite-Marie dit: Ce Sacré-Cœur, comme elle disait: Jésus. Cet usage est devenu courant. Il faut remarquer toutefois que l'on considère alors spécialement la personne de Jésus dans sa vie affective, dans son intime, dans ses principes de conduite.

Ainsi entendu, le Sacré-Cœur me rappelle Jésus dans toute sa vie af­fective et morale, Jésus intime, Jésus tout aimant et tout aimable, Jésus modèle de toutes les vertus. Toute la vie de Notre-Seigneur peut ainsi se concentrer dans son cœur.

Dans le même sens, une statue du Sacré-Cœur c'est une statue où Jésus, nous montrant son cœur essaie de traduire à nos regards toute sa vie intime, son amour surtout et ses amabilités.

Grâce à cette extension, nous pouvons décrire la dévotion au Sacré­Cœur comme la dévotion à Jésus se montrant à nous ou nous montrant son cœur, dans sa vie intime et ses sentiments les plus personnels, lesquels ne disent d'ailleurs qu'amour et amabilité. C'est Jésus nous ré­vélant le fond de lui-même en nous disant: «Voilà ce cœur» (P. Bainvel).

Résolution. - Oh! l'admirable dévotion, qui appelle mon attention sur tout l'intérieur de Jésus, sur son amour surtout, mais aussi sur toutes ses vertus, sur tous ses sentiments, sur le principe et l'âme de tous ses mystères. C'est l'épanouissement de la règle de vie tracé par Saint Paul: Formez en vous les sentiments de Jésus: Hoc sentite in vobis quod et in Chri­sto Jesu.

Colloque avec le Sacré-Cœur.

3 Juin
Objet précis de cette dévotion:
le cœur qui aime les hommes

Estote ergo imitatores Dei, sicut filii charissimi: et ambulate in dilectione, sicut et Christus dilexit nos, et tradidit semetip­sum pro nobis oblationem et hostiam Deo in odorem suavitatis (ad Eph., 5, 1).

Soyez les imitateurs de Dieu comme des fils bien-aimés: et marchez dans la di­lection, comme le Christ nous a aimés, et il s'est livré pour nous comme une offran­de et une victime à Dieu en odeur de sua­vité (aux Eph., 5, 1).

1er Prélude. Jésus nous a aimés à la fois de son amour divin et humain et il s'est livré pour nous.

2e Prélude. C'est votre admirable amour, Seigneur, que je veux surtout honorer dans le symbole de votre Cœur.

Ier POINT: C'est surtout son amour pour les hommes que nous honorons dans le Cœur de Jésus. - L'amour que nous honorons dans ce culte, c'est surtout l'amour de Jésus pour les hommes, l'amour qui demande une réciproci­té d'amour. Qui peut mieux nous en instruire que Notre-Seigneur lui-même? Or qu'a-t-il dit à Marguerite-Marie? Lors de sa première grande révélation, le 27 décembre 1673, à la fête de saint Jean, il lui montre son Cœur sur un trône avec la couronne d'épines et la croix, et lui dit que ces instruments de la Passion signifiaient l'amour immense qu'il a mani­festé pour les hommes et pour lequel il demandait un amour réciproque.

A la seconde grande révélation, au premier vendredi de juin 1674, Notre-Seigneur découvre à sa servante «les merveilles inexplicables de son pur amour, et jusqu'à quel excès il l'avait porté d'aimer les hommes dont il ne recevait que des ingratitudes et des méconnaissances…».

Enfin, à la troisième grande révélation, pendant l'octave du Saint-Sacrement en 1675, Notre-Seigneur donne la formule définitive de cette dévotion: «Voilà ce cœur qui a tant aimé les hommes, qu'il n'a rien épargné, jusqu'à s'épuiser et se consumer, pour leur témoigner son amour, et qui ne reçoit en retour, de la plupart, que des ingratitudes et des mépris…». Rien de plus manifeste, Notre-Seigneur voulait surtout nous rappeler son amour pour nous et nous demander un amour réci­proque.

IIe POINT: C'est aussi par extension, son amour pour Dieu. - L'amour de Jésus pour les hommes ne va pas sans son amour pour son Père; il en est tout pénétré, il y prend sa source, il y a son motif, Jésus sait le grand commandement: «Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur…» et le second commandement, qui est semblable au premier: «Tu aimeras ton prochain comme toi-même et pour Dieu».

Il appelle notre attention sur son amour pour nous, mais spontané­ment nous étendons notre contemplation à tout son Cœur, à tout son intérieur, à toutes ses vertus, et le sentiment le plus -élevé que nous y ren­controns, c'est son amour pour son Père. «Les principales vertus qu'on prétend honorer dans le Cœur de Jésus, dit le P. Claude de la Colom­bière, sont premièrement un amour très ardent de Dieu son Père». Le P. Croiset et le P. de Gallifet ne parlent pas autrement. La dévotion au Cœur de Jésus est, dans son objet direct et immédiat, la dévotion au Cœur de Jésus brûlant d'amour pour nous; mais elle est aussi, par une extension légitime et naturelle, la dévotion au Sacré-Cœur de Jésus dans toute sa vie intime, dans ses vertus et particulièrement dans son amour pour Dieu.

En tant qu'emblème, c'est son amour pour nous que Jésus nous révèle en nous découvrant son Cœur, ruais il nous invite indirectement à con­templer ce divin Cœur dans toute sa vie intime et dans toutes ses vertus, dont la première est l'amour pour son Père.

IIIe POINT: C'est son amour créé plutôt que son amour incréé. - Quel amour de Jésus faut-il honorer dans la dévotion au Sacré-Cœur, son amour créé ou incréé? L'amour dont il nous aime comme homme dans sa nature humaine, ou celui dont il nous aime comme Dieu dans sa natu­re divine et pour répéter une expression claire et courte, celui qui créa Lazare ou celui qui pleura sur Lazare? (P. Bainvel).

Il n'y a pas de doute que l'objet précis et formel de notre dévotion est le Cœur humain de Jésus, animé de son amour divin et humain. C'est le Cœur du Verbe incarné qui a tant aimé les hommes; c'est l'immense amour du Verbe incarné, qui se manifeste dans toute sa vie, dans sa mort, dans le Saint-Sacrement. Ainsi parlent ceux qui avaient mission de propager cette dévotion, le P. de la Colombière, le P. Croiset, le P. de Gallifet.

Mais il est arrivé, et cela était naturel que l'on passât facilement à la considération de l'amour purement divin, qui a porté le Verbe de Dieu à nous créer, à nous conserver et surtout à prendre un corps mortel pour nous sauver. Ce n'est pas strictement la dévotion au Sacré-Cœur, c'en est une conséquence. Etant devenus plus aimants pour le Cœur du Ver­be incarné, nous devenons aussi plus reconnaissants pour le Verbe divin qui a voulu prendre un corps humain pour l'offrir en victime à notre profit.

Résolutions. - Plus ma dévotion s'éclaire, plus j'aime le Cœur de Jésus. Je le connais mieux, je le médite plus facilement. Je veux vivre et mourir dans ce Cœur, qui a vécu pour mon amour. Je veux m'unir à lui toujours plus fidèlement au commencement de mes actions.

Colloque avec le Sacré-Cœur.

4 Juin
L'acte propre de la dévotion au Sacré-Cœur, c'est l'amour de Notre-Seigneur

Charissimi, diligamus nos invicem, quia charitas ex Deo est. Et omnis qui di­ligit, ex Deo natus est, et cognoscit Deum. Qui non diligit, non novit Deum: quoniam Deus charitas Dei in nobis, quo­niam Filium suum unigenitum misit Deus in mundum, ut vivamus per eum (Ep. 1 S. Joan, 4, 7).

Mes bien-aimés, aimons-nous les uns les autres, car la charité vient de Dieu. Et celui qui aime est né de Dieu et il connaît Dieu. Celui qui n'aime pas ne connaît pas Dieu, car Dieu est charité. L'amour de Dieu s'est manifesté à nous en ce qu'il a envoyé son Fils unique dans le monde pour que nous vivions par lui (Ep. 1 de S. Jean, 4, 7).

1er Prélude. Dieu nous a manifesté son amour en nous envoyant son Fils qui a donné sa vie pour nous.

2e Prélude. L'amour appelle l'amour; l'amour méconnu appelle l'amour réparateur.

Ier POINT: La manifestation du Sacré-Cœur à Marguerite-Marie est la mani­festation de l'amour. - Quand Jésus montrait à Marguerite-Marie son Cœur passionné d'amour pour les hommes, et incapable de contenir plus longtemps les flammes qui le dévoraient, que voulait-il, sinon atti­rer notre attention sur cet amour, nous amener à lui rendre hommage, nous inviter à puiser dans ce Cœur infiniment riche? (Bainvel).

En nous disant qu'il prend un singulier plaisir à être honoré sous la fi­gure de son cœur de chair, quel but a-t-il? Que nous demande-t-il sinon d'honorer son amour et d'y répondre en lui rendant amour pour amour? La manifestation du Sacré-Cœur à Marguerite-Marie est la manifesta­tion de l'amour.

La dévotion au Sacré-Cœur se ramène donc, suivant le mot de Pie VI, à vénérer l'immense charité et l'amour prodigue (effusum) de Notre­-Seigneur, en allumant notre amour à ce foyer d'amour.

Marguerite-Marie, résumant ses visions, écrivait au P. Croiset: «Il m'était montré un Cœur toujours présent, jetant des flammes de toute part, avec ces paroles: Si tu savais combien je suis altéré de me faire ai­mer des hommes, tu ne négligerais rien pour cela… J'ai soif, je brûle d'être aimé».

IIe POINT: L'amour appelle l'amour. - La fin de la nouvelle dévotion, disait le postulateur de 1697, est de payer un tribut d'amour à la source même de l'amour. - La première fin qu'on ait en vue, disait le postula­teur de 1727, le P. de Gallifet, est de répondre à l'amour du Christ. - Et le P. Croiset: Ce n'est ici proprement qu'un exercice d'amour; l'amour en est l'objet, l'amour en est le motif principal, et c'est l'amour qui doit en être la fin.

C'est bien ainsi que l'entend l'Eglise. Elle dit dans la secrète de la messe Egredimini: «Nous vous supplions, Seigneur, que le Saint-Esprit nous enflamme de l'amour que Notre-Seigneur Jésus-Christ a fait jaillir de son Cœur sur la terre, et dont il a voulu qu'elle s'embrase». Quand Pie IX, en 1856, étendait la fête du Sacré-Cœur à l'Eglise entière, c'était afin de «fournir aux fidèles des stimulants pour aimer et payer d'amour le Cœur de Celui qui nous a aimés et lavés de nos péchés dans son sang».

Quand il élève la fête à un rite supérieur, c'est pour que «la dévotion d'amour au Cœur de notre Rédempteur se propage toujours plus, et de­scende plus avant dans le cœur des fidèles, et qu'ainsi la charité, qui chez plusieurs s'est refroidie, se ranime aux feux du divin amour».

Léon XIII a répété les mêmes enseignements. Dans son Encyclique du 28 juin 1889, il écrit: «Jésus n'a pas de désir plus ardent que de voir s'allumer dans les âmes l'amour dont son propre Cœur est dévoré. Al­lons donc à celui qui ne nous demande comme prix de sa charité que la réciprocité de l'amour».

Rien de plus manifeste; l'acte propre de la dévotion au Sacré-Cœur est l'amour.

IIIe POINT: L'amour méconnu appelle l'amour réparateur. - La dévotion au Sacré-Cœur étant un retour d'amour à l'amour méconnu et outragé, se présente naturellement comme un amour de réparation. Aussi tous les documents autorisés nous parlent-ils de la réparation en même temps que de l'amour.

L'amour de Jésus, tel qu'il s'est montré à Marguerite-Marie, est spé­cialement l'amour méconnu et outragé, et c'est ce qui donne son impor­tance à l'acte de réparation dans le culte du Sacré-Cœur.

Le P. Eudes n'a pas oublié la réparation, mais il la laisse au second plan, il est tout absorbé par l'amour, il chante l'amour. Marguerite-Marie, à la demande de Notre-Seigneur, met sur le même plan l'amour et la réparation. Mais c'est une réparation d'amour sur­tout qu'elle demande, plutôt qu'une réparation de justice ou d'expia­tion.

Cette réparation d'amour se traduit par l'amende honorable, qui s'adresse précisément à l'amour méconnu et outragé.

L'amour, la consécration ou le don amoureux de soi au Sacré-Cœur, la vie toute pour lui et de lui, tiennent le premier rang dans les écrits de Marguerite-Marie. La réparation et l'amende honorable viennent en­suite, comme un témoignage spécial d'amour envers l'amour méconnu et outragé du Sauveur.

Résolutions. - Amour et réparation, consécration assidue de tout moi­même, voilà ce que le Sacré-Cœur attend de moi. Mais cette consécra­tion doit embrasser tous mes actes. Je la dois renouveler au commence­ment de chacune de mes actions, et il faut pour cela vivre dans un pieux et constant recueillement, sous le regard de Notre-Seigneur dans l'esprit d'amour et de réparation.

Colloque avec Marguerite-Marie.

5 Juin
Visites eucharistiques:
le bon pasteur, le rédempteur, le modèle de toute sainteté

Ego sum pastor bonus et cognosco oves meas et cognoscunt me meae. Sicut novit me Pater, et ego agnosco Patrem; et ani­mam meam pono pro ovibus meis. Et alias oves habeo quae non sunt ex hoc ovi­li, et illas oportet me adducere; et vocem meam audient, et fient unum ovile et unus pastor (S. Joan, 10, 14).

Je suis le bon pasteur, je connais mes brebis et elles me connaissent. Comme mon Père me connaît, je connais mon Pè­re, et je donne ma vie pour mes brebis. Et j'ai d'autres brebis qui ne sont pas du troupeau, il faut que je les gagne; et elles entendront ma voix, et il n'y aura qu'un troupeau et un pasteur (S. Jean, 10, 14).

1er Prélude. C'est le Rédempteur, qui est au tabernacle, c'est le pasteur aimant et dé­voué, c'est le modèle de la sainteté.

2e Prélude. Seigneur, appliquez-moi le prix de votre sang. Prenez-moi sur vos épaules, pour me reporter au bercail, je suis la brebis égarée.

Ier POINT: Qui vient? C'est le Bon pasteur avec toute sa tendresse pour ses bre­bis. - Le bon Pasteur a un cœur rempli d'affection et de dévouement pour ses brebis (S. Jean, 10). Il les connaît par leur nom, il les appelle, elles entendent et comprennent sa voix. Il marche devant elles et elles le suivent. Il donne sa vie pour les sauver: «Je donne ma vie pour la gloire de mon Père, dit le Sauveur, parce que je l'aime et il m'aime parce que je donne ma vie pour sa gloire (S. Jean, 10, 17). Eh bien! je donne aussi ma vie pour mes brebis, pour leur salut éternel. Aussi, mes vraies brebis me connaissent et m'aiment».

Suis-je du nombre de ces vraies brebis, qui aiment ardemment le Bon Pasteur du tabernacle? Hélas! non, je suis une pauvre brebis impruden­te, qui erre dans les bois exposée aux bêtes fauves.

Et le Bon Pasteur veut me chercher, il m'appelle, il veut me prendre sur ses épaules, près de son cœur. Ce sera une grande joie pour lui de me retrouver, il en fera part à ses amis, il les invitera à se réjouir avec lui (S. Luc, 15).

Puis-je lire cette parabole du Sauveur et rester indifférent? Il m'appel­le, il m'attend, il est triste de mon absence, de ma froideur, de mon in­différence. Oh! que le Sauveur a un Cœur aimant et que j'ai un cœur dur! Seigneur, faites violence à mon cœur.

IIe POINT: Qui vient? C'est le Rédempteur avec le prix de son sang. - Saint Pierre (1 Ep. 1) se complaît à nous l'expliquer: «Nous n'avons pas été rachetés de l'esclavage du péché au prix de l'or et de l'argent, mais par le sang précieux de l'Agneau immaculé prédestiné dès le commencement et manifesté dans ces derniers temps pour notre salut, si nous sommes fi­dèles dans l'obéissance aimante envers Dieu, dans la charité pour le pro­chain».

Notre âme était comme les filles de Sion captives, et désolées sur les ri­ves de l'Euphrate à Babylone. «Lève-toi, Sion, chante Isaïe, réjouis-toi Jérusalem, détache les liens de ton cou, fille de Sion, parce que le Sau­veur te rachète gratuitement» (Is., 52).

Chantez votre reconnaissance, nous dit David (au ps. 102), parce que la miséricorde divine vient à vous avec l'abondance de ses dons qu'on ne peut comparer qu'à la hauteur du ciel au-dessus de la terre.

Oui, disons notre reconnaissance au cœur eucharistique de Jésus, qui a donné tout son sang pour nous racheter.

IIIe POINT: Qui est là? C'est le modèle de toute sainteté et de toute vertu. - Jésus est là avec tout son cœur, avec les vertus admirables qu'il prati­quait pendant sa vie mortelle. Il peut nous dire encore: «Apprenez de moi que je suis doux et humble de cœur. -je vous ai donné l'exemple afin que vous fassiez comme j'ai fait. -J'aime mon Père et je fais tou­jours sa volonté».

Il n'y a de différence que pour la patience, qui était unie alors à des souffrances réelles, et qui n'est plus unie aujourd'hui qu'à des souffran­ces et à des humiliations mystiques.

Notre-Seigneur ne nous aime pas moins qu'alors. Il est toujours dans la disposition de souffrir, s'il le fallait, autant et plus qu'il a souffert pour le salut de nos âmes.

Jésus-Hostie, c'est Jésus vivant, brûlant d'amour pour son Père et pour nos âmes. C'est Jésus aimant l'humilité, la douceur, la patience. Il est là passionné pour la pureté, pour l'obéissance, pour la prière.

Comment puis-je me présenter devant lui avec mes affections toutes terrestres? Mon âme est toute défigurée. Je suis devenu, comme dit le Psaume, semblable aux animaux qui n'ont pas d'intelligence. Mais Jésus est précisément là pour me transformer par son exemple et par ses grâces et pour me relever de vertu en vertu par l'action du Saint-Esprit (2 Cor., 3).

Résolutions. - Seigneur, présentez encore à votre Père le sang de votre divin Cœur pour me racheter et me purifier. - Aimable et bon Pasteur accueillez la brebis égarée, pardonnez-moi, ne me refusez pas vos cares­ses. Reprenez-moi à votre suite. - Divin modèle de toutes les vertus, instruisez-moi, transformez-moi, unissez-moi à vous.

Colloque avec Jésus-Hostie.

6 Juin
Visites eucharistiques:
le céleste médecin, le chasseur d'âmes, le céleste capitaine

Vere languores nostros ipse tulit, et do­lores nostros ipse portavit; et nos putavi­mus eum quasi leprosum, et percussum a Deo et humiliatum. Ipse autem vulnera­tus est propter iniquitates nostras, attritus est propter scelera nostra; disciplina pacis nostrae super eum et livore ejus sanati su­mus (Isaïe, 53, 4).

Il a pris vraiment nos langueurs sur lui et il s'est chargé de nos douleurs, et nous l'avons considéré comme un lépreux, comme un homme frappé de Dieu et hu­milié. Mais lui a été blessé pour nos ini­quités et brisé pour nos crimes. Le châti­ment qui devait nous procurer la paix est tombé sur lui et nous avons été guéris par ses plaies (Isaïe, 53, 4).

1er Prélude. C'est le céleste médecin qui a pris sur lui nos infirmités, c'est le chasseur d'âmes, c'est le capitaine qui veut nous conduire au combat.

2e Prélude. Seigneur, guérissez-moi, gagnez ma volonté, guidez-moi.

Ier POINT: Qui vient? C'est le céleste médecin qui a pris sur lui nos infirmités, pour nous guérir. - Le prophète Isaïe décrit longuement cette substitution (chap. 53). C'est nous qui sommes malades moralement. Nous nous sommes égarés comme des brebis errantes, nous nous sommes détournés de la voie du Seigneur. Nous étions comme des lépreux par nos péchés, nous méritions d'être abandonnés à la souffrance et à la mort; mais le cé­leste médecin a tout pris sur lui. Il s'élève devant le Seigneur comme un arbrisseau desséché, il est couvert de plaies et abreuvé de mépris. Il n'a plus de beauté. Il va à la mort comme un agneau qui se laisse faire. C'est qu'il a pris sur lui toutes nos responsabilités et toutes les souffrances ré­demptrices que nous aurions dû subir nous-mêmes.

Il a fait plus que le bon Samaritain, il n'a pas seulement pansé nos plaies, il les a prises sur lui.

Rien n'approche de cette générosité. Le Cœur du céleste médecin surpasse tous les cœurs par sa bonté, par son désintéressement.

II' POINT: Qui vient? C'est le chasseur d'âmes. - Oui, le Sauveur qui paraît là inactif dans le tabernacle, est un chasseur ardent. Il a pour ga­gner nos âmes toute la passion qu'ont les chasseurs pour prendre le gi­bier, Jérémie (16, 16) nous représente Dieu qui envoie des groupes de pêcheurs et de chasseurs contre son peuple. Saint Jérôme interprète cela comme se rapportant à nos temps de grâce. Le Sauveur a fait lui-même la chasse des âmes en parcourant la Galilée et la Judée. Puis il a organisé cette chasse et cette pêche par les apôtres et les hommes apostoliques; mais il reste lui-même le chef de cette chasse dans nos tabernacles. Il inspire les hommes apostoliques. Il verse dans leur cœur l'ardeur et le zèle pour le salut des âmes. Puis il lance lui-même ses flèches d'amour dans les cœurs des fidèles qui le reçoivent ou qui le visitent. Le Cœur du bon Maître est le cœur d'un chasseur ardent et passionné qui veut à tout prix se rendre maître de nos cœurs.

Ses flèches sont sa beauté et sa bonté qui touchent nos cœurs et les blessent d'amour. David, au psaume 44, a bien décrit cette chasse des âmes: «O roi, dit-il, vous surpassez en grâce et en beauté les enfants des hommes. Cela vous rend tout puissant sur les cœurs. Servez-vous de vos attraits comme de flèches pour assujettir les cœurs à votre empire, par la puissance de la vérité, de la douceur et de la justice. Vos flèches sont ai­guës, elles blesseront au cœur ceux que vous voulez atteindre».

O divin chasseur, lancez à mon cœur une de ces flèches victorieuses. Blessez-le par votre amour et gagnez-le pour toujours.

IIIe POINT: Qui vient? C'est le céleste capitaine, pour m'armer de foi, de justi­ce et d'amour. - je vais faire alliance avec vous, dit le Seigneur dans Isaïe (55, 3); je vais réaliser la promesse que j'ai faite à David, je vous donne­rai le Sauveur promis; il sera le témoin de la vérité, mais il sera aussi un chef, un capitaine et un précepteur: ducem ac praeceptorem… Vous sortirez avec joie de l'esclavage où vous étiez réduits et vous serez conduits dans la paix.

A qui vient le céleste capitaine? A un soldat sans courage, à un déser­teur, car je ne suis que cela. N'ai-je pas à maintes reprises déserté le ser­vice du divin Roi? N'ai-je pas échappé à mon capitaine? Il vient cepen­dant sans colère. Il veut me rendre mon rang et me refaire chevalier du Roi des rois.

Saint Paul décrit aux Ephésiens (chap. 6) cette armure spirituelle que nous devons revêtir. «Revêtez-vous, dit-il, de toutes les armes de Dieu, car vous avez à combattre contre les puissances infernales. Que la vérité soit la ceinture de vos reins et la justice votre cuirasse. Ayez la chaussure ferme qui symbolise l'apostolat; portez le bouclier de la foi et le casque des pensées célestes. Et comme des âmes aimantes, vivez dans l'union avec Notre-Seigneur, dans le recueillement, dans la prière habituelle». C'est ce lien d'amour qui sera votre arme la meilleure.

Résolutions. - L'union au Cœur de Jésus sera mon salut et ma force. Blessez mon cœur de vos flèches, ô divin chasseur; guérissez ce pauvre cœur malade, ô céleste médecin; armez-moi de foi et d'amour, ô Roi du ciel et faites de moi le chevalier fidèle, assidu et dévoué de votre Cœur.

Colloque avec le Roi du tabernacle.

7 Juin
Visites eucharistiques:
la source de vie, l'arbre de vie, la pierre précieuse

Si scires donum Dei et quis est qui dicit tibi: da mihi bibere, tu forsitan petisses ab eo, et dedisset tibi aquam vivam… Omnis qui bibit ex aqua bac sitiet iterum; qui au­tem biberit ex aqua quam ego dabo ei, non sitiet in aeternum; sed aqua quam ego dabo ei, fiet in eo fons aquae salientis invitam aeternam (S. Joan, 4, 10).

Si tu savais le don de Dieu et qui est ce­lui qui te dit: donne-moi à boire, tu lui de­manderais toi-même à boire et il te don­nerait de l'eau vive… Celui qui boit de ce puits aura encore soif; mais celui qui boi­ra de l'eau que je lui donnerai n'aura plus jamais soif, et cette eau deviendra en lui une source jaillissante pour la vie éternelle (S. Jean, 4, 10).

1er Prélude. Nous avons au tabernacle l'arbre de vie, la source de vie, la pierre pré­cieuse qu'il faut acheter à tout prix.

2e Prélude. Seigneur, c'est votre divin Cœur qui est le fruit de vie et la pierre pré­cieuse, je veux l'acquérir et vous voulez me le donner.

Ier POINT: Qui est là? C'est la source de vie. - Le paradis terrestre avait aussi sa source fécondante. L'eucharistie est la source qui arrose toute la terre d'un torrent de grâces.

La Jérusalem céleste, dit saint Jean, a aussi son fleuve de vie, limpide comme le cristal et découlant du trône de Dieu et de l'agneau. Au ciel ce sera la vie de Dieu et son amour qui rassasieront les élus; mais en atten­dant, c'est l'Eucharistie qui nous donne l'avant-goût du ciel. Elle décou­le du cœur de Jésus, comme une source intarissable. Elle apporte aux âmes le rafraîchissement et la purification dont elles ont besoin (Apoc., 22).

Dans le prophète Jérémie, Dieu reproche à son peuple de l'avoir quit­té, lui, la source de vie pour aller à des citernes vides, c'est-à-dire à des idoles ou à des créatures qui ne peuvent soutenir la vie spirituelle. N'est­-ce pas ce que je fais tous les jours? Quand aurai-je le courage de m'atta­cher à Jésus seul, à son Eucharistie, à son Cœur qui est la vraie source de vie? Il m'y invite comme il y invitait la Samaritaine: «Celui qui boit de l'eau que je donne, disait-il, sera désaltéré. Il n'éprouvera plus la soif maladive d'une âme dévoyée, parce que je suis la source de vie…».

Seigneur, je vous dirai comme la pauvre Samaritaine: Donnez-moi cette eau, afin que je n'aie plus soif. Faites-moi goûter l'amour de votre cœur, pour que je me détache des créatures.

IIe POINT: Qui est là? C'est l'arbre de vie. - C'est le véritable arbre de vie, dont celui du paradis n'était qu'une figure. Celui-là donnait un pain qui soutenait la vie du corps, mais l'Eucharistie est le pain spirituel, le pain de vie descendu du ciel, qui donne l'immortalité de l'âme à ceux qui le mangent dignement.

La cité céleste décrite par saint Jean aura aussi son arbre de vie qui donnera ses fruits variés pour chaque mois et des feuilles propres à gué­rir toutes les infirmités. Nous avons tout cela dans l'Eucharistie. C'est un fruit varié qui n'engendre pas de satiété. Il nourrit la vie spirituelle; les feuilles symbolisent les dons qui accompagnent la grâce: la joie, la paix, le zèle.

Notre-Seigneur a décrit lui-même à Marguerite-Marie la dévotion à son Cœur Eucharistique comme «un arbre sacré, chargé de fruits excel­lents et salutaires, que ce cœur divin veut qu'on distribue avec abon­dance à tous ceux qui désireront d'en manger…» (Lettre au P. Croiset).

IIIe POINT: Qui est là? C'est la pierre précieuse, près de laquelle l'or n'est rien. - Le royaume des cieux, dit Notre-Seigneur (S. Mat., 13), est semblable à une pierre précieuse que découvre un marchand. Il vend tout ce qu'il a pour se la procurer. Nous avons au tabernacle le Roi des cieux.

Il est à notre disposition avec son royaume qui est sa grâce sur la terre en attendant sa gloire au ciel. Ne devrions-nous pas quitter tout et sacri­fier tout pour ce royaume?

Hélas! j'ai délaissé souvent l'Eucharistie et le Cœur de Jésus pour les créatures, comme le peuple d'Israël qui sacrifiait le service de Dieu pour un morceau de pain (Ezech., 13, 19).

Mais la pierre précieuse n'est pas loin. Il est encore temps. Je puis la retrouver et la racheter, si je fais les sacrifices nécessaires. L'Eucharistie est là, le Cœur de Jésus est là au tabernacle. Mais Notre-Seigneur me fi­xe un prix de rachat, c'est tel sacrifice qu'il faut faire, c'est telle attache qu'il faut rompre. Je connais ce prix par mon examen particulier, je le connais par mes confessions habituelles. Je sais ce qu'il faut sacrifier, mais le courage me fait défaut.

Seigneur, aidez-moi, je vous le demande par la bonté de votre cœur et par l'intercession de Marie.

Résolutions. - Voici l'arbre de vie, continuerai-je à le délaisser pour courir au fruit défendu? Voici la source de vie, irai-je encore boire au ruisseau empoisonné? Voici le joyau d'un prix infini, vais-je le dedai­gner pour une jouissance sensuelle? Non, je veux aujourd'hui revenir à mes résolutions salutaires. Je puiserai ma force auprès du tabernacle.

Colloque avec Jésus-Hostie.

8 Juin
Visites eucharistiques:
le pain du ciel, le vin mystique, le feu consumant

At illa venit, et adoravit eum, dicens: Domine, adjuva me. Qui respondens ait: Non est bonum sumere panem filiorum, et mittere canibus. At illa dixit: Etiam, Domine; nam et catelli edunt de micis quae cadunt de mensa dominorum suo­rum (S. Mat., 15, 25).

La Chananéenne vint et l'adora en di­sant: Maître, aidez-moi. Il répondit: Il n'est pas bon de prendre le pain des en­fants et de le jeter aux chiens. Elle reprit: Si, Seigneur,car les chiens mangent les miettes qui tombent de la table de leurs maîtres (S. Mat., 15, 25).

1er Prélude. C'est le pain divin, le pain du ciel, le pain royal, Notre-Seigneur, ne dé­daigne pas cependant d'en offrir à tous.

2e Prélude. Seigneur, je suis indigne de ce don céleste, par pitié donnez-le moi quand même pour me fortifier.

Ier POINT: Qui est là? C'est le pain de vie, le pain du ciel. - Le patriarche Jacob promet à la tribu d'Aser un pain succulent et digne des rois (Gen., 49). Le pain vraiment royal, c'est nous qui le possédons. C'est le pain divin, c'est le pain du ciel. C'est l'Eucharistie. Le peuple d'Israël a eu la manne, mais elle ne soutenait que la vie terrestre. Notre manne entre­tient la vie spirituelle. «Je suis le pain de vie, nous dit le bon Maître. Vos pères ont eu la manne, un pain terrestre, je suis le pain de vie, descendu du ciel. Celui qui mangera de ce pain, vivra éternellement; le pain que je donnerai, c'est ma chair pour la vie du monde» (S. Jean, 6).

Vous offrez ce pain, Seigneur, à ma pauvre âme. Vous pouviez me di­re comme à la Chananeenne: Il n'est pas bon de prendre le pain des en­fants pour le jeter aux chiens. Mais votre cœur est infiniment compatis­sant et miséricordieux.

Vous me donnez ce pain pour me nourrir et pour me fortifier contre toute défaillance: et panis cor hominis confirmet (Ps., 103). Mon action de grâces s'adresse à votre cœur.

IIe POINT: Qui est là? C'est le vin mystique des vierges. - Notre-Seigneur a choisi ce symbole parce que le vin fortifie et donne la joie. Le vin don­ne la joie au cœur, dit le psaume (Ps., 103).

Le roi de Sion viendra, dit le prophète Zacharie, il annoncera la paix aux nations, il délivrera et protégera son peuple; il lui donnera le fro­ment des élus et le vin qui fait germer les vierges (9, 17).

C'est bien l'Eucharistie qu'annonçait le prophète. Le Sauveur nous donne le froment qui forme une jeunesse d'élite, des jeunes gens forts et vaillants, intrépides pour le bien et victorieux dans les tentations. Il nous donne aussi le vin qui rend chastes et purs ceux qui reçoivent bien les saints mystères.

Ce sont les dons du cœur de Jésus. A qui donne-t-il ce vin généreux?

Aux âmes attristées par leurs péchés et leurs tentations. elles retrou­vent la joie et la paix dans la sainte communion.

L'Epoux divin donne à son épouse le vin eucharistique pour échauffer son cœur et y développer le saint amour. L'épouse à son tour donne à l'Epoux son tendre amour qui est comme un vin aromatisé, pour conso­ler le Cœur de ce divin époux (Gant., 8, 2).

Seigneur, donnez-moi ce vin enivrant de l'amour qui remplira mon cœur d'une sainte joie et d'une ardente affection pour vous.

IIIe POINT: Qui est là? C'est le feu consumant, qui vient embraser les cœurs. - Les anges qui voient la beauté divine sont embrasés d'amour. Ils sont ardents comme le feu pour aimer et servir Dieu. Les anges de Dieu, dit saint Paul après David, sont comme des flammes ardentes (aux Héb., 1, 7).

Nous ne voyons pas la beauté divine, mais nous savons la bonté du Sauveur dans les mystères de la rédemption et dans sa vie eucharistique. Il y a là de quoi embraser nos cœurs comme ceux des anges et c'est ce que veut Notre-Seigneur. «Je suis venu, dit-il, pour allumer l'incendie et je n'ai qu'un désir, c'est qu'il se propage» (S. Luc., 12).

Il est là pour cela dans l'hostie, pour aimer et pour se faire aimer. C'est le sacrement d'amour, c'est le mystère d'amour. «Comme il avait aimé les siens, dit S. Jean, il les aima jusqu'à la fin, jusqu'à la limite de l'amour». C'était beaucoup de se donner une fois pour nous sur la croix, mais cela ne suffisait pas à son cœur. Il voulait se donner tous les jours et partout. Il voulait être tous les jours auprès de nous, pour nous écouter, pour nous donner audience, pour nous consoler dans nos tristesses, pour nous guérir de nos infirmités, pour nous fortifier dans nos faiblesses. Et en nous aimant à ce point, il nous prêche l'amour, il nous prêche l'apo­stolat, le dévouement, la charité pour le prochain. C'est un feu toujours prêt à se propager.

Résolutions. - J'irai me nourrir du pain de vie pour y puiser la force, comme Elie la puisa dans un pain symbolique. J'irai boire le vin qui fait les âmes chastes. J'irai réchauffer mon pauvre cœur si froid auprès du cœur de Jésus brûlant d'amour dans le tabernacle. Apprenez-moi, Sei­gneur, à me dévouer comme vous.

Colloque avec Jésus-Hostie.

8 Juin
Pour la fête-dieu

Caro mea vere est cibus et sanguis meus vere est potus. Qui manducat meam carnera et bibit meum sanguinem, in me manet et ego in illo. Sicut misit me vivens Pater, et ego vivo propter Patrem: et qui manducat me et ipse vivet propter me (S. Joan, 6, 56).

Ma chair est vraiment une nourriture et mon sang est vraiment un breuvage. Celui qui mange ma chair et boit mon sang, demeure en moi et moi en lui. Comme mon Père qui m'a envoyé est vi­vant et que je vis par mon Père, ainsi celui qui me mange vivra aussi par moi (S. Jean, 6, 56).

1er Prélude. Les impies blasphèment Saint-Sacrement: les chrétiens l'honorent, le mais combien imparfaitement!

2e Prélude. Seigneur, j'entends le reproche d'Isaïe: Mon peuple m'honore des lèvres, mais son cœur est loin de moi. Changez mon cœur et rendez-moi fervent.

Ier POINT: L'indifférence des chrétiens et surtout du peuple choisi est plus sen­sible à Notre-Seigneur que l'impiété de ses ennemis. - Bien des hommages sont rendus aujourd'hui à Notre-Seigneur, mais il peut appliquer à un grand nombre le reproche du prophète: Mon peuple m'honore des lèvres, mais son cœur est loin de moi.

Le mystère de la présence réelle de Notre-Seigneur au Très Saint Sa­crement, mystère concevable seulement pour la foi véritable, humble et soumise, est pris comme point de mire des railleries, du mépris et de la haine des impies, et cependant cela est moins douloureux au cœur ai­mant de Notre-Seigneur que l'indifférence, la tiédeur, la froideur de tant de cœurs chrétiens et même consacrés. - D'après les apparences exté­rieures, on fait beaucoup, on dépense même beaucoup, mais souvent, c'est pour l'idole de la vanité et de l'amour-propre. Avant tout, c'est le cœur, la bonne et pure intention qui a une valeur aux yeux de Notre­-Seigneur, mais il n'est pas rare que le cœur n'y soit pas, sans lequel ce­pendant tous les autres dons sont sans valeur. Que d'intérêts mesquins ou de satisfactions puériles on a en vue, même dans ces choses saintes! N'y a-t-il pas même des ministres de Dieu qui se préoccupent plus qu'il ne faudrait de la chaleur et de la fatigue? Cependant il y a par ci par là dans la multitude une âme vraiment aimante, ce sont ces âmes ignorées et oubliées qui consolent le Sacré-Cœur.

IIe POINT: Analogie de nos fêtes-Dieu et du dimanche des Rameaux à Jérusalem. - Ce jour a beaucoup de ressemblance avec le dimanche des Ra­meaux, avec l'entrée de Notre-Seigneur à Jérusalem.

Le chemin est semé de fleurs, tous les hommages extérieurs sont pro­digués et l'on crie aussi: «Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur». Mais quelques jours après, souvent le jour même, à la première occa­sion, on entend ces paroles: «Otez-le de là, qu'il soit mis à la croix!». Il y a de nouveau des judas qui trahissent Notre-Seigneur après lui avoir donné le baiser de l'hypocrisie; il y a des Pierre qui le renient, qui agis­sent comme s'ils ne l'avaient jamais connu, qui par curiosité se rendent en des endroits et fréquentent des sociétés où ne vont que les ennemis du Sauveur, les ennemis de la croix. Il y a toujours des disciples qui par crainte d'être méprisés ou d'avoir à souffrir, se tiennent à l'écart, s'en­quièrent des outrages faits à leur Maître, mais n'ont pas le courage de le suivre. Cependant, il y a aussi encore des saint Jean, qui le suivent jusque sous la croix, le reconnaissent devant tout l'univers et se mon­trent prêts à partager le sort de leur Maître bien-aimé.

Il y a encore des femmes généreuses qui gravissent le Calvaire en mar­chant sur les traces sanglantes de leur Rédempteur, de l'Agneau­ victime.

IIIe POINT: La Passion de Notre-Seigneur est renouvelée dans le Saint­Sacrement, et il attend l'hommage de nos cœurs. - Dans le Saint-Sacrement, Notre-Seigneur éprouve encore des choses analogues aux scènes de sa Passion. Il est de nouveau maltraité par un grand nombre. Il est pris et lié par ceux qui attachent ses mains pleines de grâces pour qu'il ne puis­se pas les leur donner. Il est tourné en dérision, regardé comme un se­ducteur et un menteur par ceux dont la foi faible semble dire qu'ils le ju­gent ainsi. Il est offensé et traîné dans la fange par leurs mains et leurs cœurs impurs. Il est revêtu d'un manteau de dérision par la profanation que plusieurs font de leur saint état et de leur dignité. Il est emprisonné dans des cœurs assombris et infectés par le péché et les passions. Il est flagellé par les péchés de la chair, couronné d'épines par l'orgueil et la vanité, outragé par la désobéissance, l'ambition, la révolte. Ses chutes douloureuses sont renouvelées par les rechutes fréquentes dans les an­ciennes habitudes. Le dépouillement de ses vêtements est renouvelé par l'immodestie et les péchés de la chair. Mais son cœur est principalement blessé par l'ingratitude, l'indifférence, la tiédeur et l'abus des grâces de son peuple choisi.

Ce sont les cœurs, c'est l'amour, c'est la volonté qu'il demande. Ils sont de plus grand prix que toute la pompe et les décorations extérieures. Si le pur amour et la bonne intention manquent, tout le reste est sans va­leur à ses yeux.

Offrons pour le consoler les actes d'adoration et d'amour que lui of­frait sa sainte Mère, comme aussi ceux de son disciple bien-aimé saint Jean et de toutes les âmes qui l'ont tendrement aimé.

Résolutions. - Seigneur, pour réparer les outrages qui vous sont faits dans l'Eucharistie et la froideur des âmes qui devraient tant vous aimer, je vous offre l'amour de Marie, de saint Jean, des cœurs qui vous ont le plus aimé, de sainte Gertrude, de Marguerite-Marie, de tous les saints du Sacré-Cœur.

Je veux vous servir moi-même avec amour, avec des intentions très pures et des soins délicats, particulièrement au saint autel.

Colloque avec Jésus au Saint-Sacrement.

9 Juin
Visites eucharistiques:
c'est le désire des nations;
c'est une mère et plus qu'une mère;
c'est l'homme de douleurs blesse pour nous

Vidimus eum et non erat aspectus, et desideravimus eum: despectum et novissi­mum virorum, virum dolorum et scien­tem infirmitatem… Ipse autem vulnera­tus est propter iniquitates nostras, attritus est propter scelera nostra: disciplina pacis nostrae super eum et livore ejus sanati su­mus (Isaiae, 53, 3).

Nous l'avons vu et il était sans beauté et nous l'avons méconnu; il nous a paru le dernier des hommes, un homme de dou­leurs et d'infirmités… Mais c'est pour nos iniquités qu'il a été blessé, il a été écrasé à cause de nos fautes. Notre expiation a pe­sé sur lui et nous avons été guéris par ses souffrances (Isaïe, 53, 3).

1er Prélude. Jésus-Hostie, c'était le désiré des nations. Il a pour nous un cœur de mè­re. Il a été accablé de souffrances pour nos péchés.

2e Prélude. Gagnez enfin mon cœur, ô mon Sauveur, j'ai soif de votre amour.

Ier POINT: Qui vient? C'est le Sauveur désiré et attendu par les nations. - Le patriarche Jacob le disait en bénissant son fils Juda: «Le sceptre ne sorti­ra pas de Juda, disait-il, jusqu'à ce que vienne celui qui doit venir et il sera le désiré de tous les peuples» (Gen., 41). Nous le savons, Israël at­tendait le Messie et tous les peuples souhaitaient un Sauveur. Nous le possédons, nous, ce Sauveur, dans le tabernacle, et nous n'allons pas à lui!

Et Jésus à son tour désirait cette pâque où il se communiquerait à nous (S. Luc, 22). Il désire encore ardemment nos visites, nos commu­nions. Et nous, nous restons tièdes. Notre âme veut et ne veut pas. Elle n'a que des velléités (Prov., 21, 25). Le Cœur de Jésus en est attristé.

Il veut notre visite pour allumer en nos cœurs le feu des saints désirs. Mon âme est cette Jérusalem décrite par Jérémie (Lam., 1), toute dé­solée, dévastée, sans énergie et sans force. J'irai au tabernacle recevoir les effluves de la sagesse et de la force divines.

IIe POINT: Qui vient? C'est le Sauveur qui se dit notre mère et plus que notre mère. - «Sion, disait: Le Seigneur m'abandonne et m'oublie. - Non, répond le Seigneur, est-ce qu'une mère peut oublier son enfant et le fruit de ses entrailles? Et si même, une mère pouvait négliger son enfant, moi je ne vous oublierai pas» (Is., 49, 14).

Nous avons donc au tabernacle, une mère et plus qu'une mère. D'où vient que nous n'allons pas avec plus de confiance au Cœur eucharisti­que de Jésus?

Qui suis-je? un petit enfant qui a besoin d'être allaité du lait royal. Le Sauveur est là pour me le donner. Le prophète l'a promis: «Tu auras le lait royal disait-il à Sion, et tu sauras que je suis ton Sauveur, ton Re­dempteur et ta force» (Is., 60).

J'ai là au tabernacle le pain des forts, la manne qui délecte et nourrit. Si je ne néglige pas ce banquet, cet aliment divin, je croîtrai en force et en grâce. C'est l'intention de Notre-Seigneur.

Comme de petits enfants, dit saint Pierre, désirez et goûtez le lait spiri­tuel, pour que la grâce du salut grandisse en vous (1 Ep. de S. Pierre, 2, 2). Croissez, nous dit saint Paul, jusqu'au développement de l'homme parfait, pour que vous ne soyez plus comme des enfants sans volonté; ac­complissez vos devoirs par amour, afin que vous croissiez sans cesse dans le Christ qui est votre chef (aux Eph., 4, 13).

J'irai donc au tabernacle puiser le lait de la sagesse et l'esprit de chari­té au cœur du Christ.

IIIe POINT: Qui vient? C'est l'homme de douleurs, blesse pour nous. -Jésus a gardé ses stigmates. Au tabernacle, il ne souffre plus, mais il est encore marqué des signes de l'homme de douleurs. Il est encore l'agneau im­molé et offert en victime à son Père. L'apparence du pain nous rappelle qu'il a été broyé comme du blé.

Il a accepté cette attitude humiliée, cette vie cachée sous l'hostie. Il est là, exposé à tous les mépris, à tous les oublis, à tous les sacrilèges. Quel contraste! Il vient à mon âme qui est avide de ses aises; à mon âme qui est ennemie de la croix et qui préfère une couronne de roses à la couronne d'épines; mais il vient pour m'enseigner la voie du sacrifice, qui conduit au ciel. Ceux qui sont du Christ, dit saint Paul; ceux qui connaissent et qui aiment le Christ, crucifient leur chair avec ses vices et ses concupiscences (aux Gal., 5, 24).

Je suis cloué à la croix avec le Christ, dit-il encore. Je ne vis plus, c'est le Christ qui vit en moi, le Christ crucifié, humble, obéissant, détaché des créatures (aux Gal., 2, 19).

J'irai au pied du tabernacle demander ces leçons au Cœur de Jésus.

Résolutions. - Je ne serai plus indifférent pour le Sauveur que toutes les nations attendaient je puiserai auprès de lui les grâces du salut. Il est pour moi comme une mère, j'irai avec une affection filiale me nourrir du lait de la grâce. J'irai à l'homme de douleurs apprendre le sacrifice, l'obéissance et l'abnégation.

Colloque avec Jésus-Hostie.

10 Juin
Visites eucharistiques:
le bon samaritain, le fils du roi qui m'invite à ses noces, l'hôte qui frappe a la porte de mon cœur

Samaritanus autem quidam iter fa­ciens, venit secus eum; et videns eum, mi­sericordia motus est. Et appropians alliga­vit vulnera ejus, infundens oleum et vi­num, et imponens illum in jumentum suum, duxit in stabulum et curam ejus egit (S. Luc, 10, 33).

Un Samaritain qui passait vint au bles­sé, et le voyant, il fut touché de miséricor­de. Et s'approchant, il pansa ses blessures y versa l'huile et le vin et le mettant sur son cheval il le conduisit à l'hôtellerie et en prit soin (S. Luc, 10, 33).

1er Prélude. Jésus-Hostie est le bon Samaritain, il est le Fils du Roi qui invite à ses noces, il est l'hôte qui frappe pour être reçu dans mon cœur.

2e Prélude. Moi, Seigneur, je suis le pauvre blessé du chemin. Secourez-moi, guérissez-moi.

Ier POINT: Qui vient? le bon samaritain qui passe auprès des blessés. - Il est certain que N.-S. a voulu se dépeindre lui-même sous les traits du bon samaritain. Il a voulu nous révéler sous cette parabole toute la bonté et la compassion de son Cœur. Et s'il a été le bon samaritain dans sa vie mortelle en semant partout ses soins, ses consolations, en secourant et en guérissant tous les blessés et les malades, il n'a pas endurci son Cœur dans l'Eucharistie. Il est là avec la même bonté, la même tendresse pour ceux qui souffrent. Il dit encore: «Venez à moi, vous tous qui peinez et qui souffrez, et je vous soulagerai».

J'irai à lui, je lui montrerai mes plaies, les plaies spirituelles surtout. Il y mettra l'huile qui adoucit et le vin qui cautérise. Il me soulagera, j'en suis sûr.

Voyez Seigneur, dans quel état m'ont réduit les tentations de la chair, du monde et du démon, relevez-moi, guérissez-moi.

IIe POINT: Qui vient? le Fils du Roi pour m'inviter aux noces. - Isaïe avait entrevu le festin quotidien de la nouvelle alliance. «Le Seigneur des ar­mées, disait-il, préparera aux peuples fidèles sur la montagne de Sion, qui est l'Eglise, un festin de viandes délicieuses, un festin de vins exquis, de viandes pleines de suc et de moelle, d'un vin pur et limpide». Ce sera l'avant goût du ciel (Is., 25, 6).

Dans l'Evangile, Notre-Seigneur appelle ce festin les noces du Fils du Roi (S. Mat., 22). Le Roi invite ses serviteurs, ils ne viennent pas; il invite alors les inconnus, les gens du dehors. Plusieurs viennent, mais l'un d'eux n'a pas la robe nuptiale, il a une robe souillée, on le jette dehors. Les serviteurs, c'était le peuple juif. Les gens du dehors, c'est nous. Nous nous présentons peut-être au festin avec quelque souillure. Si au moins, nous avions l'humilité et le repentir, comme la Madeleine, com­me la Samaritaine, comme le bon larron! Le fils du Roi a le Cœur si bon et si miséricordieux, il nous purifierait et nous accueillerait.

Allons à lui dans ces dispositions, il nous accueillera. Nous aurons part au festin délicieux de l'Eucharistie. Il nous rassasiera, il nous don­nera le dégoût des viandes nuisibles. Il nous fera désirer le grand festin des noces royales du ciel entrevu par saint Jean dans l'Apocalypse (19).

IIIe POINT: Qui vient? c'est l'hôte qui frappe à la porte de mon cœur pour que je lui ouvre. - Me voici à la porte, dit Notre-Seigneur, je frappe, ouvrez­moi. Si quelqu'un entend ma voix et m'ouvre la porte, j'entrerai chez lui et nous souperons ensemble (Apol., 3, 20).

Notre-Seigneur désire notre amitié, notre intimité et l'union avec nous. Quand répondrons-nous à son désir, à l'attente de son cœur? Ouvre-moi, mon épouse, dit-il, ouvre-moi, je secouerai la rosée de mes cheveux (Gant., 5, 2). C'est là un symbole des grâces promises. Mais jusqu'à présent mon âme a été ingrate et mon cœur a été dur. Je me suis tourné vers les créatures, comme ont fait les vierges folles. Je n'ai pas entretenu dans la lampe de mon cœur l'huile de la ferveur (S. Mat., 25).

Comme le serviteur infidèle, je n'ai pas fait fructifier mon talent.

Si c'était le jour du jugement. Notre-Seigneur pourrait me dire: j'ai eu faim et soif de votre amour, de vos visites, de vos réparations au ta­bernacle, et vous ne m'avez pas rassasié. J'étais prisonnier et vous ne m'avez pas visité. J'étais triste et souffrant et vous ne m'avez pas con­solé.

C'est vrai, Seigneur. Je suis un ingrat, j'ai un cœur dur comme la pierre. Je suis dissipé et attaché aux créatures. Changez-moi, convertissez-moi. J'éprouve aujourd'hui une soif indicible de votre amour.

Résolution. - Je me présenterai tous les jours au bon Samaritain, il pansera mes plaies, je répondrai à l'invitation du Fils du Roi, mais je me présenterai avec la robe nuptiale, avec mon âme purifiée par la pénitence. Je répondrai enfin aux appels du prisonnier du tabernacle.

Colloque avec Jésus-Hostie.

11 Juin
Saint Barnabé, apôtre

Joseph autem, qui cognominatus est Barnabas ab apostolis (quod est interpre­tatum Filius consolationis), Levites, Cy­prius genere, cum haberet agrum, vendi­dit eum, et attulit pretium et posuit ante pedes apostolorum (Act., 4, 36).

Joseph surnommé Barnabé par les apô­tres (ce qui veut dire Fils de la consola­tion), était Lévite et Cypriote de race; comme il acait un champ, il le cendit, en apporta le prix et le déposa aux pieds des apôtres (Actes, 4,36).

1er Prélude. Saint Barnabé apparaît dans ce texte comme un apôtre aimable, géné­reux et dévoué. Il devait être cher au Sacré-Cœur.

2e Prélude. Saint apôtre, demandez à Notre-Seigneur pour moi le goût de l'étude et de la piété, le détachement des biens de la terre et le zèle pour le salut des âmes.

Ier POINT: Le détachement. - Saint Barnabé n'était pas du nombre des douze apôtres, mais il leur a été adjoint et il a travaillé beaucoup avec saint Paul. Lévite et cypriote, il étudiait les saintes Lettres à Jérusalem sous la direction du rabbin Gamaliel, quand il fut témoin de la guérison du paralytique à la piscine. Il s'unit alors aux disciples de Notre­-Seigneur. C'était un jeune homme aimable et bon. Il était bon, disent les Actes, et plein de foi et richement doué des dons de l'Esprit-Saint. Les apôtres le surnommèrent Barnabé, ce qui veut dire «le Fils de la con­solation». Après la Pentecôte, il était à Damas quand eut lieu le miracle de la conversion de saint Paul. Il se fit l'ange gardien de saint Paul, il le conduisit à Jérusalem et le présenta aux apôtres. Ils travaillèrent ensem­ble plusieurs années, et ils reçurent la mission de prêcher la foi aux gen­tils. Ils gagnèrent presque toute la ville d'Antioche.

Barnabé était d'une famille aisée. Il avait une belle propriété à l'île de Chypre. Il la vendit et en apporta le prix aux apôtres. Il donnait ainsi le grand exemple du détachement et de la vie religieuse.

IIe POINT: Le zèle. - Il y avait à Antioche tout un groupe de prêtres, de prophètes et de docteurs. Le Saint-Esprit leur révéla positivement la mission de Paul et de Barnabé pour la conversion des gentils. Ils envoyè­rent donc ces deux apôtres vers les pays d'occident. Barnabé et Paul pas­sèrent en l'île de Chypre où ils firent merveille et gagnèrent à la foi le proconsul lui-même, Sergius Paulus. Ils allèrent de là en Asie-Mineure et ils prêchèrent en Pisidie, à Pergen, à Antioche, à Iconium, à Lystra. Ce fut une alternative de succès et de persécutions.

A Lystra, un curieux incident montre combien les deux apôtres étaient admirables dans leur zèle, dans la puissance de leur parole et dans leur dignité de vie. Le peuple témoin de leurs miracles les prit pour des dieux. Paul, le brillant orateur devait être Mercure, Barnabé, le saint lévite au port majestueux semblait être Jupiter. Déjà on voulait leur offrir des sacrifices. Ils durent se démener pour empêcher ce sacrilè­ge. Mais le lendemain des juifs d'Antioche et d'Iconium viennent les poursuivre de leurs calomnies, et le peuple si mobile dans ses sentiments les chasse à coups de pierre. Ils retournèrent à Antioche et se séparèrent ensuite. Barnabé repassa en Chypre et y affermit les chrétientés qu'il avait fondées précédemment. Il alla ensuite prêcher en Italie, puis il re­vint mourir en Chypre.

IIIe POINT: La charité. - Il avait bien le cœur ardent et généreux d'un disciple et d'un apôtre de Notre-Seigneur. Il a tout quitté pour Notre-Seigneur et donné son bien aux pauvres. Il aime tant le Christ qu'il en prend le nom. Il s'appelle chrétien et donne ce nom aux conver­tis d'Antioche. Comme il est bon pour saint Paul! Il l'accompagne de Damas à Jérusalem, il le présente aux apôtres, et il vit avec lui plusieurs années, partageant ses fatigues, ses travaux, ses privations, ses persécu­tions. Il s'attache aux gens de Chypre, de Salamine, la capitale de l'île et se dévoue à les sanctifier. C'est là que Notre-Seigneur lui demandera le sacrifice de sa vie, après qu'il l'aura confirmé dans la ferveur et la chari­té.

Barnabé avait tant de succès à Salamine que les juifs récalcitrants ré­solurent de le perdre. Il partagea cet honneur avec Notre-Seigneur. Comme ils avaient crucifié le Maître, ils lapidèrent le disciple. Ils voulu­rent brûler son corps, mais les flammes le laissèrent intact, comme elles épargnèrent saint Jean le disciple bien aimé. Quelques siècles plus tard en 465, on ouvrit son tombeau, pour transporter ses reliques à Constan­tinople, on le trouva entier et, sur sa poitrine l'Evangile de saint Mat­thieu, qu'il avait transcrit de sa propre main. Ses disciples avaient mis auprès de lui l'Evangile qu'il aimait tant.

Résolution. - Voilà un beau modèle à imiter. Saint Barnabé est un di­sciple bien aimable, il est bon, pieux, charitable pour le prochain. Il a aussi les vertus les plus austères, il s'est dépouillé de ses biens, il a bravé toutes les contradictions. Je veux à son exemple secouer ma tiédeur.

Colloque avec saint Barnabé.

12 Juin
Visites eucharistiques:
le Dieu caché, le souverain prêtre
le riche héritier de son père

Erat quidam mendicus nomine Laza­rus, qui jacebat ad januam ejus ulceribus plenus, cupiens saturari de micis quae ca­debant de mensa divitis, et nemo illi da­bat… Factum est ut moreretur mendicus et portaretur ab angelis in sinum Abrahae (S. Luc, 16, 20).

Il y avait un mendiant nommé Lazare, couché à la porte du riche et couvert d'ul­cères, et avide de recueillir les restes de la table du riche, et on ne les lui donnait pas… Il arriva que le mendiant mourut et les anges le portèrent dans le sein d'Abra­ham (S. Luc, 16, 20).

1er Prélude. Jésus-Hostie, c'est le Dieu caché, c'est le prêtre dévoué, c'est le riche hé­ritier, qui nous fait part de son héritage.

2e Prélude. Seigneur, je suis pauvre spirituellement et couvert d'ulcères comme La­zare. Vous êtes le bon riche, donnez-moi les restes de votre table.

Ier POINT: Qui vient? C'est le Dieu caché. - Oui, Seigneur, vous êtes vraiment le Dieu caché, comme le disait prophétiquement Isaïe (45, 15). Vous étiez le Dieu caché dans l'humilité et la pauvreté de Bethléem et de Nazareth et dans les souffrances de la Passion. Vous êtes encore le Dieu caché dans l'hostie du tabernacle.

Vous invitez mon âme à se cacher aussi dans l'humilité et le recueille­ment pour s'entretenir avec vous.

Vous le disiez déjà au peuple d'Israël par le même prophète Isaïe (16, 20): Venez, mon peuple, entrez dans le secret de votre chambre, fermez vos portes sur vous et tenez-vous un peu caché pour un moment, jusqu'à ce que ma colère passe et châtie les méchants. - Vous avez souvent in­vité vos apôtres à se retirer dans la solitude. Vous m'appelez devant le tabernacle, pour jeter en mon cœur une pleine mesure de grâces.

IIe POINT: Qui vient? Le Souverain Prêtre, saint et puissant dans sa prière. - Le sacerdoce de l'ancienne loi était bien imparfait. Dieu a juré d'établir le sacerdoce nouveau, selon l'ordre de Melchisédech. Jésus est le seul prêtre, il demeure éternellement, il possède un sacerdoce éternel, et il est toujours prêt à sauver ceux qui s'approchent de Dieu par son entremise, étant toujours vivant pour intercéder pour nous. Il est le pontife saint qu'il nous fallait, le pontife innocent, séparé des pécheurs et plus élevé que les cieux, qui n'est point obligé, comme les autres, d'offrir tous les jours des victimes pour ses propres péchés (aux Héb., 7).

Il est prêtre et il est victime de propitiation. Il s'est offert pour nous (1 ép. de S. Jean, 2, 2).

Il vient à une âme sacerdotale. «Vous êtes, nous dit saint Pierre, un ordre de saints prêtres, destinés à offrir à Dieu des hosties spirituelles qui lui soient agréables par Jésus-Christ. Le Cœur de Jésus est l'autel de vos sacrifices, vous êtes la race choisie, l'ordre des prêtres rois, la nation sainte, le peuple conquis, afin que vous publiiez les grandeurs de celui qui vous a appelés des ténèbres à son admirable lumière» (1 ép. de S. Pierre, 2).

J'irai donc devant le tabernacle, Jésus y acceptera la consécration de mon cœur, pour en faire un cœur vraiment sacerdotal. J'y offrirai des hosties de louange, d'amour, d'impétration, de réparation. Je les pré­senterai à Dieu sur le Cœur de Jésus qui est l'autel par excellence. Lui seul peut offrir à son Père des hosties qui soient agréées, parce qu'il est le seul prêtre éternel.

IIIe POINT: Qui vient? C'est le riche héritier de son Père, qui vient se dépouil­ler pour nous enrichir. - «Vous savez, dit saint Paul, quelle a été la bonté de Notre-Seigneur Jésus-Christ, qui étant riche, s'est rendu pauvre pour l'amour de vous, afin que vous devinssiez riches par sa pauvreté» (2 aux Cor., 8).

Seigneur, je suis un pauvre mendiant tout couvert d'ulcères, comme ce Lazare que vous avez décrit dans l'Evangile (S. Luc., 16). Il attendait à la porte du mauvais riche et il aurait été heureux de recevoir les restes ou les miettes du festin.

Mais je suis plus heureux que Lazare, parce que je m'adresse à un bon riche, à un riche dont le Cœur est rempli de miséricorde et de géné­rosité. Vous êtes ce riche. Devant le tabernacle, je suis à votre porte. Ce ne sont pas seulement les miettes que vous me donnerez. Vous m'offrez tout le trésor de vos mérites. Vous vous êtes dépouillé pour m'enrichir, vous avez tout sacrifié pour moi. Vous avez épousé la pauvreté, l'humi­lité, les mépris, les souffrances, pour payer toutes mes dettes et pour m'enrichir par vos sacrifices.

Que vous rendrai-je, Seigneur, pour cette infinie bonté de votre Cœur? J'irai à vous avec confiance, c'est tout ce que vous demandez de moi. Vous m'attendez pour me combler de vos bienfaits.

Résolutions. - J'irai à mon Dieu, le Dieu caché, qui m'attend pour m'entretenir dans la retraite.

J'irai au Prêtre éternel, qui veut m'unir à son sacerdoce. Je déposerai sur son Cœur mes hosties de louange, de réparation et d'amour. J'irai à mon riche bienfaiteur, qui veut me faire part de ses richesses.

Colloque avec Jésus-Eucharistie.

13 Juin
Saint Antoine de Padoue
1195-1231

Beatus dives qui inventus est sine ma­cula, et qui post aurum non abiit, nec spe­ravit in pecunia et thesauris! Quis est hic et laudabimus eum? fecit enim mirabilia in vita sua (Eccl., 31, 8).

Heureux le riche qui reste sans péché, qui ne s'attache pas à la recherche de l'or et ne met pas son espérance dans la riches­se! Qui est-il? Nous le louerons, car il a fait des merveilles dans sa vie (Eccl., 31, 8).

1er Prélude. Saint Antoine était de noble famille, il a embrassé la pauvreté par un ar­dent amour pour Notre-Seigneur, et pour le récompenser, Notre-Seigneur l'a aimé, l'a visité et lui a accordé le don des miracles.

2e Prélude. Grand saint, vous étiez par votre ardent amour pour Notre-Seigneur un saint du Sacré-Cœur, aidez-nous à faire régner le Cœur de Jésus dans nos cœurs et dans la société.

Ier POINT: Il a aimé Notre-Seigneur jusqu'à désirer le martyre. - Saint An­toine de Padoue a été un des saints les plus aimants pour Notre­Seigneur, c'est pour cela qu'il plaît à Notre-Seigneur de donner un grand éclat à son culte au moment même où se propage la dévotion au Sacré-Cœur.

Antoine de Padoue, dans le monde Ferdinand de Bouillon, était d'une famille de saints. Il était le petit neveu de Godefroy de Bouillon, lequel était le fils de sainte Ida, comtesse de Boulogne. Il naquit à Lisbonne, dans l'hôtel de sa famille, près de la cathédrale. A cinq ans, déjà tout pé­nétré de sainteté, il fait voeu de virginité. A dix ans, il est placé à l'école des clercs de Notre-Dame-Del-Pilar. Il est le modèle des écoliers. Le démon vient le tenter sous une forme hideuse, le petit clerc le chasse par un signe de croix tracé sur le sol et resté marqué miraculeusement sur le marbre.

Il devient religieux augustin au convent de Sainte-Croix, à Coïmbre. Son amour pour Notre-Seigneur croissait toujours. Il envie le sort de pieux religieux franciscains qui vont porter la foi au Maroc au péril de leur vie, et quand on rapporte leurs dépouilles à Coïmbre, après qu'ils ont été martyrisés, il brûle de mourir aussi pour le Sauveur qui est mort pour nous. Il se fait franciscain pour aller aussi au Maroc. Et nous, sentons-nous assez l'amour de Notre-Seigneur en nos cœurs, pour dési­rer de faire pour lui quelques sacrifices?

IIe POINT: L'apôtre du Sacré-Cœur. - La Providence n'a pas voulu qu'il aboutît au Maroc, il a été jeté sur les côtes de Sicile. Il va réchauffer encore son cœur auprès de celui de saint François d'Assise. Son talent se révèle, on le fait professeur, puis missionnaire. Il gagne des âmes innom­brables à l'amour de Notre-Seigneur. Il fut, au XIIIe siècle, dit le P. Marie-Antoine, le docteur et l'écrivain du Cœur de Jésus. Il ramène toujours ses auditeurs à la pensée de l'amour, comme but final de la vie chrétienne, et c'est dans le Cœur du Sauveur qu'il montre la source et le trône de cet amour.

Il dit: «Oui, la blessure du côté de Jésus est un soleil qui éclaire tout homme. Par l'ouverture du Sacré-Cœur fut ouverte la porte du paradis d'où nous vient toute lumière. C'est là qu'est l'asile assuré de l'arche de paix et du salut. Le Sauveur ouvrit son côté et son Cœur à la colombe, c'est-à-dire à l'âme religieuse, afin qu'elle y pût trouver une retraite.

Soyez comme la colombe qui établit son nid au plus profond de la pierre. Si Jésus-Christ est la pierre, le creux de la pierre est la plaie du côté de Jésus, qui mène à son Cœur.

Il y avait dans l'ancienne loi deux autels, l'autel d'airain ou des holo­caustes, qui était hors du sanctuaire, et l'autel d'or du sanctuaire même. L'autel d'airain de la loi nouvelle est le corps sanglant du Christ immolé en présence du peuple; l'autel d'or est son Cœur brûlant d'amour, et là est l'encens qui monte vers le ciel».

Ses succès étaient merveilleux.

Si nous voulons gagner des âmes à Notre-Seigneur, il faut d'abord nous exciter à son amour. La ferveur de notre cœur se communiquera facilement à ceux qui seront en relations avec nous.

IIIe POINT: Ses beaux miracles sont une récompense de son amour pour Notre­Seigneur. - Ses prodiges sont innombrables. Mais leur caractère même montre combien il était uni à Notre-Seigneur par un tendre amour. - Une nuit de Noël, comme il était retenu à l'infirmerie par les devoirs de sa charge, à Coïmbre, il entendit sonner l'élévation. Il désirait bien voir l'Hostie et adorer son Sauveur naissant, il se mit à genoux, les murs s'ouvrirent et il assista à l'élévation.

Plus tard, c'était au Puy, comme il priait la nuit, l'Enfant Jésus de­scendit vers lui, se mit dans ses bras et lui fit mille caresses. Son hôte qui passait devant sa chambre vit cela. C'est le miracle que l'on représente ordinairement.

Ces prodiges montrent le tendre amour réciproque de Jésus et d'An­toine.

Maintenant, saint Antoine est le pourvoyeur des pauvres. Son cœur s'est identifié avec celui de Jésus. Il a pitié des foules, comme Jésus avait pitié d'elles en Galilée. Il distribue le pain par un miracle de providence. Il dit aux âmes: «Donnez-moi du pain pour mes pauvres, et j'obtiendrai pour vous auprès de Dieu les grâces dont vous avez besoin».

Ayons confiance en ce grand ami du Sacré-Cœur. Demandons-lui d'apaiser les dissensions sociales qui règnent aujourd'hui. Prions-le de nous aider à faire régner le Cœur de Jésus.

Résolutions. - Ayons une grande dévotion à saint Antoine en la rap­portant au Sacré-Cœur. Il a mission de faire aimer le Sacré-Cœur. Il manifeste sa bonté pour les âmes et pour les pauvres.

Aidons-nous de son intervention puissante auprès du Cœur de Jésus. Colloque avec saint Antoine.

14 Juin
Visites eucharistiques:
l'ami, le frère, le père miséricordieux

Dixit autem pater ad servos suos: Cito proferte stolam primam, et induite illum, et date annulum in manum ejus et calcea­menta in pedes ejus; et adducite vitulum saginatum et occidite, et manducamus et epulemur; quia hic filius meus mortuus erat et revixit; perierat et inventus est (S. Luc, 15, 22).

Le père dit à ses serviteurs: Apportez vite la meilleure robe et revêtez-le, donnez-lui un anneau au doigt, des chaussures aux pieds; apportez un veau gras et tuez-le, nous mangerons et ferons un festin; parce que cet enfant était mort et il revit; il était perdu et il est retrouvé (S. Luc, 15, 22).

1er Prélude. Jésus-Eucharistie est l'ami, le frère compatissant, le père miséricordieux.

2e Prélude. Je me lèverai et j'irai à mon père avec humilité et il me rendra tout ce que j'ai perdu.

Ier POINT: Qui vient? C'est l'ami fidèle et généreux. - Qui vient? C'est l'ami véritable. Il nous l'a dit: «Vous êtes mes amis», et il sait ce que c'est que le véritable ami. Il l'a décrit au livre de l'Ecclésiastique et dans son discours après la Cène.

L'Ecclésiastique loue les amis fidèles, ceux qui ont une conversation aimable et qui aiment la paix, ceux qui ne séloignent pas au jour de l'af­fliction, ceux qui sont fermes et constants. L'ami fidèle est une forte pro­tection. Celui qui l'a trouvé a trouvé un trésor. Rien n'est comparable à l'ami fidèle. Il vaut plus que l'or et l'argent. Il est un remède qui donne la vie et l'immortalité… (Eccl., 6).

Notre-Seigneur est pour nous ce trésor, puisqu'il nous a appelés ses amis (S. Jean, 15, 15). Il s'est dépeint aussi quand il a dit que le vérita­ble ami donne sa vie pour ses amis.

Allons au Cœur eucharistique de Jésus comme au Cœur d'un ami fi­dèle, d'un véritable ami dévoué sans mesure. Il ne nous permet pas de douter de sa tendre amitié.

IIe POINT: Qui vient? Le frère â son frère coupable, pour le ramener et lui par­donner. - Oui, quoique Dieu, il ne rougit point de nous appeler ses frè­res: non confunditur fratres eos vocare. Saint Paul exprime abondamment son admiration à ce sujet, dans les premiers chapitres de sa lettre aux Hé­breux. «Autrefois, dit-il, Dieu a parlé à nos pères par les prophètes, mais de nos jours c'est par son propre Fils, qui a créé le monde avec lui et qu'il a fait héritier de toutes choses. Il est la splendeur de sa gloire et l'image de sa substance; il soutient tout par la puissance de sa parole, et après nous avoir purifiés de nos péchés, il est assis au plus haut des cieux, à la droite de la Majesté divine, étant aussi élevé au-dessus des an­ges que son nom le comporte, car qui est l'ange à qui Dieu ait jamais dit: Vous êtes mon Fils, je vous ai engendré aujourd'hui, et encore: je serai son Père et il sera mon Fils?… L'écriture dit des anges que Dieu les a fait ses ministres, mais elle dit au Fils de Dieu! Votre trône, ô Dieu, sera un trône éternel… Et ailleurs, le reconnaissant pour le Créateur de toutes choses, elle lui dit: Seigneur, vous avez créé la terre dès le commence­ment du monde… Aussi, qui est l'ange auquel le Seigneur ait dit: Asseyez-vous à ma droite jusqu'à ce que j'aie réduit vos ennemis à vous servir de marchepied?… «Cependant son Fils adorable, Dieu l'a rendu pour un peu de temps inférieur aux anges, en le faisant passible et mortel, mais il l'a ensuite couronné de gloire et d'honneur. Il était digne de Dieu que pour conduire à la gloire ses enfants, il con­sommât par les souffrances celui d'entre eux qui devait être l'auteur de leur salut. Car le Sauveur et les rachetés sont de la même race humaine et il ne dédaigne pas de les appeler ses frères…». Tel est le magnifique enseignement de saint Paul. L'hôte du taberna­cle est notre frère, un frère aimant, qui s'est sacrifié pour nous, com­ment hésiterions-nous à aller lui dire notre amour?

IIIe POINT: Qui vient? Le Père de miséricorde qui nous aime tendrement. - Il nous appelle ses petits enfants: filioli. Il s'est dépeint avec complaisance dans la parabole de l'enfant prodigue.

Je suis ce fils prodigue, qui a vécu, sinon dans la luxure, du moins dans la vanité et l'inutilité.

Je reviens à mon Père, hésitant, timide, craintif, mais lui est là qui m'attend avec amour. Son Cœur bat fortement dans sa poitrine. Il me désire avec ardeur, il regarde, il cherche. Et si je reviens, il se jette à mon cou et me presse contre lui, cœur contre cœur.

Et il appelle ses serviteurs, ses anges, pour me rendre tout ce que j'ai perdu. Rien n'y manque: la robe d'autrefois, l'anneau de noblesse, les chaussures, et le veau gras pour le festin. Le Cœur de Jésus est ému; ses yeux pleurent de tendresse, puis ils sourient de joie, «Réjouissons-nous, dit le bon Maître, cet enfant était mort et il revit, il était perdu et il est retrouvé».

Résolutions. -J'irai à mon ami, à mon frère, à mon père. Hésiterai-je encore maintenant que je connais l'hôte du tabernacle? Qu'a-t-on à craindre quand on s'adresse au cœur d'un ami, d'un frère, d'un père? Pour épancher mon cœur, pour prendre conseil, pour me consoler de mes peines, pour jouir de l'amitié, j'irai au tabernacle, j'irai souvent. Ce sera ma meilleure joie.

Colloque avec Jésus-Eucharistie.

15 Juin
Visites eucharistiques:
le roi, le maître et le docteur

Cum coepisset rationem ponere, obla­tus est ei unus, qui debebat ei decem mil­lia talenta. Cum autem non haberet unde redderet, jussit eum dominus ejus venum­dari… Procidens autem servus ille, orabat eum dicens: Patientiam habe in me et omnia reddam tibi. Misertus autem do­minus servi illius dimisit eum et debitum dimisit ei (S. Mat., 18, 24).

Comme le Roi demandait ses comptes, vint un serviteur qui lui devait dix mille talents. Comme il n'avait rien à rendre, le Roi ordonna de le vendre en esclavage… Celui-ci suppliait en disant: Ayez patien­ce, et je vous rendrai tout. Touché de compassion, le Maître lui fit grâce et lui fit remise de tout (S. Mat., 18, 24).

1er Prélude. Jésus est un Maître au Cœur tendre et compatissant, qui pardonne et re­met nos dettes.

2e Prélude. Seigneur, ayez patience avec moi, j'essaierai de vous rendre, ou bien faites-moi remise de tout.

Ier POINT: Qui vient? Le Roi au Cœur si bon et compatissant, qui nous fera remise de toutes nos dettes. - Qui vient? C'est le Roi des rois et le Maître des maîtres. Il est puissant et terrible. Au ciel, son vêtement est éblouis­sant, ses yeux sont brillants comme le feu, sa parole est comme un glaive à deux tranchants. Mais dans sa vie mortelle et dans l'Eucharistie, il est doux comme un agneau et affable comme un enfant.

Il vient me demander mes comptes. Je suis effrayé. Je lui dois dix mil­le talents. J'ai mérité les derniers châtiments. - Pardon, Seigneur, at­tendez encore, ayez patience. - Il pardonnera tout et fera remise de tout, parce que son Cœur est bon et compatissant.

C'est au Cœur de Jésus que je m'adresserai dans l'Eucharistie. J'ai tant de dettes! Il faut que je trouve un Maître infiniment compatissant et généreux. Mais dans le Cœur de Jésus, cette compassion n'est-elle pas sans mesure?

IIe POINT: Qui vient? Le Maître aimant au serviteur infidèle pour le regagner à son service par l'amour. - Le Maître est bon, il est doux et facile. «Venez à moi, dit-il, vous tous qui peinez sous le joug du démon et de la nature, mon joug à moi est léger et mon service est facile. Et pour ce service, doux en lui-même, et qui mettrait vos âmes dans la paix, je promets des récompenses infinies…» (S. Mat., 11).

Mais, ô bon Maître, jusqu'à présent je n'ai été qu'un serviteur infidè­le. J'ai préféré le joug odieux des créatures et des passions à votre maîtrise si douce et si aimable. J'ai dit le Non serviam que vous reprochiez à Israël. Vous m'aviez tiré de l'Egypte par le baptême, par la conver­sion, par la vocation. Je vous ai quitté et j'ai servi Baal. Vous pouvez ap­peler en témoignage contre moi le ciel et la terre. Ils m'accuseront et de­manderont vengeance. J'ai abandonné les sources de la vie et cherché des citernes vides ou des eaux troublées. Je n'ose plus revenir à vous (Jé­rémis, 2).

Et cependant, vous me cherchez et m'appelez. Vous venez pour me gagner par votre amour et me ramener à votre service qui est plus doux que les royautés de la terre. Vous venez avec les liens d'Adam, les liens humains qui sont les liens du cœur: in funiculis Adam traham eos. Vous me rendez votre Cœur: Conversum est in me Cor meum. Vous oubliez votre sé­vérité. Vous avez un Cœur divin, et le Cœur de Dieu n'est pas comme celui des hommes: Quoniam Deus ego et non homo (Osée, 11).

Oh! oui, bon Maître, dans l'Eucharistie je trouve le Cœur d'un Dieu et je m'adresse avec confiance à son infinie bonté.

IIIe POINT: Qui vient? C'est le précepteur, le docteur qui montre la voie et don­ne la grâce de la suivre. - Le Maître a bien à se plaindre de nous. Il peut nous dire comme il disait à Israël par son prophète Isaïe: «Vous vous glorifiez d'être de la ville sainte, mais vous ne vivez pas en conséquence; vous m'honorez des lèvres et votre cœur est loin de moi».

Cependant il a voulu pardonner à Israël pour qu'on ne dise pas que le Dieu d'Israël est impuissant ou dur. Il veut nous pardonner pour qu'on ne dise pas que son Cœur n'est pas compatissant et miséricordieux.

Il sait que nous avons un cœur dur, un cou inflexible et un front d'ai­rain (Isaïe, 48, 4), mais à cause de son nom et pour le renom de son Cœur miséricordieux, il détournera sa colère: longe faciam furorem meum. Il nous corrigera, puis il nous épargnera.

Il nous avait montré la voie à suivre. Si nous avions été fidèles, il nous aurait comblés de ses consolations et nous aurait multipliés comme le sa­ble du rivage.

Et maintenant, malgré que nous l'ayons offensé, il nous dit encore: «Sortez de la servitude et réjouissez-vous. Comme autrefois les Israéli­tes, vous ne souffrirez pas de la soif au désert, je ferai sortir l'eau du ro­cher et vous en boirez en abondance» (Isaïe, 48, 20-21).

Résolutions. - Ces paroles paraissent dites pour nous, Seigneur. Vous voulez encore nous pardonner et nous ouvrir les sources de votre Cœur. J'irai donc avec confiance et constamment à vous dans l'Eucharistie, par mes visites, par mon souvenir fréquent.

Colloque avec Jésus-Hostie.

15 Juin
Octave de la fête-dieu
Les rapports de l'eucharistie et du Sacré-Cœur

Erat autem recumbens unus ex discipu­lis ejus in sinu Jesu. Innuit ergo huic Si­mon Petrus et dixit ei: Quis est, de quo dicit? Itaque cum recubuisset ille supra pectus Jesu, dicit ei: Domine, quis est? (S. Joan, 13, 23).

Mais un des disciples reposait sur le sein de Jésus, celui que Jésus aimait. Si­mon Pierre lui fit signe et lui dit: De qui parle-t-il? Alors, celui qui reposait sur la poitrine de Jésus lui dit: Maître, qui est­ce? (S. Jean, 13, 23).

1er Prélude. Saint Jean a compris de suite que l'Eucharistie est le don du Cœur de Jésus.

2e Prélude. Cœur eucharistique de Jésus, gagnez mon cœur à l'union avec vous.

Ier POINT: Au Cénacle, saint Jean comprend que le don de l'Eucharistie vient du Cœur de Jésus. - C'est dans le sein de Jésus, in sinu Jesu; c'est sur la poitrine de Jésus, supra pectus Jesu, que saint Jean fait son action de grâces. A peine a-t-il communié, qu'il s'incline sur le sein de Jésus. Il a reçu l'Eucharistie, il va à la source. Il ne se contente pas du don, comme les autres, il va jusqu'au trésor d'où le don est sorti.

Son geste nous prêche. C'est comme s'il nous disait: «Voyez-vous, c'est de là que vient ce don ineffable. En m'appuyant là, je bois à la source. Comme les Israélites buvaient l'eau vivifiante qui jaillissait de la fente du rocher, ainsi je bois avec joie aux sources d'où découle l'Eucha­ristie. C'est là que je porte mon action de grâces, à la source même, au Cœur généreux de Jésus…».

Comme saint Jean, unissons l'Eucharistie au Cœur de Jésus. Il en est la source, il attend notre remerciement pour sa bonté infinie…

IIe POINT: A Paray, c'est dans l'Eucharistie que le Sacré-Cœur révèle son amour. - Pendant que les anges et les saints contemplent, admirent, adorent et chantent l'amour du Cœur divin, dans les splendeurs de la gloire, les hommes sont appelés à l'honorer, à l'aimer, de préférence, dans sa vie eucharistique. C'est ordinairement dans l'Eucharistie qu'il se manifeste à Paray-le-Monial, pour solliciter notre amour.

«Un de mes plus rudes supplices, dit Marguerite-Marie, c'était lors­que ce divin Cœur m'était représenté avec ces paroles: «J'ai soif, mais d'une soif si ardente d'être aimé des hommes au Très Saint Sacrement, que cette soif me consume; et je ne trouve personne qui s'efforce, selon mon désir, de me désaltérer, en rendant quelque retour à mon amour».

C'est devant le Saint-Sacrement que Marguerite-Marie a reçu ses grandes révélations.

La première d'abord: «Une fois dit-elle, étant devant le Saint-Sacrement, je me trouvai toute investie de cette divine présence… je m'abandonnai à ce divin Esprit. Il me fit connaître que le grand désir qu'il a d'être parfaite­ment aimé des hommes, lui avait fait former le dessein de leur manifester son Cœur».

Une autre fois, que le Saint-Sacrement était exposé, il lui manifesta les mer­veilles de son pur amour, qui n'est payé que par des ingratitudes. Il lui dit: «C'est ce qui m'est beaucoup plus sensible que tout ce que j'ai souffert en ma passion, d'autant que si les hommes me rendaient quelque retour d'amour, j'estime­rais peu tout ce que j'ai fait pour eux, et je voudrais, s'il se pouvait, en faire davan­tage…».

C'est devant l'Eucharistie aussi qu'elle a entendu la grande révélation si connue: Voilà ce Cœur qui a tant aimé les hommes! Une autre fois, écrit-elle, étant devant le Saint-Sacrement, un jour de son octave, mon Dieu, me découvrant son divin Cœur, me dit: «Voilà ce Cœur qui a tant aimé les hommes, qu'il n'a rien épargné, jusqu'à s'épuiser et se consumer, pour leur témoi­gner son amour».

IIIe POINT: C'est aussi dans l'Eucharistie que Notre-Seigneur demande répa­ration. - Un jour de communion, racontent les contemporaines, comme la vénérable Sœur, pendant son action de grâces sentait un vif désir de faire quelque chose pour son Dieu, le Bien-Aimé de son âme lui demanda in­térieurement si elle ne serait pas bien aise de souffrir toutes les peines que les pécheurs méritaient, afin qu'il fût glorifié de toutes ces âmes.

Une autre fois, raconte-t-elle, dans un temps de carnaval, Notre-­Seigneur se présenta à moi après la sainte communion, sous la figure d'un Ecce homo, chargé de sa croix, tout couvert de plaies et de meurtrissures. Son sang adorable découlait de toutes parts; il dit d'une voix douloureu­sement triste: «N'y aura-t-il personne qui ait pitié de moi, et qui veuille compatir et prendre part à ma douleur, dans le pitoyable état où me mettent les pécheurs, sur­tout à présent?».

C'est toujours l'Eucharistie. La dévotion au Sacré-Cœur est surtout eucharistique. Où cherchons-nous le Cœur de Jésus mieux que dans l'Eucharistie? Les abaissements de la crèche et les angoisses de la Pas­sion ne sont qu'un souvenir; la gloire du ciel n'est qu'une espérance; Jésus ne nous est accessible que dans l'Eucharistie. Là son Cœur bat au­près de nous.

Résolutions. - Bon Maître, je veux unir ces deux dévotions, comme vous me l'avez enseigné vous-même dans vos manifestations à Marguerite-Marie. Dans l'Eucharistie se trouve votre Cœur vivant, ai­mant et offensé. Je le visiterai souvent, je me tournerai souvent vers lui, comme faisait votre fidèle servante.

Colloque avec le Cœur Eucharistique de Jésus.

16 Juin
Sur la tendresse que Notre-Seigneur
nous témoigne au Saint-Sacrement

Et accepto pane gratias egit, et fregit, et dedit eis, dicens: Hoc est corpus meum quod pro vobis datur; hoc facite in meam commemorationem. Similiter et calicem, postquam coenavit, dicens: Hic est calix novum testamentum in sanguine meo, qui pro vobis fundetur (S. Luc, 22, 19).

Il prit le pain et ayant rendu grâces, il le rompit et le leur donna en disant: Ceci est mon corps qui est donné pour vous: faites ceci en mémoire de moi. Il prit de même la coupe, après avoir soupé, en disait: Ce calice est la nouvelle alliance en mon sang, qui sera répandu pour vous (S. Luc, 22, 19).

1er Prélude. Le Sacrement de l'Eucharistie est le don de l'amour par excellence.

2e Prélude. Enseignez-moi, Seigneur, à aller à vous avec amitié, avec confiance et abandon.

Ier POINT: Le sacrement de l'Eucharistie est le mystère d'amour par excellence. - Notre-Seigneur est là, pour nous aimer et pour être aimé de nous. Il ne reçoit pas dans ce Sacrement les consolations que son Cœur voudrait y trouver. Nous ne parlons pas en ce moment des sacrilèges qui l'outra­gent, nous voulons parler des prêtres et des fidèles qui le reçoivent dans des dispositions suffisantes, mais sans amour. en recevant ce sacrement, comme en recevant les autres, on pense à soi et bien rarement à Notre­-Seigneur. Cela tient à la faiblesse humaine, mais aussi à la formation que l'on donne aux clercs et aux fidèles.

Les sacrements mettent à la disposition de tous les mérites de Notre-Seigneur et les fruits de la Rédemption. Les bons sont empressés de re­cueillir ces fruits précieux, mais combien peu songent à remercier Notre-Seigneur de ces marques d'amour qu'il nous a prodiguées! Sa présence dans le sacrement de l'autel est une habitation permanente au milieu de nous, ses frères. Il est corporellement au milieu de nous, comme il était corporellement au milieu de ses amis pendant sa vie mortelle: on n'y pense pas assez. On le laisse trop souvent seul dans ses tabernacles. Ce­pendant il y est en ami, en ami plein de tendresse.

Il attend qu'on vienne lui ouvrir son cœur, causer avec lui, lui confier ses peines et ses joies. On s'ouvre à des amis qui ne le valent pas; on ne pense pas à s'ouvrir à lui. Il faudrait que les fidèles fussent dès l'enfance formés à aller à lui avec simplicité; qu'on leur enseignât que le Dieu du Tabernacle n'est pas là sur son trône de justice, qu'il s'y tient en ami, qui ne demande qu'à écouter les confidences des hommes ses frères et spécialement des enfants, pour lesquels il a une tendre affection.

IIe POINT: Indifférence générale pour Jésus-hostie. - On passe indifférent auprès des églises où est Notre-Seigneur. Si l'on visite une église, on fait bien une génuflexion devant le tabernacle, on murmure quelquefois des lèvres une formule de prière. On fait cela machinalement. On ne sent pas qu'une visite cordiale, dans laquelle on épancherait son cœur dans le Cœur de Jésus le réjouirait et le consolerait. On l'honore comme on honorerait une statue de marbre froide et insensible.

L'hommage distrait qui lui est rendu lui fait sentir combien il est éloi­gné du cœur même de ses serviteurs. Cependant, il est un ami, le meil­leur des amis. Il voudrait que les prêtres qui savent cela le consolassent de ces oublis. Il voudrait plus, il voudrait qu'ils parlassent plus souvent et avec plus de cœur de son amitié pour les hommes ses frères.

En habituant les enfants à ces rapports d'amitié avec Notre-Seigneur, on préparerait une génération de chrétiens moins froids et moins indiffé­rents. On sèmerait des germes d'affection pour lui. Ces germes porte­raient un jour leurs fruits. Les prêtres qui comprennent ces choses et les mettent en pratique produisent de grands fruits.

IIIe POINT: Ce que Notre-Seigneur demande aux hommes, c'est le don de leur cœur. - C'est par le cœur que les hommes se donnent. C'est par le cœur qu'ils se conduisent. En Notre-Seigneur, c'est son cœur qui a été l'inspirateur de tous les sacrifices qu'il a faits pour ses frères. C'est par le cœur qu'on doit reconnaître ce que son cœur a fait pour les hommes. Ce qui se fait sans le cœur ne peut toucher le Cœur de Jésus.

On doit diriger vers Notre-Seigneur les sentiments du cœur et leur donner pour objet principal et dominant une affectueuse reconnaissance pour ses bienfaits, une confiance sans borne en sa tendresse, une affec­tion douce pour sa personne et son humanité.

Il faut que les chrétiens sachent que lui, le plus affectueux, le plus ai­mant, le plus tendre, le plus délicat de tous les hommes, n'aime rien tant que le don des cœurs, qu'il a faim et soif du cœur de ses frères.

Pensons donc souvent, surtout si nous sommes prêtres, au prisonnier du tabernacle. Il habite près de nous ou avec nous, visitons-le souvent. Allons le consoler des offenses qui lui sont faites. Allons demander ses conseils pour travailler à son règne d'amour; allons le remercier d'un succès, lui offrir une épreuve qui nous arrive, lui recommander une af­faire, un besoin de notre âme ou de nos frères. Traitons-le enfin comme notre ami principal, comme un ami qui mérite notre confiance et qui a conquis par mille bienfaits le droit de n'être pas oublié. Allons à lui par reconnaissance; allons à lui avec confiance; allons à lui par amitié, com­me il vient lui-même par amitié vers nous qui le méritons si peu.

Résolutions. - Seigneur, vous êtes le meilleur des amis, le plus fidèle, le plus indulgent, le plus généreux, le plus compatissant. Comment n'irais-je pas à vous? Pourquoi, hélas! ai-je été si dur et si ingrat envers vous jusqu'à présent? Je vous promets une pensée plus habituelle à votre présence eucharistique et des visites plus fréquentes et surtout plus cor­diales.

Colloque avec Jésus-Eucharistie.

17 Juin
Sur la bonté que Notre-Seigneur
nous témoigne dans la sainte communion

Ante diem festum Paschae, sciens Jésus quia venit hora ejus ut transeat ex hoc mundo ad Patrem, cum dilexisset eos qui erant in mundo, in finem dilexit eos (S. Joan, 13, 1).

Avant la fête de Pâques, Jésus sachant que son heure était venue de passer de ce monde à son Père, comme il avait aimé les siens qui étaient dans le monde, il les aima jusqu'à la fin (S. Jean, 13, 1).

1er Prélude. Le sacrement de l'Eucharistie est le prodige de l'amour du Cœur de Jésus pour les hommes.

2e Prélude. Seigneur, faites que je réponde comme je dois à l'affection et à la tendres­se que vous me témoignez dans la sainte communion.

1er POINT: Dans ce sacrement, Notre-Seigneur nous donne l'exemple de la plus étonnante tendresse. - Le sacrement de l'Eucharistie, la merveille de la toute puissance divine, est aussi le prodige de l'amour du Cœur de Jésus pour les hommes. C'est pour cela que l'apôtre saint Jean en rappelle l'institution par ces simples mots: «Comme Notre-Seigneur avait aimé les siens qui étaient dans le monde, il les aima jusqu'à la fin».

Ce sacrement montre qu'on ne doit pas craindre d'aller à Notre­-Seigneur par les affections du cœur. Il est facile de comprendre que la communion du corps et du sang de Notre-Seigneur est un prodige d'af­fection et d'amour tendre.

Dans le sacrement de l'autel, Notre-Seigneur est vivant. Il est là Dieu et homme, homme en corps et en âme. Il se fond tout à la fois dans le corps, et dans l'âme du communiant. N'est-ce pas là une folie d'amour et d'amour tendre? Son Cœur seul, son Cœur débordant d'amour a pu trouver une pareille folie qui exigeait la mise en œuvre de toute sa puis­sance divine. Il a mis sa toute puissance au service des folies de sa ten­dresse. A la folie de la croix, il a ajouté la folie d'une communication si intime que les hommes ont peine à la concevoir. Il est vrai que sa chair se fond dans la chair du communiant, son âme dans l'âme, son cœur dans le cœur du fidèle, et cet embrassement inspiré par le Cœur de Jésus brûlant d'amour dure tant que durent les espèces sacramentelles. Il l'a dit: «Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi et moi en lui».

Il y a dans la sainte communion, dit saint Cyrille, comme deux cires qui se fondent et se mêlent ensemble.

Le même Père applique à l'Eucharistie l'exemple que saint Paul don­ ne du ferment qui gagne toute la masse de la farine. «Ainsi, dit-il, l'Ho­stie remplit tout l'homme de sa grâce».

IIe POINT: Cette tendresse de Notre-Seigneur demande une tendresse réciproque. - Notre-Seigneur nous donne donc l'exemple de la plus incroyable ten­dresse. Cette tendresse en appelle une autre en retour, l'affection du cœur qui le reçoit. La tendresse pour lui n'est donc pas une folie. Etre fou avec lui et de cette manière, c'est être sage. C'est agir avec lui, com­me lui, la sagesse incréée, agit avec les hommes. C'est l'imiter. L'imiter, c'est aller à lui comme il vient à ses frères, par l'amour et le sacrifice. Il a donné deux grands exemples, qui résument tout son Cœur: la croix et le sacrement de l'autel. Aimons-le avec la tendresse qu'il nous témoigne dans ce sacrement adorable et avec la force généreuse qu'il a montrée au Calvaire, ce sera la perfection. Les âmes tendres portent leur croix avec plus d'amour que les autres. C'est parce que le Cœur de Jésus est le plus tendre de tous les cœurs que le sacrifice de la croix a été le plus généreux de tous les sacrifices.

IIIe POINT: La tendresse de Notre-Seigneur pour nous est semblable à celle d'une mère. - Pour nous faire une idée de la tendresse de Notre-Seigneur pour les hommes, songeons à celle d'une mère pour son petit enfant. Notre-Seigneur l'a dit par le prophète Isaïe: «Une mère peut-elle oublier son petit enfant et ne pas avoir pitié du fruit de son sein? Eh bien! si elle peut le faire, moi je ne vous oublierai pas». Ce que Dieu a dit du peuple d'Israël, s'applique mieux encore aux âmes chrétiennes.

Marie a eu pour son Jésus enfant une tendresse si grande qu'aucune créature n'a pu et ne pourra jamais l'égaler. Cette tendresse de Marie pâlit auprès de celle du Sauveur, qui a inventé la merveille de l'Euchari­stie. Ceux qui viennent à Notre-Seigneur avec l'amour de tendresse sont toujours reçus avec complaisance. Que l'on comprenne enfin que l'amour d'un Dieu n'est pas, ne peut pas être un amour sans cœur, un amour glacial, un amour sans amour. Epurer son cœur, ce n'est pas en chasser l'amour, c'est en chasser tout ce qui n'est pas amour pour Jésus.

Aimer Jésus, c'est tout ce qu'il demande. C'est pour que l'on vienne à lui avec son cœur qu'il veut répandre la dévotion à son cœur sacré. Il faut dans cette dévotion distinguer deux choses: le culte public et le culte intérieur. Les solennités du culte public glorifient le Sacré-Cœur et il y est très sensible. Dieu le Père s'y complaît et y répond par des grâces abondantes, mais il faut plus et mieux à Notre-Seigneur. Il lui faut des adorateurs en esprit et en vérité, des adorateurs qui lui donnent leur cœur, qui lui en donnent tous les battements, toutes les aspirations, tou­tes les affections.

Résolutions. - Seigneur Jésus, prenez mon cœur, il est à vous. je veux vous le donner avec tendresse en pensant habituellement à vous et en conversant intimement avec vous. je veux vous le donner avec force en me consumant pour vous dans les travaux, dans l'action, dans les peines et jusqu'à la mort.

Colloque avec Jésus-Hostie.

18 Juin
Le Cœur de Jésus, siège de toutes les vertus

Volo enim vos scire qualem sollicitudi­nem habeam pro vobis et pro fis qui non viderunt faciem meam in carne: ut conso­lentur corda ipsorum, instructi in charita­te et in omnes divitias plenitudinis intel­lectus, in agnitionem mysterii Dei Patris et Christi Jesu, in quo sunt omnes thesau­ri sapientiae et scientiae absconditi (ad Col., 2, 1).

Je veux que vous sachiez ma sollicitude pour vous et pour ceux que je n'ai pas en­core vus; pour que vos cœurs soient con­solés, que vous soyez instruits dans la cha­rité et spirituellement enrichis pour l'in­telligence des mystères de Dieu le Père et du Christ Jésus, en qui sont tous les tré­sors de la sagesse et de la science, mysté­rieusement cachés (aux Col., 2, 1).

1er Prélude. En Jésus, en son Cœur, sont cachés tous les trésors de la charité, de la sagesse et de la vertu.

2e Prélude. Donnez-moi, Seigneur, quelque aumône de ce riche trésor.

Ier POINT: Humilité. - Cette méditation et les deux suivantes nous sont inspirées par le P. Claude de la Colombière. «Le Cœur de Jésus, nous dit-il dans son acte d'oblation, est le siège de toutes les vertus, la source de toutes les bénédictions, et la retraite de toutes les âmes saintes». Le saint religieux s'inspirait des communications et des lettres de Marguerite-Marie.

«La première vertu que l'on doit honorer en lui, dit-il, est un amour très ardent de Dieu son Père, joint à un respect très profond et à la plus grande humilité qui fut jamais». Notre-Seigneur n'a-t-il pas dit lui-même: «Apprenez de moi que je suis doux et humble de cœur!».

Nous parlons ici de l'humilité fondamentale, qui consiste à reconnaître le néant de la créature et la grandeur infinie de Dieu. C'est cette humilité du Cœur de Jésus qui établissait Notre-Seigneur dans le respect très profond de la Majesté divine et dans un amour ardent pour les infinies perfections de son Père céleste.

Cela doit être pour nous aussi la vertu principale et le fondement de toutes les autres. Ce n'est que la mise en pratique du premier comman­dement dans toute son intégrité: Un seul Dieu tu adoreras et aimeras parfaitement.

IIe POINT: Patience. - «La deuxième vertu à honorer dans le Sacré-Cœur, dit le P. Claude de la Colombière, c'est une patience infinie dans les maux, une contrition et une douleur extrêmes pour les péchés dont il s'était chargé, la confiance d'un fils très tendre alliée à la confusion d'un très grand pécheur». - Il savait que Notre-Seigneur, en manifestant son cœur à Marguerite-Marie, avait surtout attiré notre attention sur ses mystères douloureux, sur sa Passion et ses souffrances réparatrices. «Le Sacré-Cœur me fut représenté sur un trône de feu, lui avait dit Marguerite-Marie, et la plaie qu'il avait reçue sur la croix y paraissait visiblement. Il y avait une couronne d'épines autour de ce Sacré-Cœur et une croix au-dessus. Le divin Sauveur me fit connaître que ces instru­ments de la Passion signifiaient que l'amour immense qu'il a pour les hommes avait été la source de toutes les souffrances et humiliations qu'il a voulu souffrir pour nous; que dès le premier instant de son incarna­tion, tous ces tourments et tous ces mépris lui avaient été préparés, que la croix fut, pour ainsi dire, plantée dans son Cœur, et que ce fut dès ce premier instant qu'il accepta, pour nous témoigner tout son amour, tou­tes les humiliations, la pauvreté, les douleurs que sa sacrée humanité de­vait souffrir dans tout le cours de sa vie mortelle, et les outrages auxquels l'amour devait l'exposer jusqu'à la fin des siècles, sur nos autels, dans le très saint et très auguste Sacrement…».

Patience, réparation, abandon, c'est bien là toute la vie du Cœur de Jésus. Il nous a donné cet exemple avec la grâce pour l'imiter. C'était la résolution du P. Claude de la Colombière: «J'embrasse, disait-il, l'aimable croix de l'obéissance jusqu'à ma mort. Elle sera tout mon plaisir, toute ma gloire et mes délices. A Dieu ne plaise que je me glorifie, que je me réjouisse jamais sinon dans la croix de Jésus-Christ. A Dieu ne plaise que j'aie jamais d'autre trésor que sa pauvreté, d'autres délices que ses souffrances, d'autre amour que lui-même!». Tel doit être aussi mon idéal.

IIIe POINT: Charité. - «La troisième vertu qu'il faut honorer dans le Sacré-Cœur, dit encore le P. Claude de la Colombière, c'est sa compas­sion très sensible pour nos misères, son amour immense pour nous mal­gré ces mêmes misères, et, malgré ces mouvements et impressions, son égalité inaltérable causée par une conformité si parfaite à la volonté de Dieu, qu'elle ne pouvait être troublée par aucun événement».

N'est-ce pas dans la miséricorde de son Cœur qu'il nous a visités: Per viscera misericordiae in quibus visitavit nos (S. Luc, 1, 78). Quand Jésus ren­contre des malades, des morts, son Cœur ne peut résister aux larmes de ceux qui les entourent. Emu de pitié, il les guérit, il les rend à la vie: mi­sericordia motus (S. Luc, 7, 13).

En voyant la foule sans provisions pour son repas, il a compassion d'elle: misereor super turbam (S. Luc, 10, 33).

«Ce Cœur est encore autant qu'on le peut être dans les mêmes senti­ments, remarque le P. Claude de la Colombière, il est toujours brûlant d'amour pour les hommes, toujours ouvert pour répandre toutes sortes de grâces et de bénédictions, toujours touché de nos maux, toujours pressé du désir de nous faire part de ses trésors et de se donner lui-même à nous, toujours disposé à nous recevoir, et à nous servir d'asile, de de­meure et de paradis, dès cette vie».

En me tenant uni au Cœur de Jésus et en méditant ses mystères, je participerai de plus en plus à ses vertus.

Résolutions. - J'ai à ma portée, dans le Cœur de Jésus, la source de toutes les vertus, qui se peuvent résumer dans l'humilité, la patience, la charité; mais il faut que je boive résolument à cette source. Il faut que je m'unisse toujours plus fidèlement au Cœur de Jésus dans chacune de mes actions.

Colloque avec le Sacré-Cœur.

18 Juin
Fête du saint Cœur de Marie

Dixit mater ejus ad illum: Fili, quid fe­cisti nobis sic? Ecce pater tuus et ego do­lentes quaerebamus te. Et ait ad illos: Ne­sciebatis quia in his quae Patris mei sunt oportet me esse?… Et descendit cum eis, et venit Nazareth; et erat subditus illis. Et Mater ejus conservabat omnia verba haec in corde suo (S. Luc, 2, 48).

Sa mère lui dit: Mon Fils, pourquoi avez-vous agi ainsi envers nous? Votre père et moi vous cherchions en pleurant. Il leur dit: Ne saviez-vous pas que je dois être aux choses de mon Père?… Et il de­scendit avec eux à Nazareth, et il leur était soumis. Et sa Mère conservait tout cela dans son cœur (S. Luc, 2, 48).

1er Prélude. Marie conservait en son cœur toutes les leçons de Jésus, leçons de vie in­térieure et leçons de miséricorde pour les hommes.

2e Prélude. O Marie, refuge des pécheurs, salut des infirmes, consolatrice des affli­gés, priez pour moi, ayez pitié de moi.

Ier POINT: Le Cœur de Marie est le refuge des pécheurs. - Dieu a voulu tout particulièrement faire de Marie l'espérance et le salut des pécheurs. Les Pères de l'Eglise ne tarissent pas sur ce privilège de Marie.

Le moyen-âge, très avide de symboles, a comparé Marie à l'astre de la nuit, parce qu'elle éclaire le pécheur, qui marche dans la nuit de ses pé­chés. «Le soleil, créé pour briller durant le jour, est, dit le cardinal Hu­gues, la figure de Jésus, dont la lumière réjouit les justes qui vivent dans le grand jour de la grâce divine; la lune, créée pour luire durant la nuit, est la figure de Marie, dont la lumière éclaire encore les pécheurs, plon­gés dans la nuit du péché». - «Si quelqu'un, dit Innocent III, se trouve misérablement engagé dans la nuit du péché, qu'il lève les yeux vers l'astre de la nuit, qu'il invoque Marie!».

«La divine miséricorde, dit le P. Eudes, règne si parfaitement dans le Cœur de Marie, qu'elle lui fait porter le nom de Reine et de Mère de miséricorde. Elle a tellement gagné le cœur de la divine miséricorde, qu'il lui a donné les clefs de tous ses trésors, et l'en a rendue absolument maîtresse». Refusera-t-elle son concours aux pécheurs, elle qui pendant sa vie a offert son divin Fils pour eux, au Temple et au Calvaire?

IIe POINT: Le Cœur de Marie, salut des infirmes. - Marie n'est que bon­té, aussi on peut tout espérer de la générosité de son Cœur, la guérison des corps comme celle des âmes. Souvent même ses bienfaits revêtent l'éclat d'un miracle, comme il arrive à Lourdes et en tant d'autres sanc­tuaires.

«Marie, dit saint Bernard, est comme la terre promise, où Dieu fait couler le lait et le miel de ses bénédictions» (sur le Salve Regina).

«Tels sont, dit saint Léon, les trésors de bonté et de clémence déposés dans le sein de Marie, que nous devons la proclamer non seulement mi­séricordieuse, mais la miséricorde même».

«Quand je vous contemple, dit saint Bonaventure, ô ma Souveraine, je n'aperçois plus rien que la miséricorde; car c'est en faveur des miséra­bles que Dieu vous a choisie pour sa Mère, et c'est l'office de sa miséri­corde qu'il vous a confié. Sans cesse occupée des malheureux, vous m'apparaissez comme enveloppée de miséricorde et vous semblez n'avoir à cœur que d'exercer la miséricorde».

Toute l'histoire publie la miséricorde de Marie. On l'invoque dans la maladie, dans la souffrance, dans l'épreuve, et les ex-voto de nos sanc­tuaires disent combien elle est secourable.

«Marie, dit saint Jean Chrysostôme, est un océan de miséricorde».

IIIe POINT: Le Cœur de Marie est l'espérance de tous les affligés. - La divi­ne Providence avait réservé ce rôle à Marie. Elle était figurée par Esther et Judith qui ont sauvé le peuple de Dieu.

Partout les fidèles, confiants et reconnaissants, lui ont élevé des sanc­tuaires sous les titres gracieux de Notre-Dame de Bonsecours, Notre­-Dame du Perpétuel-Secours, Marie Auxiliatrice, Marie Consolatrice des affligés.

Elle a préludé dans sa vie mortelle à ce ministère de miséricorde, en courant assister sa parente Elisabeth, en venant en aide aux époux de Cana, en assumant la charge de donner à saint Jean, après la mort du Sauveur, ses soins maternels.

A Cana, elle est la protectrice des familles. En adoptant saint Jean, el­le prend la tutelle et le soin du sacerdoce et de l'Eglise, représentés par saint Jean au pied de la croix.

Est-il étonnant, après cela, de voir partout les particuliers et les na­tions réclamer son patronage, recourir à son assistance, faire appel à son cœur de Mère et lui témoigner par des monuments et des offrandes de tout genre leur reconnaissance pour les bienfaits reçus?

L'Eglise chante en son honneur cet hymne de confiance: «Salut, ô Reine, Mère de miséricorde, notre vie, notre douceur et notre espéran­ce?».

Les Docteurs et les Saints cherchent les expressions les plus fortes pour dire combien son Cœur est secourable: «Elle est, dit saint Jean Dama­scène, l'unique soulagement de tous les affligés et la souveraine consola­trice de tous les cœurs angoissés».

Résolutions. - O Vierge bénie, secours des chrétiens, protégez-nous, protégez nos familles, protégez les nations chrétiennes dans ces temps difficiles que nous traversons.

O Mère de mon Dieu, votre Cœur n'a jamais dédaigné de secourir aucun pécheur, quelque énormes que fussent ses crimes, dès qu'il s'est recommandé à vous. Laissez-vous donc porter à me secourir par votre bonté qui est sans mesure. je ferai chaque jour quelque chose pour votre culte.

Colloque avec le Sacré-Cœur de Marie.

19 Juin
Le Cœur de Jésus,
source de toutes les bénédictions

Et erit firmamentum in terra in summis montium: super-extolletur super Liba­num fructus ejus: et florebunt de civitate sicut foenum terme. Sit nomen ejus bene­dictum in saecula: ante solem permanet nomen ejus. Et benedicentur in ipso omnes tribus terme: omnes gentes magni­ficabunt eum (Ps., 71, 16).

Il sera comme une forteresse en haut des monts: ses fruits s'élèveront plus haut que le Liban; les fleurs de la cité sainte se multiplieront comme l'herbe. Que son nom soit béni dans les siècles: son nom surpasse l'éclat du soleil. En lui seront bé­nies toutes les nations de la terre. Tous les peuples le glorifieront (Ps., 71, 16).

1er Prélude. Bien des fois Dieu nous a promis par les patriarches et les prophètes des bénédictions merveilleuses pour les temps de la rédemption. Nous pouvons voir dans le psaume 71, le Cœur' de Jésus semblable au soleil qui fait éclore les fleurs et mûrir les fruits.

2e Prélude. Radieux soleil du divin Cœur éclairez, échauffez et fécondez mon cœur.

Ier POINT: Lettre de Marguerite-Marie au P. Claude de la Colombière. - Le P. Claude savait mieux que personne combien la dévotion au Sacré-Cœur serait riche en bénédictions, Marguerite-Marie lui avait fait part des promesses qu'elle avait reçues de Notre-Seigneur. - «Que ne puis-­je raconter, lui écrivait-elle, tout ce que je sais de cette aimable dévotion au Sacré-Cœur de Jésus, et découvrir à toute la terre les trésors de grâ­ces que Jésus-Christ renferme dans ce Cœur adorable, et qu'il a dessein de répandre avec profusion sur tous ceux qui la pratiqueront! …

Les trésors de bénédictions et de grâces que ce Sacré-Cœur renferme sont infinis; je ne sache pas qu'il y ait un exercice de dévotion dans la vie spirituelle, qui soit plus propre à élever en peu de temps une âme à la plus haute perfection et à lui faire goûter les véritables délices qu'on trouve au service de Jésus Christ…

Faites en sorte que les personnes religieuses l'embrassent, car elles en retireront tant de secours qu'il ne faudrait point d'autre moyen pour ré­tablir la première ferveur et la plus exacte régularité dans les commu­nautés les moins bien réglées, et pour porter au comble de la perfection celles qui vivent dans la plus exacte régularité.

IIe POINT: Promesses spéciales. - Marguerite-Marie annonçait aussi au P. Claude des grâces spéciales pour les apôtres du Sacré-Cœur, pour les personnes séculières, pour la bonne mort. - «Mon divin Sauveur, écrivait-elle, m'a fait entendre que ceux qui travaillent au salut des âmes auront l'art de toucher les cœurs les plus endurcis et travailleront avec un succès merveilleux, s'ils sont pénétrés eux-mêmes d'une tendre dévo­tion à son divin cœur. - Pour les personnes séculières, elles trouveront par le moyen de cette aimable dévotion tous les secours nécessaires à leur état; c'est-à-dire la paix dans leurs familles, le soulagement dans leurs travaux, la bénédiction du ciel dans toutes leurs entreprises, la consola­tion dans leurs misères; et c'est proprement dans ce Sacré-Cœur qu'el­les trouveront leur refuge pendant toute leur vie et principalement à l'heure de leur mort. Ah! qu'il est doux de mourir après avoir eu une constante dévotion au Cœur de celui qui doit nous juger! - Enfin, il est visible qu'il n'est personne au monde qui ne ressentît toutes sortes de se­cours du ciel, s'il avait pour Jésus-Christ un amour reconnaissant tel qu'est celui qu'on lui témoigne par la dévotion à son Sacré-Cœur».

III° POINT: Lettre à la mère Greyfié. - Ces promesses de bénédictions sont répétées, avec plus d'instance encore s'il est possible, dans une let­tre à la mère Greyfie. - «Si vous saviez, dit Marguerite-Marie, com­bien je me sens pressée d'aimer le Sacré-Cœur de Notre-Seigneur Jésus­-Christ! Il m'a gratifié d'une visite qui m'a été extrêmement favorable pour les bonnes impressions qu'elle a laissées dans mon cœur. Alors il m'a confirmé que le plaisir qu'il prend d'être aimé, connu et honoré de ses créatures est si grand que, si je ne me trompe, il m'a promis que tous ceux qui lui auront été dévoués et consacrés ne périront jamais; et que, comme il est la source de toutes bénédictions, il les répandra avec abon­dance dans tous les lieux où sera posée et honorée l'image de son divin Cœur; qu'il réunira les familles divisées et protégera et assistera celles qui seraient en quelque nécessité et qui s'adresseront à lui avec confian­ce; qu'il répandra la suave onction de son ardente charité sur toutes les communautés qui l'honoreront et se mettront sous sa spéciale protec­tion; qu'il en détournera tous les coups de la justice divine, pour les re­mettre en grâce lorsqu'elles en seront déchues. Il m'a donné à connaître que son Sacré-Cœur est le Saint des Saints, le Saint d'amour! qu'il voulait qu'il fût connu à présent pour être le Mediateur entre Dieu et les hommes, car il est tout-puissant pour faire leur paix en détournant les châtiments que nos péchés ont attirés, et pour nous obtenir miséricorde».

Est-il étonnant que le P. de la Colombière, ayant eu connaissance des merveilleuses promesses de Notre-Seigneur, ait appelé le Sacré-Cœur la source de toutes les bénédictions? Oui, la dévotion au Sacré-Cœur est le plein épanouissement de la prophétie de David qui nous montre le règne du Christ donnant des montagnes de fruits hautes comme le Liban et des gerbes de fleurs abondantes comme l'herbe des champs.

Mais pour avoir part à ces bénédictions, n'oublions pas la condition: il faut que nous soyons vraiment dévoués et consacrés au Sacré-Cœur.

Résolutions. - Croître dans votre amour, Seigneur, c'est la bénedic­tion que je demande avant tout. Sortir de la tiédeur, avancer dans la per­fection, c'est mon plus ardent désir. Pour cela je veux vous consacrer toujours plus fidèlement mes pensées, mes dispositions, mes actions.

Colloque avec le Sacré-Cœur.

20 Juin
Le cœur de Jésus,
retraite de toutes les âmes saintes

Surge, amica mea, speciosa mea, et ve­ni: columba mea in foraminibus petrae, in caverna maceriae, ostende mihi faciem tuam, sonet vox tua in auribus meis: vox enim tua dulcis et facies tua decora (Cant., 2, 13).

Lève-toi, âme aimable et chère à mon cœur: viens comme une colombe dans le creux d'un rocher ou dans la crevasse de la muraille, montre-moi ton visage, parle à mon oreille: j'aime ta voix et ta présence (Gant., 2, 13).

1er Prélude. Jésus daigne se complaire à notre présence, à notre conversation, il nous invite à nous réfugier sur son sein et dans son Cœur, comme la colombe au creux du rocher.

2e Prélude. C'est trop de bonté, Seigneur, mais puisque vous m'y invitez, j'entrerai dans votre Cœur et j'y fixerai ma demeure.

Ier POINT: Le Cœur de Jésus est notre douce retraite. - C'est depuis les Pères de l'Eglise que la tradition interprète en ce sens notre texte du can­tique des cantiques. Saint Augustin dit dans son Manuel (chap., 2): «Longin m'a ouvert par sa lance le côté de Jésus, et je suis entré et je re­pose là en sûreté». - Saint Bernard a des pages délicieuses en son traité de la Passion (chap., 3): «Votre cœur a été blessé, dit-il à Notre-­Seigneur, pour que je puisse habiter en lui et en vous… qu'il fait bon à habiter dans ce cœur!…». Saint Bonaventure disait: «En pénétrant dans les plaies de Jésus, j'arrive jusqu'au fond de son amour… entrons là tout entiers, nous y trouverons notre repos et une ineffable douceur» (Stim. div. amoris chap. 1). Notre-Seigneur disait à sainte Mechtilde: «Je te donnerai mon cœur comme un lieu de refuge». Saint François de Sales écrivait à une visitandine (lettre 64): «Je ne sais où vous serez ce carême selon le corps; selon l'esprit, j'espère que vous serez dans la caverne de la tourterelle et au côté percé de Notre-Seigneur; je veux bien m'essayer d'y être souvent avec vous; Dieu par sa souveraine bonté nous en fasse la grâce! … Que ce Seigneur est bon, ma très chère fille, que son cœur est aimable! Demeurons là en ce saint domicile!».

Le P. Claude de la Colombière a donc raison de dire que le Cœur de Jésus est la retraite de toutes les âmes saintes.

IIe POINT: C'est un lieu de refuge. - Marguerite-Marie, très assidue au séjour dans le Cœur de Jésus, y prenait des rôles très variés, s'y considé­rant tantôt comme disciple à l'école du divin Cœur, tantôt comme une malade à l'hospice, ou une captive dans la prison d'amour, ou une men­diante au palais du roi. Mais plus souvent elle voit dans le Cœur de Jésus un lieu de refuge, un port de sûreté, une citadelle de protection con­tre les ennemis du salut, un asile pour les pécheurs.

«Il faut nous retirer, dit-elle, dans la plaie du Sacré-Cœur comme un pauvre voyageur qui cherche un port assuré pour se mettre à l'abri des écueils et des tempêtes de la mer orageuse du monde, où on est exposé à un continuel naufrage. - Le Cœur adorable est une délicieuse retraite où nous vivrons à l'abri de tous les orages. - Ce divin Cœur est comme un fort imprenable contre les assauts de l'ennemi».

Le Sacré-Cœur est l'asile de la miséricorde et du pardon: «Les pé­cheurs, dit Notre-Seigneur, trouveront dans mon cœur l'océan infini de la miséricorde». - «Que pouvez-vous craindre d'y aller, dit Marguerite-Marie, puisqu'il vous invite à y aller? N'est-il pas le trône de la miséricorde où les misérables sont les mieux reçus, pourvu que l'amour les présente dans l'abîme de leur misère?». - «Le Père éternel, par un excès de miséricorde, a fait de cet or précieux une monnaie inap­préciable, marquée au coin de sa divinité, afin que les hommes en puis­sent payer leurs dettes et négocier la grande affaire de leur salut éternel». - «Vous demeurerez dans le Sacré-Cœur de Jésus comme un criminel qui, par les regrets et la douleur de ses fautes, désire apaiser son juge en se renfermant dans cette prison d'amour». - «Il m'a donné à connaître que son Sacré-Cœur est le Saint des Saints, qu'il voulait qu'il fût connu à présent pour être le médiateur entre Dieu et les hommes, car il est tout puissant pour faire leur paix et pour obtenir miséricorde».

IIIe POINT: C'est un oratoire sacré. - «Choisissez le Cœur de Notre-Seigneur, nous dit Marguerite-Marie, pour votre oratoire sacré. Entrez ­y pour y faire vos prières et oraisons, afin qu'elles soient agréables à Dieu. Vous y trouverez de quoi lui rendre ce que vous lui devez». - «Vous vous trouvez languissante au service de Dieu, ne vous en troublez point. Pour vous satisfaire sur ce sujet, vous n'avez qu'à vous unir, en tout ce que vous ferez, au Sacré-Cœur de Notre-Seigneur Jésus-Christ, au commencement, pour vous servir de dispositions, et à la fin de satis­faction. - Vous ne pouvez rien faire à l'oraison? Contentez-vous d'of­frir celle de Notre-Seigneur au très saint Sacrement de l'autel, offrant ses ardeurs pour réparer vos tiédeurs. - Dites dans chacune de vos actions: Mon Dieu, je veux faire ou souffrir cela dans le Cœur sacré de votre di­vin Fils, et selon ses saintes intentions que je vous offre pour réparer tout ce qu'il y a d'impur et d'imparfait dans les miennes. Il suppléera à tout ce qui pourra manquer de votre part; il aimera Dieu pour vous, et vous l'aimerez en lui et par lui». - «Ce divin Cœur est une source intarissa­ble où il y a trois canaux qui coulent sans cesse: premièrement de miséri­corde pour les pécheurs d'où découle l'esprit de contrition et de péniten­ce; le second, de charité pour tous les besoins, et particulièrement pour ceux qui tendent à la perfection, qui y trouveront de quoi vaincre les ob­stacles; du troisième, découlent l'amour et la lumière pour ceux qu'il veut unir à lui pour leur communiquer sa science et ses lumières. Cher­chons dans ce divin Cœur tout ce dont nous aurons besoin; ayons re­cours à lui en tout temps et en tout lieu. C'est un trésor caché et infini qui ne demande qu'à s'ouvrir à nous».

Résolutions. - Le divin Cœur est donc une douce retraite, j'y veux de­meurer toujours; c'est un asile, un refuge où je trouverai le pardon de mes fautes et la protection dans tous les périls; c'est l'oratoire sacré où je prierai pour être toujours exaucé.

Colloque avec le Sacré-Cœur.

21 Juin
Saint Louis de Gonzague
1568-1591

Placens Deo factus est dilectus, et vi­vens inter peccatores translatus est. Rap­tus est, ne malitia mutaret intellectum ejus, aut ne fictio deciperet animam illius… Consummatus in brevi, explevit tempora multa (Sap., 4, 11).

Comme il était agréable à Dieu, il en a été aimé, et Dieu l'a enlevé d'entre les pé­cheurs, de peur que son esprit ne fût ga­gné par la malice des impies ou séduit par les faux biens du monde. Ayant peu vécu, il a rempli la course d'une longue vie (Sap., 4, 11).

1er Prélude. L'aimable jeune Saint a été aimé du Sacré-Cœur, qui l'a appelé de bon­ne heure à lui.

2e Prélude. Saint Louis de Gonzague, enseignez-nous à mériter l'affection du Cœur de Jésus.

Ier POINT: Le saint du Sacré-Cœur. - Saint Louis de Gonzague est ap­pelé avec raison le saint du Sacré-Cœur. Il suça peut-être cette dévotion avec le lait, sa famille étant, par une faveur spéciale en possession du sang précieux qui avait coulé des blessures du Sauveur.

Il avait une union continuelle au Cœur de Jésus dans les actes de sa vie.

Neuf ans après sa mort, sainte Madeleine de Pazzi, dans un de ses ra­vissements, vit saint Louis de Gonzague dans la gloire céleste. Quand el­le revint de son extase, elle s'écria: «Oh! quelle gloire a Louis, le fils d'Ignace! C'est un grand saint et un martyr inconnu». Elle ajoutait: «Quand Louis était dans sa vie mortelle, il décochait sans cesse des flè­ches d'amour vers le Cœur de Jésus».

On peut voir un signe providentiel dans le fait que le cher saint est mort dans la nuit qui suit l'octave du Saint-Sacrement, après minuit, c'est-à-dire au jour que Notre-Seigneur devait choisir pour la fête du Sacré-Cœur.

Marguerite-Marie le regardait si bien comme le saint du Sacreé-Cœur, qu'elle choisit le 21 juin, jour de sa mort et de sa fête, pour se consacrer au Sacré-Cœur avec le Père de la Colombière.

Le Père Croiset, si uni à Marguerite-Marie, dans le premier livre qui traite officiellement de la dévotion au Sacré-Cœur, indique le recours à saint Louis de Gonzague comme un des moyens principaux d'obtenir cette dévotion.

IIe POINT: Sa sainte vie et sa précieuse mort. - Ce cher patron de la jeu­nesse s'est élevé à une grande sainteté. «Après le glorieux saint Ignace et saint François Xavier, disait Bellarmin, quoiqu'il y ait eu déjà dans la Compagnie beaucoup de parfaits religieux et d'héroïques martyrs, Dieu n'y a fait briller personne avec autant d'éclat que ce bienheureux jeune homme».

Dès l'âge de sept ans, il se consacra à Marie et commença à réciter tous les jours l'office de la sainte Vierge. A neuf ans, il fit le voeu de vir­ginité.

Il était la modestie même. Il aimait la prière comme les autres enfants aiment le jeu.

Il reçut la première communion de la main de saint Charles Borro­mée, et dès lors il communia tous les dimanches, consacrant trois jours de la semaine à la préparation et trois jours à l'action de grâces.

Il aimait les veilles, les disciplines et l'abstinence comme un ascète. La prière était son refuge habituel. «Je n'ai jamais recommandé à Dieu, disait-il, une affaire grande ou petite qui n'ait été terminée comme je l'ai souhaité».

Son oraison était sans distractions.

Ce n'était qu'un enfant et il aimait Notre-Seigneur comme un sera­phin. Il puisait cet amour dans la méditation de la Passion et de l'Eucha­ristie.

Au noviciat, il était le modèle de tous par sa régularité et sa ferveur. Il mourut martyr de sa charité. Il avait demandé la permission d'aller soigner les pestiférés. Il gagna lui-même les germes de la maladie.

Le soir de l'octave du Saint-Sacrement, il dit au Père Provincial: «Nous nous en allons avec joie. - Où allez-vous, lui dit le Père. - En paradis», répondit le jeune saint. Et il expirait après minuit le sourire sur les lèvres.

IIIe POINT: L'apôtre du Sacré-Cœur. - Tout dévoué sur la terre à l'amour de Notre-Seigneur et au culte intime du Cœur de Jésus, notre saint en devint du haut du ciel le promoteur et l'apôtre.

Le 6 Janvier 1735, il apparaît, avec le Père de la Colombière et d'au­tres serviteurs du Sacré-Cœur, pour confirmer la mission confiée au P. de Hoyas, de promouvoir dans toute l'Espagne ce culte sacré.

Le 9 février 1765, trois jours après l'approbation de l'office et de la messe du Sacré-Cœur par Clément XIII, il vint du ciel déclarer que cet office était ratifié, et comme preuve de sa mission, il guérit Nicolas Ce­lestini auquel il dit: «A ma prière, Dieu te guérit, mais il faut que tu t'ap­pliques à acquérir la perfection religieuse, et que durant toute ta vie, tu t'efforces de propager la dévotion au Sacré-Cœur, très agréable au ciel».

Quelques jours après, il se montrait encore, brillant de gloire, à un jeune orphelin de Rome, et le guérissait aussi, en lui faisant promettre d'honorer les saints Cœurs de Jésus et de Marie.

Faisons-en l'auxiliaire de notre apostolat du Sacré-Cœur.

Résolutions. - Cher saint, obtenez-moi la grâce d'être comme vous bien uni au Cœur de Jésus et de lancer sans cesse des flèches d'amour à ce divin Cœur, par mes oraisons jaculatoires et par l'offrande fidèle de toutes mes actions en esprit d'amour et de réparation.

C'est au pied du crucifix et du tabernacle que je puiserai, à votre exemple, la ferveur de l'amour.

Colloque avec saint Louis de Gonzague.

22 JUIN
Les pratiques de la dévotion au S.-C.

Exerce teipsum ad pietatem. Nam cor­poralis exercitatio ad modicum utilis est: pietas autem ad omnia utilis est, promis­sionem habens vitae quae nunc est et fu­turae (1 Ep. ad Tim., 4, 7).

Exerce-toi à la piété. Car les exercices du corps sont utiles à quelque chose; mais la piété est utile à tout, ayant les promes­ses de la vie présente comme de la vie fu­ture (Ep. 1 à Tim., 4, 7).

1er Prélude. Exerçons-nous dans les pratiques de la dévotion au Sacré-Cœur, qui est la forme providentielle de la piété pour le temps présent.

2e Prélude. Sacré-Cœur de Jésus, aidez-moi à vous aimer pratiquement.

Ier POINT: Image du Sacré-Cœur. - Consécration. - L'image tient une grande place dans les visions de Marguerite-Marie, dans les désirs et les promesses du Sacré-Cœur. C'est à la fois un moyen de propager cette chère dévotion et une pratique spéciale désirée par Jésus et à laquelle il a promis d'attacher de grandes grâces. Aussi comme Marguerite-Marie y tient! Comme elle est heureuse de propager ces images! N'a-t-elle pas des promesses du Sacré-Cœur pour ceux qui la porteront, et l'assurance de bénédictions spéciales pour les maisons où elle sera exposée et hono­rée? Jésus ne veut-il pas qu'elle ait sa place d'honneur dans le palais des rois et même sur le drapeau national?

Dans les visions de Marguerite-Marie, c'est tantôt le Cœur seul qui lui est montré avec les insignes de la Passion, tantôt c'est Jésus lui-même montrant son Cœur sur sa poitrine.

La consécration que Marguerite-Marie nous demande pour le Sacre­Cœur est un don de soi-même, qu'il faut renouveler souvent, afin de ne plus vivre que pour le Sacré-Cœur, pour ses intérêts et pour son amour. Quelquefois, la donation est demandée sous une forme spéciale, c'est une victime qui doit s'offrir pour être immolée en expiation pour les pé­cheurs ou pour la communauté ou pour les âmes du purgatoire. C'est là une voie particulière. Faisons la consécration commune et réalisons-la publiquement par le don de toutes nos actions.

IIe POINT: La communion et l'amende honorable. - Une des demandes de Jésus à Marguerite-Marie est de communier aussi souvent qu'elle pourra. C'est là le véritable esprit de l'Evangile, remis en honneur par Pie X.

Dans la vie de Marguerite-Marie, la dévotion au Saint-Sacrement est étroitement unie avec la dévotion au Sacré-Cœur. C'est devant le Saint-Sacrement qu'elle a ses principales révélations. C'est à l'autel qu'elle voit Jésus outragé, qu'elle lui fait amende honorable et lui offre ses hom­mages et ses réparations. Elle aime et recommande l'adoration du Saint­-Sacrement; elle désire se consumer comme un cierge qui brûle devant l'autel.

L'amende honorable tient une grande place dans la vie de Marguerite-Marie et dans ses recommandations. C'est la meilleure for­me de réparation amoureuse pour l'amour outragé. C'est ainsi que Notre-Seigneur la présente dans la grande apparition. Il demande que le jour de la fête future on honore son Cœur «en communiant ce jour-là et en lui faisant réparation par une amende honorable pour réparer les in­dignités qu'il a reçues pendant le temps qu'il a été exposé sur les autels».

L'amende honorable est un acte précis, déterminé, mais c'est en mê­me temps une tendance générale de l'âme dévote, jalouse de l'honneur de celui qu'elle aime. Cet esprit de réparation est partout dans la vie de Marguerite-Marie et dans ses écrits. Elle demandait aussi la communion réparatrice. Aux prêtres, elle eût demandé la messe réparatrice. «Vous ferez, disait-elle à ses novices, une communion pour faire amende hono­rable au Sacré-Cœur de Jésus-Christ et lui crier miséricorde pour toutes les mauvaises communions qui se font et se sont faites par nous et les mauvais chrétiens».

IIIe POINT: Heure-Sainte et union à Jésus souffrant. - On peut dire de la Passion, comme de l'Eucharistie: c'est une dévotion inséparable, pour Marguerite-Marie, de la dévotion au Sacré-Cœur. L'Heure-Sainte que Jésus a demandée à Marguerite-Marie, n'est pas autre chose qu'un exercice d'union à Jésus souffrant.

Elle passait au chœur la nuit du jeudi-Saint et une fois elle y passa toute la nuit à genoux, sans appui et les mains jointes, en union mysti­que avec les mystères de l'agonie. L'image du Sacré-Cœur qu'elle nous a révélée est toute imprégnée de la Passion: plaie, croix, couronne d'épi­nes (Bainvel).

Ses écrits nous donnent l'impression d'une âme toute unie à Jésus souffrant, sans autre joie que la joie même «de souffrir en aimant». On sait la fameuse vision où Notre-Seigneur lui présenta un double tableau, celui d'une vie «toute dans la paix et la consolation» et celui d'une vie toute crucifiée; et comment lui-même choisit pour elle la se­conde.

Notre-Seigneur lui avait appris, à l'occasion du jubilé, à offrir souvent au Père éternel les amples satisfactions qu'il a faites à sa justice pour les pécheurs sur l'arbre de la croix, en le priant de rendre efficace le mérite de son sang précieux à toutes les âmes criminelles.

Résolutions. - Je m'attache surtout à la consécration et à l'amende ho­norable. Amour et réparation, c'est ma devise. C'est l'esprit dans lequel je veux vivre et mourir. je veux répéter ma devise au commencement de toutes mes actions. je veux les offrir dans cette intention au cœur de mon Jésus pour sa consolation.

Colloque avec Marguerite-Marie.

23 Juin
Le cœur sacerdotal de Jésus

Sacrificium et oblationem noluisti: cu­res auteur perfecisti mihi. Holocaustum et pro peccato non postulasti: tunc dixi: Ec­ce venio. In capite libri scriptum est de me ut facerem voluntatem tuam: Deus meus, volui, et legem tuam in medio cor­dis mei (Ps., 39, 7).

Vous n'avez plus voulu des sacrifices et des oblations. Vous m'avez rendu atten­tif. Vous ne m'avez pas demandé d'holo­cautes ou d'hostie pour le péché; alors j'ai dit: me voici. Il est écrit en tête de la loi que je ferai votre volonté. Je le veux, Sei­gneur, et vous avez écrit votre loi au mi­lieu de mon cœur (Ps., 39, 7).

1er Prélude. Dieu n'a plus voulu des sacrifices de l'ancienne loi, mais il a mis au cœur de Notre-Seigneur, la loi du sacrifice nouveau. Le Cœur de Jésus est le prêtre de la nouvelle loi, comme Aaron et sa race étaient les prêtres de l'ancienne.

2e Prélude. J'offre, Seigneur, à votre Père, les sacrifices de votre Cœur et j'y unis les miens.

Ier POINT: C'est par son Cœur que Jésus exerce principalement son sacerdoce. - Le psaume nous l'a dit: Dieu a écrit au Cœur de Jésus la loi du sacri­fice nouveau. Saint Paul le répète: Par l'oblation de lui-même, Jésus nous a sanctifiés (aux Héb., 10, 14). C'est l'amour du Cœur de Jésus pour son Père et pour nous qui inspire et dirige son oblation et son im­molation. L'Eglise nous le rappelle dans la sainte liturgie: dans l'hymne du temps pascal, Ad regias agni dapes, elle nous montre l'amour-prêtre, ou le Cœur sacerdotal de Jésus offrant le sacrifice rédempteur:

Divina cujus cari tas Sacrum propinat sanguinem Almique membra corporis Amor sacerdos immolat.

«C'est la charité, c'est l'amour-prêtre, qui a versé le sang et immolé la chair du divin agneau sur la croix».

«Comme il aimait les siens, Jésus les aima jusqu'à la fin» (Saint Jean, 13). Après une vie toute de sacrifice, il se livre à ses persécuteurs et à ses bourreaux qui le crucifient. «C'est, dit-il, pour que le monde soit témoin de l'amour que j'ai pour mon Père» (S. Jean, 14). «Il m'a aimé, dit saint Paul, et il s'est livré pour moi» (aux Gal., 2).

IIe POINT: Le Cœur sacerdotal de Jésus est l'organe d'un culte parfait d'amour et de réparation envers son Père, d'expiation et d'impétration pour les hom­mes. - La louange infinie que le Verbe est en personne dans l'éternité, il l'a transportée dans le monde. A cette louange éternelle s'ajoutent l'ado­ration, la reconnaissance, la prière de l'humanité qu'il s'est hypostati­quement unie.

Et comme le Christ, quoique pur et parfait en lui-même, est le chef de l'humanité déchue, il offrira aussi à son Père un sacrifice d'expiation pour réparer la gloire de son Père outragée.

Mais quelle victime offrira-t-il à son Père? Une victime d'un prix infi­ni, une victime divine peut seule être adéquate à la gloire de Dieu. Le Cœur de Jésus s'offrira donc lui-même. Prêtre et victime, il s'immolera comme une hostie d'amour, de reconnaissance, de réparation et de prie­re. Il s'immolera en mourant d'amour, en donnant sa vie, en même temps que ses bourreaux s'efforcent de la lui ôter: «Je donne mon âme de moi-même, dit-il, et personne ne pourrait me l'enlever» (S. Jean, 10).

Ce Cœur adorable voulait à la fois glorifier son Père, sauver nos âmes et gagner nos cœurs par l'intensité de son amour. Et nous aimant jusqu'à la fin et sans limites, il a voulu perpétuer son sacrifice, le multi­plier par toute la terre et l'éterniser au ciel. Victime offerte dès le pre­mier instant de sa conception, il s'est sacrifié au Calvaire, il s'immole dans l'Eucharistie, il s'offre au ciel, «toujours vivant pour interpeller pour nous» (aux Héb., 7, 25).

IIIe POINT: Le sacerdoce de la nouvelle loi est sorti du Cœur de Jésus comme un fleuve d'amour et de vie. - Jusqu'au jeudi-Saint la plénitude du sacer­doce éternel était concentrée en Notre-Seigneur Jésus-Christ. Son cœur est un abîme infini de gloire pour son Père et de salut pour les hommes. De cet abîme, le ciel a vu sortir ce jour-là, un double fleuve d'amour et de vie: le sacerdoce et l'Eucharistie. Ce double fleuve allait répandre ses eaux divines dans toute l'Eglise de Dieu pour tout inonder, tout vivifier, régénérer et sanctifier.

Ce jour-là, deux présences de Jésus ici-bas ont été fondées: sa présen­ce physique dans nos tabernacles, sa présence morale dans le sacerdoce catholique. Notre-Seigneur demeure avec nous d'une manière invisible ou voilée dans l'Eucharistie. Et il a chargé ses prêtres de le consacrer, de le faire connaître, de le distribuer, d'être les propagateurs de sa lumière, de son amour, de sa vie.

La Providence éclaire, réchauffe et vivifie la nature, surtout par le so­leil. Le sacerdoce est le soleil surnaturel dont se sert Jésus pour éclairer, vivifier, diviniser les âmes.

Les prêtres sont comme le cœur de l'Eglise, l'organe le plus intime et le plus influent de Jésus, le principal moteur par lequel son sacerdoce di­vin porte partout la vie (Sauvé: Jésus intime).

Résolutions. - Prêtre et victime, tout chrétien doit l'être dans une cer­taine mesure. Le prêtre plus que tout autre doit être uni au Cœur sacer­dotal de Jésus. J'unis, ô Jésus, mes petits sacrifices de chaque jour, de chaque heure au sacrifice perpétuel d'amour et de réparation de votre divin Cœur.

Colloque avec le Cœur sacerdotal de Jésus.

24 Juin
Nativité de saint Jean-Baptiste

Et tu, puer, propheta altissimi vocabe­ris; praeibis enim ante faciem Domini pa­rare vias ejus, ad dandam scientiam salu­tis plebi ejus, in remissionem peccatorum eorum (S. Luc, 1, 76).

Et toi, enfant, tu seras appelé le pro­phète du Très-Haut; tu marcheras devant le Seigneur pour lui préparer les voies, pour donner la science du salut à son peu­ple, pour la rémission des péchés (S. Luc, 1, 76).

1er Prélude. Le précurseur, parent et ami de Jésus, a une grande ressemblance avec lui. Sa mission est de conduire à Jésus.

2e Prélude. Saint précurseur, conduisez-nous à Jésus, à son amour, à son imitation, à son Cœur.

Ier POINT: Pénitence et réparation. - Saint Jean-Baptiste est voué à la pénitence et à la réparation pour son peuple, comme les prophètes. Comme Jérémie, il est sanctifié dans le sein de sa mère. Il est le nouvel Elie, prédit par Malachie.

Dès son enfance il est voué à la pénitence. «Il ne boira ni vin ni cidre», dit l'ange à Zacharie.

Il passe son adolescence au désert, il est vêtu d'une tunique de poils de chameaux serrée par une ceinture de cuir; il mange du miel sauvage et des sauterelles.

«Qu'êtes-vous allés voir au désert? dit Jésus à ses disciples. Ce n'est pas un homme mollement vêtu. C'est un ange, qui ne mange ni ne boit» (S. Mat., 11, 18). Notre-Seigneur exprime par là l'extrême mortifica­tion de son Précurseur.

C'est un prophète, un ascète. Saint Bernard l'appelle le patriarche, le maître et le guide des religieux. Comme les religieux contemplatifs, il a aimé la solitude, l'oraison, la pénitence; comme les religieux apostoli­ques, il a prêché à toutes les classes de la société, il a ramené un grand nombre de pécheurs, il a conduit les âmes à Jésus-Christ.

Imitons sa pénitence et son zèle.

IIe POINT: Il a été martyr de la pureté. - Saint Jean-Baptiste aimait ar­demment la virginité. Il a vécu vierge. Il ne pouvait souffrir la vue de l'impureté. Il attaquait dans ses discours tous les désordres de mœurs, sans crainte d'offenser les grands. Il reprocha même à Hérode d'avoir pris pour épouse la femme de son frère encore vivant. C'est cette fermeté apostolique et cet amour de la pureté qui lui attirèrent la persécution et lui valurent le martyre. Hérode et cette femme qu'il avait épousée contrairement aux lois et à la décence ne lui pardonnaient pas ses reproches. C'est dans les excès mêmes de leur vie sensuelle et désordonnée qu'ils conjurèrent contre sa vie. C'est au milieu des danses et des festins qu'ils le firent mettre à mort.

Il était à la fois martyr ou témoin de la sainte vertu de pureté, et répa­rateur pour les orgies dans lesquelles on prononçait sa condamnation. Il était un ange par sa pureté. L'évangile et les prophètes lui donnent ce beau titre: «J'enverrai mon ange devant le Messie», avait dit le Sei­gneur dans la prophétie de Malachie (3, 1).

Notre-Seigneur lui-même fait l'application de cette prophétie: «C'est de lui, dit-il, que le prophète a dit: J'enverrai mon ange devant vous pour préparer vos voies» (S. Mat., 11, 10).

Saint Jean-Baptiste est donc pour nous un admirable modèle de pure­té. Il nous enseigne les moyens de conserver nos âmes pures. Ces moyens sont la prière, l'éloignement du monde et la mortification.

IIIe POINT: Son union avec Jésus et Marie. - Il n'est pas encore ne que Jésus et Marie vont le visiter en Judée. Il tressaille dans le sein de sa mè­re. Il est béni et sanctifié par la présence de Jésus et la visite de Marie.

Il est un ami pour Jésus, il le dit lui-même: «L'ami de l'époux, dit-il, se réjouit quand il entend la voix de son ami, c'est pour cela que je suis dans la joie aujourd'hui» (S. Jean, 3, 29). Quand Jésus enfant revient d'Egypte, il visite son petit ami en passant en Judée. Chaque année, dans les jours de pâques, ils sont ensemble à jérusalem. Ils se retrouvent au Jourdain. Saint Jean connaît la mission de son ami et parent, il publie cette mission: «Voici, dit-il, l'Agneau de Dieu, voici celui qui efface les péchés du monde».

Ils prêchent l'un et l'autre, mais saint Jean envoie ses disciples au Christ. Il tient ses grâces de Jésus et il conduit les âmes à Jésus.

Telle doit être notre union avec Jésus et Marie. Marie nous donnera Jésus. Soyez des amis pour Jésus par votre assiduité, par votre affection, par votre confiance. Conduisons-lui les âmes, ne cherchons en rien à re­tenir leur affection pour nous, admirons en cela le détachement de saint Jean. Allez à Jésus, dit-il à tous, je ne suis rien qu'une voix qui prêche au désert, je ne suis pas digne de délier sa chaussure.

Résolutions. - La pénitence et l'amour de la pureté sont les préludes d'une union toujours plus grande avec Jésus et Marie. Je veux chercher cette union dans chacune de mes actions. Je voudrais que ma tendresse pour Jésus ressemblât à celle de saint Jean.

Colloque avec saint Jean-Baptiste.

25 Juin
Le cœur de Jésus dans l'eucharistie:
solitude et recueillement

Rex Israel Dominus in medio tui, non timebis malum ultra. In die illa dicetur Jerusalem: Noli timere, Sion, non dissol­vantur manus tuae. Dominus Deus tuus in medio tui fortis, ipse salvabit: gaudebit super te in laetitia, silebit in dilectione sua, exultabit super te in laude (Sopho­nias, 3, 15).

Le Seigneur, le Roi d'Israël, est au mi­lieu de vous, ne craignez plus. En ce temps-là, on dira à Jérusalem: ne crai­gnez pas, ne laissez pas tomber vos mains. Le Seigneur votre Dieu, le Dieu fort est au milieu de vous, il vous sauvera: il se réjouira de votre salut; en son silence, il vous aimera et il louera son Père (So­phonie, 3, 15).

1er Prélude. Le prophète Sophonie a prédit l'habitation de Notre-Seigneur parmi nous et il a entrevu sa vie de silence, remplie par son amour pour nous et sa reconnais­sance pour son Père.

2e Prélude. Que je voudrais aussi savoir me taire vis-à-vis des créatures et vivre dans l'adoration et l'amour de mon Dieu!

Ier POINT: La solitude du Cœur de Jésus au tabernacle. - On ne saurait guère mieux décrire la vie eucharistique du Cœur de Jésus, que ne l'a fait soeur Marie Véronique, la sainte fondatrice des religieuses victimes du Cœur de Jésus. Nous lui emprunterons bien des pensées dans cette méditation et les trois qui suivent (Voir Sa Vie par le P. Prevost).

Il y a une double solitude de Notre-Seigneur au tabernacle, celle que lui imposent les hommes, et celle qu'il a choisie.

Entrez dans nos sanctuaires: souvent, hélas! l'indifférence et l'ingrati­tude des hommes en font un désert. C'est là une solitude qui coûte à Notre-Seigneur. Il l'a acceptée pour notre salut.

Mais quand bien même une multitude pieuse se presserait dans nos temples, rien n'y peut interrompre la solitude du tabernacle. Le Verbe de Dieu s'est condamné dans l'Eucharistie à un éternel silence. Quelle leçon pour nous! Il veut nous signifier qu'il est bon de se taire souvent, de se soustraire à l'agitation et au bruit pour mener la vie intérieure. Nous devons oublier les créatures, si le devoir ne nous oblige pas à nous en occuper. Si nous devons traiter avec elles, que ce soit uniquement pour la gloire et l'amour du Cœur de Jésus. «Notre conversation doit être dans les cieux» (aux Philip., 8, 7).

IIe POINT: La vie intérieure du Cœur de Jésus au tabernacle. - Le divin Maître dans l'Eucharistie est entièrement dégagé de la vie extérieure. «Il contemple, il aime, il adore les perfections de Dieu; il s'immole à la gloi­re de son Père, en dehors de tout le créé, comme en une vaste solitude où les objets de la terre ne peuvent l'atteindre.

«Il faut tout perdre de vue, tout oublier et s'oublier soi-même pour imiter cette vie divine.

Demandons au Sacré-Cœur comme une faveur d'être parfois retirés dans cette solitude parfaite, sous le regard de Dieu seul, en la compagnie de notre bien-aimé Jésus, n'ayant de liberté et d'action que pour aimer et adorer notre Dieu, pour nous sacrifier et nous perdre en lui.

De son tabernacle, Jésus ne parle à aucune créature. Nul bruit, nul mouvement ne s'y fait entendre, mais, devant son Père, son silence est bien plus profond et bien plus sublime. On dirait que toute son occupa­tion soit de se taire. Il est tout amour, anéantissement, immolation, priè­re; mais tout se passe dans le silence, dans les profondeurs de lui-même et de la divinité. Que ce silence est un langage puissant et fort! Il rend hommage à la grandeur de Dieu, à ses perfections infinies, à son domai­ne souverain, à tous ses attributs que Jésus loue par un hymne éternel et sans fin et dans un mystérieux silence».

Je voudrais dans mes adorations faire taire en moi les créatures pour m'unir à l'adoration de Jésus envers son Père.

IIIe POINT: La solitude et le silence nous préparent â la conversation avec Notre-Seigneur. - «Une âme qui veut se disposer à une conversation inti­me avec Notre-Seigneur doit aimer la solitude et le silence. Cela doit être un point essentiel de son règlement de vie. elle doit y trouver son bon­heur, son repos et sa vie. Ce doit lui être une peine quand elle est obligée de se livrer à des occupations profanes. Sans le silence, en effet, il n'y a point de recueillement, d'union à Dieu, de correspondance à ses désirs.

«Le silence extérieur s'étend encore aux peines, aux contradictions, aux observations qui nous sont faites. O mon Dieu, communiquez aux âmes vouées au divin Cœur de Jésus le goût de ce silence divin et la pra­tique du silence extérieur!

Jésus au saint tabernacle expie par son silence tant de conversations frivoles, de paroles inutiles et mauvaises dont ses créatures se rendent coupables. Il est victime pour les péchés de la langue. Il souffre particu­lièrement pour les fautes des âmes qui lui sont consacrées et pour lesquelles il a une tendresse spéciale.

Après cela, est-ce que je puis hésiter à aimer le silence? Ne dois-je pas être victime avec Jésus et comme Jésus?». Dans mes adorations et mon action de grâces surtout je ferai taire en moi les créatures pour m'unir à Notre-Seigneur. Je ne puis entendre Jésus que dans le silence de mon cœur.

Résolutions. - Je renouvelle toutes mes résolutions de silence et de re­cueillement. Je comprends que l'union avec Jésus est à ce prix. Venez, o mon bien-aimé, votre serviteur vous écoute. Parlez à mon cœur, j'ai soif d'entendre vos doux entretiens.

Colloque avec le Cœur eucharistique de Jésus.

26 JUIN
Le cœur de Jésus dans l'eucharistie:
abnegation et aneantissement

Hoc enim sentite in vobis, quod et in Christo Jesu: qui cumin forma Dei esset, non rapinam arbitratus est esse se aequa­lem Deo: sed semetipsum exinanivit for­mam servi accipiens, in similitudinem ho­minum factus, et habitu inventus ut ho­mo. Humiliavit semetipsum, factus obe­diens usque ad mortem, mortem autem crucis (ad Phil., 2, 5).

Formez en vous les sentiments du Christ Jésus, qui ayant la forme et la na­ture de Dieu, n'a pas cru que ce fût pour lui une usurpation d'être égal à Dieu: et cependant il s'est anéanti lui-même, pre­nant la forme d'un esclave, se rendant semblable aux hommes et se faisant reconnaître comme tel. Il s'est humilié, en se faisant obéissant jusqu'à la mort de la croix (aux Phil., 2, 5).

1er Prélude. Si Jésus s'est humilié et anéanti en prenant la nature d'un homme, que dire de la forme eucharistique où il s'est mis?

2e Prélude. Donnez-moi, Seigneur, le sentiment de l'humilité et de l'anéantissement à vos pieds pour honorer votre majesté éternelle.

Ier POINT: Les abaissements eucharistiques. - «Qui pourrait découvrir un Dieu sous les faibles espèces sacramentelles, sous le voile qui le recou­vre et l'obscurité qui l'environne? La foi seule peut pénétrer le mystère de ces incompréhensibles abaissements.

«C'est cette apparence de pain qui me cache un Dieu! Il pourrait user de sa puissance, montrer sa gloire et attirer tous les cœurs à lui, il ne le fait pas!… L'œuvre de son Père s'opérera au comble de l'anéantisse­ment, de l'humiliation, de l'opprobre, de la petitesse. - O humilité! vertu par excellence, qui enchaînez Jésus sous ces apparentes impuissan­ces, passez si avant dans le cœur de vos amis et de vos victimes, que leur solitude, leurs humiliations et leurs opprobres fassent leurs délices et leur trésor!

Le sentiment de la grandeur de Dieu et de sa Majesté outragée nous inspire le désir profond de l'humilité et de l'anéantissement à ses pieds pour mieux honorer son être éternel et réparer les offenses qui lui sont faites».

IIe POINT: Comment une âme vouée au Sacré-Cœur et victime du Sacré-Cœur doit communier à l'anéantissement eucharistique. - «Si une âme a l'attrait de la vie de victime, si elle veut s'offrir en hostie de réparation et de propi­tiation au Sacré-Cœur de Jésus, elle doit communier tout spécialement aux anéantissements eucharistiques. Dès qu'elle s'est constituée victime, son arrêt est prononcé, et il faut que jusqu'à la fin elle porte la grâce de ce sacré et divin caractère qui en fait un être délaissé et méprisé, un être de rien, puisqu'elle a pris sur elle le péché et les misères de tous…

«Jésus au Saint-Sacrement a disparu sous les apparences les plus com­munes et se donne en aliment à l'homme. Peut-il y avoir un abaissement plus profond? Orgueil humain que tu es confondu! L'anéantissement devant Dieu est donc infiniment nécessaire à la victime qui porte la qua­lité de pécheur en elle-même et dans les péchés des autres pour lesquels elle veut demander grâce».

«Elle doit avoir la plus haute idée de la grandeur et de la sainteté de Dieu et un amour passionné de son propre abaissement. Elle doit hono­rer Dieu surtout par ces abîmes d'anéantissements où Dieu la plonge».

Si nous sommes délaissés de Dieu dans la vie intérieure, si les hommes nous méconnaissent, nous oublient, nous comptent pour rien, estimons­-nous heureux de participer aux anéantissements du bon Maître. «Les apôtres étaient heureux et se trouvaient honorés de souffrir persécution pour le nom de Jésus» (Act., 5, 41). Regardons comme une grâce de par­ticiper aux anéantissements du Sauveur, pour contribuer à la gloire de Dieu, au salut des âmes et au progrès de l'Eglise.

IIIe POINT: Jésus méconnu et outragé dans l'Eucharistie. - Parlant de la vie mortelle du Sauveur, saint Paul nous dit que Notre-Seigneur Jésus­-Christ s'est humilié en se faisant obéissant jusqu'à la mort de la croix. Dans l'Eucharistie, Notre-Seigneur s'est abaissé et humilié jusqu'à s'ex­poser à tous les mépris, jusqu'à se laisser toucher par des mains profanes et placer dans des cœurs sacrilèges, qui le crucifient moralement.

Jésus ne souffre pas dans l'Eucharistie, il est impassible, mais parfois il se montre à ses amis sous les apparences de la souffrance. Il apparais­sait à Marguerite-Marie tout couvert de plaies. «Un jour, dit-elle, mon Sauveur se présenta à moi comme un Ecce homo, tout déchiré et défiguré, disant: Cinq âmes consacrées à mon service m'ont ainsi traité, en com­muniant sans ferveur». Et le bon Maître lui demandait de baiser ses plaies pour en adoucir la douleur. Cela veut dire seulement que nos pé­chés seraient capables de lui arracher des larmes et de le crucifier de nou­veau, s'il pouvait encore souffrir. Mais ses amis doivent éprouver quel­que chose des souffrances que le bon Maître ne peut plus porter. La vue des désordres du monde doit tenir nos cœurs sous le pressoir. Nous de­vons surtout redoubler d'amour pour le dédommager de l'ingratitude de tant d'âmes. Il nous l'a demandé par Marguerite-Marie: «J'ai soif, disait-il, d'être aimé des hommes au Très Saint-Sacrement».

Résolutions. - Humilité et anéantissement dans la pensée de mon néant et dans l'obéissance, c'est ce que Notre-Seigneur attend de moi. - Je renouvellerai aussi ma ferveur pour tous les exercices eucharisti­ques, pour la sainte messe, la communion, la visite au Saint-Sacrement.

Colloque avec Jésus-Hostie.

27 Juin
Le cœur de Jésus dans l'eucharistie:
détachement et pauvreté

Scitis enim gratiam Domini nostri Jesu Christi, quoniam propter vos egenus factus est, cum esset dives, ut illius inopia vos di­vites essetis. Et consilium in hoc do: hoc enim vobis utile est, qui non solum facere sed velle coepistis ab anno priore: nunc ve­ro et facto perficite (2 ad cor., 8, 9).

Vous savez la grâce de Notre-Seigneur Jésus-Christ, qui s'est fait pauvre, quand il était riche, pour que nous soyons enrichis par sa pauvreté. Et je vous donne le conseil de l'imiter par votre charité. Cela vous se­ra utile. Vous avez commencé l'an passé, achevez cette année (2 aux Cor., 8, 9).

1er Prélude. Notre-Seigneur s'est fait pauvre pour nous enrichir. Saint Paul parle de la pauvreté de Bethléem et de Nazareth, mais ses paroles peuvent s'entendre aussi de la pauvreté de Jésus-Eucharistie.

2e Prélude. Seigneur, donnez-moi la grâce de comprendre et de pratiquer le détache­ment.

Ier POINT: Pauvreté extérieure. - «La pauvreté eucharistique a été por­tée aux dernières limites du possible en notre sainte victime de l'autel. Sans doute, nous donnons à la divine Hostie des vases d'or, des taber­nacles de marbres précieux, mais tout cela reste en dehors de lui, tout ce­la lui est tout à fait extérieur et comme étranger. Il n'a pris pour lui que les apparences les plus vulgaires et les plus fragiles. Il se contente du ta­bernacle de bois comme du tabernacle de marbre. Il s'est exposé à tout, même à la profanation, aux mépris, aux outrages. Il préfère le taberna­cle de bois du missionnaire à l'autel de marbre des villes, où il est sou­vent oublié. Il demeure même sous la petite parcelle qui tombe et s'égare sur le sol poussiéreux de l'église (Voir nos méditations sur la couronne du Sacré-Cœur).

C'est cette pauvreté qui nous enrichit de Dieu, comme saint Paul le dit aux Corinthiens. L'apôtre fait allusion à la pauvreté de Bethléem et de Nazareth et au dépouillement du Calvaire; mais les dépouillements de l'Eucharistie sont plus sublimes encore, et ils sont si méconnus et si oubliés!».

IIe POINT: Pauvreté intérieure. - «La, pauvreté extérieure ouvre une belle voie â la pauvreté intérieure qui fait le fond de la vertu de pauvreté. Jésus a pratiqué cette dernière avec une perfection que lui seul pourra ja­mais atteindre, car c'est en lui que Dieu a régné pleinement. Le règne de Dieu ne s'établit que dans le vrai pauvre, qui est dénué de lui-même et des créatures, qui ne se recherche pas dans les dons de Dieu, qui meurt incessamment à toutes les choses sensibles, qui n'a plus de désirs, de pensées, de mouvements qui lui soient propres, qui ne vit plus que de l'esprit de Dieu, qui ne cherche rien hors de lui, qui demeure dans sa pe­titesse et sa dépendance. Il va droit au pur amour. N'est-ce pas là tout le Cœur de Jésus? Un pauvre religieux a encore quelque souci du vête­ment et du pain, et son cœur en est occupé. Jésus-Eucharistie n'a aucun souci des voiles qui le couvrent, ils lui sont si peu de chose!

«O adorable Jésus! l'unique pauvre et le seul où Dieu ait régné pleine­ment et sans résistance, qui pourra comprendre le prodige de votre pau­vreté eucharistique? Cette pauvreté unique donne une gloire infinie à Dieu votre Père.

O bienheureuse pauvreté! Béni soit le jour où nous voyant parfaite­ment dégagés de tout le terrestre, nous serons riches de Notre-Seigneur, de sa vie en nous, de son cœur divin, vivant et régnant en nos cœurs!».

IIIe POINT: Applications. - La pauvreté eucharistique de Jésus n'of­fre pas comme sa pauvreté de Nazareth un exemple sensible et facile à imiter, mais elle inspire un esprit de pauvreté qui trouvera sa réalisation dans notre vie, suivant la vocation de chacun de nous.

C'est à nous de rechercher quel degré de pauvreté, même extérieure, la volonté divine demande de nous. Et si notre état de vie ne demande pas la pauvreté extérieure absolue, il reste à pratiquer la pauvreté spiri­tuelle, le détachement qui forme la première béatitude promulguée par Notre-Seigneur: «Bienheureux les pauvres en esprit, parce que le royau­me de Dieu leur appartient». Il reste aussi la pauvreté intérieure, le déta­chement du moi, de la volonté propre, de l'amour-propre, le don de tout nous-même à Notre-Seigneur, à sa volonté, à sa direction, manifestée par notre règle de vie et par sa Providence.

La sainte visitandine, Marguerite-Marie nous dit, sous l'inspiration du Sacré-Cœur, que l'âme la plus dénuée et la plus dépouillée de tout possédera davantage le Cœur de Jésus et trouvera en lui la paix et le bonheur.

O heureuse pauvreté! Béni soit le jour où, nous voyant parfaitement dégagés de tout le terrestre, nous serons riches de Notre-Seigneur, de sa vie en nous, de son Cœur divin, vivant et régnant en nos cœurs.

Résolutions. - Pour gagner le Cœur tout aimable de Jésus, dit Marguerite-Marie, il faut l'imiter dans sa pauvreté, nous laissant don­ner ou ôter les choses, comme si nous étions morts ou insensibles à tout; nous regardant comme des pauvres et songeant que si on nous dépouil­lait de tout, on ne nous ferait pas d'injustice (Sa Vie, p. 14).

Colloque avec Jésus-Eucharistie.

28 Juin
Le cœur de Jésus dans l'eucharistie:
son obéissance

Interea rogabant eum discipuli dicen­tes: Rabbi, manduca. Ille autem dicit eis: Ego cibum habeo manducare, quem vos nescitis. Dicebant ergo discipuli ad invi­cem: Numquid aliquis attulit ei manduca­re? dicit illis Jésus: Meus cibus est ut fa­ciam voluntatem ejus qui misit me (S. Joan, 4, 34).

Cependant ses disciples lui disaient: Maître, mangez. Il leur répondit: J'ai une nourriture à manger que vous ne connais­sez pas. Ils se disaient donc entre eux: Est-ce que quelqu'un lui a apporté à man­ger? Jésus leur dit: ma nourriture est de faire la volonté de celui qui m'a envoyé (S. Jean, 4, 34).

1er Prélude. Pour Jésus, obéir et faire la volonté de son Père, c'est sa nourriture, son repos, sa gloire, sa béatitude et toute sa vie.

2e Prélude. Il ne fait pas autre chose dans l'Eucharistie. Il obéit aux hommes parce que son Père l'a donné à eux pour leur salut.

Ier POINT: Parfaite obéissance de Jésus. - «C'est un enseignement mer­veilleux, plein de lumières et de grâces, que celui de l'obéissance de Jésus au Saint-Sacrement. Jésus obéit à tous les prêtres, bons ou mauvais. Il descend dans des cœurs profanes et souillés par le démon. Il ne refuse pas de se mettre en présence de son ennemi, parce qu'il a une loi inviola­ble: l'obéissance, par amour pour son Père. Rien ne le retient ni ne l'entraîne hors de cette voie, aucun prétexte de dignité ou de conve­nance.

Jésus-Eucharistie n'a pas plus de vie propre qu'un mort. Son mouve­ment, c'est la seule obéissance, dont Dieu reçoit une louange sans fin. Oh! quel exemple! Jésus n'a plus de vie que par l'impulsion de son Père; sa dépendance de Dieu est aussi parfaite que son amour pour lui est infi­ni… S'il est à notre disposition, s'il obéit au prêtre, c'est encore à son Père qu'il obéit, parce qu'il a promis à son Père de se donner à nous. Il­ne se rétracte pas. C'est ainsi qu'en obéissant à nos supérieurs, nous obéissons à Dieu, parce que Dieu veut que nous leur obéissions».

IIe POINT: L'obéissance de Notre-Seigneur glorifie son Père et nous mérite des grâces. - «Oh! quelle gloire Jésus rend à Dieu, et quelle complaisance Dieu prend en ce Fils bien-aimé, en le voyant dans cette attitude abais­sée et anéantie! Il a pris la forme d'esclave, lui qui est Dieu, quel exem­ple sublime! Mon Jésus, qui ne voudrait vous suivre, pour l'honneur de votre Père et la consolation de votre Cœur, victime d'obéissance?

Sans l'obéissance, l'œuvre de la rédemption aurait été nulle, et cela se comprend: tout péché est une désobéissance, tout acte de réparation et de rachat doit être un acte d'obéissance.

Pour que l'obéissance soit parfaite et vraiment rédemptrice, elle doit être reçue dans le cœur; son principe doit être l'amour. Aussi David nous montre-t-il le Rédempteur apportant au monde la volonté de Dieu écrite en son Cœur (Ps., 39). La véritable marque de la perfection d'une âme, c'est qu'elle soit parvenue au point d'être tellement morte à sa vo­lonté, qu'elle ne prétende, qu'elle ne désire aucunement faire ce qu'elle voudrait; elle obéit à tous pour Dieu. O Jésus! qui nous donnera de ces âmes, vraiment mortes à elles-mêmes, pour continuer votre sacrifice du Calvaire et de l'Eucharistie».

IIIe POINT: La pratique de l'obéissance. - Marguerite-Marie nous en­seigne la pratique de cette obéissance parfaite: «Pour l'intérieur, écrivait-elle (lettre 29), vous obéirez fidèlement aux mouvements de la grâce pour les actes des vertus; quant à l'extérieur, vous obéirez amou­reusement à ceux qui ont pouvoir de vous commander, pensant à ces pa­roles: «Jésus a été obéissant jusqu'à la mort». Vous obéirez jusqu'au der­nier soupir de votre vie. Et vos obéissances seront pour honorer celles de Jésus-Christ au Très Saint-Sacrement; si vous êtes fidèles à faire la vo­lonté de Dieu dans le temps, la vôtre s'accomplira pendant toute l'éter­nité».

«Jésus, dit la vénérée Mère Marie-Véronique, ne reçoit d'impulsion que par Dieu son Père: «Je ne fais pas ma volonté, disait-il, mais celle de mon Père». Nous ne devons recevoir d'impulsion que de l'esprit de Jé­sus. Il doit être notre pensée, notre parole, nos actes, nos mouvements, notre âme, notre vie. «Ce n'est plus moi qui vis, c'est Jésus, c'est son esprit, c'est son Cœur qui vit en moi». - Obéissance entière à Dieu, dé­pendance de lui seul; quelle étendue et quelle profondeur dans ces deux mots! Mon âme est appelée à y entrer, à y vivre, à disparaître sous Jésus et son divin Esprit. Jésus au tabernacle n'est plus rien sous ce pain qui le couvre: l'âme victime n'a pas d'autre modèle à suivre.

J'aurai toujours ce modèle sous les yeux. J'aimerai l'obéissance com­me l'aime mon Jésus. Je vivrai en elle sans réserve. Je fais un pacte avec toute ma vie personnelle, avec toutes mes volontés et appréciations natu­relles. C'est à tout jamais que je dis adieu au moi humain, aux œuvres et aux désirs du vieil Adam qui veut toujours être quelque chose et se gouverner.

Résolutions. - Tout le bonheur d'une âme, dit Marguerite-Marie, consiste à se rendre conforme à la très sainte volonté de Dieu. C'est là que notre cœur trouve sa paix, notre esprit sa joie et son repos, puisque celui qui adhère à Dieu devient un même esprit avec lui. Au commence­ment de mes actions je dirai avec saint Paul: Seigneur, que voulez-vous que je fasse?

Colloque avec Jésus-Eucharistie.

29 Juin
Saint Pierre

Cum ergo prandissent, dicit Simoni Pe­tro Jésus: Simon Joannis, diligis me plus his? Dicit ei: Etiam, Domine, tu scis quia amo te. Dicit ei: Pasce agnos meos… Di­xit ei tertio: Simon Joannis, amas me? Contristatus est Petrus quia dixit ei tertio: Amas me? Et dixit ei: Domine, tu omnia nosti, tu scis qui amo te. Dixit ei: Pasce oves meas (S. Joan, 21, 15).

Après le repas, Jésus dit à Simon Pier­re: Simon, fils de Jean, m'aimes-tu plus que ceux-là? Il lui dit: Oui, Seigneur, vous savez que je vous aime. Jésus dit: Pais mes agneaux… Il dit une troisième fois: Simon, fils de Jean, m'aimes-tu? Pierre fut triste de ce que Jésus lui deman­dait une troisième fois: M'aimes-tu? Il dit: Seigneur, vous savez tout, vous savez que je vous aime. Jésus dit: Pais mes bre­bis (S. Jean, 21, 15).

1er Prélude. Il y a une grande amitié entre Jésus et saint Pierre. Saint Pierre est un des apôtres du Sacré-Cœur.

2e Prélude. Saint apôtre, aimé du Sauveur, obtenez-moi la grâce d'aimer généreuse­ment le cœur de Jésus.

Ier POINT: Pierre et l'Eglise sont les premiers fruits et les premiers dons du Cœur de Jésus. - Cette fête vient après le cycle des mystères du Christ, après la Pentecôte, le Saint-Sacrement et le Sacré-Cœur, et au commen­cement du temps qui symbolise l'Eglise.

C'est par les apôtres que l'Eglise a commencé: Per quos Ecclesta sumpsit exordium (Lit).

Cette fête vient dans la plénitude de la saison, quand les fleurs sont en­core là, que les fruits commencent, que les jours sont pleins, lumineux et chauds.

Pierre est la fleur de l'Eglise et le premier fruit du Cœur de Jésus. Pour faire un prêtre, il fallait l'hostie du sacrifice, et cette hostie s'est formée au Calvaire. Pierre est le chef du sacerdoce. Pour qu'il y eût un Pierre, un Pape, il n'a rien fallu de moins que tous les travaux, toutes les douleurs et le sacrifice entier de Jésus.

Pierre est le premier salaire du crucifié. Il est son sacrement, son orga­ne, la continuation du Christ et du Cœur de Jésus.

Il est le chef de la hiérarchie, la source visible de la grâce; le trésor di­vin, vivant et inépuisable des dons célestes; l'image de la paternité divi­ne, souveraine et universelle, le guide et le pasteur de tous.

IIe POINT: Pierre est apôtre du Sacré-Cœur. - Pierre est parmi les inti­mes du Cœur de Jésus. Il est toujours auprès de Jésus, avec Jean et Jac­ques.

Saint Jean aimait Jésus plus tendrement. Saint Pierre aimait forte­ment, il aimait beaucoup parce qu'il lui avait été beaucoup pardonné. Il marcha sur les eaux pour aller à Jésus.

Il défend Jésus en frappant Malchus. Il a un moment de faiblesse au Sanhédrin, mais il le répare généreusement par ses larmes.

Il oppose sa triple confession d'amour à son triple reniement.

Jésus l'avait toujours tenu parmi ses préférés, avec André, Jacques et Jean. Il les a appelés les premiers. Il est allé demeurer chez Pierre. Il le prend avec lui au Thabor, il l'envoie préparer la Cène avec Jean, il le prend aussi auprès de lui à l'agonie.

Pierre et Jean courent au tombeau. Jésus fait avertir Pierre de sa ré­surrection et lui apparaît en particulier.

C'est toujours l'intimité, toujours l'union.

Le chef de l'Eglise doit d'ailleurs posséder éminemment ce que possè­dent ses membres. Jean est l'apôtre du Sacré-Cœur, Pierre devait l'être aussi quoique avec des nuances dans la forme.

IIIe POINT: Pierre, sacrement et organe du Sacré-Cœur. - Pierre est le continuateur du Christ, le remplaçant, le vicaire du Christ. C'est en quelque sorte le Christ voilé, comme dans l'Eucharistie.

Son enseignement est celui du Christ. Il est l'organe du Sacré-Cœur. Notre-Seigneur a préparé et figuré cette union avec Pierre. Il y a plu­sieurs barques à Capharnaüm, mais c'est sur celle de Pierre que Jésus monte pour enseigner le peuple.

Il y a plus d'un pêcheur au lac, mais c'est à Pierre que Notre-Seigneur fait faire la pêche miraculeuse, qui symbolisait la propagation de l'Egli­se.

Notre-Seigneur a promis d'avance à Pierre sa primauté, qui est la continuation de la puissance du Christ: «Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Eglise, et les puissances de l'enfer ne prévaudront pas contre elle» (S. Mat., 16, 18).

«Je te donnerai les clefs du royaume des cieux: tout ce que tu lieras se­ra lié et tout ce que tu délieras sera délié» (S. Mat., 16, 19).

«Quand tu seras converti, tu confirmeras tes frères» (S. Luc, 22, 32). Quand le jour est venu, Notre-Seigneur réalise sa promesse. Il transmet à Pierre son autorité de pasteur: «Pierre, puisque tu m'aimes beaucoup, puisque tu m'aimes plus que les autres, pais mes agneaux, pais mes brebis».

Pierre, pasteur suprême de l'Eglise, est dépositaire et administrateur de tous les dons du Cœur de Jésus. Il préside à l'administration des sa­crements. De son autorité découlent l'ordre et la juridiction dans l'Egli­se. Il détient la clef des indulgences. Il ouvre et ferme les trésors du Cœur de Jésus.

Quel respect, quelle obéissance je dois à Pierre et à ses successeurs!

Résolutions. - Pour moi, le Pape est comme le Christ sur la terre. Je dois l'honorer, l'aimer, lui obéir. Les brebis fidèles écoutent le pasteur, le suivent et se gardent bien d'aller chercher loin de lui des pâturages empoisonnés. Les amis du Sacré-Cœur sont des amis de Pierre.

Colloque avec saint Pierre.

30 Juin
Saint Paul

Mihi antem absit gloriari, nisi in cruce Domini nostri jesu Christi, per quem mi­hi mundus crucifixus est et ego mundo… De cetero nemo mihi molestus sit; ego enim stigmaea Domini jesu in corpore meo porto (ad Gal., 6, 14).

Pour moi, je ne veux me glorifier que dans la croix de Notre-Seigneur Jésus­Christ, par lequel le monde m'est crucifié et moi au monde… Du reste, que person­ne ne me condamne, je porte en effet sur mon corps les stigmates du Sauveur Jésus (aux Gal., 6, 15).

1er Prélude. Saint Paul est pour Jésus l'apôtre ardent, l'ami dévoué, la victime généreuse.

2e Prélude. Grand apôtre, obtenez-moi la grâce de marcher à votre suite dans la voie d'amour et d'immolation.

­

Ier POINT: Apostolat. - Saint Paul est de la tribu de Benjamin. Il est né à Tarse, il étudiait à Jérusalem sous les Rabbins au moment du mar­tyre de saint Etienne. Converti à Damas par le miracle que l'on sait, il devient apôtre à son tour et le monde entier suffit à peine à son zèle. Il aime tant Jésus! Et il a reçu une grâce puissante d'apostolat. «Celui-ci, a dit Jésus à Ananie, est un vase d'élection qui portera mon nom aux na­tions, aux rois et aux fils d'Israël».

Il fallait à son zèle un grand théâtre. Ses plus longs séjours furent à Antioche, à Corinthe et à Rome, les métropoles de ce temps-là.

En trois ans, il convertit une bonne partie d'Antioche. Il va ensuite plusieurs fois et toujours plus avant vers l'Occident. La première fois, il évangélise Chypre et la Pisidie. Il a des disciples illustres: Sergius Paulus et sainte Thècle. La seconde fois, après le concile de Jérusalem, il repas­se en Asie mineure, où il gagne le jeune Timothée. Il passe en Macédo­nie et en Grèce: à Philippes, à Salonique, à Athènes où il gagne Denis l'aréopagite, à Corinthe où il prêche deux ans et où il laisse une grande chrétienté, puis il retourne à Antioche. La troisième fois, il revoit l'Asie Mineure, il passe trois ans à Ephèse, puis il repasse à Corinthe et rentre à jérusalem où l'attend la persécution. C'est dans les chaînes qu'il est conduit à Rome où sa prison devient pendant deux ans une école d'évangélisation. Devenu libre, il va prêcher en Espagne, puis retourne en Orient et revient à Rome donner sa vie pour le Christ.

Quel est notre zèle en regard d'un pareil spectacle?

IIe POINT: Charité. - Saint Paul est passionné d'amour pour le Christ. Le nom de Jésus est toujours sur ses lèvres et sous sa plume. Sa vie, c'est le Christ: Mihi vivere Christus est. Ses extases et ses visions ont été le fruit de sa ferveur. Son amour pour le Christ est indomptable et in­vincible: «Qui pourrait, dit-il, nous séparer de l'amour du Christ? Les tribulations? les angoisses? la faim? le dépouillement? les dangers? les persécutions? le glaive? Non, dit-il, nous surmonterons tout cela pour l'amour de celui qui nous a aimés le premier. -je suis sûr, dit-il, que ni la mort, ni la vie, ni les anges, ni les principautés, ni les vertus, ni le pré­sent, ni l'avenir, ni la force, ni la hauteur, ni la profondeur, ni quelque autre créature ne pourra jamais nous séparer de l'amour du Christ Jésus» (aux Rom., chap. 8). Aucun homme n'a jamais formulé un acte d'amour plus vivement passionné.

Il a donné aussi le code de la sainte charité pour le prochain! La chari­té est patiente, elle est bienveillante: elle est sans envie, sans malveillan­ce, sans orgueil, sans ambition, sans égoïsme et sans colère. Elle ne pen­se pas le mal et ne se réjouit pas des fautes d'autrui. Elle souffre tout, elle croit, elle espère, elle supporte. Elle est sans défaillance (1 aux Cor., 13). Quel sujet de méditation!

IIIe POINT: Réparation. - Saint Paul a été une victime toujours im­molée pour la gloire de Dieu et le salut des âmes.

Notre-Seigneur avait dit: «Je lui montrerai tout ce qu'il aura à souffrir pour mon nom» (Act., 1, 16). Il se savait victime. Il disait: «Je ne veux me glorifier que dans la croix de Jésus. -je porte en mon corps ses stig­mates» (aux Gal., 6). «Je me dépenserai et je dépenserai tout pour le sa­lut de vos âmes» (2 aux Cor., 12, 15).

Il énumère dans sa deuxième lettre aux Corinthiens tout ce qu'il a souffert pour le Christ: Il a été flagellé par les juifs; il a été trois fois bat­tu de verges et lapidé trois fois. Il a fait trois naufrages; il a passé un jour et une nuit au fond de la mer. Il a souffert la faim, la soif, le froid, la nu­dité.

Il a donné la formule du pur amour quand il a dit: «Soit que vous mangiez, soit que vous buviez, soit que vous fassiez quelque autre chose, faites tout pour la gloire de Dieu» (1 aux Cor., 10, 31).

Enfin il est mort pour le Christ comme il le désirait, heureux de don­ner sa vie pour celui qui est mort pour nous. Saint Paul avait éminem­ment l'esprit de la dévotion au Sacré-Cœur.

Résolutions. - Grand apôtre, admettez-moi au nombre de vos disci­ples. Enseignez-moi cet amour invincible que vous aviez pour Dieu et cette charité éminente que vous pratiquiez envers le prochain. Faites de moi, comme vous l'avez désiré, une hostie vivante, sainte et agréable à Dieu (aux Rom., 12, 1).

Colloque avec saint Paul.


1)
Cor Jesu virtutum omnium abyssus. – Cor patiens. – Cor obediens. – Fons vi­tae et sanctitatis…
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